Table des matières :: Glossaire :: Auteur

3.2 2 Les termes

On appelle une unité sémantique, qu'elle soit constituée d'un seul mot ou de plusieurs, un terme. Le terme comprend normalement un mot, mais il peut être une combinaison de mots. Dans l'A.T. בֶן־נָבִיא (littéralement "fils de prophète") est un terme, car il indique une unité sémantique. Quand on ne peut pas échanger les mots contre leurs synonymes, sans en changer le sens, c'est le signe qu'une expression est un terme. Dans l'A.T. on ne parle que des fils de tel ou de tel prophète: ex.: Jr 28.1 בֶן־עַזּוּר הַנָּבִיא (cf. Za 1.1,7) ou avec le mot חֹזֶה (aussi = prophète ex.: 2 Ch 19.2 בֶן־חֲנָנִי הַחֹזֶה). Nous ne savons donc pas si בֶן־נָבִיא peut indiquer le fils du prophète. Quand donc on disait בֶן־נָבִיא, on parlait d'un membre d'une confrérie prophétique cf. Am 7.12 et 14 et les deux mots forment un seul terme.

Le terme est donc la brique avec laquelle un message verbal est construit. L'étude des termes est donc à la base de la compréhension d'un texte. On ne peut pas, cependant, étudier tous les termes d'un texte en détail; comment alors choisir les termes à expliciter?

Le choix des termes à étudier:

Ce choix (comme toute activité exégétique) devient plus aisé avec de l'expérience. Cependant trois règles peuvent être proposées aux débutants pour leur faciliter la tâche:

  1. Les mots qui semblent avoir un sens hors de l'ordinaire (ou un sens technique) valent la peine d'être étudiés. Ex.: Dans Am 7.14 le mot "fils" comme nous venons de le voir, ne semble pas avoir la signification d'"enfant" car Amos n'aurait pas nié que son père était prophète c'est donc un signe que "fils de prophète" fonctionne ici comme un terme technique.
  2. Il est utile d'éclairer les expressions qui sont thématiques ou qui semblent résumer une unité textuelle (une phrase, un verset ou un paragraphe p.ex.). Le mot חֶסֶד revient trois fois dans le livre de Ruth, ce qui représente peu de chose, mais ces occurrances sont dans des versets importants. Au 1.8 dans la transition entre l'introduction et l'histoire proprement dite, une ressemblance apparaît déjà entre le חֶסֶד humain et le חֶסֶד divin. Le 2.20 contient une bénédiction du חֶסֶד du SEIGNEUR dans le verset même où nous sommes informé que Booz est le proche parent ayant pour responsabilité de protéger גֹאֵל les veuves, Noémi et Ruth. Le 3.10 introduit la réponse, centrale au récit, de Booz à la demande de Ruth "Epouse ta servante". Cette fois ci, c'est Ruth qui est bénie à cause de son חֶסֶד. Le mot est clairement thématique. Si on jette un coup d'oeil aux lexiques, on voit que חֶסֶד possède toute une gamme de sens: bonté, charité, amour, piété, beauté, miséricorde, faveur, grâce, loyauté, fidélité, les actes du Dieu fidèle aux alliances. Ainsi l'étude du mot s'avère nécessaire, et commence déjà.
  3. Un mot ou une expression qui est répétée dans un péricope, ou dont on trouve des synonymes ou des antonymes est important. Parfois son sens est évident, mais souvent il vaut la peine d'en faire une étude plus soigneuse.
  4. Evidemment, un terme dont le sens n'est pas clair a besoin d'explication!

(Les noms propres de personnes et de lieux ont aussi besoin d'une étude et d'une explication, non pas pour des raisons linguistiques, mais pour des raisons historiques.)

L'étude d'un terme:

Le premier outil pour l'étude d'un terme est une concordance, car elle fournira une liste complète des occurrances. De cette liste prise globalement on peut distinguer le (des) contexte(s) sociologique(s) ou littéraire(s) d'un mot, ou d'un sens de ce mot. S'il est particulièrement fréquent chez les prophètes, ou dans les récits des patriarches, pour ne citer que deux lieux possibles, il est intéressant de le connaître surtout si le péricope d'étude vient d'un autre milieu.

Ex. Am 5.13: la concordance hébraïque nous enseigne que les autres mots sont assez fréquents et se trouvent partout dans l'A.T. pourtant le participe מַשְׂכִּיל se trouve surtout dans les livres des Proverbes, des Psaumes et Daniel (et quelques fois aussi dans les livres historiques). Semblablement, si l'on regarde dans un lexique/36, on découvre que l'expression est assez fréquente dans la littérature sapientiale avec le sens d'un homme prudent, mais n'apparaît pas dans les prophètes, sauf ici (et peut être selon certaines corrections au texte dans Jr 50.9). Suivant ces informations il serait raisonable donc de lire ce verset dans l'optique d'une parole de sage plutôt que dans celle d'un oracle prophétique.

