La Réforme Marginale

Jean leDuc

 

"Sola Scriptura, Sola Gratia"

"Veritas, Caritas, Libertas."

 

L'une des étapes les plus décisive du Christianisme fut la Réforme du seizième siècle.  C'est en octobre 1517 que la Réforme prit officiellement naissance.  Avant 1517 l'autorité abusive de l'institution papale avait été souvent contestée par les Vaudois, l'Anglais John Wyclif, et le Morave Jean Huss.  La richesse matérielle et le pouvoir temporel avaient tellement corrompu l'Église Catholique Romaine, qu'une réforme s'imposait de toute urgence. 

 

L'Église Vaudoise, dont la source est l’Église Italique (Ac. 10: 1), fut fondée vers l'an 120 et non au moyen-âge. Elle avait maintenue la pureté de la foi marginale et fut gardienne de la Bible Authentique qu'elle traduisit en vieux Latin vers l'an 157.  Les Vaudois recherchèrent la simplicité chrétienne et acceptaient la Bible comme seule règle de foi et de conduite.  Ils apprenaient par cœur de long passages bibliques et, vêtu pauvrement, allaient deux par deux prêcher l'Évangile.  Ils s'opposèrent fortement au Catholicisme, reconnurent le pape comme l'Antichrist, et furent persécuté atrocement pour leur foi.

 

Pour Wyclif, surnommé l'étoile de la Réforme, l'Église Romaine devait se convertir et retourner à la pureté de la foi et à la simplicité de vie, celle qui la caractérisait à l'époque apostolique.  Comme les Vaudois, il déclara ouvertement que le pape est l'Antichrist, et ne reconnaissait que la Bible comme seule autorité pour la foi, refusant celle de la tradition ecclésiastique.

 

Le Bohémien Jean Huss, né au environs de 1369, embrassa la doctrine de Wyclif.  Selon Huss, l'Église universelle comprenait seulement les élus de Dieu; et il faisait la distinction entre "être en Christ" et "être membre de l'Église".  Le 6 juillet 1415, il fut accusé d'hérésie par le pape et brûlé sur un bûcher pour sa foi biblique.

 

Au milieu du quatorzième siècle, apparut le mouvement des "Frères de la Vie Commune".  Malheureusement, comme leurs précurseurs, ces croyants authentiques espéraient amener la réforme de l'Église Romaine, ne réalisant pas qu'on ne peut réformer un corps mort en décomposition.  Deux élèves de ce mouvement qu'il faut mentionner, furent Jean de Wessel et Érasme de Rotterdam.  Wessel, appelé "la lumière du monde", fut parmi les plus grands savants de son époque, prêcha la doctrine de la justification par la foi seule, sans les oeuvres méritoires.  Selon lui, les élus ne sont sauvés que par la grâce, et affirmait que même si l'on était excommunié de l'Église, si Dieu nous avait élus, on pouvait être certain de notre salut.  Accusé d'hérésie, il abjura ses convictions et fut mis en prison où il mourut en 1489.  Il faut dire que ses convictions n'étaient pas enracinées dans la crainte de Dieu et n'étaient que superficielles, car aucun vrai élu n'abjurerait sa foi.  Toutefois, nous ne savons point si Wessel se repentit avant de mourir pour revenir à ses convictions.  Le savant le plus célèbre de cette période fut Érasme de Rotterdam.  Contemporain de Luther, il mit sa grande culture au service des critiques contre l'Église Romaine et ridiculisa l'ignorance des moines et des prêtres.  Toutefois, il ne s'associa pas à Luther ou à la Réforme du seizième siècle.  Son oeuvre majestueuse du Nouveau Testament Grec, connu plus tard comme le Texte Reçu, fut la pierre angulaire qui déclencha la Réforme Orthodoxe, ébranla l'Église Romaine et exposa le pape comme l'Antichrist.  Son texte fut traduit par les grands Réformateurs qui remirent au peuples la pure Parole de Dieu dans toute son intégralité dans la traduction d’Olivétan et ses versions Épée, Martin et Ostervald.

