LA VIE DE
JÉSUS
CHAPITRE II
L'activité publique de
Jésus.
G. Jésus à
Jérusalem, - le dimanche des Rameaux.
115. Parabole des dix vierges.
(Matth.
XXV, 1-13.)
La parabole des dix vierges ne s'occupe que des
disciples de Jésus, c'est-à-dire des croyants.
Alors le royaume des cieux sera semblable à dix
vierges, qui, ayant pris leurs lampes, allèrent
au-devant de l'époux. Chaque chrétien est
considéré comme une vierge qui s'est donnée au
Seigneur et qui lui reste fidèle. Déjà dans l'Ancien
Testament, la relation du Dieu de l'alliance avec
son peuple, était représentée sous l'image de
l'union des fiancés et des époux. L'abandon de Dieu,
l'idolâtrie est appelée tout simplement adultère et
impureté, comme par exemple auPsaume
LXXIII : « Tu retrancheras tous ceux qui se
détournent de toi », (littéralement ceux qui
commettent l'impureté). Les vierges sont donc les
âmes qui aiment Jésus, et qui ont obtenu le pardon
de leurs péchés. Dix est le nombre complet, parfait,
qui fait penser à la plénitude des croyants.
Cette parabole nous montre le fiancé
descendant du ciel et venant chercher sa fiancée
ornée et parée pour la conduire dans la salle des
noces. Mais le Seigneur veut nous montrer
spécialement qu'il n'admettra à ce banquet que ceux
qui s'y sont préparés intérieurement. Et cette
préparation consiste surtout à aspirer ardemment à
entrer dans la communion du Seigneur et à aller
au-devant de lui avec une lampe allumée. La parabole
ne parle pas de la fiancée, mais seulement des
vierges qui l'accompagnent. Cette fiancée n'est
d'ailleurs autre que l'assemblée de tous les
croyants. On ne pouvait donc pas parler de sa
sagesse et de sa folie ; c'est pourquoi le Seigneur
parle ici de plusieurs vierges et non d'une seule
fiancée. Cependant, ces vierges représentent aussi
les âmes fiancées au Sauveur. Les sages participent
à la félicité du fiancé, car elles entrent dans la
joie de leur Seigneur. De fait, on ne peutdistinguer
les vierges d'avec la fiancée. Seulement, en parlant
de celle-ci, on a plutôt en vue l'Église, tandis que
les dix vierges représentent plutôt chacune des âmes
dont l'Église se compose.
Or, il y en
avait cinq d'entre elles qui étaient sages et cinq
qui étaient folles. Celles qui étaient folles, en
prenant leurs lampes, n'avaient pas pris d'huile
avec elles ; mais les sages avaient pris de l'huile
dans leurs vaisseaux avec leurs lampes.
La sagesse des sages consistait en ceci : C'est
qu'outre l'huile qui alimentait leurs lampes, elles
en avaient fait une provision dans leurs vaisseaux.
Les folles avaient négligé cette précaution, se
contentant de l'huile qui remplissait leurs lampes
pour le moment. Dans les Écritures, l'huile est
toujours l'image du Saint-Esprit. Les lampes
représentent les coeurs ; car, comme l'huile est
versée dans la lampe, de même le Saint-Esprit est
versé dans les coeurs des croyants. - Les vaisseaux
dont les vierges sages étaient munies, étaient
remplis d'huile comme les lampes, mais d'une autre
manière. Car l'huile qui est dans les vaisseaux
n'est pas destinée à brûler et à éclairer
immédiatement, comme celle qui est dans les lampes.
Avant d'en faire usage, il faut qu'on la verse des
vaisseaux dans les lampes, c'est-à-dire dans les
coeurs. Si donc les lampes sont des véhicules
humains (subjectifs) du Saint-Esprit, les vaisseaux
en sont les véhicules objectifs.
