Page 297 - LES DEUX BABYLONES

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mystérieuse divinité combinait les caractères de Père et de Fils
et sans elle
aucune prière ne pouvait être exaucée ; la porte du ciel même ne pouvait s'ouvrir
C'est ce dieu qu'on adorait si généralement en Asie Mineure quand notre
Seigneur envoya par Jean son serviteur les sept messagers de l'Apocalypse aux
Églises de cette région. Aussi dans un de ses ordres le voyons-nous repousser
tacitement l'assimilation profane de sa dignité à celle de ce dieu, et réclamer ses
droits exclusifs à la prérogative attribuée généralement à son rival :
"Écris aussi,
écris à l'ange de l'église de Philadelphie : Voici ce que dit celui qui est saint, le
véritable, qui a la clef de David, qui ouvre et personne ne ferme, qui ferme et
personne n'ouvre."
. Or, c'est à ce Janus, comme médiateur
adoré en Asie Mineure et aussi à Rome dans les premiers siècles, qu'appartenait
le gouvernement du monde, il avait, suivant les païens, tout pouvoir dans le ciel,
sur terre et sur mer
À ce titre, il avait dit-on, jus vertendi cardinis, le
pouvoir de tourner les gonds, d'ouvrir les portes des cieux, ou d'ouvrir et de
fermer dans le monde les portes de la paix et de la guerre. Le pape, s'instituant
grand-prêtre de Janus, prit aussi jus vertendi cardinis, le pouvoir de tourner les
gonds, d'ouvrir et de fermer dans un sens blasphématoire et païen. Ce pouvoir fut
tout d'abord affirmé insensiblement et avec prudence, mais une fois les
fondements jetés, l'édifice du pouvoir papal fut solidement établi, siècle après
siècle. Les païens qui voyaient quels progrès le christianisme de Rome faisait
vers le paganisme sous la direction du pape, étaient plus que contents de
reconnaître que le pape possédait ce pouvoir ; ils l'encouragèrent joyeusement à
s'élever de degré en degré au faîte de ses prétentions blasphématoires qui
convenaient au représentant de Janus, prétentions qui, on le sait, sont maintenant,
grâce au consentement unanime de la chrétienté apostate de l'Occident,
reconnues comme inhérentes à la charge d'évêque de Rome. Il fallait cependant
une coopération extérieure pour permettre au pape de s'élever à la suprématie du
pouvoir auquel il prétend. Quand son pouvoir se fut accru, quand sa domination
se fut étendue, et surtout quand il fut devenu un souverain temporel, la clef de
Janus devint trop lourde pour sa main, il eut besoin de partager avec un autre le
pouvoir du gond. C'est ainsi que ses conseillers privés, ses hauts fonctionnaires
d'État, associés avec lui pour le gouvernement de l'Église et du monde, reçurent
le titre aujourd'hui bien connu de cardinaux, les prêtres du gond. Ce titre avait
déjà été porté auparavant par les grands officiers de l'empereur Romain qui, en