chrétiens dedéclarer que «l'idée chrétienne du bien est le renversement de lanature» (cf.
A. Darlu dans
les Questions morales,
Alcan 1907). Cepréjugé sans cesse renaissant
vient de ce que la pensée occidentale,dominée par la philosophie grecque, attribue à la
Bible un dualismemétaphysique qui lui est totalement étranger. Dans l'enseignement
desprophètes d'Israël, de Jésus, de saint Paul, le corps n'est nullementopposé à l'âme
ni la matière à l'esprit (voir Chair). Dieu n'a passeulement collaboré à la création,
comme dans le platonisme, il l'afaite; d'où l'unité et la bonté de la nature en elle-
même, la natureà l'état primitif et normal. Aussi, quand l'enseignement bibliqueplace le
bien de l'homme dans une loi spirituelle, il n'entendnullement que l'homme, pour cela,
doit se détourner de la nature etmépriser les biens que la vie présente nous offre par la
bonté deDieu.. «Loin d'enseigner un ascétisme arbitraire (Col 2:20
etsuivant
), l'Écriture
sainte nous invite à rapporter toutes choses à lagloire de Dieu, même le manger et le
boire (1Co 10:31), et àconsidérer toutes choses comme à nous, pourvu que, vivant
nous-mêmesdans la communion de Jésus-Christ, nous les fassions servir
àl'affermissement et à l'extension du royaume de Dieu (1.Cor.3:21-23). Dans le bien,
tel que Dieu le veut et tel qu'il nous lerévèle par l'Évangile, on trouve réuni et confondu
ce qu'il y a deplus moral dans les préceptes les plus élevés du stoïcisme et cequ'il y a
de plus religieux dans les principes les plus purs dumysticisme.» (Jean Monod.) La
doctrine du bien dans la théologie dePaul est essentiellement une doctrine de liberté
(1Co 6:12,Ro8:21), et Paul en cela ne fait que suivre son Maître qui avait dit:«Si le Fils
vous affranchit, vous serez réellement libres»; «lavérité vous affranchira». De la nature?
non, mais du péché, ce quiest tout autre chose (Jn 8:36,32). Jésus n'a pas renversé
lanature, il l'a au contraire redressée, accomplie dans sa personnedivine. Précisément
parce qu'il venait de Dieu, le Fils de l'homme,type humain exempt des mutilations du
péché, aurait seul pus'appliquer au sens absolu le vers de Térence: «Je suis homme et
riende ce qui est humain ne m'est étranger.»
2.
La façon dont les deux Testaments
proclament quetoute la création était bonne en sortant des mains du Créateur
(Ge1:31,1Ti 4:4) nous apprend que le mal, intervenant au sein del'univers dans des
circonstances qui nous sont inconnues parcequ'antérieures à notre économie, est un
accident temporaire, unecontingence dont nous avons le devoir d'attendre avec
confiance ladisparition définitive (Esa 35:10 42:4 5:1-11,Mt 6:13,Jas 4:7,Lu10:18,1Co
15:26,Ap 12:9). Rien n'est plus contraire à l'enseignementde la Bible ni plus funeste en
soi que de tenir le mal pour conditiondu bien. Le mal est le contraire du bien comme
les ténèbres sont lecontraire de la lumière (Jn 3:19,Eph 5:8,1Jn 1:5). Les hommesont
préféré les ténèbres à la lumière (Jn 1:4-11,3:19); mais lavictoire limitée des ténèbres
n'est jamais que momentanée, parce quecelles-ci n'ont point en elles, comme la
lumière, d'énergie vivante.Ainsi en est-il des rapports du bien et du mal. Le mal est
unepuissance de dissolution qui fait mourir; par là il s'épuise lui-mêmedans son
action. Ce que nous appelons couramment la mort n'est pas unanéantissement, mais
une transformation de la vie, qui a le derniermot en tout. Quant à la mort réelle, où