UNIVERSALISME

Les historiens des religions ont parfois classé les religions enreligions naturelles, nationales et universelles. Ces dernièresseraient le bouddhisme, le christianisme et l'islam. Mais, par sescôtés particularistes et nomistiques, l'islam est-il vraiment unereligion universelle? Et le bouddhisme, en dehors de l'idolâtrie quis'est développée sous son couvert, est-il vraiment une religion? Enréalité, il n'y a de religion universelle que là où le Dieu répond,par son unité et sa sainteté, aux besoins de toutes les époques et detoutes les consciences. D'où il appert que la seule religion qui aitles caractères de l'universalité est celle qui s'est exprimée dansl'universalisme des prophètes hébreux, prédicateurs du Dieu unique etsaint, et qui s'est incarnée dans la personne et l'oeuvre deJésus-Christ. En principe, l'universalisme religieux date de Moïse, puisque larévélation à Moïse introduisit dans l'humanité la notion de Jéhovah.Mais la religion du Dieu unique et saint, avant de porter ses fruits,doit d'abord plonger ses racines dans un peuple. Voilà la raison dela vocation d'Israël et du caractère essentiellement national de sonculte. Ce caractère, tout pédagogique, était destiné à s'effacer, àdisparaître. Hélas! l'orgueil de l'homme et son ambition l'attachentsi fort au nationalisme religieux que lorsqu'il pense avoir un Dieuplus puissant que les autres, il ne songe qu'à le confisquer pour luiet à en tirer parti au détriment de ses voisins. C'est ainsi que lesIsraélites, tout fiers d'avoir le Dieu unique pour Dieu national,servaient Jéhovah comme les autres nations servaient leurs Elohim(voir Yahvé) et s'imaginaient que Jéhovah ne s'occupait qu'à assurerleur prospérité, multiplier leurs victoires, assouvir leursvengeances. Les grands prophètes, universalistes fervents, s'opposèrentconstamment à ce particularisme stérile. Déjà Elie donnait à entendreque Jéhovah sacrifierait son peuple plutôt qu'un seul principe de sajustice (1Ro 19,21,2Ro 1). Israël a été élu pour donnerl'exemple aux autres nations, pour être leur lumière et pour tracerla route qui amènera tous les peuples à l'adoration du seul Dieu,Jéhovah, créateur de tous (Esa 19:18 et suivant, Mic 4:1 etsuivants, Esa 42:6 49:6 51:4, etc.). C'est qu'en réalité lesautres dieux ne sont pas seulement des dieux inférieurs, ce sont desfantômes, ils n'existent pas (De 4:28,Jer 10:1,16,Esa 41:21 44:946:5 et suivants). Malachie va même jusqu'à dire que les offrandesfaites par les païens à leurs Elohim vont en réalité à Jéhovah!(Mal 1:10 cf. A. Westphal, Vérités vitales, 1919, p. 49; Ad.Lods, Les prophètes d'Israël, 1935, pp. 313, 314 et 364). Lalargeur universaliste ne pouvait aller au delà. Voir Prophète, V et VI Mais quand les prophètes se sont tus, l'universalisme qu'ilsavaient prêché a disparu avec eux (voir pourtant Jonas). Le judaïsmesacerdotal ne voit plus dans son monothéisme strict qu'une occasionde se glorifier et de mépriser les autres peuples, qu'il traited'inférieurs, de vassaux, de créatures sans âme qui ne pourrontéchapper à la condamnation éternelle qu'en s'agrégeant au judaïsme(cf. Midrasch Chemoth rabba, 18; Midrasch Vayîqra, etPseudo-Esdras 4:56, etc.). Le préjugé particulariste de l'anciennealliance était fort, au point qu'il franchit la barrière de lanouvelle alliance, si bien que les premiers judéo-chrétiens, et mêmeles apôtres, crurent au début que les païens, pour avoir part ausalut, devaient se faire circoncire, c'est-à-dire se faire Juifs,pour pouvoir devenir disciples de Jésus-Christ (cf. Ac 10,Ac 11et Ac 15). Pour avoir brisé définitivement le moule particulariste, saintPaul est devenu, par excellence, l'interprète de la pensée de sonMaître, le missionnaire et le théologien du christianisme (voir Paul,l'apôtre). L'universalisme a: -pour fondement l'oeuvre de Jésus-Christ: Quand j'aurai été élevé de la terre, j'attirerai tous les hommesà moi (Jn 12:32); -pour règle, l'ordre du Christ: Allez et instruisez toutes les nations.. (Mt 28:19); -pour expression ecclésiastique, les déclarations de saint Paul: La circoncision n'est rien, l'incirconcision n'est rien; ce quiimporte..., c'est d'être une nouvelle créature...Il n'y a plus ici niJuif ni Grec, ni esclave ni libre.., vous êtes tous un enJésus-Christ (1Cor 7:19,Ga 6:15 3:28). ALEX W. Pour la valeur eschatologique du terme universalisme (théoried'après laquelle tous les hommes seront finalement sauvés), voirEschatologie, III, 6.