Page 6 - Dictionnaire de la Bible J.A. Bost 1849
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PRÉFACE
Si la destructivité est peut-être le caractère dominant de notre siècle, si la destructibilité est le caractère de
toutes les puissances qui cherchent sur la terre un point d'appui; s'il n'y a plus rien ici-bas qui soit
aujourd'hui respecté, si tout est ébranlé, si les royaumes se dissolvent, si la propriété est menacée d'une
transformation, si par quelques-uns la famille est niée au point de vue humanitaire; si la tiare pontificale,
vulgairement appelée religion, est elle-même compromise, si les États de l'Église sont menacés dans leur
existence comme les Églises de l'État, si les puissances les mieux établies semblent être à la merci du
premier vent qui souffle, il reste encore une puissance que rien n'a jamais pu renverser, ni ébranler: une
puissance qui n'a pu être détruite ni par les révolutionnaires français du dix-huitième siècle, ni par les
révolutionnaires romains du douzième et du seizième; une puissance contre laquelle ont échoué les
dragonnades de Louis XIV, et les flammes du clergé; une puissance qui a résisté à la force plus délétère
encore de l'oubli, de l'indifférence, de l'ignorance, du mépris; une puissance que n'ont pu compromettre
ni les moines oisifs des couvents, ni les moines furieux de l'inquisition, ni ceux qui élevaient leurs bâtards
sur le trône des papes, ni ceux qui brûlaient Jean Huss; une puissance qui s'est montrée plus forte que les
supplices, plus forte aussi que la corruption; une puissance enfin qui depuis dix-huit siècles toujours la
même, toujours sereine et pure, préside à la chute de tous ses ennemis, offre à tous les malheureux
d'ineffables consolations, et reste seule debout, seule forte, au milieu des débris nombreux qui jonchent la
terre autour d'elle.
Cette puissance, c'est la Parole de Dieu.
Sa force, c'est de ne renfermer aucun alliage humain. Elle est esprit et vie. Insensible à toute action
terrestre, elle grandit par ses revers comme par ses succès, à l'inverse de tous les pouvoirs matériels,
ecclésiastiques ou civils, qui, souillés de terre, tombent par leurs succès non moins que par leurs revers.
Il semble que la société moderne commence à le comprendre; elle se détache toujours plus, et surtout en
religion, de ces autorités sans force morale qui pendant longtemps ont voulu s'imposer à elle. Assez
longtemps on lui a dit: Occupez-vous du matériel, je m'occuperai du spirituel. Et maintenant ce matériel
lui pèse; elle s'en effraye; elle veut, elle aussi, s'occuper du spirituel; elle le cherche, mais où le trouvera-t-
elle? Dans l'énervante et fade lecture des romans et des livres d'imagination? elle l'a essayé, et n'en veut
plus. Dans les préoccupations politiques? elle l'a essayé, elle a espéré, elle n'a trouvé que déceptions. Dans
la religion? mais laquelle? À laquelle donnera-t-on ce nom? Dieu a permis que celle que Voltaire appelait
l'infâme, et que la main des hommes ne saurait détruire, se détruisît elle-même, qu'elle tombât de son
propre poids, qu'elle arrachât elle-même le bandeau à ses prétendus sectateurs, et qu'elle leur dît: Je ne
suis pas une puissance spirituelle, je ne suis qu'une puissance matérielle; je ne succomberai point; j'ai
300,000 baïonnettes pour me soutenir. Il a fallu (Dieu l'a permis) qu'elle se montrât non point la colonne et
l'appui de la vérité, mais la fille des armes et du mensonge. Depuis longtemps on le soupçonnait, on le
sait aujourd'hui. Qui recueillera son héritage?
Il n'y a plus que deux prétendants en présence, la Parole de Dieu, et l'incrédulité. Le grand nombre sans
doute se rangeront dans les rangs de ce dernier, l'incrédulité, qui peut s'accommoder de toutes les formes
religieuses, parce qu'elle a la conscience qu'elle les détruira toutes dès qu'elle le voudra. Le petit nombre
se grouperont autour de la Parole de Dieu, et ils s'y grouperont tous, parce que l'idole que quelques-uns
adoraient encore par habitude ou par préjugé, se décompose de jour en jour, et perd jusqu'à son prestige
extérieur. Les âmes pieuses de toutes les communions sentent le besoin impérieux de s'unir entre elles et
de se séparer du monde. L'unité factice, dont le pesant niveau a si longtemps écrasé les peuples et l'Église,
ne suffit plus aujourd'hui, pas plus en religion qu'en politique; le temps des fictions est passé, parce que
l'âge de majorité est venu. Une lutte sourde, un travail souterrain s'accomplit au sein de toutes les sectes
de la chrétienté: le protestantisme n'est pas moins divisé que le catholicisme, quoique par sa nature plus
spirituelle, il ait moins à souffrir à l'extérieur: dans aucun pays protestant on n'aurait songé à faire venir
de la troupe pour imposer un pasteur à ses paroissiens. Mais si, chez nous, la lutte est plus théologique,
plus ecclésiastique, moins mondaine, elle n'en existe pas moins; si le principe de la liberté, qui est la base
de notre constitution comme Église, est lui-même notre sauvegarde contre les excès de la liberté, et ne
nous protège pas contre l'incrédulité; sous ce rapport même, parce qu'on n'a pas l'habitude de se repaître

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