Page 246 - LES DEUX BABYLONES
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                                      Note P, p. 356 - L'étendard du Dragon dans
                                    la Rome impériale est le symbole du culte du feu.



            Ammien Marcellin qui parle de cet étendard, l'appelle "purpureum signum draconis" (liv. XVI, ch. 12, p.
          145). À ce propos on se demande: l'épithète purpureum qui indique la couleur du dragon a-t-elle quelque
          rapport avec le feu? La citation suivante de Salverté peut jeter quelque lumière sur ce sujet: le dragon figurait
          parmi  les enseignes militaires des Assyriens. Cyrus le fit adopter par les Mèdes et les Perses. Sous les
          empereurs romains et sous les empereurs de Byzance, chaque cohorte ou centurie avait pour enseigne un
          dragon (Des Sciences occultes Appendice, note A, p. 486). Il n'y a pas de doute que l'étendard du dragon ou
          serpent chez les Assyriens et les Perses ne se rapportât au culte du feu, le culte du feu et du serpent étant mêlés
          ensemble dans ces pays (LAYARD, Ninive et ses ruines, vol. II, p. 468-469). Comme les Romains donc
          empruntèrent évidemment ces étendards à cette origine, il est à présumer qu'ils les envisageaient à la même
          lumière que ceux auxquels ils les avaient empruntés, surtout comme cette lumière était si exactement en
          harmonie  avec leur système de culte du feu. L'épithète de purpureus ou   pourpre ne nous donne pas
          naturellement l'idée de le couleur du feu. Mais elle nous donne l'idée du rouge, et le rouge d'une nuance ou
          de  l'autre, a presque unanimement servi chez les nations idolâtres, à représenter le feu. Les Égyptiens
          (BUNSEN, vol. I, p. 200), les Hindous (MOOR, Le Panthéon, Brahma, p. 6), les Assyriens (LAYARD,
          Ninive, etc., vol. II, ch. 3, p. 312, note) représentaient tous le feu par le rouge. Les Perses le faisaient aussi,
          cela est évident, car Quinte Curce parlant des mages qui suivaient le feu sacré et éternel, nous dit que les 365
          jeunes gens qui formaient la suite de ces mages étaient revêtus "punicis amicutis", de vêtements écarlates (liv.
          III, ch. 3, p. 42); la couleur de ces vêtements avait évidemment trait au feu dont ils étaient les ministres;
          puniceus équivaut à purpureus, car c'est en Phenicie qu'on trouve la pourpre ou le poisson pourpre. La couleur
          extraite de ce poisson pourpre était l'écarlate (voir KITTO, Comment illust. de l'Exode, XXXV, 35, vol. I, p.
          215); et c'est le nom même de ce poisson pourpre de Phénicie, "arguna", qui est usité dans Daniel (Daniel V,
          16, 29), "celui qui interprétera l'inscription faite sur le mur sera vêtu d'écarlate". Les Tyriens connaissaient
          l'art de faire de la véritable pourpre aussi bien que le cramoisi, et il paraît hors de doute que purpureus ne soit
          souvent employé dans le sens attaché d'ordinaire à notre mot pourpre. Mais le sens original de l'épithète est
          "écarlate", et comme l'écarlate brillant est une couleur naturelle qui représente le feu, ainsi nous avons raison
          de croire que cette couleur, quand elle était employée pour des vêtements d'apparat chez les Tyriens, avait
          spécialement  rapport au feu; car le Tyrien Hercule,  qui était regardé comme l'inventeur de la pourpre
          (BRYANT, vol. III, p. 485), était regardé comme le roi du feu,
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