(Du latin tradete =remettre, livrer, qui a donné traditio =action de transmettre, et traditor =traître.) Par tradition ondoit entendre: 1° Transmission de faits historiques, de doctrinesreligieuses, de légendes, d'âge en âge par voie orale et sans preuveauthentique écrite (Littré). 2° Transmission, siècle après siècle, d'uneinterprétation aussi scrupuleuse que possible de textes rapportantdes faits ou des doctrines; ex.: tradition scripturaire (=serapportant à la sainte Écriture), christianisme traditionnel, etc. La tradition joue un rôle capital dans toutes les branches del'histoire. On l'a appelée «la mémoire de l'humanité»; Lacordaire ladéfinit «le lien du présent avec le passé». Le mérite de toutetradition est en effet d'établir entre les générations une continuitéintellectuelle et morale. Son danger est de défigurer au cours dessiècles la chose qu'elle avait mission de transmettre, et par là dela trahir. Ce danger est particulièrement à redouter dans le domainedes religions.--Toute religion part d'une inspiration ou d'unerévélation; elle jaillit comme une source vive ouverte à l'espoirhumain. Pour que l'eau de la source ne se perde pas, il lui faut unlit qui la conduise vers les terres qu'elle doit féconder. Pour quel'inspiration ou la révélation première qui a instauré la religionpuisse atteindre les générations qu'elle a pour mission d'édifier, illui faut le canal de la tradition. Mais ce canal est creusé par deshommes. Les hommes clairvoyants et désintéressés sont rares.L'autorité que leur confère la charge de transmettre à leurssemblables la religion canalisée les incite à approprier, àinterpréter, à compléter, à codifier la religion, à emprisonner soncours entre les parapets étroits d'un dogmatisme théologique ou d'unlégalisme disciplinaire. Ainsi se sont formés le prêtre et ledocteur, devenus peu à peu les dispensateurs de la vérité, lesmaîtres des grâces, la personnification vivante de la tradition. Toutcela ne s'est point fait sans que fût altérée peu à peu l'inspirationpremière de la religion, ni sans que fût dénaturé par l'accommodationà une politique humaine le sens des textes primitifs. On pourraitciter ici l'exemple de bien des religions orientales d'originespiritualiste et que la tradition déformatrice a ramenées aupaganisme. Mais le danger de la tradition, si on ne la contrôle sanscesse par sa source, se montre surtout à l'occasion de la religionbiblique, laquelle a été fondée par des révélations successives,démontrée dans des personnes et recueillie dans des textes. La Thora de l'A.T., loi de Moïse, continuée par la prédicationdes prophètes, était proprement une révélation donnée par Dieu sousforme de commandements. Les premières occasions dans lesquelles nousvoyons l'A.T, faire appel à la tradition sont pour renvoyer auxcommandements de Moïse, et De 6:6 et suivants nous montre bienque la tradition biblique dans ses origines a eu pour missiond'inculquer aux Israélites les textes où était inscrite la volontérévélée de Jéhovah (cf. De 11:18 17:18 31:9 ss) Très vite unclergé se forma pour garder cette loi, la protéger, l'expliquer aupeuple et constituer un culte autour d'elle; ainsi se formèrent latradition hébraïque et la tradition juive; loi orale, loi humaine quise détache peu à peu de l'esprit de la loi écrite, qui la relègue ausecond plan et qui, souvent, la contredit. C'est contre cettetradition déformante qu'Ésaïe s'élevait déjà au VIII° siècle av.J.-C.: «Ce peuple m'honore des lèvres, mais son coeur est éloigné demoi. La crainte qu'il a de moi n'est qu'un précepte de traditionhumaine» (Esa 29:13, Sg.). Les mille prescriptions parlesquelles la tradition avait estompé, voire esquivé, les exigencesmorales et spirituelles de la loi, Jérémie les combat à son tour: «Nevous livrez pas à des espérances trompeuses, en disant: C'est ici letemple de l'Éternel, le temple de l'Éternel, le temple de l'Éternel!En vain s'est mise à l'oeuvre la plume mensongère des scribes...»