Page 26 - LES DEUX BABYLONES
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                                Article 2 - La Mère et l'Enfant, et l'original de l'Enfant



                           Avec une pareille théorie, la première personne de la Divinité était mise de côté dans la
                           pratique.  Étant le grand Dieu Invisible qui n'intervenait en rien dans les choses de
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                           l'humanité, il devait être adoré dans le silence , c'est-à-dire qu'en réalité il n'était pas adoré 2
                           du  tout par la  multitude. Le même trait est aujourd'hui mis en relief dans l'Inde d'une
                           manière frappante. Quoique Brahma, d'après les livres sacrés, soit la première personne de
                           la triade Hindoue, et que la religion de l'Hindoustani soit désignée par son nom, cependant
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                           on ne l'adore jamais , et dans l'Inde entière, c'est à peine s'il existe
                           aujourd'hui  un seul temple de ceux qu'on  élevait autrefois en son
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                           honneur . Il en est de même en Europe, dans les pays où le système
                           papal s'est le plus complètement développé. Dans l'Italie papale, de
                           l'avis  de tous les voyageurs (sauf là où l'Évangile a récemment
                           pénétré) il n'y a presque plus aucune trace d'adoration du Roi Éternel
                Fig. 5     et Invisible, tandis que la mère et l'enfant sont les deux grands objets
                           du culte. Il en était absolument de même dans l'ancienne Babylone.
          Les Babyloniens dans leur religion populaire adoraient par-dessus tout une mère déesse
          et son fils, qui était représenté dans les tableaux et par des statues comme un petit enfant
          dans les bras de sa mère (fig. 5 et 6). De Babylone le culte de la Mère et de l'Enfant se
          répandit jusqu'au bout du monde. En Égypte, la Mère et l'Enfant étaient adorés sous les  Fig. 6
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          noms d'Isis et d'Osiris .


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          Dans l'Inde, même aujourd'hui, sous les noms d'Isi et d'Iswara . En Asie, c'est Cybèle et Deoius . Dans la
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          Rome  païenne, la Fortune et Jupiter Puer, ou Jupiter l'enfant . En Grèce, Gérés la grande Mère avec un
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          nourrisson au sein , ou Irène, la déesse de la paix, avec l'enfant Plutus dans les bras , et même au Thibet, au
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          Japon, en Chine, les missionnaires Jésuites ont été bien surpris de trouver la contrepartie de la Madone  et

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                              JAMBLICHUS, Les Mystères, sect. VII, ch. III.
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                              KITTO, Commentaire illustré, vol. IV, p. 81.
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                              Indrani, femme du dieu Hindou Indra; voir Recherches Asiatiques, vol. VI, p. 393.
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                              WARD, Études des Hindous, d'après les Recherches de Kennedy sur la Mythologie ancienne et
                              moderne, p. 196.
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                              Osiris, comme l'enfant appelé d'ordinaire Horus. BUNSEN, vol. I, p. 438 comparé avec p. 433-434.
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                              KENNEDY, Mythologie Hindoue, p. 49. Quoique étant l'époux d'Isi, Iswara est aussi représenté comme
                              un enfant à son sein. Id. p. 338. Note.
                       7      DYMOCK, Dictionnaire classique, Cybèle et Deoius.
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                              Oeuvres de CICÉRON, De divinatione, liv. II, ch. 41. Vol. III, p. 77.
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                              SOPHOCLE, Antigone, vers 1133.
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                              PAUSANIAS, liv. I. Attica, ch. 8.
                       11     En Italien, le nom de la Vierge est la traduction d'un titre de la déesse babylonienne. Baal ou Belus était
                              le nom de la grande divinité mâle des Babyloniens, et la divinité femelle était Beltis (HESYCHIUS,
                              Lexique, p. 188). Ce nom se trouve aussi à Ninive, pour la mère des dieux (VAUX, Ninive et Persépolis,
                              p. 459); et dans un discours attribué à Nebuchadnezzar (EUSÈBE, Praepar. Evang. liv. IX, ch. 4), les
                              noms Belus et Beltis sont joints comme ceux des grands dieu et déesse de Babylone. Le Grec Belus, plus
                              haut titre du dieu babylonien, était incontestablement "Baal le Seigneur". Beltis, nom de la divinité
                              femelle, équivalent à Baalti, soit en latin Mea domina et en italien, par altération, madonna. À ce sujet,
                              Junon la reine des cieux, en Grec Héra, signifiait aussi "la Dame" et le titre de Cybèle ou Rhéa à Rome
                              était domina ou la dame, comme Athéné, nom de Minerve à Athènes. Le nom hébreu Adon, le Seigneur,
                              Athon avec les points voyelles, était connu des Grecs d'Asie (qui apportèrent l'idolâtrie en Grèce) comme
                              un nom de Dieu, sous la forme Athan. Eustate, dans une note sur la Periergesis de Dionysius (v. 915,
                              apud BRYANT, vol. III, p. 140), dit que Athan est dieu. Athan au féminin est Athana, la Dame, d'où
                              Athena en attique. Minerve est représentée comme une vierge, mais Strabon (liv. X, ch. 3, p. 405) dit
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