Depuis l'effusion dit Saint-Esprit, qui
eut lieu le jour de la Pentecôte, l'huile n'est plus
versée directement d'en haut dans les coeurs des
croyants. Mais le Dieu qui est appelé un Dieu
d'ordre (l
Cor. XIV, 33) a institué des moyens de grâce, la
Parole et lessacrements, comme des
vaisseaux remplis du Saint-Esprit, desquels l'huile
est versée dans les lampes, c'est-à-dire dans les
coeurs. La précaution que prirent les vierges sages
de ne pas laisser leurs vaisseaux dans quelque coin,
ni même dans le sanctuaire, mais de les emporter et
de les garder avec elles, est le signe distinctif de
toutes les âmes qui savent que l'huile de leurs
lampes s'épuisera peu à peu, et qu'elles doivent en
puiser toujours de nouveau, si elles veulent les
empêcher de s'éteindre. Elles reconnaissent la
Parole de Dieu et les sacrements, comme les
véhicules du Saint-Esprit, et lorsqu'elles répètent
celle prière :« Ne laisse pass'éteindre la lumière
de ma foi », elles ne s'attendent pas à ce que le
ciel s'ouvre à leurs prières, et que le Saint-Esprit
descende sur elles sous la forme d'une colombe ;
mais elles prennent en mains, avec foi, la cruche
d'huile de la Parole de Dieu et des sacrements, et
sont assurées que ces vaisseaux versent volontiers
leur contenu dans leurs coeurs.
Les vierges folles, au contraire, sont
dépourvues de prévoyance et croient pouvoir
entretenir et rafraîchir leur vie spirituelle par le
seul souvenir de leurs expériences intérieures.
Elles ont conscience, de leur foi, et ce sentiment
les rend heureuses et les satisfait, en sorte
qu'elles oublient leurs péchés et leurs faiblesses,
et négligent les grâces qui s'offrent chaque jour à
elles. - Les vierges folles sont, comme les sages,
engendrées par la Parole de vie, mais cette semence
est tombée sur le roc. Elle leva promptement et eut
d'abord un développement réjouissant. Elles crurent
pendant quelque temps, mais au moment de la
tentation elles succombèrent.
Les sages vivent de la Parole de Dieu, et
leur âme est comme un arbre planté près des
ruisseaux d'eau courante, qui porte son fruit en sa
saison et dont le feuillage ne se flétrit point, et
tout ce qu'elles entreprennent réussit (Psaume
1, 3). Leurs lampes ne s'éteignent point, parce
que ces vierges se sont reconnues comme de pauvres
pécheresses qui ne peuvent garder la foi ni par leur
propre intelligence ni par leurs propres forces, et
qui, à cause de cela, se ménagent toujours une
nouvelle provision d'huile. Alors le coeur chrétien
s'identifie toujours davantage avec la Parole de
Dieu. tellement que tous ses sentiments, toutes ses
pensées, tous ses désirs, et toutes ses aspirations
sont remplis des puissances du siècle à venir. Alors
aussi se vérifie pour lui ce que le Seigneur dit à
la Samaritaine, en lui parlant du Saint-Esprit sous
l'image de l'eau vive : « Celui qui boira de l'eau
que je lui donnerai n'aura plus jamais soif, et
l'eau que je lui donnerai deviendra en lui une
source d'eau qui jaillira jusqu'à la vie éternelle.
- Tout en puisant journellement à cette source, le
coeur croyant sent de plus en plus son indigence ;
mais c'est précisément ce sentiment qui le rend plus
certain de la grâce qu'il a obtenue. Et lorsqu'il
voit chaque jour, avec honte et douleur, combien il
est rempli de péchés, alors il recourt à la cruche
d'huile de la sainte Cène, dont il use avec un saint
empressement. Et au moyen de ces provisions sans
cesse renouvelées aux vaisseaux d'huile qui, comme
au temps d'Élie, ne s'épuisent jamais, bien qu'on y
puise sans cesse, la précieuse oeuvre de la grâce
s'accomplit, savoir : l'affermissement du coeur.
Sans cet approvisionnement un roseau agité çà et là
par le vent de ses propres inspirations. Ainsi la
sagesse des vierges sages se fait connaître par un
désir continuel de croître dans la grâce, par une
méditation diligente de la Parole de Dieu, par une
fréquentation régulière du service divin, et par un
grand zèle à participer à la Sainte-Cène. Ces coeurs
veulent être toujours davantage ce qu'ils sont déjà
: des coeurs croyants.
