Le mot Trinité, du latin Trinilas, ne se rencontre pas dans laBible. Il apparaît pour la première fois, sous sa forme latine, chezTertullien (Adv. Prax., 2), et sous sa forme grecque chezThéophile d'Antioche, contemporain de Tertullien. Si le motn'apparaît pas, la doctrine de la Trinité a cependant ses racinesdans le N.T. Elle exprime la conception nouvelle de Dieu à laquellela pensée chrétienne se trouva nécessairement amenée pour donner uneplace à la personne divine de Jésus-Christ à côté de celle de Dieu lePère. C'est dans le symbole dit d'Athanase que la doctrine de laTrinité a été formulée de la manière la plus complète et la plusminutieuse. Les abus de la scolastique, les querelles stériles surles essences de la Trinité ne doivent pas nous faire oublier quecette doctrine répond à un besoin essentiel de la piété chrétienne:affirmer la nature divine du Christ, tout en sauvegardant la foi auDieu unique. 1. Avant Jésus: les personnages célestes à côté de Dieu. Les Pères de l'Eglise ont voulu trouver dans l'A.T, des textespréfigurant la doctrine de la Trinité. Cet effort devaitinévitablement rester stérile, car la Trinité répond à une exigencede pensée spécifiquement chrétienne. Ils ont allégué: la forme dupluriel Élohim, nom de Dieu dans l'A.T., l'apparition de troisanges à Abraham (Ge 18:2), le mot saint appliqué à Jéhovahet qui est trois fois répété (Esa 6:3); la triple bénédiction deNo 6:24, etc. Aucun de ces textes n'implique une distinction defonctions en Dieu; aucun ne pose le problème auquel répondra ladoctrine de la Trinité. On peut citer avec beaucoup plus de raisonles textes antérieurs à Jésus-Christ qui parlent du caractère divinet éternel du Messie, du Fils de l'homme, de la Sagesse, tous personnages célestes dont il fallait nécessairement juxtaposerla personnalité à celle du Dieu unique. Esa 9 5 donne auMessie des noms essentiellement divins. Mic 5:1 parle desorigines antiques et éternelles du futur dominateur d'Israël. Da7:14 attribue avant tout au Fils de l'homme une domination future,mais cette domination, une fois établie, ne passera point. Ce n'estpas une domination humaine. Le livre d'Hénoch fait aussi du Fils del'homme le juge du monde dont la bouche répand tous les secrets de laSagesse (53:3), et qui, assis sur le trône de sa gloire, juge leshommes et les sept anges (Hen 55:4). La préexistence du Fils del'homme est encore clairement enseignée dans Hénoch: «Il a été choisiet caché devant le Seigneur, avant la création du monde et pourl'éternité» (Hen 48:6). Quand Hénoch est enlevé au ciel, il va «versle Fils de l'homme et le Seigneur des esprits» (Hen 70:1) quisemblent exister côte à côte dans les cieux, comme dans Mr14:62. A côté de ces textes qui attribuent au Messie ou au Fils del'homme une personnalité divine et éternelle, il convient dementionner ceux qui parlent de la Sagesse. La Sagesse habitaitdans le ciel avant tous les siècles (Pr 8:22-30, Sir 24:4,Bar3:29, Hén. 84:3) et on la cherche en vain ailleurs (Job28:12-23). Elle est venue parmi les hommes (Pr 1:20 8:31,Sir 24:8,22). Mais les hommes ont refusé de la recevoir et elle estretournée au ciel parmi les anges (Hén. 42:2). Au temps messianique,elle reviendra et sera répandue sur la terre comme l'eau, si bien quetous ceux qui ont soif en seront désaltérés (Hén. 49:1 48:1).L'esprit de sagesse reposera sur le Messie (Hén. 49:3, cf. Esa11:2). Cette destinée de la Sagesse, repoussée par les hommes etcherchant sa demeure inutilement sur la terre, rappelle lesexpériences que Jean (Jn 1:11) attribuera au Logos. Elle nousavertit qu'avant Jésus-Christ il y avait toute une théologie desêtres célestes, mettant en particulière éminence au-dessus des angeset au-dessous de Dieu le Messie, le Fils de l'homme, la Sagesse. La pensée chrétienne puisera abondamment dans lesréservoirs d'images et de formules ainsi accumulées, lorsque à sontour elle devra formuler l'idée de la divinité du Christ. Mais ladiversité même des noms et des descriptions que nous trouvons dansles livres sapientiaux et les pseudépigraphes nous avertit qu'ils'agit encore de spéculations non fixées. Tout cela se cristalliseralorsque la pensée chrétienne se trouvera amenée à méditer sur lanature divine de Jésus et à formuler la théorie du Verbe. 