 

La Réforme fut préparée dans l'esprit des gens depuis très longtemps, et la contribution culturelle comme spirituelle d'hommes tels que les Vaudois, Wyclif, Huss, Érasme, Luther, Calvin et les Huguenots, à la fin du quinzième siècle et au début du seizième siècle est considérable.  Ceux qui s'engagèrent à réformer l'Église étaient des hommes très ordinaires quoique d'une foi forte, d'une conviction profonde, d'un courage moral admirable et d'une endurance physique exceptionnelle.  Ils risquèrent leur vie et sacrifièrent leur confort afin de travailler sans relâche à la pureté de l'Église. La tyrannie ecclésiastique de l'Église Catholique Romaine qui avait asservi des peuples  tout entier à une religion pseudo-chrétienne de superstitions, de mensonges et d'abus aussi bien spirituel que matériel, se rompait sous l'assaut vigoureux de l'Esprit de Dieu et de sa Parole inspirée.  L'heure glorieuse des débuts d'un retour aux Écritures et à la grâce de Dieu seule se manifesta de nouveau, et les fidèles affranchis pouvaient de nouveau en toute liberté adorer et servir Dieu. 

 

Mais la Réforme du seizième siècle doit être considérée, à proprement parler, comme étant une Réforme Orthodoxe et non Marginale, c'est à dire quelle était plutôt une Réforme de l'Église en tant que Institution.  Mais les changements qu'elle apporta débordèrent le cadre ecclésiastique pour affecter aussi la vie du monde et des hommes.  Selon Luther et tous les Réformateurs Orthodoxes de ce temps, tout ce qui n'était pas expressément interdit par la Bible pouvait être conservés dans la nouvelle Église.  C'est pourquoi la Réforme Orthodoxe conserva certains éléments de l'ancienne Église comme le cléricalisme, le formalisme et le ritualisme; ce qui engendra graduellement un esprit de tiédeur et prépara le chemin pour l'Église de Laodicée des derniers temps (Apoc. 3: 13-22). 

 

Malgré ses bonnes intentions et le solide fondement des doctrines de la grâce du Calvinisme, la Réforme Orthoxe engendra des scissions en son sein et plusieurs groupes de dissidents se formèrent avec leurs doctrines particulières, ce qui donna naissance à des conflits interminables sur plusieurs doctrines comme celles de la Trinité, de la Cène, et du Baptême d'eau.  La pire apostasie qui se manifesta fut celle de l'Arminianisme qui prétend que l'homme a le libre choix de croire en Christ, s'opposant ainsi à la Souveraineté de Dieu dans le salut par la grâce selon la doctrine de la double Prédestination absolue.  Cette doctrine diabolique de l’Arminianisme met l'homme à la place de Dieu, présente une façade chrétienne subversive et subtile à tendance psychologique, qui se répandit rapidement surtout chez les chrétiens nominaux qui ont reçu une puissance d'égarement de la part de Dieu (2 Thess. 2: 11, 12).

 

Contrairement, la Réforme Marginale, se basant uniquement sur la Grâce et la Parole de Dieu dans la traduction des Réformateurs, proclame la liberté en Christ de toutes dominations humaines, ecclésiastiques comme politiques.  Le mot même de Réforme signifie un procédé continuel de raffinage de la foi et non des institutions.  Cela signifie que les élus d'aujourd'hui, qui adhèrent à la Réforme Marginale, ne doivent avoir sur ce sujet de l'ecclésiologie les mêmes opinions que les gens du 16" siècle.  Certes, il ne sera jamais question - au grand jamais - d'adapter l'Évangile de la Souveraineté de Dieu dans le salut par la grâce, auquel les élus ont été prédestinés, à l'esprit du temps ni de faire des concessions à l'homme autonome qui veut se mettre à la place de Dieu par son libre choix illusoire de croire ou non.  Le Réformé Marginal, dit Souverainiste Séparatiste ou Calvinistes Marginal, doit proclamer la foi dans le langage nouveau d'une nouvelle époque, non pas que la foi serait de nature changeante et devrait être continuellement changée; mais de proclamer une voie décisive resté ouverte à l'action du Saint-Esprit et à la Parole de Vérité.  En ce sens, nous parlons d'une réforme des pensées et des cœurs,  et j'ose dire  une réforme même de la traduction des Saintes Écritures d'après le Texte Reçu des Réformateurs, et oui, une réforme même de l’Église réformée qui présente à nos contemporains une dogmatique inflexible.

