CHAPITRE IX.
RÈGNE DE KENNETH-BATAILLE DE LUNCARTHY-MAISON DE HAY- MODIFICATION
DE LA LOI DE SUCCESSION. Les Écossais s'étaient arrêtés
dans leur chemin, ou plutôt ils en étaient sortis et s'étaient
écartés du droit chemin, et ils avaient besoin d'être ramenés à
celui-ci avec le bâton de la calamité nationale. En peu de temps,
nous les trouvons malmenés par un coup qu'ils ont sans doute déploré
comme un malheur, mais qu'ils auraient dû accepter comme un bienfait.
Là encore, sur leur côte orientale, se trouvaient les galères
nordiques remplies de guerriers assoiffés de sang, brandissant des
haches de combat grossièrement façonnées en fer de tourbière, et des
épées aiguisées et trempées par des artisans plus habiles que les
armuriers de Scandinavie. Ces maraudeurs avaient traversé
le continent pour charger leurs navires de butin et de captifs, puis
retourner dans leur pays et s'y délecter de leur butin. C'est tout
ce à quoi les Vikings pensaient et se souciaient. Cependant, ils
étaient venus pour une autre mission, même s'ils ne le savaient pas.
Ils avaient été appelés depuis leurs fjords pour réunir les parties
divisées des Écossais, en concentrant dans une lutte suprême pour
l'indépendance les passions et les énergies qui, entre-temps,
étaient dépensées dans des querelles personnelles insignifiantes, et
pour rappeler au sens du devoir une nation qui devenait inconsciente
de sa haute mission. Mais il faut d'abord trouver un
occupant pour le trône vacant. La vie dissolue et le bref règne de
Cullen avaient, comme nous l'avons vu, été brutalement interrompus
sur la route par un acte de violence provoqué, mais non justifié,
par ses propres amours criminelles. Il fallait un certain courage,
on peut le penser, pour s'asseoir sur la pierre fatale de Scone,
après avoir récemment fait l'expérience des soucis et des risques
qui attendaient le pouvoir royal en Écosse. Kenneth, le troisième de
ce nom - un nom honoré dans la lignée royale des Écossais -, le
frère de Duff le Noir, fut le successeur de Cullen. À peine monté
sur le trône (971), il s'attela à la tâche de remettre de l'ordre
dans un royaume qui, comme on pouvait le croire, sous un souverain
tel que Cullen, était tombé dans la confusion. Il était rare en
effet qu'il n'y ait pas une rébellion qui couvait dans l'un ou
l'autre des comtés du nord. Mais ce danger était considérablement
aggravé par un mal que Kenneth avait plus de mal à atteindre avec
ses armes que les insurrections dans le Lochaber ou le Ross-shire.
Les nombreuses îles qui parsèment les mers occidentales et qui
charment l'oeil du touriste par leur beauté pittoresque ou leur
grandeur rocheuse, étaient à l'époque autant de « villes de refuge »
où le voleur, le brigand, le tueur d'hommes et le rebelle pouvaient
s'enfuir et où ils pouvaient défier la justice. La difficulté de
faire face à ce mal était d'autant plus grande que les Norvégiens
avaient commencé à exercer parfois la souveraineté de ces îles et
n'étaient pas peu enclins à affaiblir le pouvoir des rois d'Alban en
étendant leur protection aux ennemis de leur gouvernement. Si
Kenneth avait pu submerger ce port de hors-la-loi et de flibustiers
dans les vagues de l'Atlantique, il aurait sans doute privé notre
côte occidentale d'une grande partie de son attrait, mais il aurait
allégé les soucis de son gouvernement et consolidé la paix de son
royaume. Il avait commencé à s'attaquer à ce mal monstrueux et
progressait dans sa suppression, lorsque son attention fut attirée
par un autre secteur de son territoire. Rien, pensa sans doute
Kenneth, ne pouvait être plus malheureux en ce moment. Il plaçait le
roi et la nation écossaise entre deux feux. À l'ouest, une vingtaine
d'îles étaient sur le point de s'enflammer dans l'insurrection ; à
l'est planait le nuage de guerre norvégien, dans les plis sombres
duquel sommeillaient les éclairs. Jamais on n'avait vu une telle
flottille de galères nordiques jeter l'ancre au large de Red Head,
sur la côte d'Angus. Pendant plusieurs jours, elles n'ont pas bougé
de l'endroit, mais ont plané au-dessus du rivage, comme une volée
d'oiseaux de proie, comme si elles voulaient rendre les habitants
impuissants par la terreur avant de s'abattre sur eux avec leurs
haches de guerre et leurs épées tranchantes. On discutait à bord
pour savoir s'ils devaient descendre sur l'Angleterre ou sur
l'Écosse, l'Angleterre étant la terre la plus riche et où ils
recueilleraient un butin plus abondant, alors que dans le pays
septentrional et plus pauvre, ils ne pouvaient espérer glaner que
peu de choses, et ce peu de choses avec plus de risques en raison de
la nature plus féroce des gens. Mais en plus de cela, les
Scandinaves devaient tenir compte du fait que, dans les deux cas,
ils ne pourraient pas éviter une rencontre avec les Écossais, qui
pourraient peut-être se précipiter à l'aide des Anglais, ne
serait-ce que pour écarter le danger qui les menaçait eux-mêmes, et
qu'ils devraient donc combattre deux nations au lieu d'une seule.
