AVANT-PROPOS Chargés par la Société des livres moraux et religieux de la rédaction d'un dictionnaire hébreu-français à l'usage des écoles israélites, nous nous sommes efforcés, dans la composition de ce travail, de ne point sortir des limites qui nous ont été tracées. D'après le plan et le programme arrêtés d'avance, nous n’avions pas à faire une œuvre Savante et originale; les vues ambitieuses et séduisantes d'invention et de découverte nous étaient complètement interdites. La nouveauté en matière de lexicographie, et surtout de lexicographie hébraïque, si elle est parfois vérité, souvent n'est que paradoxe ou pure hypothèse. Plus d'une fois aussi ce qui a été donné comme nouveauté s'est trouvé n'être en définitive que la rencontre plus ou moins fortuite d'explications anciennes peu connues ou entièrement inédites. Nous avions, quant à nous, nos auteurs à reproduire et nos guides à suivre. Ces guides, ce sont nos exégètes et nos grammairiens les plus autorisés : R. Jona (Ibn-Ganach), R. Salo- mon ben Isaac (Yarchi), Ibn-Ezra, R. Salomon Parchon, R. David Kimchi, R. Levi ben-Gerson; les versions les plus accréditées, Onkelos, Jonathan ben-Ouziel, les Septante, quelquefois aussi la Vulgate et Luther, et, parmi les auteurs et traducteurs modernes, Mendelsohn, Wessely, Ben-Zoew, et surtout Gesenius.
Le système de l'ordre alphabétique des mots et non des racines est celui que nous avons dû adopter. Pour cette partie de notre travail nous n'avions qu'à imiter et à reproduire Gesenius, qui a vulgarisé ce mode de vocabulaire le plus commode et le plus conforme à nos habitudes scolaires, mais non pas le plus rationnel ni le mieux approprié au génie des langues orientales.
Aux mots hébreux et chaldéens composant le lexique des saintes Écritures nous avons joint les mots hébreux et chaldéens de nos Rituels et du Traité Aboth. Ce nouveau travail a été jugé nécessaire dans un dictionnaire principalement destiné à la jeunesse israélite. La langue des docteurs de la grande Synagogue, ainsi que celle de nos plus anciens rabbins, dans leur enseignement morale ne s'éloigne pas essentiellement de celle de la Bible. Tous ces mots sont marqués d’un astérisque qui les précède.
D'après ce qui a été dit plus haut, on comprend que, si nous n'avons usé qu'avec réserve des travaux des exégètes les plus récents, c'est que nous avions une tradition à respecter, une autorité à faire prévaloir, celle des célèbres commentateurs que la Synagogue est accoutumée à vénérer. Non pas qu'il y ait pour l'israélite des commentateurs qui s'imposent, une traduction dont il ne lui soit pas permis de s'écarter. En dehors des mots et des versets dont l'explication importe au point de vue doctrinal et dont le sens est fixé par le Talmud (mots et passages qui se trouvent presque en totalité dans le Pentateuque), la piété la plus timorée conserve à l'égard de l'interprétation des saintes Écritures la plus entière indépendance. Elle met sa joie et sa gloire à chercher dans les textes sacrés et à y trouver l'expression d'idées et de sentiments que l'on n'y avait pas encore découverts, à creuser à son tour ce sol fécond et qui ne saurait être épuisé, pour en tirer des trésors cachés à tous les regards. Mais, dans un travail comme le nôtre, toute interprétation douteuse, toute conjecture paradoxale, toute explication trop aventurée, devait être soigneusement écartée. Notre tâche, nous le répétons, consistait à reproduire les opinions des écrivains autorisés dont les recherches et les découvertes sont devenues le patrimoine du judaïsme.
Il n'y a donc pas, dans ce dictionnaire, une seule explication, soit de mot, soit de verset, qui n'ait pour elle l'autorité de l'un des noms précités. Entre les diverses interprétations qui nous étaient proposées, nous avons choisi celle qui nous paraissait la plus plausible, et, quand plusieurs interprétations semblaient avoir le même caractère de vraisemblance, nous avons cru devoir les reproduire les unes et les autres malgré ou plutôt à cause de leur divergence.
Un dictionnaire complet doit donner les diverses acceptions des mots, les significations les plus tranchées comme celles qui ne se distinguent que par les plus délicates nuances, le sens ordinaire et fréquent comme l'emploi le plus éloigné et le plus rare. Sans craindre de tomber dans la prolixité et la redondance, nous avons laissé à cette partie essentielle de notre travail l'étendue qui lui appartient. — Pour justifier nos définitions, nous ne nous sommes pas bornés à la simple indication des textes. Les sens et les significa״* tions attribués aux mots ont tous à leur appui un ou plusieurs versets traduits.
— Ce travail de traduction et de commentaire ne sera pas sans utilité, surtout aux jeunes étudiants. On nous rendra la justice de reconnaître que nous n'avons ni évité ni tourné les difficultés.
Certes, nous ne prétendons pas avoir pu dissiper tous les doutes, éclaircir toutes les obscurités, et indiquer nue solution satisfaisante aux problèmes qu’offre souvent le texte de la Bible. Nous ne nions pas l’avoir tenté jusqu’à un certain point, en nous appliquant à citer les passages les plus difficiles, et sur lesquels s’est particulièrement exercée la sagacité des commentateurs.
Mous avons été sobres d'explications grammaticales. Un lexique doit être l'auxiliaire de la grammaire ; il ne saurait la remplacer ni en rendre l’étude inutile. Les soins les plus minutieux ont été apportés à l’exécution typographique de ce volume. La Société des livres moraux et religieux n'a rien voulu épargner pour rendre cet ouvrage digne d’elle-même et de l’élite des israélites français qu’elle représente. Le vénérable président de la Société, M. le grand rabbin Ulmann, après avoir pris connaissance du manuscrit et avoir exercé sur le travail des auteurs l’influence de ses conseils et de ses savantes observations, s’est imposé encore la pénible tâche de lire et de réviser toutes les feuilles imprimées. Get ouvrage a ainsi obtenu le concours le plus efficace ainsi que la plus haute sanction qui pouvait lui être donnée.—En outre, M. le grand rabbin du Consistoire central a joint à ce dictionnaire un appendice consacré à des notices biographiques sur les docteurs cités dans le Traité Aboth. Ce dictionnaire, le premier en son genre qui ait paru en France, sera accueilli, nous l’espérons, avec bienveillance par tous les amis de la littérature sacrée. Une œuvre consciencieuse est rarement une œuvre inutile. Notre vœu le plus cher serait accompli si cet ouvrage pouvait contribuer à réveiller en France, et surtout parmi nos coreligionnaires, l'étude des saintes Écritures. La vie dans le judaïsme, c'est la science de la parole divine, le go&t des choses saintes, l'inspiration religieuse puisée à sa seule et vraie source. Là est notre gloire dans le passé, là aussi sera pour nous l'honneur de l’avenir.
TABLE DES PRINCIPALES ABRÉVIATIONS
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