2. Rapports entre Dieu et le Christ, d'après les évangiles. Les Synoptiques aperçoivent nettement le problème que posent lesrelations entre la personnalité de Dieu et la personnalité du Christ.Matthieu (Mt 11:27, cf. Lu 10:22) déclare que le problèmedépasse les capacités humaines et que seuls le Père et le Filspeuvent se comprendre et se départager l'un l'autre. Un effort declarification intellectuelle ne pouvait cependant être évité. Lesauditeurs de Jésus éprouvaient un vif embarras à distinguer leursdevoirs envers Dieu d'avec leurs devoirs envers le Christ. Lesévangiles sont témoins de l'étonnement de la foule à voir Jésusdécider seul, au nom de son autorité personnelle (Mr 1:22,Mt7:29), et opposer son: «Moi, je vous dis» à la révélation écrite deJéhovah. N'y avait-il pas contradiction entre l'affirmation de Jésusque le premier commandement était: «le Seigneur notre Dieu est unSeigneur unique» (Mr 12:29) et l'affirmation réitérée que leshommes seront jugés d'après l'attitude qu'ils auront eue envers lapersonne du seul Fils de l'homme? (Mt 16:25 25:35 etc.) D'unemême haleine, Jésus parle de la nécessité de faire la volonté du Père et de la punition qui atteindra ceux auxquels il dira: «Jene vous ai jamais connus, retirez-vous de moi» (Mt 7:21-23).Alors que tout l'A.T, répète que Jéhovah rendra à chacun selon sesoeuvres (Jer 51:56), dans les Synoptiques c'est le Fils del'homme qui rendra à chacun selon ses oeuvres (Mt 16:27). Dansles nombreux passages où Jésus parle de la nécessité de sarésurrection (Mt 16:21 17:9 17:23 et parallèle), pas une fois laformule employée ne désigne expressément Dieu comme l'auteur de cetterésurrection, et, dans la déclaration sur le temple rebâti en troisjours, Jésus affirme: Je le rebâtirai. Entendait-il doncs'attribuer à lui seul l'initiative et le mérite de sa proprerésurrection? (Mt 26:61, cf. Mr 14:58,Jn 2:19). Ce mélangeinextricable des initiatives et des responsabilités entre le Père etle Fils, dont les Synoptiques rendent témoignage, apparaît pluscomplètement encore dans les textes johanniques. Jésus dit:«J'attirerai» (Jn 12:32), mais il dit aussi: «Le Pèreseul attire» (Jn 6:44). L'action du Père et du Fils sesuperposent exactement et sont indivisibles (Jn 5:17). Croire enDieu et croire en Christ sont un seul et même acte (Jn 14:1).Les relations entre le Père et le Fils symbolisent et résument cellesentre Jésus et les hommes (Jn 15:9 17:21 20:31). L'Esprit, lePère et le Fils mettent en commun entre eux leurs richesses et leursfonctions dans un même élan de révélation (Jn 16:13-15). 3. Les formules trinitaires dans le N.T. Il était donc inévitable que la pensée chrétienne en vînt à chercherune formule fixant les droits et les fonctions réciproques de Dieu etdu Christ. C'était déjà une réponse que de parler du Père et du Filscomme Jésus l'avait fait avec insistance. Car le l'ère est évidemmentplus grand que le Fils (Jn 14:28,31, cf. 1Co 15:27 etsuivant), et un lien de subordination les unit. C'est du Père queJésus reçoit tout (Jn 5:19 10:29). Le Père connaît des heuresque le Fils ne connaît pas (Mr 13:32). Cette subordinationnécessaire du Fils au Père était déjà un élément d'ordre et declarté. Mais un problème nouveau allait se poser avec la disparitiondu Jésus de la chair. La personnalité de Jésus allait-elle continuerà être le centre unique de toute l'attention spirituelle? Est-ceJésus le Seigneur ressuscité qui allait toujours, dans des visions,parler et ordonner aux vivants, comme il le fit pour Saul deTarse (Ac 9:5), pour Ananias (Ac 9:10), pour Paul? (Ac22:18) Est-ce Jésus le Seigneur, et non plus Dieu, qui allaitdésormais «recevoir l'esprit» des martyrs mis à mort, selon laformule employée par Etienne? (Ac 7:59) Ne convenait-il pas demettre en évidence la puissance permanente de l' Esprit, danslaquelle l'action de Dieu et celle du Christ seraient mêlées d'unemanière indiscernable et continue? La notion de l'Esprit saint--quefournissait déjà l'A.T.