Les sages du conseil nordique ont donc décidé de frapper là où ils
se trouvaient. Contournant les hautes falaises de Red Head, leur
galère entra dans l'estuaire de l'Esk à Montrose, et les
envahisseurs, sautant sur le rivage, se livrèrent au sac et au
massacre le long des rives du fleuve ; ne rencontrant aucune
opposition pendant quelques jours, ils étendirent leurs ravages vers
le sud jusqu'à la Tay, et vers l'ouest le long de la grande vallée
de Strathmore. Le roi se trouvait à Stirling
lorsque la nouvelle lui parvint de cette nouvelle invasion des vieux
ennemis de son royaume. Kenneth rassembla les forces qu'il avait
avec lui, et donnant l'ordre au reste de la population de s'armer et
de le suivre, il partit à la rencontre des envahisseurs. L'armée
viking avait alors pénétré à l'intérieur des terres et était arrivée
à Perth. Les deux armées se rencontrèrent près du confluent de la
Tay et de l'Earn. La bataille qui s'ensuivit est l'une des plus
célèbres de l'histoire de ces invasions. Le Danois et l'Écossais
brûlaient tous deux d'une haine héréditaire. Qu'est-ce que le Viking
païen avait à faire sur cette terre ? Elle ne lui appartenait pas,
et l'Écossais était déterminé à ce qu'elle ne lui appartienne jamais.
S'il vient ici pour trouver une tombe, il l'aura ; mais en ce qui
concerne ces montagnes et ces plaines, elles ont été la demeure des
Calédoniens depuis des temps immémoriaux, et ce qui a été la
possession de nos pères, sera la possession de nos fils. C'est ce
qu'ont dit les Écossais. C'est dans cet esprit que la bataille
s'engagea. Elle fit rage avec une fureur
sanguinaire. Au lever du soleil, la scène du conflit avait l'air
d'un endroit doux et gracieux ; mais avant midi, la bataille l'avait
transformée en un véritable capharnaüm, effrayant à voir, bien que
la rage avec laquelle les combattants luttaient les uns contre les
autres les rendait insensibles aux horreurs qui les entouraient. Des
troncs découpés et mutilés, des crânes fendus, des membres arrachés,
des Danois et des Écossais étendus et serrés les uns contre les
autres, leurs visages assombris par la mort et leurs yeux encore
brûlants du feu de la bataille, jonchaient les belles prairies où se
déroulait le conflit, et teintaient les deux rivières qui arrosaient
la vallée que la guerre avait rendue aussi épouvantable que son
aspect habituel est doux et accueillant. La journée avait tourné en
défaveur des Écossais, et ils commençaient à s'échapper du champ de
bataille en foules terrifiées. C'est alors que se produisit un
incident qui changea le cours de la bataille et jeta une lueur
romantique d'héroïsme patriotique sur son carnage. Il se trouve qu'un robuste
yeoman et ses deux fils labouraient dans un champ qui se trouvait
sur la piste des fugitifs. Indigné de voir les Écossais tourner le
dos à l'ennemi, il arrêta sa charrue, détacha ses bœufs et, armé lui
et ses fils des outils de leur élevage, il se plaça sur le chemin
des fuyards et, en partie par des reproches et en partie par des
coups, il arrêta leur fuite et les obligea à faire face et à
reprendre la bataille, lui et ses deux fils en tête du combat. Le
courage est aussi contagieux que la lâcheté. Le vieil esprit
guerrier calédonien, qui avait résisté aux légions romaines au pied
de ces mêmes montagnes qui dominaient cette bataille contre les
Danois, s'est enflammé dans la poitrine des Écossais. L'armée des
Vikings fut vaincue et le jour qui, jusqu'à présent, avait été plein
de désastres et se refermait sombrement sur les Écossais, se
transforma avec une rapidité presque magique en un jour de victoire. L'histoire a sans doute été
embellie au cours de sa transmission, mais ses fondements
historiques sont trop nombreux pour qu'on puisse la considérer comme
entièrement légendaire. L'incident, sous une forme ou une autre, a
dû se produire, car sinon comment aurait-il pu obtenir la place
qu'il occupe dans l'histoire, écrite et héraldique, ainsi que dans
les traditions du pays ? Le sol lui-même en témoigne. Les armes