 

Donner une forme au vent est impossible; nous le reconnaissons seulement par ses déplacements et les influences qu'il exerce sur nous et sur notre entourage.  Ainsi en est-il du Christianisme Marginal; par comparaison au Christianisme Conventionnel historique, accepté et respecté universellement. Jésus compare un Chrétien "né de l'Esprit" à un vent:  "Le vent souffle où il veut, et tu en entends le son; mais tu ne sais d'où il vient, ni où il va": il en est ainsi de tout homme qui est "né de l'Esprit" (Jean.3: 8).  Cette comparaison s'applique par extension à tout le Christianisme authentique en entier; un Christianisme sans forme qui se déplace où il veut avec le vent de l'Esprit Saint.  Inutile de spécifier que la "Liberté" est son caractéristique prédominant; on ne peut l'encadrer et encore moins l'institutionnaliser.  On peut le reconnaître seulement par les influences qu'il exerce dans sa séparation d'avec son contraire qui veut à tout prix sa structuration institutionnelle, pour le contrôler.  Or, la Parole de Dieu nous dit que "la colère de Dieu se révèle pleinement du ciel sur toute impiété et injustice des hommes qui retiennent injustement la vérité captive" (Rom.1: 18).

 

Vouloir le monopole de la vérité pour capturer les consciences est le jeux de l'esprit du Malin et non de l'Esprit de Dieu.  Ainsi être Chrétien Marginal signifie être "séparé" dans sa Foi strictement Biblique, de tout accord officiel, de règle ou d'enseignement, imposés par l'entente commune de différents groupes religieux, sociaux, ou politiques.  En ce sens, et encore plus dans le sens scripturaire, un Chrétien Marginal est un Séparatiste et un Hors-la-Loi de pure race.  En ceci, la Foi Calviniste Marginale, qui maintient les doctrines de la grâce (T.U.L.I.P.) énoncées dans les Canons de Dordrecht sans institutionnalisme, formalisme, ou ritualisme, devient la foi des rejetés, des oubliés, des égarés, des défavorisés et des écrasés.  Terme généralement conçu d'une manière dérogatoire, le mot "Marginal" semble à première vue, inapproprié pour désigner le Christianisme authentique.  Mais en relation avec la Parole de Dieu, il signifie "mis à part", être séparé du monde à Christ, être sanctifié; c'est à dire être sous la Grâce unique de Dieu sans mérites quelconques. 

 

Les Chrétiens Marginaux ont toujours été un facteur problématique pour le monde politique et religieux, tout simplement parce qu'ils ne sont point de ce monde: "Je leur ai donné ta Parole, et le monde les a hais parce qu'ils ne sont point du monde, comme aussi je ne suis point du monde" dit Jésus (Jean.17:14); et qu'ils maintiennent la Souveraineté de Dieu sur toutes choses.  Ainsi ils deviennent une source de tension et d'éléments qui dérangent le piètre confort des Conformistes, et le libre-choix illusoires des apostasiés.  La simplicité du message "d'Amour, de Foi et de Liberté qu'ils proclament, déclenche des réactions hostiles et parfois violentes contre eux de la part du Christianisme Conventionnel qui dit enseigner l'Amour de Dieu.  Or, en toutes choses, la grâce seule de Dieu doit nous suffire (2 Cor. 12: 9), et en ceci les deux piliers de la Réforme demeurent inébranlable:  "SOLA GRACIA, SOLA SCRIPTURA" (la Grâce seule, l'Écriture seule); et ceci exclu tout effort humain et toutes structurations dénominationnelles ou dissidentes.  Sur ces deux piliers reposent les trois pivots de la Réforme Marginale, à savoir "LA VÉRITÉ, LA CHARITÉ, LA LIBERTÉ"  qui en sont sa devise en ces derniers temps de ténèbres, de laxisme, et d'indifférence.

 

"A Christ seul soit la gloire"