--n'était-elle pas nécessaire pour éliminerdans l'âme du croyant tout conflit entre l'invocation à Dieu etl'invocation à Jésus? L'expérience du Dieu intérieur contemporainétait aussi évidente, aussi pressante que le souvenir du SeigneurJésus des évangiles! Déjà, dans le livre des Actes, à côté descirconstances où Jésus parle en personne, il y a celles où l'onentend seulement une voix céleste (Ac 11:7,9), un ange duSeigneur (Ac 8:26), l'esprit de Jésus (Ac 16:7), et enfin,le plus souvent, l'Esprit tout court (Ac 8:29 10:19 11:12,etc.). St Paul insistera sur ce rôle irremplaçable de l'Esprit quimeut les volontés (1Co 12:3), distribue les charismes (verset11), donne à chacun l'assurance de son salut, l'aide dans sesprières (Ro 8:16-26). Les trois modes sous lesquels Dieu semanifeste étaient désormais dénombrés, et nous pouvons aborder, avecchance de les comprendre, les textes trinitaires essentiels de saintPaul. Le premier est 1Co 12:4,6, dans lequel est affirmée l'unitédivine, en face de la diversité des apparences humaines. L'apôtrementionne tour à tour l'Esprit, le Seigneur, Dieu. Dans le secondtexte (2Co 13:13), l'ordre est différent: Jésus-Christ, Dieu,l'Esprit saint. Ce texte de 2Co 13:13 est essentiel. Il contientune affirmation, issue de l'expérience religieuse intime de l'apôtre,et est étranger à toute préoccupation philosophique. Il nous apportecependant une formule nettement trinitaire. C'est la grâce duSeigneur Jésus-Christ qui a ouvert à Paul les richesses infinies del'amour de Dieu et l'a introduit dans la communion inexpri-mablementprécieuse du Saint-Esprit. C'est de la connaissance de Christ quepart le chrétien pour s'élever à l'amour de Dieu, et c'est le Christqui ouvre la porte de l'âme à l'invasion de l'Esprit. Que l'oncompare la salutation paulinienne à la formule baptismale de Mt28:19, Père, Fils et Saint-Esprit, et l'on ne peut manquerd'être frappé des différences. Nous avons déjà relevé que l'ordre destermes n'est pas le même et que Paul donne à Jésus la première placechronologiquement et psychologiquement. Les noms employés diffèrentégalement: au lieu de Père, nous avons Dieu; au lieu de Fils, nousavons le Seigneur Jésus-Christ. Avec Paul il ne s'agit pas d'unespéculation sur la nature de Dieu, sur la subordination relative despersonnes divines, mais d'une affirmation de la piété sur ce queJésus apporte au pécheur. La Trinité n'est pas envisagée d'un pointde vue statique, froidement documentaire, mais définie comme le Dieuvivant, dans les mystères et l'intimité duquel on pénètre ens'assimilant une triple révélation: grâce de Jésus-Christ, amour deDieu, communion de l'Esprit saint. La vision de Dieu que nous donnePaul ne dépasse donc pas celle que donne normalement à tout chrétienl'expérience de son salut. On a remarqué que l'épithète de saintdonnée à l'Esprit est essentiellement humaine et pragmatique. Ellen'a de sens que par rapport à un monde souillé. Si l'on ne sepréoccupe, en effet, que des personnes à distinguer dans la divinité,pourquoi dire spécialement de l'une d'entre elles qu'elle est sainte?L'Esprit est surtout sanctifiant, c'est lui qui est le point decontact vécu entre le divin et les pécheurs, lui qui habite en nouset rend la vie à nos corps mortels (Ro 8:9,11). Mais ce qui était chez Paul expression spontanée de la foi varecevoir une forme systématique invariable. Pas une fois, Paul nenomme Dieu le premier. Dans 1Co 12, il nomme l'Esprit lepremier; dans 2Co 13, il nomme le Christ le premier. La logiquevoulait cependant que le Père, le plus grand, fût nommé le premier,puis le Fils, puis le Saint-Esprit. Nous trouvons cet ordre dans laformule baptismale de Mt 28:19. Il y a lieu de remarquer que lebaptême présent doit se faire au nom (sing.) et non aux noms du Père,du Fils et du Saint-Esprit. L'unité indivisible de Dieu et l'égaledignité de trois personnes divines sont conjointement affirmées. Ils'agit bien d'une doctrine réfléchie et arrêtée. Aussi la critique,frappée d'autre part du caractère universaliste de la prédication del'Évangile ainsi ordonnée, incline à placer le texte de Mt 28:19à une époque relativement tardive, à la fin du I er siècle. D'autrepart, en 1883, la découverte de la Didaché ou Doctrine des apôtres,antique document liturgique que l'on place entre 100 et 150, estvenue confirmer que la formule baptismale «au nom du Père, du Fils etdu Saint-Esprit» correspondait à l'usage courant, dès!e début du II esiècle. On lit en effet, au chap. 7 de la Didachè: «En ce quiconcerne le baptême, baptisez ainsi. Après avoir enseigné tout ce quiprécède, baptisez au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit [parimmersion] dans l'eau vive. Si tu n'as pas d'eau vive, baptise dansune autre eau; si tu ne peux le faire dans l'eau froide, baptise dansl'eau chaude; si tu n'as ni de l'une ni de l'autre, verse sur la têtetrois fois de l'eau au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit.»Justin (Apol., 61:3) donne également un peu plus tard une formulebaptismale légèrement différente: «Au nom de Dieu le Père et leMaître de toutes choses, de notre Sauveur Jésus-Christ et duSaint-Esprit.» Enfin Irénée, dans un traité récemment retrouvé(Démonstr. de la préd. apostol., 3 et 7), nous donne égalementdes formules baptismales trinitaires et les commente. 