(Jer 7 et Jer 8). La tradition, à l'époque juive, avait si bien dénaturé le sens dela révélation hébraïque que, lorsque Jésus parut, ses compatriotesles plus attachés à la tradition furent ses principaux détracteurs.Les pharisiens élevaient si haut la tradition qu'elle dominait poureux la loi et les prophètes. C'est parce que Jésus n'observait pastout le détail de cette tradition (ablutions, sabbat, etc.) que lesautorités de la religion juive se portèrent contre lui. Il lesdénonce: «Hypocrites, pourquoi transgressez-vous le commandement deDieu à cause de votre tradition? Vous avez annulé la loi de Dieu enfaveur de votre tradition. Ésaïe a bien prophétisé de vous: C'est envain qu'ils me rendent un culte, enseignant des doctrines qui ne sontque des commandements d'hommes» (Mt 15:3 et suivants, cf.Mr 7:8 et suivants). Etienne fut arrêté et finalement lapidéparce qu'il était accusé d'avoir dit que Jésus détruirait le templeet changerait les traditions (Ac 6:14; il s'agit ici destraditions établies par les docteurs de la loi en vertu de l'autoritéqu'ils s'arrogeaient comme continuateurs de Moïse; cf. Mt 23:2).Paul est persécuté et livré au pouvoir romain parce que, après avoirété fervent observateur de la tradition, il l'avait abandonnée etmême condamnée pour se conformer à l'esprit de Jésus. (cf. Php3:4 et suivants) Il recommande aux Colossiens de s'affranchirde la séduction des traditions humaines d'où qu'elles viennent, pourpouvoir rester fidèles aux enseignements du Christ (Col 2:8).Pierre ne tient pas un autre langage et appelle la tradition oùs'enfermait la dévotion juive «la vaine manière de vivre que vospères vous avaient transmise» (1Pi 1:18). Par contre les sectes judéo-chrétiennes, tels les Ébionites,avaient gardé le principe des pharisiens et mettaient la traditionorale au-dessus de la tradition écrite; par eux, cette doctrinepénétra dans une partie de l'Église de Jésus-Christ. L'ancienne alliance avait à son origine une personnalité dont lerelief saillit, bien qu'elle soit lointaine, et un texte, la Loi deDieu, constitution du jéhovisme. La nouvelle alliance a, à sonorigine, une personnalité aussi, combien attachante et vivante, maisqui n'a point laissé d'écrits. Elle n'a pas demandé non plus à sesdisciples d'écrire, elle leur a confié un témoignage, et c'est par cetémoignage que les Églises, avant tout écrit, ont été fondées. Jésus ne donne jamais à son enseignement le nom de «tradition».Jésus est un recommencement. Il annonce la parole de Dieu (Jn12:49 17:8) et s'exprime «avec autorité» (Mt 7:29,Lu 4:27).Paul, qui a été transformé par l'intervention de Jésus et qui Leprêche, appelle «traditions» son Évangile, c'est-à-dire l'ensemble dutémoignage chrétien qu'il a transmis aux Thessaloniciens: «Retenezles traditions que nous vous avons données, soit par notre parole,soit dans notre lettre» (2Th 2:15). En disant «notre parole etnotre lettre», il circonscrit: «les traditions», et les ramène, pource qui le concerne, aux limites de son action personnelle d'apôtre.Jamais il n'eût pensé qu'on oserait un jour donner le nom detradition apostolique à toute innovation dans l'Église (cf. 2Th3:6,1Co 11:2; voir aussi les formules: «modèle des sainesparoles» (2Ti 1:13) et «type de doctrine» (Ro 6:17), quirenvoient non pas à un enseignement spécial à Paul, mais à l'ensembledu témoignage chrétien primitif dont les épîtres, les Actes et lesévangiles devaient plus tard fixer le texte). Quand les premiers témoins mirent par écrit l'impression que leurMaître leur avait faite, ce fut encore un témoignage qu'ilsrendirent, plutôt qu'une histoire qu'ils écrivirent. Ils n'avaientaucune intention de travailler pour la postérité. Encore moins decomposer une dogmatique ou une morale. Ce qui faisait la valeur deleurs livres, c'est qu'ils y racontaient ce qu'ils avaient entendu etvu (Ac 10:41,1Jn 1:1). Mais ils ne pouvaient tout dire (Jn20:30 21:25). L'Église se persuada que le Maître avait