Page 45 - LES DEUX BABYLONES
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Aethiops. Mais qui était Aethiops? De même que les Éthiopiens étaient Cushites, ainsi
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Ethiops était Cush: Chus, dit Eusèbe, était le père des Éthiopiens . – Le témoignage
de Josèphe tend au même but. Comme père des Éthiopiens, Cush était Éthiopien, par
manière de supériorité. Aussi Épiphane parlant de l'origine de Nemrod dit ceci:
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Nemrod fils de Cush, l'Éthiopien . Or, comme Bacchus était le fils d'Éthiope ou Cush,
ainsi il était dépeint comme un jeune homme ou comme un enfant, et ce jeune homme
ou enfant était représenté d'ordinaire avec une coupe à la main. Cette coupe faisait de
lui pour la foule le dieu de l'ivrognerie et des festins, et il est hors de doute que ces
orgies, ces festins se pratiquaient sur une large échelle; mais après tout cette coupe
n'était qu'un hiéroglyphe, celui du nom de ce dieu. Le nom de la coupe, dans le
langage sacré, était khûs, et ainsi la coupe dans la main du jeune Bacchus fils
d'Ethiops, montrait qu'il était le jeune Chus, ou le fils de Chus. Dans la figure ci-
Fig. 22
dessous (fig. 22), la coupe dans la main droite de Bacchus est élevée d'une manière
si significative, qu'elle fait naturellement penser que c'était un symbole, et quant au rameau que tient l'autre
main, nous avons la preuve expresse que c'était aussi un symbole.
Mais il est à remarquer que cette branche n'a point de famille qui en détermine la nature. Il faut donc que ce
soit un emblème générique d'une branche ou le symbole d'une branche en général; et par conséquent elle a
besoin de la coupe comme d'un complément pour déterminer spécifiquement l'espèce de cette branche.
Il faut donc considérer ces deux symboles ensemble, et si on les considère ainsi ils sont exactement
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équivalents à la branche de Chus c'est-à-dire au rejeton ou fils de Cush .
Il y a un autre hiéroglyphe qui se rattache à Bacchus et qui confirme fortement ce que nous venons de dire;
c'est la branche de lierre. Aucun emblème ne caractérisait si nettement ce culte. Partout où l'on pratiquait les
cérémonies de Bacchus, partout où l'on célébrait ses orgies, la branche de lierre apparaissait infailliblement.
Le lierre sous une forme ou une autre, était essentiel à ces cérémonies. Les sectateurs le portaient dans leurs
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mains, s'en entouraient la tête , ou avaient la feuille de lierre 12 gravée sur leur corps d'une manière
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indélébile . Quel pouvait en être l'usage? Quelle en était la signification? Quelques mots suffiront à le
montrer. Tout d'abord, nous avons la preuve que Kissos le nom grec du lierre, était l'un des noms de
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Bacchus . Nous savons aussi que les Grecs appelaient d'ordinaire les descendants de Cush (nom bien connu
cependant des prêtres dans les mystères) non pas d'après la coutume orientale, mais Kissaioi, ou Kissioi. Ainsi
Strabon, parlant des habitants de Susa, qui étaient du Chusistan, ou de l'ancien pays de Cush, dit ceci: les
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EUSÈBE, Chronicon, vol. I, p. 109.
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ÉPIPHANE, liv. I, vol. I, p. 7.
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Chacun sait que le odzos Areos d'Homère ou la Branche de Mars est la même chose que "le fils de
Mars". L'hiéroglyphe (fig. 22) était formé sur le même principe. La coupe seule dans la main du jeune
Bacchus devait le désigner comme le jeune Chus ou l'enfant Cush; nous pouvons le conclure d'une
déclaration de Pausanias qui représente l'enfant Kuathos comme jouant le rôle d'un porteur de coupe et
présentant une coupe à Hercule (PAUSANIAS, liv. II, Corinthiaca, ch. 13, p. 142). Kuathos, coupe en
grec, vient évidemment de l'Hébreu Khus, une coupe, qui, dans une de ses formes chaldéennes devient
Khuth ou Khuath.
Or, le nom de Cush se trouve souvent comme Cuth, et dans certains dialectes, comme Cuath. L'enfant
Kuathos donc est précisément la forme grecque de l'enfant Cush ou du jeune Cush. Le lecteur
remarquera certainement les taches sur la robe (fig. 22). Les baies ou les boutons des fleurs non
entrouvertes au bout des rameaux peuvent indiquer le lierre. Ce fait cependant n'invaliderait pas, mais
plutôt confirmerait l'argument général.
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SMITH, Dictionnaire classique, Dyonisus, p. 227.
12 EURIPIDE dans STRABON, liv. X, p. 452.
13
KITTO, Com. illust., vol. IV, p. 144. – POTTER, vol. I, p. 75.
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PAUSANIAS, Attica, ch. 31, p. 78.