4. Importance passée et portée actuelle de la doctrine de la Trinité. L'idée de la Trinité, en tant que doctrine théologique, allaits'imposer de plus en plus à l'attention de la pensée chrétienne. Elleallait même devenir le réduit théologique essentiel de son système dedéfense doctrinal. Elle permettait, en effet, de situer la positionoriginale du christianisme à égale distance du judaïsme et dupaganisme polythéiste. La formule trinitaire affirmait l'unité deDieu en présence du polythéisme; elle se défendait d'être untrithéisme, car les personnes divines constituent un seul et mêmeDieu, au nom duquel le chrétien est baptisé. Mais vis-à-vis dujudaïsme au monothéisme intransigeant, la doctrine de la Trinitépermettait de faire place à l'adoration pour le Christ, le Seigneur,et à la réalité permanente et continue des effusions de l'Esprit.«C'est du judaïsme, disait Tertullien, de confesser un seul Dieu sansvouloir distinguer à côté du Père, le Fils, et après le Fils, leSaint-Esprit. Car quelle différence y aura-t-il entre les chrétienset les Juifs, sinon celle-là?» (Adv. Prax., 31). L'originalité dela pensée chrétienne a paru se concentrer ainsi à une certaine époquedans la doctrine de la Trinité, et celle-ci est devenue pendant delongs siècles le champ de bataille principal des débats théologiques. Il faut reconnaître qu'aujourd'hui la doctrine de la Trinité nenous apparaît plus comme le centre nécessaire de la penséechrétienne. Les objections à la conception chrétienne de Dieu ne sontplus les mêmes. Le théologien n'a plus à combattre le judaïsme à sadroite et le polythéisme à sa gauche. Nos contemporains ont constatéque la doctrine de la Trinité n'apporte aucune lumière sur lesproblèmes de la Providence, de l'omnipotence et de l'omniscience deDieu, qui sont au premier rang des préoccupations religieusesmodernes. De plus, notre psychologie a changé. La valeur explicativedu dogme de la Trinité nous paraît assez maigre. Nous ne pensons plusconnaître une personnalité lorsque nous possédons une définition deson essence. Ce n'est plus le substratum métaphysique d'une personnequi nous intéresse, mais les manifestations concrètes de cettepersonne. Ce sont les gestes historiques d'un individu quiconstituent sa personnalité. Nous croyons mieux comprendre Jésus,même le caractère divin de sa personnalité, en le replaçant dans soncadre historique qu'en apportant des spéculations bien liées sur sonrôle dans la création du monde. Déterminer si le Saint-Esprit procèdedu Père et du Fils simultanément, ou du Père seul, ne nous passionneplus. La pensée catholique, fidèle à la théorie des essences et dessubstances, attache en général plus de prix que la pensée protestanteà la doctrine de la Trinité. Elle y voit une révélation miraculeuse,une «confidence divine», un accès ouvert vers «l'intimité du Père».C'est ainsi que M. Lebreton, prof, à l'Institut catholique de Paris,écrit dans sa remarquable étude Le Dieu Vivant, la Révélation de laSainte Trinité dans le N.T. (Paris 1911), p. 20): «On comprendpourquoi le mystère de la Trinité est si cher à tout chrétien: c'estla grande révélation de Dieu. Quiconque n'a pas reçu cette confidencedivine n'est qu'un étranger ou, tout au plus, un serviteur. C'est lacondition des païens ou des Juifs, ce n'est plus celle des chrétiens:Je ne vous appelle plus serviteurs...mais amis, parce que tout ce quej'ai entendu de mon Père je vous l'ai fait connaître!). La penséeprotestante, elle, se demande volontiers si la doctrine de la Trinitéest bien aujourd'hui la solution la plus lucide et la plusassimilable pour résoudre le problème des prétentions divines duChrist. Il ne lui semble pas que cette doctrine soit au coeur del'enseignement des évangiles ou de saint Paul. La formule trinitaires'est imposée très vite comme une interprétation intellectuelle desaffirmations de la piété chrétienne, mais elle n'a pas une basescripturaire assez large pour être mise au tout premier rang desvérités chrétiennes essentielles. Voir Incarnation. V M.