laissé à sesapôtres bien des instructions qui n'étaient pas contenues dans leN.T.; quelques-unes de ces instructions s'étaient transmises debouche en bouche...Ainsi naquit ce qu'on a appelé «le postulat de latradition apostolique». Cette tradition en réalité était peu dechose, comme on le voit d'après les Aerapha (voir ce mot) etd'après ce qu'Eusèbe de Césarée en rapporte. Et, d'autre part, lesfantaisies que lui attribuent dès le II e siècle des hommes tels quePapias ou Irénée montrent combien il était imprudent de se laisseraller à chercher ailleurs que dans le texte du témoignage écrit, desrenseignements sur les institutions primitives du christianisme,voire sur les intentions, les actes et les paroles de Jésus. --Vinrent alors les grandes hérésies. L'Église, pour sa défense,s'engagea dans la voie de l'égarement. Comme les gnostiques par leursinterprétations allégoriques du N.T. trouvaient réponse à tout sur leterrain scripturaire, les docteurs de l'Église invoquèrent contre euxla tradition orale, c'est-à-dire l'enseignement transmis par lapremière génération chrétienne, enseignement qui était censé fixer,d'autorité souveraine, le sens du témoignage écrit. Ainsi naquirent,pour les besoins de l'apologétique, la prédominance de!a traditionsur le texte dont elle fixait le sens, et le prestige des sedesapostolicoe, Églises mères, dont les évêques en se succédant setransmettaient l'orthodoxie chrétienne. Ainsi se constitua la règlede foi qui aboutit au texte actuel du Symbole des apôtres (cf. A.Westphal, Le Symbole, 1928, pp. 13-44). Comme on le voit, lapremière tradition fut avant tout une tradition scripturaire, c'est-à-dire une tradition dont le but était de préciser et demaintenir le sens primitif du témoignage évangélique contenu dans leN.T. Mais l'Église ne devait pas s'en tenir là. Quand, après savictoire temporelle par le règne de Constantin, elle s'organisa surle type de l'empire des Césars, l'Église céda à la tentation dechercher dans la tradition orale une justification de toutes lesinstitutions qu'elle se donnait et dont on ne trouve rien dans lesÉcritures. Ses docteurs, par la suite, s'efforcèrent de justifier parl'Écriture même la liberté du procédé. Ils élaborèrent la doctrined'après laquelle le Seigneur avait confié à ses apôtres desenseignements (Mt 28:19 et suivants) que l'Écriture n'a pasconservés, mais qui constituent le «dépôt» dont parle Paul (1Ti6:20,2Ti 1:4) et que son disciple Timothée doit «confier à deshommes sûrs, capables d'en instruire les autres» (2Ti 2:2). Ceshommes sûrs, ce sont les évêques, les autorités sacerdotales. Quantaux laïques, ils représentent «les autres», c'est-à-dire ceuxqui ont l'obligation de recevoir docilement cet enseignementtraditionnel. Le premier critère de la tradition orale fut l' antiquité Mais bientôt, le fil reliant le présent au passé devenant trop mince,on substitua à l'antiquité la coutume et l'accord unanime desévêques. Double fiction, qui apparaît déjà dans le fait que Cyprien,le très épiscopal évêque de Carthage (Mort en 258), lorsqu'il ne peuts'entendre avec Etienne, l'évêque de Rome, en appelle sans hésiter dela tradition à l'Écriture: consuetudo sine veritate vetustaserroris est (Ep. 71). On ne saurait mieux dire.F. Chaponnière (Encycl. art. Tradition) cite cette belledéclaration de Tertullien, reproduite par l'évêque Libosus: In evançelio Dominus: Ego sum, inquit, veritas. Non dixit: Ego sum consuetudo . (De virg. vel., 1).Mais ces réactions occasionnelles ne pouvaient arrêter l'Église surla pente où l'entraînaient l'ambition du sacerdoce et les besoins del'apologétique. Dans la controverse arienne, Athanase (Mort en 373)veut que le texte de la Bible soit interprété d'après la traditiondes Pères. Parole risquée, car la tradition des Pères était multiple,souvent dangereuse à cause de son allégorisme. On arrivait ainsi àsubstituer en réalité les opinions ou les décrets de l'Église àl'autorité de la tradition