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Les vêtements dont on couvrait les initiés après leur avoir ôté les premiers étaient
évidemment la contrefaçon de cette vérité. Les vêtements des initiés aux
mystères d'Eleusis, dit Botter, étaient réputés sacrés, et aussi efficaces pour
détourner le mal que les charmes et les incantations. On ne les quittait plus avant
qu'ils ne fussent complètement usés
Et autant que possible, c'est dans ces
vêtements sacrés qu'on les ensevelissait ; car Hérodote parlant de l'Égypte, d'où
ces mystères étaient sortis, nous dit que cette religion ordonnait de mettre les
vêtements des morts
L'efficace des vêtements sacrés, comme moyen de salut,
et comme ayant le pouvoir de délivrer du mal dans le monde invisible et éternel,
occupe une place fort importante dans beaucoup de religions. Ainsi les Parsis,
dont le système repose sur des éléments empruntés à Zoroastre, croient que
"Sadra"
ou le vêtement sacré tend essentiellement à préserver l'âme du mort des
calamités envoyées par Ahriman, ou le diable ; et ils représentent ceux qui
négligent l'usage de ce vêtement sacré comme souffrant dans leur âme, et comme
poussant les cris les plus terribles et les plus effrayants, à cause des tourments
que leur infligent toutes sortes de reptiles et d'animaux nuisibles qui les assaillent
à coup de dents et d'aiguillon, et ne leur laissent pas un instant de répit
Comment a-t-on pu être entraîné à attribuer une pareille vertu à un vêtement
sacré ? Admettons que c'est exactement le travestissement du vêtement sacré
donné à nos premiers parents, et tout s'explique facilement. Cela explique aussi
les sentiments superstitieux du papisme, sans cela incompréhensibles, qui
amenèrent tant d'hommes, dans des époques de ténèbres, à se fortifier contre les
terreurs du jugement à venir, en cherchant à se faire ensevelir dans une robe de
moine. Être enseveli dans une robe de moine, avec des lettres qui enrôlaient le
mort dans l'ordre monastique, c'était, pensait-on, le moyen infaillible d'être
délivré de la condamnation éternelle ! Dans le Credo du laboureur, de Piers, on
nous présente un moine qui enjôle un pauvre homme pour avoir son argent, en
lui assurant que s'il veut seulement contribuer à la construction de son
monastère :
Saint François lui-même le revêtira de cette chape, Le présentera à la Trinité, et
priera pour ses péchés
Grâce à la même croyance superstitieuse, le roi Jean d'Angleterre fut enseveli
dans un capuchon de moine
et plus d'un noble et royal personnage, avant
que
"la vie et l'immortalité"
ne fussent de nouveau
"mises en évidence"
à la
Réformation, ne connaissaient pas de meilleur moyen pour revêtir à l'approche
de la mort leur âme nue et souillée, que de s'envelopper de la robe d'un moine ou
d'un frère qui, après tout, n'était certainement pas plus saint qu'eux-mêmes. Or,