Page 148 - LES DEUX BABYLONES
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          L'abeille dans la gueule du dieu-soleil est destinée à le représenter comme le Verbe; car Dabar, mot qui en
          chaldéen veut dire l'abeille, signifie aussi une parole; et la position de l'abeille dans la gueule du lion ne laisse
          aucun doute sur l'idée qu'on veut exprimer. Elle veut dire que Mithra, qui d'après Plutarque était adoré comme
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          Mésitès,  le Médiateur , dans son caractère d'Ouranos celui qui éclaire, n'était autre que cette glorieuse
          personne dont parle l'évangéliste Jean: "Au commencement était la Parole, et cette Parole était avec Dieu, et
          cette Parole était Dieu. Elle était au commencement avec Dieu." (Jean I, 1, 2). "En lui était la vie, et la vie
          était la lumière des hommes." (Jean I, 4).


          Le Seigneur Jésus-Christ a toujours été le Révélateur de la Divinité et doit avoir été connu comme tel par les
          patriarches; car le même évangéliste dit: "Aucun homme n'a jamais vu Dieu; seul, le fils unique, qui est dans
          le sein du Père, est celui qui nous l'a fait connaître" (Jean I, 18), c'est-à-dire qu'il l'a révélé. Avant la venue
          du Sauveur, les anciens juifs parlaient du Messie ou Fils de Dieu sous le nom de Dabar, ou la Parole. C'est
          ce qui ressort d'une déclaration du 3e chapitre du livre 1er de Samuel. Dans le 1er verset de ce chapitre, il est
          dit: "La Parole de Dieu était rare en ces jours-là; les visions n'étaient pas fréquentes" (I Samuel III, 1); c'est-à-
          dire que par suite du péché d'Élie, le Seigneur ne s'était pas depuis longtemps révélé à lui par vision, comme
          aux  prophètes. Quand le Seigneur eut appelé Samuel, cette vision du Dieu d'Israël fut rétablie (non pas
          cependant  pour Élie), car il est dit au dernier verset: "Et le Seigneur apparut de  nouveau à Scilo; car le
          Seigneur se révélait à Samuel, à Scilo, par sa parole." (I Samuel III, 21). Quoique le Seigneur parlât à Samuel,
          son langage implique plus qu'une vision, car il est dit: "le Seigneur apparut", c'est-à-dire se fit voir. Quand
          le Seigneur se révélait, ou se faisait voir à Samuel, il est dit que c'était par "Dabar", la parole de l'Éternel. Pour
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          avoir été visible, il faut que la Parole de Dieu ait été le verbe personnel de Dieu, c'est-à-dire Christ . C'est
          évidemment le nom primitif sous lequel il était connu, aussi n'est-il pas étonnant que Platon parle de la
          seconde personne de la Trinité sous le nom de Logos, qui est exactement la traduction de Dabar, ou la Parole.
          Or, la lumière de la bougie, comme la lumière de Dabar, l'abeille, était représentée comme remplaçant la
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          lumière de Dabar, la parole . Ainsi les apostats se sont détournés de la "vraie lumière" et ont mis une ombre
          à la place. Il est évident qu'il en était ainsi; car, nous dit Crabb en parlant de Saturne, on plaçait sur les autels
          de ce dieu des cierges allumés, parce que, grâce à Saturne, les hommes avaient été ramenés des ténèbres de
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          l'erreur à la lumière de la vérité . Dans la Grèce Asiatique, le dieu Babylonien était évidemment connu
          comme étant "la Parole" qui donne la lumière; car nous y voyons l'abeille occuper une place qui prouve qu'elle
          était bien le symbole du grand Révélateur.

          Voici comment Muller parle des symboles du culte de Diane à Éphèse: "Son symbole constant est l'abeille
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          qui n'a aucun rapport avec cette déesse. Le grand-prêtre était lui-même appelé Essen, ou le roi-abeille ." Son
          caractère montre celui du dieu qu'il représentait. La divinité associée à Diane, la déesse portant une tour, était
          naturellement la même divinité qui accompagnait invariablement la déesse Babylonienne, et le titre du prêtre
          montre que l'abeille qu'on voit sur ses médailles était un autre symbole de son fils, la semence de la femme,
          sous son caractère de Dabar, la parole qui éclaire les âmes des hommes. Les formulaires mêmes de la papauté
          nous montrent avec une remarquable évidence que c'est là précisément le mystère caché sous les cierges
          brûlant sur l'autel, car dans le même endroit où elle parle du mystère du cierge, Rome parle ainsi de l'abeille
          qui produit la cire: "Si nous admirons l'origine de cette substance, savoir, les cierges, nous devons exalter




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                              PLUTARQUE, De Iside, vol. II, p. 369.
                       15     Après la captivité de Babylone, comme on le voit par les Targums chaldéens ou paraphrases de l'Ancien
                              Testament, Christ était d'ordinaire appelé la Parole du Seigneur. Dans ces largums du Chaldéen récent, le
                              mot employé pour "la Parole" est "Mimra"; mais ce mot, bien qu'il soit synonyme de celui qui est
                              employé dans le texte hébreu, n'y est jamais employé. Le terme usité est Dabar. Cela est si bien connu
                              que dans la traduction de l'évangile de Jean (polyglotte Bagster), le premier verset est ainsi traduit: "Au
                              commencement était la Parole" (Dabar) (Jean I, 1).
                       16     Platonis opera, vol. I, p. 84. E.
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                              CRABB, Mythologie, p. 12.
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                              MULLER, Les Donens, vol. I, p. 403-404. Oxford, 1830.
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