Page 186 - LES DEUX BABYLONES
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          la bête, et qui pourra combattre contre elle?" (Apocalypse XIII, 3, 4). Telle est, à tous égards, l'analogie entre
          le langage de la prophétie et l'ancien type babylonien.


          Y a-t-il donc des rapports entre ces détails et l'histoire religieuse de l'empire romain après la chute de l'ancien
          paganisme dans cet empire? Oui, à tous les points de vue. À peine l'ancien paganisme fut-il légalement aboli,
          le feu éternel des Vestales éteint, l'ancien serpent précipité du siège puissant où il s'était si longtemps assis
          en  sécurité, qu'il essaya des moyens les plus énergiques pour regagner son influence et son autorité.
          Comprenant qu'il ne suffirait pas de persécuter le christianisme pour détruire l'église symbolisée par la femme
          entourée du soleil, il essaya d'une autre manière: "Et le serpent jeta de sa gueule de l'eau, comme un fleuve,
          après la femme, afin qu'elle fût entraînée par le fleuve." (Apocalypse XII, 15). Voilà un symbole vraiment
          remarquable. Si c'était là le dragon de feu, on devait s'attendre à ce qu'il fût représente suivant les mythes
          populaires, comme vomissant du feu après la femme. Mais non! Ce ne fut pas le cas il jeta de sa bouche un
          fleuve d'eau! Que signifie donc cela? Comme l'eau sortait de la gueule du dragon cela veut dire une doctrine
          et naturellement une fausse doctrine. Mais n'y a-t-il rien de plus distinctif? Un simple coup d'oeil jeté sur
          l'ancien type babylonien montrera que l'eau jetée par la bouche du serpent doit être l'eau de la régénération
          baptismale.


          La fonction de Pontifex Maximus


          Or,  c'était précisément à cette époque, alors que l'ancien paganisme fut supprimé, que la doctrine de la
          régénération baptismale qui avait déjà agi auparavant dans l'Église chrétienne, menaçait de s'étendre comme
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          un  déluge sur la surface de l'empire romain . Ce fut alors précisément que notre Seigneur Jésus-Christ
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          commença à être appelé populairement Ichthys, c'est-à-dire le poisson : il est évident qu'on l'identifiait ainsi
          avec Dagon. À la fin du IVe siècle, et depuis cette époque, on enseignait que celui qui avait été plongé dans
          les fonts baptismaux était par là né de nouveau, et rendu blanc comme la neige. Ce fleuve ne sortait pas
          seulement de la bouche de Satan, l'ancien serpent, mais aussi de la bouche de celui qui fut plus tard reconnu
          par les païens de Rome comme le chef visible de l'ancien paganisme Romain.


          Quand  le culte romain du  feu fut détruit, nous l'avons vu, la  fonction de Pontifex Maximus, chef du
          paganisme, fut abolie. Ce fut là la blessure mortelle de la tête du dragon de feu. Mais à peine avait-il reçu cette
          blessure qu'il fut bientôt guéri. Peu d'années après l'abolition du titre païen de Pontifex, ce titre fut rétabli, et
          cela par l'empereur même qui l'avait aboli; il fut donné de nouveau, avec toutes les idées païennes qui s'y
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          rattachaient, à l'évêque de Rome lui-même . Dès lors ce dernier fut l'agent principal qui répandit dans la
          chrétienté  tout d'abord  la doctrine funeste de la régénération par le baptême, et ensuite toutes les autres
          doctrines qui dérivaient de l'ancienne Babylone. Quand ce titre païen fut donné à l'évêque de Rome, ce ne fut
          pas comme un simple titre d'homme, mais comme un titre auquel se rattachait un pouvoir formidable. Des
          évêques, et même des métropolitains d'églises étrangères, dans de vastes régions de l'Occident, en Gaule
          comme en Italie, étaient soumis à l'autorité de l'évêque de Rome sous ce nouveau caractère de Pontifex, quand
          il était escorté de cinq ou six autres évêques qui étaient ses conseillers; et il infligeait des peines civiles à ceux
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          qui ne se soumettaient pas aux décisions pontificales . Le danger était grand pour la cause de la vérité et de


                       15     Depuis environ 360, jusqu'à l'époque de l'empereur Justinien, vers 550, nous savons que cette doctrine
                              fut promulguée, et aussi qu'elle finit par se répandre largement chez les chrétiens professants. (Voir
                              GIESELER, vol. IX, 2e Période. Culte public, p. 145).
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                              AUGUSTIN, De Civitate Dei, liv. XVIII, vol. IX, ch. 23, p. 665.
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                              Codex Theodosianus, liv. XVI, tit. I, leg. 2. Voir aussi leg. 3. Le lecteur remarquera que tandis que
                              l'évêque de Rome seul est appelé Pontifex, les chefs des autres églises mentionnées sont simplement
                              appelés episcopi.
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                              Rescrit de Gratien en réponse aux demandes du Concile Romain, dans GIESELER, vol. I, 2e période,
                              div. I, ch. 3, La hiérarchie dans l'Occident, p. 434, note 12. Voir aussi BOWER, Damasus, 278. Pour les
                              demandes du concile romain, voir ibid. vol. I, p. 209. Ce rescrit était antérieur au Codex dont nous
                              parlons, décret qui porte le nom de Valentinien et de Théodose, aussi bien que celui de Gratien.
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