Et comme l'époux
tardait à venir, elles s'assoupirent toutes et
s'endormirent. L'Époux viendra
inopinément comme un larron pendant la nuit. Mais
pour le brûlant désir des âmes qui l'attendent, il
vient toujours trop lentement. Il tarde, et les
croyants s'assoupissent et s'endorment. La vie de la
foi devient languissante et tiède, même chez les
vierges sages, et chez plusieurs l'amour pour Jésus
se refroidit. Par ses nombreux combats et ses
tentations, l'âme se fatigue. Le premier amour s'est
calmé, le feu du premier zèle s'est alangui. On
s'est habitué à vivre dans les pensées de paix que
procure l'assurance du salut. On a cessé d'y
travailler avec crainte et tremblement. On ne croit
plus nécessaire de se faire violence pour ravir le
royaume des cieux. On n'a plus hâte de sauver son
âme. Et comme on a cessé de combattre jusqu'au sang
contre le péché, ou n'apporte plus ni ardeur ni
ferveur dans ! a prière. On n'éprouve plus aucune
crainte à fréquenter le monde. On ne travaille plus
à le vaincre ; ou cherche plutôt à vivre en paix
avec lui, ce qui est impossible.
Le fait que le Seigneur nous dit que même
les vierges sages s'endormirent, est une preuve de
sa bonté et de son amour pour les pécheurs, qui
n'éteint pas le lumignon qui fume encore. C'est de
cette même bonté qu'il usa en Gethsémané envers ses
disciples endormis, lorsqu'il leur dit : Veillez et
priez, de pour que vous ne tombiez en tentation, car
l'esprit est prompt, mais la chair est faible. Je
pense que tous ceux qui se seront laissé réveiller
par cet appel à la vigilance, et auxquels il sera
permis d'accompagner l'Époux dans la salle du
festin, lui rendront encore grâces d'une manière
toute particulière devant le trône de sa gloire pour
cette bonté, qui doit être pour notre âme une
puissante défense contre le découragement et
l'incrédulité. Cette bonté et cette patience du
Seigneur sont notre félicité.
Et sur le minuit
ou entendit crier : Voici l'Époux qui vient, sortez
au-devant de lui. On ne saurait douter
que la venue du Seigneur, dont il est question ici,
ne marque le moment où il reviendra pour juger le
monde ; mais ces paroles doivent aussi nous rappeler
le terme de notre propre vie. Puisse aucun de nous
ne manquer, lorsque le gardien fera entendre ce cri
de l'amour :« Prépare-toi pour le festin ; il faut
que tu ailles au-devant de l'Époux ! » -
Alors les vierges se levèrent
toutes et préparèrent leurs lampes.
Toutes se réveillent. Les folles sont effrayées
d'être tirées de leur sommeil. Les sages, au
contraire, sont heureuses d'être délivrées de leur
pénible engourdissement. Toutes préparent leurs
lampes, mais les sages seules peuvent faire luire
les leurs. Les folles font de vains efforts pour
obtenir le même résultat. Leurs lampes s'éteignent
parce qu'elles manquent d'huile. Terrible état de
ces âmes, qui ont été une fois illuminées, qui ont
vécu dans la communion de l'Époux, et qui sont
devenues ténèbres et ont perdu le Saint-Esprit ! -
Et les folles dirent aux
sages : Donnez-nous de votre huile, car nos lampes
s'éteignent. Jusqu'ici, il eût été
difficile de faire la différence entre les vierges
folles et les sages. Mais maintenant les folles se
reconnaissent elles-mêmes comme telles à leur grande
frayeur. Elles sentent que leur état spirituel ne
leur permet pas de paraître devant l'Époux. Leur
lumière s'éteint. Il fait sombre dans leurs coeurs
et devant leurs yeux. Auparavant elles avaient le
sentiment d'être rassasiées et riches ; maintenant
elles sentent le manque absolu de consolations et de
forces. Toute leur vie elles ont espéré dans le
Seigneur et sont allées au-devant de lui, et
maintenant qu'elles doivent le voir et remporter le
prix de leur foi, elles s'aperçoivent avec effroi
qu'elles sont privées de la vertu et même de la
présence du Saint-Esprit.