brisées et les fragments de squelettes qui y sont déterrés
témoignent d'une bataille ancienne mais féroce. Le nom du paysan
robuste et audacieux qui a transformé un moment de grand péril pour
son pays en un moment de glorieux triomphe est Hay. Il est entré
dans le champ comme un simple laboureur, il en est sorti comme un
chevalier ceinturé. Si, par la suite, il mit la main à la charrue,
ce fut pour labourer les vastes étendues que son souverain
reconnaissant lui donna en récompense de sa bravoure dans la fertile
Carse of Gowrie. C'est ainsi que furent jetées les bases de la noble
maison d'Errol. Boece et Buchanan, et les
historiens qui les suivent, ont raconté l'aventure de Hay et de ses
deux fils à la bataille de Luncarty avec des circonstances non pas,
en effet, impossibles ou même improbables, mais d'un caractère si
surprenant et si romanesque qu'on en vient à soupçonner la véracité
de l'histoire. Pourquoi, a-t-on demandé, Hay et ses fils
auraient-ils labouré leurs champs alors qu'une bataille désespérée
faisait rage à peu de distance d'eux ? Dans ce genre d'événements,
il y a toujours des circonstances qui posent des problèmes et qu'une
narration complète des détails permettrait d'éclaircir de façon
satisfaisante. Si tous les faits de l'affaire nous étaient connus,
ce qui ne sera jamais le cas, il ne fait guère de doute que le
patriotisme de Hay et de ses fils serait à l'abri de tout soupçon.
Contre cette seule objection à l'histoire, nous devons opposer de
nombreux témoignages concordants en faveur de son occurrence réelle.
Le fait qu'une bataille très sanglante ait été livrée aux Danois à
Luncarty est, nous le supposons, généralement admis. Que le robuste
yeoman du Perthshire soit intervenu à un moment critique et ait
changé le cours de la bataille n'est certainement pas un événement
impossible. Combien de fois est-il arrivé, dans les guerres
anciennes et modernes, que l'héroïsme d'un ou de quelques hommes
change d'un seul coup l'aspect du conflit et transforme la défaite
en victoire ? Telle est la substance de l'histoire, dégagée de ses
circonstances accidentelles. Qu'un tel exploit ait été accompli par
Hay, nous en avons de nombreuses preuves corroborantes. Il y a la
tradition populaire très répandue. Boece et Buchanan n'ont pas créé
cette tradition. Elle existait bien avant leur époque et a dû
trouver sa première origine dans un exploit du type de celui
attribué à Hay. Il y a aussi les armoiries de la famille d'Errol, où
l'on peut voir les outils agricoles que leur courageux ancêtre a si
soudainement transformés en armes de combat pour déconcerter les
Danois. Et enfin, pour corroborer l'exploit, nous avons la position
élevée de la maison d'Errol depuis une époque très ancienne. Leur
descendant était Haut-Connétable d'Écosse sous le règne de Robert
Ier, et si nous ne nous trompons pas, le représentant actuel de
cette noble maison occupe le même poste élevé. Après cela, l'Écosse connut
quelques années de tranquillité. Fort de cette grande victoire, le
roi s'attaqua plus durement aux voleurs et aux brigands qui
infestaient les pays du nord. Il introduit ce que l'on appellerait
aujourd'hui une loi d'option, donnant à ces nobles le libre choix
entre une vie honnête et la potence. Il enseigna aux nobles le
respect de la couronne ; il jeta son bouclier sur les gens du peuple,
les protégeant des exactions rapaces. Les arts et l'agriculture
reprirent vie dans l'espace de respiration qui leur était donné par
le voleur domestique et le pilleur étranger, et Kenneth saisit
l'occasion que lui offraient le calme et le contentement qui
régnaient pour apporter une modification importante à la loi de
succession à la couronne, dont nous parlerons plus tard. Après la bataille de Luncarty,
Kenneth, nous dit la Chronique des Pictes, construisit des forts sur
les rives du Forth, sans doute pour empêcher les incursions des
Danois. Il est intéressant de savoir qu'à cette époque, le Forth
