Page 48 - LES DEUX BABYLONES
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de la foi patriarcale et à délivrer de la crainte de Dieu et des jugements célestes qu'ils éprouvèrent sans doute
tant que dura le souvenir du déluge. Et suivant les principes de la corruption humaine ce fut sans doute là un
des grands éléments de sa réputation: car les hommes se rallient vite autour de celui qui peut donner la
moindre apparence de raison à une doctrine qui leur dit: vous pouvez être assuré du ciel et de votre bonheur
sans changer de coeur et de nature, et en vivant sans Dieu dans le monde.
Une tradition Polynésienne nous décrit la grandeur de ce don fait aux hommes par Nemrod, de l'avis des
impies, lorsqu'il les arrache aux impressions de la vraie religion et à l'autorité du ciel. John Williams, le
missionnaire bien connu, nous dit que, d'après une ancienne tradition des mers du Sud, "les cieux étaient à
l'origine si près de la terre, que les hommes ne pouvaient pas marcher, mais ils étaient obligés de ramper.
C'était là un grand mal; mais à la fin quelqu'un conçut l'idée d'élever les cieux à une hauteur plus convenable:
pour cela, il déploya toute son énergie, et d'un premier effort les souleva à la hauteur d'une plante délicate
appelée teve, haute d'environ quatre pieds. Là il les laissa un instant jusqu'à ce qu'il se fût reposé, puis par un
second effort, il les souleva jusqu'à la hauteur d'un arbre appelé Kanakiri, qui est aussi grand que le Sycomore.
Au troisième effort, il les éleva jusqu'à la hauteur des montagnes. Enfin, après un long repos, il les éleva à leur
hauteur actuelle. C'est pour cela qu'il fut divinisé comme un puissant bienfaiteur de l'humanité, et, jusqu'au
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jour où ils embrassèrent le christianisme, les mortels trompés l'adorèrent comme l'Élévateur des cieux ." Or,
comment mieux décrire que par cette fable polynésienne la situation de l'humanité après le déluge, et la
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conduite de Nemrod ou Phoronée l'Émancipateur ?
Tandis que cette effrayante catastrophe par laquelle Dieu manifesta sa justice vengeresse sur les pécheurs de
l'ancien monde était encore dans toutes les mémoires, tant que Noé et ses descendants fidèles cherchaient avec
zèle à graver dans l'âme de leurs disciples les leçons que cet événement solennel était si propre à leur
enseigner, le ciel, c'est-à-dire Dieu, devait paraître tout rapproché de la terre.
Maintenir l'union entre le ciel et la terre, et la maintenir aussi étroite que possible, tel doit avoir été le grand
but de tous ceux qui aimaient Dieu et les intérêts de l'humanité. Mais cela impliquait qu'il fallait s'abstenir
et se débarrasser de toute espèce de vice, et de tous ces plaisirs de péché après lesquels l'esprit naturel non
renouvelé, non sanctifié soupire continuellement. C'est là ce que tout esprit impur doit avoir senti comme un
état d'insupportable esclavage. "L'affection de la chair est ennemie de Dieu, elle n'est pas soumise à la loi de
Dieu, et aussi elle ne le peut." Elle dit au Tout-Puissant: "Retire-toi de nous, car nous ne désirons pas
connaître tes voies."
Tant que domina l'influence du grand père du monde nouveau, tant qu'on s'attacha à ses maximes, que le
monde fut entouré d'une atmosphère de sainteté, quoi d'étonnant que ceux qui vivaient loin de Dieu et de la
piété, sentissent le ciel, son influence, son autorité, dans une intolérable proximité, et que dans ces
circonstances, ils ne pussent pas marcher, mais seulement ramper, c'est-à-dire qu'ils n'étaient pas libres de
marcher d'après les regards de leurs yeux et l'imagination de leur coeur! Nemrod les affranchit de cette
servitude. Par l'apostasie qu'il introduisit, par la liberté de vie qu'il développa chez ceux qui se rallièrent
autour de lui, et en les éloignant des saintes influences qui les avaient déjà plus ou moins travaillés, il les aida
à repousser Dieu et la stricte spiritualité de sa loi, et devint ainsi l'Élévateur des cieux, amenant les hommes
à penser, à agir, comme si les deux étaient loin de la terre, et comme si le Dieu des cieux ne pouvait voir à
travers un épais nuage, ou comme s'il ne voyait pas avec déplaisir les violateurs de ses lois. Dès lors tous
ceux-là sentaient qu'ils pouvaient respirer à l'aise et marcher en toute liberté. Pour cette raison, ces hommes
ne pouvaient que voir en Nemrod leur grand bienfaiteur.
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WILLIAM, Récits des entreprises missionnaires, ch. XXXI, p. 142.
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Le sens de ce nom, l'Émancipateur, est expliqué au ch. 3, art. 1, où est relatée l'émancipation temporaire
des esclaves le jour de sa naissance.