Ce qui leur manque, elles le voient
clairement en regardant les vierges sages. Elles les
avaient peut-être dédaignées jusqu'alors.
Lorsqu'elles les voyaient recueillir de l'huile avec
tant de zèle, se garder avec soin des souillures du
monde, elles les considéraient probablement comme
des personnes bornées. Maintenant elles
reconnaissent avec angoisse qu'elles-mêmes ont agi
follement, tandis que leurs compagnes ont été
prudentes. Leur folie a aussi été un levain qui a
fait lever toute la pâte. C'est cette folie qui est
cause qu'elles se sont contentées de leur provision
d'huile, si vite épuisée, dans l'espoir insensé de
pouvoir en trouver en elles-mêmes. Cette même folie
les pousse maintenant à s'adresser à leurs soeurs
pour obtenir d'elles l'huile qui leur manque. Elles
s'appuient sur le bras de la chair. Que ce soit là
le sens de leur demande, c'est ce qui ressort de la
réponse que le Seigneur met dans la bouche des
vierges sages : Nous ne le
pouvons, de peur que nous n'en ayons pas assez pour
vous et pour nous. Car, ordinairement,
parmi les chrétiens qui sont les oints du Seigneur,
il y a une communication mutuelle de dons
spirituels, afin que la foi en soit fortifiée.
C'est précisément une telle communication
qui doit augmenter la plénitude de l'Esprit chez
ceux qui donnent et chez ceux qui reçoivent. En
effet, d'après la promesse du Seigneur, des fleuves
d'eau vive doivent découler du corps des croyants.
Or, ceux-ci ne seront pas appauvris par cet
écoulement. Ils en seront au contraire, enrichis.
Dans le règne de Dieu, on ne s'appauvrit pas en
donnant, surtout quand il s'agit de dons spirituels.
Au contraire, plus on donne, plus on peut donner.
Par conséquent, lorsque les vierges sages expliquent
aux folles qu'elles ne peuvent pas leur donner de
leur huile, de peur d'en manquer elles-mêmes, cela
ne peut signifier que ceci : C'est que les folles
voudraient s'approprier la vie spirituelle pleine de
foi des sages, et en profiter, sans avoir
elles-mêmes besoin de se nourrir de la Parole de
Dieu, sans être obligées de crucifier le vieil homme
avec ses passions et ses convoitises, sans livrer
les rudes combats de la sanctification. Mais cela ne
se peut pas. Notre chair ne peut pas être tuée par
une repentance étrangère, pas plus que nos péchés ne
peuvent nousêtre pardonnés par la foi d'autrui. Les
relations de l'âme croyante avec le Seigneur sont
absolument personnelles, et ne peuvent pas profiter
aux autres.
Allez plutôt
vers ceux qui en rendent et en achetez.
Par ceux qui en vendent, il faut entendre ceux qui
enseignent la Parole de Dieu, les apôtres, les
prophètes, qui conduisent les âmes à l'Époux. C'est
l'explication la plus naturelle.
Mais pendant qu'elles en
allaient acheter, l'Époux vint ; et celles qui
étaient prêtes entrèrent avec lui aux noces, et la
porte fut fermée : Les sages étaient
prêtes parce que leurs lampes, pleines de l'huile
sainte, étaient allumées, parce que, malgré leur
pauvreté spirituelle, le Saint-Esprit plaidait leur
cause devant le Seigneur, par des soupirs qui ne se
peuvent exprimer. Alors la porte fut fermée par la
main de celui qui ferme et personne n'ouvre.
Après cela, les
autres vierges vinrent aussi et dirent : Seigneur,
Seigneur, ouvre-nous. Mais il répondit : Je vous dis
en vérité que je ne vous connais point.