était susceptible d'être visité par ces brouillards noirs qui
embarrassent parfois le navigateur dans les mêmes eaux de nos jours,
et qui ont empêché Marie Stuart d'accoster pendant trois jours
lorsqu'elle est venue prendre possession du trône écossais. Dans la
Chronique saxonne, le Forth est appelé Myrcford, le mirk du dark
firth ; il en est de même dans les sagas nordiques, où le nom qui
lui est donné est Myrk-va-Fiord. Après avoir fait de son mieux pour
empêcher les Danois d'entrer en Écosse par le Dark Frith, Kenneth
entreprend de ravager la Saxe. L'histoire ne nous éclaire pas sur
les causes qui l'ont poussé à cette expédition, ni sur les résultats
qui en ont découlé. Au-delà de l'affirmation quelque peu improbable
selon laquelle le roi des Écossais aurait emmené en captivité le
fils d'un roi des Saxons. Si Kenneth a emmené quelqu'un, il
s'agissait probablement d'un souverain nord-ombrien de dignité
inférieure. Et c'est ici que la Chronique des Pictes se termine avec
l'indication que ce roi (Kenneth) a donné la grande ville de Brechin
au Seigneur. » 1 Dans les premiers âges des
Écossais, et jusqu'au règne de Kenneth III, la couronne, comme nous
l'avons déjà dit, ne passait pas directement de père en fils. À la
mort du monarque, ce n'était pas le plus proche parent, mais celui
de tous ses proches qui était jugé le plus apte à gouverner, qui
était choisi pour lui succéder. Cet arrangement était exigé par
l'état du pays et le caractère des Écossais. Il fallait un homme
d'une compréhension mûre et d'une volonté ferme pour gouverner un
peuple si impétueux et parfois si intraitable. Ces qualités ne
devaient pas être recherchées chez un homme d'âge tendre. En
conséquence, à la mort du souverain, les États se réunirent et
choisirent un successeur, en veillant seulement à ce que la personne
élue, en plus de posséder les qualifications requises, soit de
souche royale, c'est-à-dire un descendant de Fergus le Premier, roi
des Écossais. Les nobles, dans l'ensemble, étaient opposés à un
changement de leur ancienne loi, qui avait bien fonctionné. Mais le
roi insiste. Il décrivit les maux qui accompagnaient le mode actuel
d'élection au trône, les intrigues et les disputes des candidats,
les séditions, les conspirations et les guerres qui étaient parfois
encouragées par des concurrents déçus : Et il représenta d'autre
part qu'en décrétant qu'à la mort du roi, la couronne passerait
directement à son fils, et si ce fils était d'âge tendre, qu'une
régence, composée des plus sages de la nation, serait nommée jusqu'à
ce qu'il atteigne la majorité, tous les avantages du système actuel
seraient conservés, et tous ses inconvénients seraient évités. À ces
arguments, Kenneth en aurait ajouté d'autres, plus palpables, pour
obtenir l'assentiment de la noblesse. Quoi qu'il en soit, le roi
réalisa son projet, et la loi de succession à la couronne, qui
s'appliquait depuis la fondation de la monarchie écossaise, fut
modifiée à partir de ce jour. Il fut décrété « que le fils aîné du
roi, à l'avenir, devrait toujours succéder au père, quel que soit
son âge ; de même, si le fils mourait avant le père, que le plus
proche parent devrait succéder à l'aïeul. Lorsque le roi était
mineur, il fallait choisir un tuteur ou un protecteur, un homme
éminent par son intérêt et son pouvoir, pour gouverner au nom et à
la place du roi, jusqu'à ce qu'il ait atteint l'âge de quatorze ans,
après quoi il avait la liberté de se choisir des tuteurs. » Ce
changement de loi s'est étendu à d'autres choses que le trône. On
dit que la loi sur la succession dans les familles privées a été
altérée ou modifiée à la même époque. Boethius et Buchanan ont chargé
la mémoire de ce prince, qui sur toutes les autres transactions de
son règne a joué un rôle sage et droit, de la culpabilité d'avoir
procuré la mort de Malcolm, prince de Cumberland, pour faire place à
la succession directe de son propre fils. À cette époque, le roi
écossais détenait le Cumberland en tant que fief du monarque anglais.
