Page 38 - LES DEUX BABYLONES
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Et ces ailes largement ouvertes symbolisaient l'étendue de sa puissance.
Ésaïe fait clairement allusion à cette manière de représenter les rois de
Babylone et d'Assyrie qui imitaient Nemrod et ses successeurs (Ésaïe VIII,
6-8): "Parce que ce peuple a méprisé les eaux de Shiloah qui coulent
doucement, et qu'il s'est réjoui au sujet de Retsin et du fils de Remalia,
voici, le Seigneur va faire monter contre eux les puissantes et grandes
eaux du fleuve (le roi d'Assyrie et toute sa gloire) il s'élèvera partout au-
dessus de son lit et il se répandra sur toutes ses rives; il pénétrera dans
Juda, il débordera et inondera, il atteindra jusqu'au cou. Le déploiement
de ses ailes remplira l'étendue de ton pays, Ô Emmanuel." – Si nous
remarquons les figures présentées ici au lecteur (fig. 14 et 15) avec leurs
grandes ailes étendues, comme symboles du roi Assyrien, quelle force,
Fig. 14
quelle énergie présente le langage inspiré du prophète.
Et comme il est évident que le déploiement des ailes du monarque
Assyrien "qui devait remplir l'étendue du pays" offre précisément ce sens
symbolique dont j'ai parlé, c'est-à-dire la diffusion de ses braves dans le
pays, ou de ces troupes armées, que le roi de Babylone devait amener avec
lui dans son invasion! La manière dont les rois d'Assyrie étaient
représentés et le sens de cette figure donnent encore plus de force à
l'histoire du songe de Cyrus le Grand. Cyrus le Grand, nous dit Hérodote,
vit en songe le fils d'un de ses princes, en ce moment même dans une
province éloignée, portant deux grandes ailes aux épaules; l'une couvrait
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l'Asie, et l'autre l'Europe . Il en conclut aussitôt qu'il fomentait une révolte
contre lui. Les symboles des Babyloniens dont Cyrus avait pris la capitale
et sur lesquels il régnait, lui étaient entièrement familiers; et si les ailes
étaient le symbole de la souveraineté, si leur possession impliquait la
souveraineté sur la puissance, ou sur les armées de l'empire, il est aisé de Fig. 15
voir qu'il était tout naturel que le roi conçût au sujet de ce prince des
soupçons de déloyauté, dans les circonstances que nous avons indiquées!
Le vrai sens de ce mot équivoque, Baal-aberin, pourra seul expliquer le passage d'Aristophane où il est dit:
"Au commencement du monde, les oiseaux furent créés les premiers, et après eux vint la race bénie des
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immortels ." – On a vu là une parole athée ou sans signification, mais si l'on a la clef de ce langage, on verra
qu'il contient un fait historique important. Les oiseaux, il ne faut pas l'oublier, c'est-à-dire les ailés,
symbolisaient les seigneurs des puissants, le sens est donc clair; le voici: les hommes commencèrent à être
puissants sur la terre, et les seigneurs, ou les chefs de ces hommes puissants, furent divinisés. Le sens
mystique de ce symbole aide à expliquer l'origine de l'histoire de Persée, fils de Jupiter, né miraculeusement
de Danaé, qui accomplit des faits merveilleux et allait de lieu en lieu au moyen d'ailes qu'un dieu lui avait
accordées. Ainsi s'explique aussi le mythe de Bellérophon, ses exploits sur le coursier ailé, sa fin déplorable,
son élévation dans les airs, et sa chute terrible; celui d'Icare, enfin, fils de Dédale, qui s'envolant au dessus
de la mer Icarienne au moyen des ailes qu'il avait attachées à son corps avec de la cire, s'approcha trop du
soleil, vit fondre la cire, et tomba, dit-on, dans la mer à laquelle il donna son nom. Toutes ces fables se
rapportent à ceux qui ont marché, ou sont censés avoir marché sur les traces de Nemrod, le seigneur des
puissants, et qui sous ce caractère étaient représentés avec des ailes.
72 HÉRODOTE, liv. I, ch. 209, p. 96.
73 ARISTOPHANE, Aves, v. 795-805, p. 401.