Page 156 - LES DEUX BABYLONES
P. 156
154
CHAPITRE 6
Ordres religieux
Article 1 - Le Souverain Pontife
Le don du ministère est l'un des plus grands que Christ ait fait au monde. C'est à ce sujet que le Psalmiste,
prophétisant l'ascension de Christ, parle dans ce langage élevé, de ses glorieux résultats: "Tu es monté en haut,
tu as emmené des captifs en captivité; tu as reçu des dons pour les hommes, même pour les rebelles, afin que
l'Éternel demeurât parmi eux." (Psaumes LXVIII, 18). L'Église de Rome, à son origine, possédait le don
céleste du ministère et du gouvernement scripturaire; "sa foi était alors célèbre dans le monde entier", ses
oeuvres de justice étaient riches et abondantes. Mais dans un jour de malheur, l'élément Babylonien
s'introduisit dans son ministère, et désormais ce qui devait être une bénédiction devint une malédiction.
Depuis ce moment, au lieu de sanctifier l'homme, elle n'a servi qu'à le démoraliser, et à faire de lui "deux fois
plus l'enfant de l'enfer" qu'il ne l'aurait jamais été si elle l'eut simplement laissé à lui-même.
S'il en est qui s'imaginent qu'il y a une vertu secrète et mystérieuse dans une succession apostolique venant
par la papauté, qu'ils considèrent sérieusement le caractère réel des ordres du pape et de ceux de ses évêques
et de son clergé. Depuis le pape jusqu'au moindre membre du clergé, tout, on peut le montrer, est entièrement
babylonien. Le collège de cardinaux avec le pape en tête est exactement la contrepartie du collège païen des
pontifes avec son "Pontifex Maximus" ou le Souverain Pontife qui avait existé à Rome depuis les temps les
plus reculés, et qui, on le sait, était formé sur le modèle du grand concile de pontifes de Babylone.
Les clefs des cieux de Saint-Pierre
Le pape prétend aujourd'hui à la suprématie dans l'Église comme successeur de Saint Pierre, auquel, dit-on,
Nôtre-Seigneur a exclusivement confié les clefs du royaume des cieux. Mais voici un point important: avant
que le pape ne fût investi de ce titre qui, pendant mille ans, avait désigné le pouvoir des clefs de Janus et de
1
Cybèle , aucune prétention à cette prééminence ou à quoi que ce soit de semblable ne fut proclamé, sous
prétexte qu'il était le possesseur des clefs remises à Pierre. Les évêques de Rome, il est vrai, montrèrent de
bonne heure un esprit fier et ambitieux; mais pendant les trois premiers siècles leurs prétentions à des
honneurs particuliers se fondaient simplement sur la dignité de leur siège, qui était celui de la ville impériale,
la capitale du monde Romain. Cependant quand le siège de l'empire fut transporté en Orient, et que
Constantinople menaça d'éclipser Rome, il fallut bien chercher de nouvelles raisons pour maintenir la dignité
de l'évêque de Rome. Ces raisons on les trouva, lorsque vers 378, le pape devint héritier des clefs qui étaient
2
les symboles des deux divinités païennes bien connues à Rome. Janus avait une clef , Cybèle avait aussi une
3
clef et ce sont là les deux clefs que le pape porte dans ses armes comme emblème de son autorité spirituelle.
Comment le pape en vint-il à être considéré comme jouissant du pouvoir de ces clefs? On le verra plus loin;
mais il est certain qu'à l'époque dont nous parlons l'opinion populaire lui attribua ce pouvoir. Lorsque, aux
yeux des païens, il eut occupé la place des représentants de Cybèle et de Janus, et qu'il eut le droit de porter
leurs clefs, le pape vit que s'il pouvait faire seulement croire aux chrétiens que Pierre seul avait le pouvoir des
1 C'est seulement au II siècle avant l'ère chrétienne que le culte de Cybèle sous ce nom fut introduit à
Rome, mais la mère déesse sous le nom de Cardea, avec le pouvoir de la clef, était adorée en même
temps que Janus, depuis bien longtemps. Ovide, Fastes, vol. III, v. 102, p. 346.
2
ibid. liv. I, vol. III, v. 95-99, p. 18.
3
TOOKE, Le Panthéon, Cybèle, p. 153.