L'arrangement était mutuellement avantageux, constituant un lien
d'amitié entre les deux royaumes et une défense de l'Angleterre sur
sa frontière nord contre les invasions danoises. Le gouverneur de
Cumberland était généralement considéré comme l'héritier présomptif
du trône écossais. Il occupait une position analogue parmi les
Écossais, comme César sous les premiers empereurs, ou comme le
Dauphin de France ou le Prince de Galles à notre époque. La gestion
de la petite principauté était un apprentissage admirable pour le
gouvernement du grand royaume. Le prince de Cumberland sous Kenneth
III. était Malcolm, le fils de Duff. Il était prééminent parmi les
jeunes écossais pour ses qualités viriles et princières, et son
avènement au trône était attendu avec impatience par la nation. Il
se trouve qu'à peu près au moment où Kenneth a commencé à faire
pression pour que la loi de succession soit modifiée, Malcolm,
prince de Cumberland, est mort. Le roi parut touché par un véritable
chagrin pour la perte du prince et lui fit des funérailles à la
hauteur de son rang et de la place qu'il occupait dans l'estime de
la nation. Le fait que les deux événements - le changement de la loi
de succession et la mort de Malcolm, fils de Duff, qui s'interposait
entre Malcolm, fils du souverain régnant, et le trône - aient été
contemporains, ou presque, a fourni à Boethius et à Buchanan un
motif de présomption pour la grave accusation qu'ils ont portée
contre ce roi. Fordum est silencieux. Toutes les probabilités de
l'affaire nous semblent être contre les deux historiens cités et en
faveur de Kenneth, et nous refusons d'être associés à l'apposition
d'une tache si sombre sur des motifs si légers à la mémoire d'un
monarque qui, pendant un long règne, et sous une variété de
conditions, certaines d'entre elles suffisamment dures, a maintenu
un nom sans tache en ce qui concerne la magnanimité et l'honneur. Néanmoins, Kenneth était loin
de récolter les avantages qu'il s'était promis de retirer du
changement qu'il avait été si désireux d'apporter à la constitution
du royaume. Les dernières années de sa vie et de son règne furent
assombries par des problèmes découlant de cette même question.
Combien de fois, tandis qu'il façonnait péniblement ses pas au
milieu des pièges domestiques, a-t-il dû souhaiter que les Danois
reviennent et donnent aux thanes écossais des occasions légitimes de
donner libre cours à leurs passions et à leurs ambitions, en les
appelant sur le champ rouge du conflit pour la patrie ! Même après
que la tombe se soit refermée sur lui et que tous les tumultes
terrestres se soient tus autour de lui, à l'exception de celui des
vagues occidentales où il reposait, cette mesure continua à
contrarier le pays et à produire une moisson de conspirations et de
guerres. L'histoire de la fin du roi a
été diversement racontée ; une chose est certaine, c'est que Kenneth
III, comme tant d'autres de ses prédécesseurs, est mort par la
violence. Selon Johannis Major et Hector Boethius, il s'était rendu
en pèlerinage sur la tombe de Palladius, dont les ossements avaient
acquis à cette époque une merveilleuse réputation de sainteté et
dont le tombeau était devenu un célèbre lieu de pèlerinage. Après
avoir fait ses dévotions au sanctuaire du saint, le roi se détourna
pour visiter le château de Fettercairn, dont Finella, une sorte
d'Héroïdienne écossaise, était la maîtresse. Cette dame, qui devait
au roi la rancune d'avoir fait pendre son fils Crathilinth pour le
crime de s'être affranchi des lois du roi et de la vie de ses sujets,
veillait à ce qu'il ne quitte pas son château vivant. Winton dit
cependant que le roi fut renvoyé avec toutes les marques de bonne
volonté, mais qu'il fut tué par des cavaliers qui lui avaient tendu
une embuscade sur la route. Sa mort est survenue en l'an 995, la
vingt-cinquième année de son règne. On voit un cortège funèbre
avancer lentement vers l'ouest le long de la grande plaine que
délimitent les Sidlaws d'un côté et les Grampians, plus puissants,
de l'autre. La barge royale, suivie d'une flottille de bateaux
transportant de nombreuses personnes en deuil, transporte le corps
royal à travers le détroit d'Iona, et les sépultures des rois à
Icolmkill reçoivent un autre locataire. Note de bas de page 1. « Cinadius autem vallavit ripas vadorum Forthin. Primo anno perexist Cinadius, et praedavit Saxoniam, et traduxit filium regis Saxonum. Hic est qui tribuit magnam civitatem Brechne Domino."-Pict. Chron. Le Dr Skene est d'avis que la Chronique picte a été écrite à Brechin sous le règne du roi Kenneth, puisqu'elle s'interrompt avec l'annonce du don de cette ville par Kenneth au Seigneur.-Celtic Scotland, i. 369.
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