paraîtpourtant pas impossible que le genre soit beaucoup plus ancien:tardif, ii semble
un indice de décadence littéraire, mais il pourraitavoir été le système archaïque d'une
littérature didactique primitive.III L'acrostiche.Même l'acrostiche proprement dit, celui
qui prend pour initiales oufinales des lignes les lettres d'un certain mot, plaisait au
génie dela race; on en connaît bien des exemples jusque dans la poésie juivedu moyen
âge comme celle d'Aben-Esra (XII e siècle). Les Orientauxsont grands amateurs
d'énigmes, les Sémites attachaient une valeursymbolique aux noms (voir ce mot), et le
judaïsme pratiqua lagématrie, interprétation arithmétique des mots de l'A.T.
(voirNombre). C'est ainsi qu'aux petits Israélites «on enseignait quelquesversets de
l'Écriture qui commençaient ou finissaient par les lettresmêmes de leur nom; ce texte
de naissance, l'enfant devait, jour aprèsjour, l'introduire dans ses prières». (Edersheim,
Soc. juive,
p.195.) D'autre part, on sait que les chrétiens persécutés des
premierssiècles adoptèrent dans le poisson un symbole énigmatique auxprofanes, et
fourni par acrostiche: le nom grec du poisson,
ICHTHUS,
était formé par les initiales
des mots
Iêsous CHristosTHéou Uïos Sôter
=J.-C. Fils de Dieu, Sauveur. On cite aussi
deuxacrostiches dans la Bible française d'Olivétan (1535), l'un sur sonnom, l'autre sur
les Vaudois, et l'indication qu'il y a dans celui-ciune énigme à clef est donnée par cette
citation d' Eze 1:16: «Etleur ouvrage estoit comme si une roue eust été au milieu de
l'autreroue.» (Lortsch,
Hist, de la Bible en France,
pp. 114s, 121.)On a signalé dans
l'A.T., à tort ou à raison, deux exemples de cegenre d'acrostiches.
1.
Le Ps 110,
composé en l'honneur d'un grandpersonnage anonyme, se trouve former, avec les
initiales des verset1-4, le nom de Simon, qui pour un certain nombre de
savantsreprésenterait Simon Macchabée, élu en 142 par les Juifs «chef etgrand-prêtre
à perpétuité» (1Ma 14:41). Les uns objectentque cela rendrait le Psaume extrêmement
tardif; les autres, que larencontre peut n'être qu'accidentelle, car «on ne connaît
pasd'exemple d'acrostiche n'intéressant qu'une partie de la pièce» (Bbl.Cent.). Mais la
date tardive n'est pas absolument impossible; et letexte actuel du Psaume étant
certainement altéré et probablementincomplet, on ne peut conclure fermement ni sur
la régularité ni mêmesur la réalité du prétendu acrostiche.
2.
Le livre d'Esther (voir ce
mot) est connu comme necontenant pas le nom de Dieu. Pourtant les quatre
consonnes du nomsacré JHVH s'y trouvent quatre fois, comme suite d'initiales
(deuxfois) ou de finales (deux fois) de quatre mots hébreux consécutifs;elles s'y
trouvent deux fois dans l'ordre normal, JHVH, deux foisdans l'ordre inverse, hvhj. Ces
rencontres ne paraissent pas pouvoirêtre fortuites:
1°
ce sont les seuls acrostiches
avec le nom divin,non seulement dans Esther, mais dans tout l'A.T.;
2°
l'agencement
en deux paires, d'abord de finales,puis d'initiales, et l'alternance de l'ordre renversé et
de l'ordrenormal, semblent bien dénoter une intention;
3°
les quatre passages
marquent des momentsdécisifs: Est 1:20, l'édit royal; Est 5:4, l'invitationd'Esther; Est
5:13, le dépit d'Haman; Est 7:7, sa perterésolue. On a même vu un rapport entre les
initiales et lesinitiatives des deux premiers moments, entre les finales et la findes deux