primitive qui reposait d'aplomb sur letémoignage scripturaire. L'Église latine déclara avec Augustin (Morten 430) que la croyance à l'Écriture repose sur l'éducation donnéepar l'Église (Contra ép. un-dam., chap. 5), ce qui était mettrenon seulement les fidèles mais la Bible elle-même dans la dépendancede l'autorité sacerdotale.Vincent de Lérins (Mort en 450) crut retenir la traditionecclésiastique dans de sages limites en définissant: tradition=auod ubique, quod semper, quod ab omnibus cre-dilutn est(Commonit.,chap. 3). Mais en face de la diversité des opinions,comme en face des innovations incessantes, cette position étaitintenable. Il fallut en venir à décider que les concilesoecuméniques, collèges inspirés qui présidaient aux destinées del'Église, étaient les organes de la tradition. C'était le triomphe,en matière de tradition, du système épiscopal Justinien et Grégoire le Grand mirent les quatre premiers concilessur le même pied que la Bible. Le septième concile lança l'anathème àquiconque rejetterait la tradition de l'Église, «qu'elle soit oraleou écrite».Une fois que la parole sacerdotale était investie de la même autoritéque l'Écriture, il était à prévoir qu'elle rejetterait bientôtcelle-ci au second plan. On y recourut de moins en moins, et ladoctrine s'établit que: «La tradition est le canal le plus ordinairepar lequel tout l'enseignement de la foi arrive aux hommes. LesÉcritures du N.T. sont d'un emploi postérieur, elles ne contiennentpas tout le dépôt de la foi, et leur usage n'est pas essentiel,puisque, pendant bien des années, il y a eu des disciples deJésus-Christ, sans qu'aucune partie de son enseignement eût encoreété mise par écrit» (H. Lesêtre, Dict. Vigouroux art. Tradition). Ecclesia (1927) s'exprime encore plus hardiment: «Latradition est plus nécessaire que l'Écriture à la foi chrétienne.L'Écriture en effet ne peut se passer de la tradition...c'est par latradition que nous avons des Écritures une interprétationinfaillible...La tradition, par contre, pourrait se passer desÉcritures...Concluons que la tradition, pour le catholique, dépassede toute part l'Écriture» (p. 106). On peut deviner ce qu'eût penséde cette formule le brillant Abélard (Mort en 1142) qui, dans son Sic et Non, montre si bien les contradictions de la tradition etson infidélité par rapport à l'Écriture. Elles eussent étonné siècleThomas lui-même (Mort en 1274), lequel hasarde dans sa Somme (I,1, 8)que la tradition n'a qu'une autorité «probable».Cette remarque prudente n'empêcha pas l'Église qui se réclame de luide mettre la tradition au-dessus de l'Écriture, et le concile deTrente de prononcer l'anathème contre «ceux qui refuseraient decroire que la tradition a été dictée par le Christ même ou par leSaint-Esprit, aussi bien que l'Écriture Sainte, et qu'elle a étéconservée sans altération par une succession continue dans l'Églisecatholique».--Mais ce que l'Église romaine enseigne sur la Vierge Marie, sur lesSaints, sur les Papes, sur les Reliques, sur les Indulgences, sur ladistinction entre les Prêtres et les Laïques, est-il compatible avecles enseignements de l'Écriture? Il fallait, pour que la traditionecclésiastique fût pleinement justifiée, en venir à retirer la Bibleaux fidèles--la lecture de la Bible fut condamnée par le concile deToulouse en 1229, par l'Index du pape Clément VIII en 1592, par labulle Unigenitus de Clément XI en 1713 (P. Calvino)--, ou dumoins qu'elle ne fût permise qu'avec toutes sortes de précautions,afin qu'en matière de foi et de morale «personne, se confiant en sonpropre jugement, n'ait l'audace de tordre l'Écriture Sainte, selonson sens particulier, ni de lui donner des interprétations contrairesà celles que lui donne et lui a données la Sainte Mère Église, à quiil appartient de juger du véritable sens et de la véritableinterprétation des Saintes Écritures» (concile de Trente, 4 esession). Pour que cette déclaration comminatoire pût avoir toute sonefficacité, Rome