Ensuite, toujours avec la concordance, on peut étudier le(s) sens du mot chez l'auteur en question. Ex.: חֶסֶד dans le livre de Ruth (cf. supra). Lequel (lesquels) des sens de חֶסֶד convient ici? Au 1.8 des sens comme bonté, amour, ou loyauté/fidélité, sont tous appropriés, mais au 3.10, il ne s'agit pas de bonté que Ruth a témoigné par son comportement, mais d'amour ou de loyauté. (Au troisième verset, 2.20, presque tous les sens possibles semblent convenir.) Nous avons pourtant reconnu ce mot comme thématique (voir supra), en ce cas, nous voyons que le thème du livre n'est pas tout simplement l'amour (bien qu'il puisse être considéré comme un récit d'amour), et que la bonté démontrée dans ce livre consiste en la loyauté familiale et divine. Donc au 3.10, il faut comprendre חֶסֶד par loyauté ou fidélité. Finalement, on peut se demander si ce sens convient aussi bien aux autres cas ou si une autre traduction y est préférable? Au 1.8, la TOB utilise le mot "fidélité" avec en note "bonté" ou "bienveillance", le FC a choisi le mot "bon". Au 2.20 la TOB a "fidélité", tandis que le FC donne "bonté". Le FC a senti pour ce verset comme pour le 1.8 le besoin d'une autre traduction (la TOB aussi au 1.8?), mais dans le contexte du livre je n'en vois pas le besoin. Le sens de "loyauté" convient pour ce mot dans les trois occurances du livre.

Résumons ce qu'on peut attendre de l'étude d'un mot faite avec l'aide d'une concordance, en citant la liste (donnée dans la section précédente) des questions auxquelles une telle étude nous permettra de répondre:

A part la concordance, le deuxième outil de travail pour l'étude des termes est un bon lexique. Il nous indique les acceptions et les usages du mot. L'usage est, comme nous l'avons souligné dans la section qui traitait de "la langue du texte", la meilleure indication sémantique. Un bon lexique peut aussi être utilisé à la place de la concordance pour l'étude d'un terme qui comprend plus d'un mot. Dans ce cas l'approche sera semblable à l'étude d'un mot avec la concordance. Voici une initiation aux informations cachées dans un tel lexique, BDB dans le cas d'espèce. Prenons l'exemple du mot בַּיִת "maison" (BDB p.108 110):

"בַּיִת2034n.m.Dt8,12 house (Ph..."

Après tous ces éléments introductifs vient le corps de l'article.

Dans le corps de l'article on trouve les sens possibles du mot, organisés en divisions: " 1. house," "2. place, of Jerusalem בֵית קִבְרוֹת אֲבֹתַי Ne 23 (|| עִיר v5), cf. also n.pr.cpd..." NB. pour les abréviations voir la liste qui suit la préface du BDB;

et en sous divisions: " 1. house, a. as dwelling, habitation Gn 192.3.4.11" ... "b. as shelter or abode of animals 1 S 67.10 cf. Ex 919; ..." Ici on n'indique pas seulement les sens précis et la syntaxe y associée, mais aussi on signale les expressions intéressantes avec leurs références bibliques ex.: sous "6" "על הבית אשׁר as title of governor of the palace Is 2215 363 cf. 1 K 46..." Ce sont ces dernières références qui servent de pseudo-concordance des expressions et des termes techniques.

La plus grande utilité des dictionnaires bibliques est de situer les noms propres, donc dans la perspective d'une étude historique, mais ils peuvent aussi nous aider à comprendre les termes techniques. Ce sont des sources secondaires, construits sur la base d'études faites avec une concordance, et ils sont ainsi assujettis aux faiblesses humaines de leurs auteurs, par conséquent on doit toujours les lire d'une manière critique./37
Dans les bibliothèques théologiques on trouvera aussi des "encyclopédies bibliques" ou des "vocabulaires bibliques". Ils contiennent un traitement plus fourni des termes techniques et des mots clés. L'encyclopédie biblique la plus étoffée en français est le (SDB) Supplément au dictionnaire de la Bible/38 qui est composé de quelque neuf grands tomes, il n'est pas encore complet et on publie chaque année d'autres fascicules. Parmi ses articles il y en a qui ont la longeur d'un livre et tous sont écrits par des spécialistes de grande renommée. Les études très scientifiques et détaillées du vocabulaire de l'A.T. dans le "Theological Dictionary of the O.T." (traduction de "Theologisches Wörterbuch zum Alten Testament") devraient être consultées par ceux qui ont besoin d'une étude bien fournie des données bibliographiques en plus du contenu de ses propres articles./39

A l'autre extrême on doit souligner que les éditions modernes de la Bible sont en mesure de fournir une grande quantité de renseignements pour une étude des termes. Dans les études qui n'ont pas un caractère scientifique poussé, il est même probable qu'un examen minutieux de la "petite TOB" avec le FC suffira à expliquer les termes de la plupart des textes bibliques.

Retour au: Table des matières


Ce manuel a été rédigé par le Dr Tim Bulkeley à l'intention des étudiants africains de théologie de l'Université protestante du Congo. Il est mis en forme électronique hypertexte par lui en 2003-4.

Toute partie de cet ouvrage peut être copiée par quelque moyen que ce soit, à la seule condition de retenir cette mention intacte sur chaque page.

Creative Commons License
This work is licensed under a Creative Commons License.