Ordinairement la voix de l'épouse est agréable à
l'époux lorsqu'elle s'écrie : Que mon bien-aimé
vienne dans son jardin et qu'il mange de ses fruits
délicieux. (Cant.
des Cant. IV, 16). Et lorsque l'Esprit et
l'épouse impatiente disent : Seigneur Jésus, viens,
il répond avec joie : Oui, je viens bientôt. Mais le
« Seigneur, Seigneur » des vierges folles, avec
leurs lampes ne plaît point à l'Époux ; car personne
ne peut dire que Jésus est le Seigneur que par
l'onction de l'Esprit. Il est vrai que toute langue
doit le confesser comme le Seigneur, et tout genou
se ployer à son nom ; mais ceux qui ne le feront pas
avec des coeurs tremblants de joie, le feront en
tremblant d'angoisse et demeureront exclus de la
salle des noces pour l'éternité. Les vierges folles
se présentent sans huile devant la porte de cette
salle. Les mouvements de l'Esprit ont cessé ;
l'amour s'est refroidi ; le gage de la fidélité est
perdu. Aussi le Seigneur ne les reconnaît pas. Il y
eut un temps où elles confessaient le Seigneur de
coeur et de bouche, où elles avaient fermé leurs
coeurs aux attraits du monde. Et maintenant elles
sont exclues pour toujours des joies du banquet
nuptial ! Quelle terrible fin !
.
116. Le jugement dernier.
(Matth.
XXV, 31-46.)
Après avoir exhorté ses disciples à la vigilance,
le Seigneur dirige leurs regards vers le jugement
qu'il exercera lors de son avènement.
Or, quand le Fils de l'homme
viendra dans sa gloire avec ses saints anges, il
s'assiéra sur le trône de sa gloire. Et toutes les
nations seront assemblées devant lui ; et il
séparera les uns d'avec les autres, comme un berger
sépare les brebis d'avec les boucs. Et il mettra les
brebis à sa droite et les boucs à sa gauche.
Ainsi il y aura encore un jugement universel et
public dans lequel toute l'humanité comparaîtra
devant Christ son Sauveur, son Roi et son Juge. Car
le Sauveur du monde est aussi son juge. Et le
jugement sera prononcé en raison des dispositions du
coeur de chacun envers sa personne.
Alors le Roi
dira à ceux qui sont assis à sa droite : Venez, vous
les bénis de mon Père, possédez en héritage le
royaume qui vous a été préparé depuis la création du
monde ; car j'ai eu faim et vous m'avez donné à
manger ; j'ai eu soif et vous m'avez donné à boire ;
j'étais étranger et vous m'avez recueilli ; j'étais
nu et vous m'avez vêtu ; j'étais malade et vous
m'avez visite ; j'étais en prison et vous êtes venus
me voir. Alors les justes répondront : Seigneur,
quand est-ce que nous t'avons vu, avoir faim et que
nous t'avons donné à manger ? Ou avoir soif et que
nous l'avons donné à boire ? Et quand est-ce que
nous t'avons vu étranger et que nous t'avons
recueilli, ou nu, et que nous t'avons vêtu ? Ou
quand est-ce que nous t'avons vu malade et que nous
t'avons, visité, ou en prison et que nous sommes
venus te voir ? Et le Roi leur répondant leur dira :
Je vous dis, en vérité, qu'en tant que vous avez
fait cela à l'un de ces plus petits d'entre mes
frères, vous me l'avez fait à moi-même.
Jésus se regarde comme un malade dont les
souffrances dureront jusqu'à la fin du monde ; car
tout le mal qui arrive à ceux qui croient en lui, le
fait souffrir lui-même. La tête ressent toutes les
douleurs des membres. Ainsi, les croyants ont en
tout temps l'occasion detémoigner, par des actes, de
leur foi en leur Sauveur et de leur amour pour lui.
Personne, sans doute, ne peut mériter la félicité
éternelle, par les oeuvres d'un miséricordieux
amour. Car cette félicité n'est pas une récompense,
elle est un héritage. Elle nous est accordée comme
un don de la grâce. Toutefois, lorsque nous croyons
de coeur en lui, c'est un besoin pour nous de lui
montrer, par des actes, notre reconnaissance et
notre amour. Car si la foi n'est pas agissante par
la charité, elle est morte. La foi sans les oeuvres
est morte, mais aussi, réciproquement, les oeuvres
sans la foi sont mortes.