avait créé l'Inquisition en 1542 et l'Index en 1543.Et voilà le mot de Brunetière justifié: «Si vous voulez savoir ce queje crois, allez le demander à Rome.» La tradition romaine a supplantéle témoignage de l'Écriture. Comme les prophètes avaient accusé la tradition sacerdotaleisraélite d'annuler la parole de Dieu dans l'Ancien Testament, lesréformateurs accusèrent la tradition sacerdotale chrétienne d'annulerla parole de Dieu dans le Nouveau. Ils démontrèrent l'inanité despreuves patristiques invoquées par les catholiques et mirent enlumière les faux que la tradition romaine renfermait dans sondossier; ce qui incita les Jésuites à faire faire un pas de plus àl'autorité absolue de la tradition, en établissant qu'elle n'avaitnul besoin, pour se faire obéir, d'exciper de titres à l'antiquité.«Le corps mystique de l'épiscopat» jouissant d'une inspirationcontinue, c'était assez que le magistère de l'Église eût émis undécret pour que les bulles du Pape fissent autorité à l'égal dessymboles et des canons. Le catholicisme gallican se regimba, il futécrasé, et l'Église romaine mit le faîte à son édifice épiscopal eninstaurant au concile du Vatican (1870) le magistère infaillible duPontife romain. Ainsi, comme en fait de tradition le système scripturaire avait été écarté au profit du système épiscopal (concile deConstance), le système épis-copal est à son tour remplacé par lesystème papal. Quand le Pape «définit», il incarne la parole deDieu; il prononce sans appel. Les mots «sans appel» sont tropfaibles. Malgré tout, un jugement dit sans appel peut être matière àrévision. La «définition» du Saint Père ne le peut absolument pas, nidans le temps, ni dans l'éternité. Elle est vraie, elle seraéternellement vraie (Ecclesia, p. 99). Dès lors on ne peuts'étonner de la parole bien connue de Pie IX: «La tradition c'estmoi.»--«Dans son apothéose de l'institution hiérarchique...l'Églisepossède l'absoluité des choses divines. Elle n'est pas seulement lagarante de la présence perpétuée du Christ, elle est, selon Guardini,le Christ lui-même, le Christ devenu communion» (A. Will, Rev.Strasb., 1932, p. 472), «un Christ dont la divinité n'est plushumiliée et effacée, mais dont la souveraineté est directementsaisissable» (cf. K. Barth, Foi et Vie, 1932, p. 114). Peut-onencore parler de tradition? Nous n'avons plus devant nous quel'Église et, dominant l'Église, «la claire vue d'un grand Pape, cettegrâce de spéciale lumière où baigne habituellement la pensée del'Église pour l'intelligence du saint dépôt»...«Un concile n'ajoutepas à l'autorité divine du pape» (Ecclesia, pp. 97, 100). Pour justifier, au moins en quelque mesure, l'usage que lecatholicisme fait de la tradition, il faudrait démontrer que lesdonnées bibliques sont impuissantes à elles seules à amener une âmeau salut par Jésus-Christ et à servir de fondement à une sociétéreligieuse conforme aux préceptes de l'Évangile. Or, les expériencesde l'histoire à travers les siècles s'inscrivent en faux contre unepareille assertion. Nous avons vu comment la Bible a été supplantée par la traditionromaine, indûment appelée apostolique. Il nous reste à montrercomment une autre tradition s'est attaquée aux données de larévélation biblique et s'est appliquée à la dissoudre. L'Église romaine, dans le concile de Trente (1545-1563), avaitégalé son exécution à son intention. Mais en même temps qu'elle avaitintronisé sa tradition, elle avait déshonoré son génie. Ce n'est pasen vain que pour bâtir son système aux proportions gigantesques, maisau fondement fragile, elle avait abusé de la dialectique et, suivantle mot de Vigny, «terrassé la raison sous le raisonnement». Le moulinde la logique avait si bien tourné, qu'il croyait avoir écrasé sousla meule du dogme toute velléité de pensée libre. Mais l'esprithumain ne perd jamais ses droits. Et voici que déjà il avait rebondiavec l'Humanisme et la Réforme: la Réforme, qui revenait à latradition scripturaire, et la