Page 64 - LES DEUX BABYLONES
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          Seigneur Jésus-Christ fût connue . L'antique promesse "la postérité de la femme écrasera la tête du serpent"
          (Genèse III, 15), suggéra naturellement l'idée d'une naissance miraculeuse. La prêtrise et la présomption
          naturelle à l'homme travaillèrent à anticiper l'accomplissement de cette promesse, et la reine de Babylone
          semble avoir la première reçu cet honneur. On lui prodiguait les titres les plus élevés. On l'appelait la reine
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          des cieux (Jérémie XLIV, 17-19, 25) . – En Égypte, elle était appelée Athor, c'est-à-dire la demeure de
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          Dieu , ce qui signifie qu'en elle habitait toute la plénitude de la divinité. Pour désigner la grande mère déesse,
          dans un sens panthéiste, comme étant à la fois la toute puissante et infime, la Vierge mère, on avait gravé cette
          inscription sur l'un de ses temples en Égypte: "Je suis tout ce qui a été, qui est, et qui sera. Nul mortel n'a
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          écarté  mon voile. Celui que  j'ai enfanté, c'est le soleil ." – En Grèce, elle s'appelait Hestia, et  chez les
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          d'ordinaire, signifiait en réalité: l'habitation .

          Voici comment on invoque dans les Hymnes Orphiques, Hestia ou Vesta, séjour de la Divinité:


                                                Fille vénérable de Saturne,
                                           Qui habites dans la flamme éternelle!
                                      C'est en toi que les dieux ont fixé leur demeure,
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                                          Solide fondement de la race mortelle .


          Même lorsque Vesta est identifiée au feu, ce même caractère de Vesta, l'habitation, apparaît encore bien
          clairement. Philolaus, parlant d'un feu au centre de la terre, l'appelle "la Vesta de l'univers, la maison de
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          Jupiter, la mère des dieux ". – À Babylone, le titre de déesse-mère en tant que séjour de Dieu, était Sacca ,
          ou sous la forme emphatique, Sacta, c'est-à-dire le tabernacle. – Aujourd'hui les grandes déesses de l'Inde,
          comme   ayant tout le  pouvoir du Dieu qu'elles représentent, sont appelées de  ce nom "Sacti" ou "le





                       10     PARSON, Japhet, p. 205-206.
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                              Quand on appela Ashta, la femme, "la reine des cieux", ce nom de femme devint le plus grand titre
                              d'honneur. C'est ce qui explique que chez les anciens peuples de l'Est, on s'adressât aux reines et aux
                              plus grandes personnes en leur donnant le nom de femme. En anglais, ce n'est pas un titre flatteur, mais
                              autrefois on le donnait en Angleterre de la même manière qu'en Orient; le mot anglais "queen" vient en
                              effet de "Cwino", qui en ancien Goth veut dire "une femme".
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                              BUNSEN, vol. I, p. 401.
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                              ibid. vol. I, p. 386-387.
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                              Hestia, en grec, veut dire maison ou habitation (Voir Schrevellius et PHOTIUS, sub voce). C'est là,
                              pense-t-on, un sens secondaire de ce mot; son sens propre serait "feu". Mais les citations sur Hestia
                              montrent que le nom vient de Hes ou Hesè, couvrir, abriter, et c'est précisément l'idée d'une maison:
                              abriter contre les rigueurs de la température. Le verbe Hes signifie aussi protéger, se montrer
                              miséricordieux; de là vient évidemment le caractère d'Hestia, protectrice des suppliants (voir SMITH). Si
                              nous faisons venir Hestia de Hes, couvrir ou abriter nous comprendrons aisément le passage suivant de
                              SMITH: "Hestia était la déesse de la vie domestique, et la donatrice de tout le bonheur de famille; en
                              cette qualité elle habitait, dit-on, dans la partie la plus reculée de chaque maison, et elle avait inventé l'art
                              de bâtir les maisons." Si on suppose que le feu était la première idée de Hestia, comment le feu peut-il
                              avoir été considéré comme le constructeur des maisons? Mais si on prend Hestia dans le sens de
                              habitation ou demeure, il est facile de voir comment Hestia en est venue à être identifiée au feu. La
                              déesse, regardée comme l'habitation de Dieu, était connue sous le nom de Ashta, la femme, tandis
                              qu'Ashta signifiait aussi feu, ainsi Hestia ou Vesta, à mesure du développement du système Babylonien,
                              en vint à être regardée comme le feu ou la déesse du feu. Pour la raison qui a fait considérer la Déesse-
                              Mère comme étant une habitation, voir Appendice, note I.
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                              TAYLOR, Hymnes Orphiques, Hymne à Vesta, p. 175. Quoique Vesta soit appelée ici "fille de Saturne",
                              elle est aussi identifiée dans tous les Panthéons avec Cybèle ou Rhéa la femme de Saturne.
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                              TAYLOR, Notes aux Hymnes Orphiques, p. 156.
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                              Pour plus de lumière sur le sujet du culte de Sacca à Babylone, sous ce même caractère de Anaitis,
                              autrement dit Vénus, voir CHESNEY, Expédition sur l'Euphrate, vol. I, p. 381.
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