Page 130 - LES DEUX BABYLONES
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CHAPITRE 5
Rites et cérémonies
Article 1 - Processions des idoles
Ceux qui ont lu le récit de la dernière procession des idoles dans la capitale de l'Écosse, tel que nous le
trouvons dans l'Histoire de la Réformation de John Knox, oublieront difficilement la tragi-comédie qui la
termina. La lumière de l'Évangile s'était répandue au loin, les idoles papales avaient perdu de leur fascination,
et l'antipathie populaire s'élevait partout pour les renverser. "Dans toutes les parties de l'Écosse, dit cet
historien, on volait les statues. Il y avait à Edimbourg une grande idole qu'on appelait « Saint-Giles » (c'était
le patron de la ville); on la jeta dans le Lock septentrional, puis on la brûla, ce qui provoqua dans la ville un
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tumulte considérable . Les évêques demandèrent au conseil de la capitale de leur rendre le vieux Saint-Giles,
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ou bien de leur en faire un autre à ses frais . Le conseil ne pouvait accorder la première demande; la seconde,
il la repoussa absolument, car il était dès lors convaincu du péché de l'idolâtrie. Les évêques et les prêtres
cependant aimaient encore passionnément leurs idoles, et comme c'était bientôt l'anniversaire de la fête de
Saint-Giles, pendant laquelle on promenait le saint à travers la ville, ils résolurent de faire tous leurs efforts
pour célébrer la procession accoutumée avec toute la pompe possible. À cet effet, on emprunta aux frères gris
un marmouset que le peuple, par dérision, appelait le jeune Saint-Giles, et qui devait faire le service du vieux.
Au jour fixé, dit Knox, s'assemblèrent prêtres et moines avec des tambourins, des trompettes, des bannières
et des cornemuses, et celui qui devait mener le cortège n'était autre que la reine elle-même avec tous ses
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moines. Voici donc la procession qui s'avance vers l'Ouest, descend la grand-rue et arrive à Cannon-Cross .
Tant que la reine fut présente, tout se passa à la satisfaction des prêtres et de leurs sectateurs. Mais dès que
Sa Majesté se fut retirée pour dîner, quelques personnes de la foule, qui avaient jeté sur toute cette affaire un
mauvais regard, s'approchèrent de l'idole, comme pour aider à la porter, et prenant la civière sur leurs épaules,
commencèrent à s'agiter, pensant faire tomber l'idole; mais le cas avait été prévu, et prévenu par les clous de
fer qui la rattachaient à la civière. Quelqu'un se mit à crier: « À bas l'idole, à bas l'idole! » Sans plus tarder,
on la jette à terre. Tout d'abord les amis des prêtres firent quelques fanfaronnades; mais quand ils virent la
faiblesse de leur dieu, l'un d'eux le prit par les talons et lui frappant la tête contre la chaussée, laissa là le
malheureux Dagon sans tête et sans mains, et lui dit: « Honte à toi, jeune Saint-Giles, ton père aurait résisté
à de pareils coups! » Là-dessus, les apôtres et les moines s'enfuirent plus vite qu'à Pinkey Cleuch. On les vit
en proie à une de ces terreurs subites que ces hommes-là n'éprouvent guère d'ordinaire dans ce royaume (en
Angleterre); ils jettent à terre les croix, les surplis, les chapeaux à cornes et les couronnes. Les frères gris sont
haletants, les prêtres essoufflés prennent la fuite; heureux celui qui le premier arrive à sa demeure, car jamais
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dans ce royaume on ne vit une frayeur si soudaine depuis la génération de l'Antéchrist !"
Une telle procession et idoles chez un peuple qui avait commencé à étudier et à aimer la Parole de Dieu
n'inspire que de l'indignation et du mépris. Mais dans les pays de la papauté, chez un peuple tenu
soigneusement dans les ténèbres, ces processions sont l'un des moyens favoris employés par l'église romaine
pour s'assujettir ses sectateurs. Les longues processions avec des statues que les hommes portent sur leurs
épaules, les vêtements somptueux des prêtres, les robes diverses des nombreux ordres de moines et de
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KNOX, vol. I, p. 265.
2
ibid. p. 258.
3
KNOX, vol. 1, p. 259.
4 ibid. p. 260.