Page 102 - LES DEUX BABYLONES
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         puissante pour les déterminer, c'est que tous ceux qui étaient ainsi baptisés, nous dit Tertullien, avaient la
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          promesse de la régénération et le pardon de tous leurs parjures . Les adorateurs d'Odin pratiquaient le rite
          du baptême, qui, si on le rapproche de leur but avoué, montre qu'au moins à l'origine, ils ont dû croire qu'on
          pouvait  purifier le péché naturel et la corruption de leurs nouveau-nés en les aspergeant d'eau ou en les
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          plongeant immédiatement après leur naissance dans des lacs ou des rivières . Il y a plus: de l'autre côté de
          l'Atlantique,  à Mexico, on trouva la même doctrine de régénération par le baptême en vigueur chez les
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          indigènes,  lorsque Cortez et ses guerriers débarquèrent sur leurs rivages . La cérémonie du baptême
          mexicain, que les missionnaires catholiques romains de l'Espagne contemplaient avec étonnement, est décrite
          de la manière suivante dans la Conquête du Mexique de Prescott: "Lorsqu'on avait achevé tous les préparatifs
          du baptême, on réunissait tous les parents de l'enfant et on faisait venir la sage-femme qui devait accomplir
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          la cérémonie du baptême . Au point du jour tous s'assemblaient dans la cour de la maison; au lever du soleil,
          la sage-femme prenant l'enfant dans ses bras demandait un petit plat de terre rempli d'eau, pendant que ceux
          qui l'assistaient plaçaient dans la cour les ornements préparés pour le baptême. Pour accomplir la cérémonie,
          elle tournait le visage vers l'occident et commençait aussitôt certaines formalités. Ensuite elle aspergeait d'eau
          la tête de l'enfant et disait: « Ô mon enfant, prends et reçois l'eau du Seigneur du monde qui est notre vie et
          qui est donnée pour faire croître et renouveler notre corps. Elle est destinée à nous laver et à nous purifier.
          Puissent ces gouttes célestes entrer dans ton corps et y demeurer, puissent-elles détruire et éloigner de toi tout
          le mal et tout le péché qui t'a été transmis avant le commencement du monde, puisque tous nous sommes sous
          son pouvoir! » Alors elle lavait avec l'eau le corps de l'enfant et parlait ainsi: « D'où que tu viennes, toi qui
          es funeste à cet enfant, laisse-le et éloigne-toi de lui, car maintenant il a une nouvelle vie et il est né de
          nouveau, maintenant il est purifié et nettoyé de nouveau et notre mère Chalchivitlycue (la déesse de l'eau)
          l'amène dans le monde. » Ayant ainsi prié, la sage-femme prend l'enfant dans ses mains et l'élevant vers le
          ciel dit: « O Seigneur, tu vois cette créature que tu as envoyée dans le monde, ce lieu de chagrin, de souffrance
          et de pénitence, accorde-lui, ô Seigneur, tes dons et ton inspiration, car tu es le grand Dieu et avec toi est la
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          grande Déesse »" Voilà bien certainement l'opus operatum. Voilà aussi la régénération par le baptême et
          l'exorcisme 15 aussi par faits et aussi complets  que pourrait le désirer un prêtre romain ou  un  partisan du  Tractarianisme.

          Le lecteur demandera-t-il quelles preuves démontrent que le Mexique a emprunté cette doctrine à la Chaldée?
          La preuve est décisive. Nous savons, d'après les recherches d'Humboldt, que les Mexicains honoraient Wodan
          comme   le chef de leur race; exactement comme les anciens Anglais le faisaient. Le  Wodan ou Odin de
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          Scandinavie est le même, on peut le prouver, que l'Adon de Babylone . Le Wodan du Mexique, on le verra
          par la citation suivante, est absolument le même. D'après les anciennes traditions réunies par l'évêque Francis
          Munez de la Vega, dit Humboldt, le Wodan des Chiapanais (Mexicains) était petit-fils de ce vieillard illustre,
          qui, à l'époque du grand déluge, où périt la plus grande partie de l'humanité, fut sauvé sur un radeau avec sa
          famille. Wodan contribua à la construction de ce grand édifice que les hommes tentèrent d'élever jusqu'aux
          cieux. L'exécution de ce projet téméraire fut interrompue; chaque famille eut dès lors un langage différent;
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          et le grand esprit Teotl ordonna à Wodan d'aller peupler la contrée d'Anahuac . Voilà qui démontre d'une



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                              TERTULLIEN, De Baptismo, vol. I, p. 1205.
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                              Voir MALLET, Le baptême anglo-saxon, Antiquités, vol. I, p. 335.
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                              HUMBOLDT, Recherches Mexicaines, vol. I, p. 185.
                       13     Comme le baptême est absolument nécessaire au salut, Rome autorisa les sages-femmes à l'administrer.
                              Au Mexique, la sage-femme paraît avoir été une prêtresse.
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                              PRESCOTT, Le Mexique, vol. III, p. 339-340.
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                              Dans la cérémonie romaine du baptême la première chose que le prêtre doive faire, c'est d'exorciser le
                              diable pour le chasser de l'enfant qu'on va baptiser, au moyen de ces paroles: "Sors de cet enfant, esprit
                              impur, fais place à l'Esprit-Saint le consolateur." Le Chrétien sincère, vol. I, p. 365. Dans le Nouveau
                              Testament, il n'y a pas la moindre allusion à aucun exorcisme de ce genre accompagnant le baptême
                              chrétien. Il est entièrement païen.
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                              Pour les preuves, voir Appendice, note L.
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