Plusieurs diront en ce jour-là : «
Seigneur, Seigneur, n'avons-nous pas fait plusieurs
miracles en ton nom ? » Mais il leur répondra : « Je
ne vous ai jamais connus. » Et l'apôtre Paul nous
dit que donnât-on tous ses biens aux pauvres, sans
la foi en Jésus, cette générosité n'a aucune valeur
devant Dieu. C'est pourquoi ces deux choses marchent
inséparablement unies : une foi vivante et des
oeuvres de charité. Or, nous pouvons reconnaître si
notre charité est de bon aloi, en la comparant à
celle des élus qui sont à la droite de Christ. Ils
demandent avec étonnement quand ils ont témoigné
leur amour au Sauveur. Ils n'en savent rien ; mais
le Seigneur le sait. Celui qui, au nom de Jésus,
traite avec amour ceux qui ont faim ou soif, qui
sont malades ou étrangers ou prisonniers, sa main
droite ignore ce que fait sa gauche. L'oeil de
l'humilité ne se voit pas lui-même.
Ensuite, il dira
à ceux qui sont à sa gauche : Retirez-vous de moi,
maudits, et allez dans le feu éternel préparé au
diable et à ses anges. Car j'ai eu faim, et vous ne
m'avez pas donné à manger ; j'ai eu soif et vous ne
m'avez pas donné à boire ; j'étais étranger et vous
ne m'avez pas recueilli ; j'étais nu et vous ne
m'avez pas vêtu ; j'étais malade et en prison et
vous ne m'avez pas visité. Et ceux-là lui répondront
aussi : Seigneur, quand est-ce que nous t'avons vu
avoir faim, ou soif, ou être étranger, ou nu, ou
malade, ou en prison et que nous ne t'avons pas
assisté ? Et il leur répondra, : Je vous dis, en
vérité, qu'en tant que vous ne l'avez pas fait à
l'un de ces plus petits, vous ne me l'avez pas fait
non plus. Et ceux-ci s'en iront aux peines
éternelles, mais les justes s'en iront à la vie
éternelle. Le Sauveur leur est resté
étranger. Il leur a manqué l'oeil de la foi pour
reconnaître Jésus dans les pauvres et les
misérables, et ils ne leur ont témoigné aucun amour.
C'est pourquoi ils seront éternellement séparés de
Jésus. Que celui qui jusqu'à présent n'a pas
travaillé à son salut avec crainte et tremblement,
et qui croit cependant que le ciel ne saurait lui
échapper, et que la damnation n'est que pour les
criminels, pour les gens qui ont passé leur vie dans
des péchés grossiers et des désordres scandaleux,
que celui-là se retire dans la solitude et lise et
relise sérieusement ces paroles du Seigneur.
Ceux que le Père envoie aux peines
éternelles ne sont nullement des criminels ; ils
n'ont absolument rien fait d'extraordinaire. Ce qui
attire la condamnation sur eux, ce sont uniquement
des péchés d'omission. Qui n'a pas connu
Jésus ayant faim et soif, qui n'a pas aimé le
Sauveur nu et malade, sera condamné.« Celui-là pèche
qui sait faire le bien et qui ne le fait pas. » Si
nous ne voyons parmi les chrétiens qui nous
entourent, que des pécheurs, alors nous passons
froidement à côté d'eux. Nous sommes témoins de
leurs souffrances ; mais est-ce que cela nous
regarde ? Mais dès que nous reconnaissons en eux
Jésus notre Sauveur bien-aimé, notre consolation
pendant notre vie, et notre espérance dans la mort,
quelle joie et quel honneur de pouvoir prendre soin
de lui dans la personne de ceux qui lui
appartiennent ! Tu te plains de ne pas le connaître,
et voici, tu le rencontres partout sur ton chemin.
Tu crois en lui et tu ne le reconnais pas ! Si tu ne
le reconnais pas ici dans les malheureux, il ne le
reconnaîtra pas non plus là-haut dans la gloire.
C'est pourquoi, souhaitons que cette voix
ne se taise jamais dans nos coeurs :Vous
ne me l'avez pas fait non plus, afin que
nous devenions de plus en plus sérieux dans notre
vie chrétienne. Seigneur, aide-nous, Seigneur, aie
pitié de nous ! |