Page 15 - LES DEUX BABYLONES
P. 15
13
CHAPITRE 1
CARACTÈRE DISTINCTIF DES DEUX SYSTÈMES
Le premier point sur lequel j'appelle l'attention du lecteur pour démontrer l'origine Babylonienne de l'Église
Romaine, c'est le caractère de Mystère qui est particulier aux systèmes de la Rome moderne et de l'ancienne
Babylone. Le prodigieux système de corruption morale et d'idolâtrie, dépeint sous l'emblème d'une femme
qui tient à la main une coupe d'or (Apocalypse XVII, 4) et qui enivre toutes les nations du vin de son
impudicité (Apocalypse XVII, 2) est divinement appelé "Mystère, la Grande Babylone" (Apocalypse XVII,
5). Tout homme sincère qui examine soigneusement ce sujet, ne peut douter que le Mystère d'iniquité décrit
par Paul, dans II Thessaloniciens II, 1-7, n'ait sa contrepartie dans l'Église de Rome. Telle était l'impression
produite par ce tableau sur l'esprit du célèbre Sir Mathieu Haie, homme d'un discernement peu commun, qu'il
tenait ce langage: "Si cette description de l'apôtre était insérée dans le Cri d'alarme, le premier constable venu
du royaume aurait le droit d'arrêter n'importe où l'Évêque de Rome comme étant la personnification du
mystère d'iniquité". Or, comme le système dont nous parlons est aussi caractérisé par le nom de "Mystère",
on peut présumer que les deux passages s'appliquent au même système. Mais le langage qui désigne la
Babylone du Nouveau Testament, comme le lecteur ne peut manquer de le voir, nous ramène à la Babylone
antique. De même que la femme dont parle l'Apocalypse, l'ancienne Babylone tient à la main une coupe pour
enivrer les nations. Voici comment le Seigneur parlait de cette Babylone alors qu'elle était dans toute sa gloire,
prophétisant ainsi son avenir par la bouche de Jérémie: "Babylone a été dans la main de l'Éternel une coupe
d'or enivrant toute la terre; les nations ont bu de son vin, c'est pourquoi les nations ont été comme en délire."
(Jérémie LI, 7). Pourquoi cette analogie de langage concernant les deux systèmes? Il faut évidemment
conclure que l'un est la figure et l'autre la réalité. Or, comme la Babylone de l'Apocalypse est caractérisée par
le nom de Mystère, de même ce qui distingue l'ancien système Babylonien, ce sont les mystères chaldéens
qui en formaient une partie essentielle. C'est à ces Mystères que le langage symbolique du prophète hébreu
6
fait distinctement allusion lorsqu'il parle de Babylone comme d'une "coupe d'or". On ne pouvait, dit Salverté ,
être initié à ces Mystères sans avoir bu préalablement des breuvages mystérieux. Ces breuvages étaient
7
composés de vin, de miel et de farine . Quelques substances étaient ouvertement employées; d'autres, tenues
8
dans le secret, mais connues néanmoins , nous font voir que ces boissons étaient enivrantes, et les aspirants
n'étaient préparés à voir et à entendre ce qu'on leur réservait, que lorsqu'ils avaient ressenti leur influence, que
leur intelligence s'était obscurcie et que leurs passions avaient été excitées par la boisson préparée. Si l'on
cherche quel était le but de ces Mystères, on verra qu'ils avaient une analogie extraordinaire avec le "Mystère
d'iniquité" personnifié dans l'Église Romaine. Leur premier objet était de faire connaître peu à peu, sous le
sceau du secret et la sanction d'un serment, ce qu'il n'aurait pas été prudent de dévoiler tout à coup et
ouvertement. L'époque où ils furent établis prouve que les choses se sont ainsi passées. Les Mystères
Chaldéens peuvent être assignés à l'époque de Sémiramis, qui vivait seulement quelques siècles après le
9
déluge, et qui est célèbre pour leur avoir imprimé le caractère de son esprit licencieux et corrompu . Cette
belle mais misérable reine de Babylone n'était pas seulement dans sa personne elle-même un modèle de
10
convoitise effrénée et de dérèglement, mais encore dans les mystères qu'elle avait le plus contribué à former ,
6
Eusèbe SALVERTÉ, Des Sciences occultes, p. 259
7
GEBELIN, Monde primitif, vol. IV, p. 319.
8
Voir SALVERTÉ, p. 258-259.
9
AMMIANUS MARCELLINUS, liv. XIV, ch. 6 et liv. XXIII, ch. 6. p. 371, 374, comp. avec Justin,
Histoires, liv. 1, ch. 1, p. 615. Et Chronique d'Eusèbe, tome I, p. 40, 70 etc. Eusèbe dit que Ninus et
Sémiramis régnaient à l'époque d'Abraham. Voir tome I, p. 41 et tome II, p. 65. Pour l'âge de Sémiramis,
voir note page 15.
10 Chronique Paschale, vol. 1. p. 65.