Page 35 - LES DEUX BABYLONES
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étant, en Orient, le symbole bien connu de la force ou de la puissance, Kronos le cornu était, suivant ce
système mystique, le synonyme de l'épithète accordée par l'Écriture à Nemrod, savoir Gheber, le puissant,
(Genèse X, 8), "il commença à être puissant sur la terre". Le nom de Kronos, comme le sait fort bien le lecteur
au courant des classiques, est appliqué à Saturne en tant que père des dieux. Nous avons déjà parlé d'un autre
père des dieux, Cush, dans son caractère de Bel, celui qui confond, ou Hephaïstos, celui qui disperse au loin,
et il est facile de comprendre comment, lorsqu'on se mit à diviniser les mortels et en particulier le puissant
fils de Cush, le père, si l'on considère surtout la part qu'il semble avoir prise à la formation de tout ce système
idolâtre, a dû aussi être divinisé sous les traits de père du "Puissant", et de tous les immortels qui lui ont
succédé. Mais nous verrons en réalité, dans le cours de nos recherches, que Nemrod était le père des dieux,
parce que c'est le premier mortel qui ait été divinisé; et que, par conséquent, il s'accorde parfaitement avec
ce fait historique que Kronos, celui qui a une corne, ou le puissant, est connu sous ce titre dans le Panthéon
classique.
Le sens de ce nom de Kronos, celui qui a une corne, appliqué à Nemrod, explique
clairement l'origine de ce symbole extraordinaire, qu'on voit si souvent dans les
sculptures de Ninive, le gigantesque homme-taureau avec des cornes, représentant les
grandes divinités d'Assyrie. Le même mot qui signifiait un taureau, signifiait aussi un
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gouverneur ou un prince . Aussi le taureau porteur de cornes signifiait-il le prince
puissant, c'est-à-dire le premier des hommes puissants qui, sous le nom de Guèbres, Gabri
ou Cabiri, occupèrent dans l'antiquité une si grande place, et auxquels les anciens rois
divinisés d'Assyrie faisaient remonter leur puissance et leur noblesse. Ceci explique
pourquoi le Bacchus des Grecs était représenté avec des cornes et pourquoi on l'invoquait
souvent sous cette épithète, "aux cornes de taureau", pour désigner par là ses grands titres
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de gloire . Dans des temps relativement modernes, Togrul Begh, le chef des Turcs Fig. 9
Seldjoucides qui venaient des bords de l'Euphrate, était aussi représenté (fig. 9) avec trois
cornes sortant de la tête comme emblème de sa souveraineté.
Ceci aussi explique admirablement l'origine des divinités adorées par les
Anglo-Saxons païens sous le nom de Zernebogus. Ce Zernebogus était
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la divinité noire, funeste de mauvais augure , en d'autres termes l'exacte
contrepartie de l'idée populaire du diable, qu'on croyait être noir, et qui,
disait-on, avait des cornes et des pieds fourchus. Analysez ce nom,
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comparez-le avec la gravure ci-après (fig. 10) extraite de Layard et vous
verrez qu'elle jette une singulière lumière sur l'origine de la superstition
populaire à propos du grand adversaire.
Fig. 10
Le nom de Zernebogus est presque du chaldéen tout pur, et semble se décomposer de lui-même pour nous
offrir le sens de "la semence du prophète Cush". Nous avons vu qu'il y a lieu de conclure que sous le nom de
Bel, différent de Baal, Cush était le grand devin ou faux prophète qu'on adorait, à Babylone. Mais des savants
indépendants ont été amenés à cette conclusion que Bel et Nebo étaient deux noms différents d'un même dieu
comme le dieu aux deux cornes (Hymne à Apollon).
57 Le nom d'un taureau ou d'un prince en Hébreu est sans les points voyelles Shur, ce qui en Chaldéen
devient Tur. De Tlir, dans le sens de taureau, vient le latin laurus, et du même mot, dans le sens de
souverain, Turannus; dans l'origine, ce mot n'était pas pris en mauvaise part. Ainsi dans ces mots
classiques bien connus, nous avons la preuve du développement du principe même qui a fait représenter
les rois divinisés d'Assyrie sous la forme d'un homme-taureau.
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Hymnes Orphiques, 41, à Trietericus, p. 117.
59
SHARON TURNER, Les Anglo-Saxons, vol. I, p. 217.
60
LAYARD, Ninive et Babylone, p. 605.