joiespéciale aux notes hautes et tous les chants reçoivent la même teintesombre. Il
faut, au contraire, consacrer tous les tons et toutes lesnotes au Créateur de toutes
choses, ce qui n'est possible qu'avec lesquatre voix.
4.
Le style varie, selon qu'on prend
un Psaume huguenot; un choral duXVI e siècle, avec les rythmes irréguliers,
audacieux, de cetteépoque; un choral grave, dogmatique, du XVII e; un air mystique
despiétistes du XVIII e; un cantique des «réveils» des XIX e et XX e. Iln'y a pas de style
uniforme, parce qu'il n'y a pas de répertoireprivilégié ou honni: tout est bien qui
exprime
un sentiment vrai àun moment vrai
de l'année (un choral de Pâques, à Noël,
sonne faux)ou de la liturgie («C'est dans la paix», Paris 110, Lfr 129, au débutdu culte;
«Seigneur dirige tous mes pas», Paris 153, Lfr 138, dansune fête joyeuse; «Reste avec
nous, le jour décline», Paris 243, Lfr142, au début du culte du matin, etc.). Et tout est
bien qui estchanté avec conviction personnelle. C'est le privilège d'uneassemblée de
croyants de chanter des paroles de foi. Autre est leculte, célébré par des croyants,
autre est le concert, exécuté devantune assistance et sans son concours. Faire venir
au culte un artisted'opéra qui, hier, chantait Don Juan et demain chantera Méphisto,
etlui donner aujourd'hui un air du Messie de Hoendel, c'est créer unscandale. Mieux
vaut se passer du soliste en renom et prendre, ou unair plus simple, ou un unisson de
bonnes voix moyennes (Berlioz).L'Église protestante a trop peu demandé les services
d'artistespieux; elle devrait veiller sur leur formation et leur offrir uneplace dans la
liturgie. Mais les solistes ne pourront jamaisremplacer l'assemblée, dont ils sont les
délégués occasionnels. Le«choeur», même composé de croyants, ne saurait à lui seul
assumer lapart de l'harmonie, et ne laisser à l'assemblée que la mélodie. Lechoeur a
pour tâche de chanter tel cantique trop difficile pour lesfidèles, et de soutenir ceux-ci
dans leurs propres cantiques.
5.
Un dernier mot concerne le devoir d'élargir sans cesse
le répertoireordinaire, de peur d'usure. Il faut étudier le psautier comme laBible, de
telle sorte qu'il devienne familier à tous, texte etmusique. Tous les avis contre les
quatre voix et en faveur del'unisson viennent d'un défaitisme inconscient; on accepte
la loi dumoindre effort, on renonce à l'excellence pour l'assemblée. C'est unretour au
cléricalisme, qui néglige les simples et ennoblit unecatégorie de privilégiés, choristes et
solistes. Demander beaucoup detous, avec persévérance; ne laisser inemployé aucun
don d'aucunfidèle; mettre l'idéal très haut, et le faire désirer de tous, c'est,en matière
de chant d'église, la même discipline que pour l'ensemblede la morale. Chaque
paroisse a donc ses exercices de chant, continuset non seulement avant une fête,
comme elle a ses cultes réguliers,l'un soutenant l'autre, et le trésor des chants
grandissant commecelui de la foi, de l'espérance et de la charité, pour tous et
pourchacun. Il surfit pour cela de faire nôtre la prière de BénédictPictet (1706): «Je
prie le Seigneur qu'il nous apprenne à chanter seslouanges sur la terre, jusqu'à ce que
nous les chantions dans leciel.» Voir Culte, Liturgie, Psaumes, Instruments de
musique. L. M.-S.