Page 111 - LES DEUX BABYLONES
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est le même. Voici le récit qu'il fait d'une de ces scènes du jugement avant l'admission des morts dans le
paradis: "Cerbère est présent comme gardien des portes près desquelles apparaissent les balances de la justice.
Anubis, qui dirige le pesage, ayant placé dans un plateau un vase représentant les bonnes actions du défunt
et dans l'autre la figure ou l'emblème de la vérité, examine ses titres à l'admission. S'il est trouvé trop léger,
Osiris, le juge des morts, inclinant son sceptre, en signe de condamnation, prononce le jugement et condamne
son âme à retourner sur la terre sous la forme d'un porc ou de quelqu'autre animal immonde. Mais si, au
moment où le total de ses actions est proclamé par Thoth (qui se tient là pour marquer les résultats des
différents pesages d'Anubis), si ses vertus sont tellement supérieures qu'elles lui méritent l'entrée au séjour
des bienheureux, Horus, prenant dans sa main la tablette de Thoth, l'amène devant Osiris, qui, dans son palais,
entouré d'Isis et de Nepthys, siège sur son trône au milieu des eaux, où s'élève le lotus, portant sur ses feuilles
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déployées les quatre génies d'Amenti ." C'est évidemment de la même manière que Babylone a symbolisé la
justification par les oeuvres. Aussi le mot écrit par l'Éternel sur la muraille, le jour où il annonça la destinée
de Belshazzar, avait-il une profonde signification: "Ttekel, tu as été pesé dans la balance et tu as été trouvé
trop léger." (Daniel V, 27).
Dans le système des Parsis, qui a fait de grands emprunts au système chaldéen nous trouvons largement
développé le principe du pesage des bonnes et des mauvaises actions. "Pendant trois jours après la
décomposition, dit Vaux (« Ninive et Persépolis ») dans son récit des doctrines des Parsis sur les morts, l'âme,
dit-on, voltige autour de sa demeure d'argile, dans l'espoir de se réunir à elle; le quatrième jour, l'ange Seroch
apparaît et la conduit au pont de Chinevad. Sur ce pont, qui, dit-on, réunit le ciel et la terre, se tient l'ange de
la justice, chargé de peser les actions des hommes; lorsque les bonnes actions l'emportent, l'âme rencontre
sur le pont une apparition éclatante, qui lui dit: Je suis ton bon génie; j'étais pur à l'origine, mais tes bonnes
actions m'ont rendu encore plus pur; et posant la main sur le cou de l'âme bénie, elle la conduit au paradis.
Mais si les mauvaises actions l'emportent, l'âme rencontre un spectre hideux qui lui hurle ces paroles: Je suis
ton mauvais génie. J'étais impur à l'origine; mais tes actions m'ont rendu encore plus impur; grâce à toi nous
demeurerons misérables jusqu'à la résurrection. L'âme coupable est alors entraînée dans l'enfer où Ahriman
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siège pour lui reprocher ses crimes ." Voilà la doctrine du Parsisme. Il en est de même en Chine. Voici ce
qu'écrit l'évêque Hurd, relatant les descriptions chinoises des régions infernales et des figures qu'on y trouve:
"L'une d'elles représente toujours un pécheur sur les plateaux d'une balance, ses péchés dans l'un, ses vertus
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dans l'autre." Nous trouvons des descriptions semblables, ajoute-t-il, dans la mythologie grecque . Voici
comment Sir J. F. Davis décrit la pratique de ce principe telle qu'elle se fait en Chine: "Dans un ouvrage
remarquable sur la morale, appelé «Examen des mérites et des démérites», il est ordonné à l'homme de tenir
chaque jour un registre actif et passif de toutes ses actions, et à la fin de l'année d'en faire le total. Si la balance
est en sa faveur elle sert à établir une provision de mérites pour l'année suivante. Si elle est contre lui, il faut
qu'il liquide à l'avenir par de bonnes actions. On donne des listes diverses et des tables comparatives des
bonnes et des mauvaises actions dans les différentes actions de la vie; la bienveillance est fortement
recommandée envers l'homme d'abord, ensuite envers les animaux. Causer la mort d'une personne est évalué
du côté du démérite par le chiffre cent; tandis qu'un simple acte d'assistance charitable n'est évalué que par
le chiffre un, de l'autre côté. Sauver la vie d'une personne, compte, dans cet ouvrage, autant que l'acte
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contraire, et il est dit que cet acte méritoire prolongera la vie d'une personne de douze années ."
Tandis qu'un pareil moyen de justification est d'un côté entièrement démoralisateur, de l'autre, il ne pourrait
jamais donner à une conscience éclairée un sentiment de paix intérieure ou d'assurance sur ce qui lui est
réservé dans le monde éternel. Quel homme pourrait jamais dire, quelque bon qu'il puisse se croire, si la
somme de ses bonnes actions contrebalancerait ou non la somme des péchés et des transgressions que sa
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WILKINSON, Les Égyptiens, vol. V, p. 447.
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VAUX, p. 113.
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HURD, Rites et cérémonies, p. 64, c. 1.
9 DAVIS, La Chine, vol. II, ch. Religion, Bouddhisme.