Renaissance qui, avant découvertl'hellénisme et tout éprise de la philosophie antique, s'établissaitdans la tradition naturelle, c'est-à-dire dans une conceptionhumaniste qui libérait l'âme humaine de la scolastique d'Église et dela révélation biblique pour la ramener à la nature, estimée bonne etcapable de donner à la vie terrestre sa loi. Érasme tenta deconcilier l'humanisme avec le christianisme; la ligne rationnellequ'il traça fut suivie par Grotius, Castellion et d'autres. Par contre, les réformateurs, Luther, Zwingle et Calvin, quifurent à leur manière des gloires de l'humanisme, rejetèrent latradition naturelle au nom de la tradition scripturaire, laquelle,bien loin de tenir la nature pour bonne, la déclare déchue etl'appelle, par la révélation chrétienne, à une totale régénération.Dans leur ligne ont marché, entre autres et par des voies diverses,Pascal et Vinet; Pascal, qui dit: «Ce qui est nature aux animaux nousl'appelons misère en l'homme, par où nous reconnaissons que sa natureétant aujourd'hui pareille à celle des animaux, il est déchu d'unemeilleure nature qui lui était propre autrefois»; Vinet, qui dit:«Cet être est-il bon? je dis qu'il est mauvais et qu'au lieu de leramener à la nature il faut l'en écarter, il faut l'élever au-dessusde lui-même. C'est pour cela que l'Évangile parle de régénération, denouvelle naissance.» La tradition naturelle de la Renaissance, enmême temps qu'elle avait éveillé chez les uns la soif de revenir aunaturalisme antique, à une vie s'épanouissant dans l'orgueil de saforce, sans contrainte morale ni religieuse, avait révélé à d'autresqu'il existait une vie spirituelle en dehors du christianisme. Et lascience s'émancipa. La grande révolution de la Renaissance fut qu'elle apprit legrec, l'hébreu, le syriaque, qu'elle étudia les Saintes Écrituresaussi hardiment qu'elle étudiait Platon, et que sa philolog'ie sesignalait à l'indignation de la Sorbonne scolastique par sestendances hérétiques et sa hardiesse à défendre les droits de laraison. Béda, qui ne peut souffrir ni la Renaissance ni la Réforme,clame contre Érasme et fait brûler Berquin. Bientôt les deuxpersécutées furent opposées l'une à l'autre: François I er protégeala Renaissance et crucifia la Réforme. Les deux vécurent cependant.Tantôt se chamaillant, tantôt s'empruntant ressources et méthodes,elles déployèrent parallèlement leurs traditions jusqu'au XIX° siècle. Du «système naturel», qui s'apparente à la philosophie deDescartes, naquit une nouvelle science de la religion: l'historisme,science qu'illustrent Spinoza (Mort en 1677) et Hobbes (Mort en1670), et qui applique à l'Écriture sainte les méthodes de laphilologie, mais en prenant vis-à-vis de cette Écriture une attitudesceptique, agressive. Elle met toujours en avant le caractèrescientifique de sa critique. Mais, observe avec raison Bouchitte:«Combien de faits de la plus grande importance pour la foi ne peut-onpas soumettre à la raison, sous prétexte de critique philologique?»Ainsi naquit le mouvement «des lumières» (all. Aufkloerung), sicher à Goethe, où l'homme s'abandonne à un intellectualisme sansfrein, qu'excite l'orgueil de la raison déclarée souveraine. Et cefut le rationalisme. Non point celui qui, légitimement, affirme commemoyen de connaissance toutes les formes de la raison, mais celui quin'admet que la raison comme principe de connaissance et par là dénieà la révélation toute réalité. Ce rationalisme, que l'humanisme de laRenaissance portait dans son sein et qui n'est qu'une façon dedéifier l'homme naturel, s'empara peu à peu de la pensée européenne,en Angleterre avec les disciples de François Bacon et d'Herbert deCherbury, en France avec Voltaire, Rousseau et l'Encyclopédie, enAllemagne avec Leibniz, Kant et Lessing; dans les milieux où l'ons'occupait plus spécialement de science biblique, le «naturalismehabillé à la chrétienne» trouva avec l'herméneutique d'Ernesti (Morten 1781) et surtout avec la théorie de l'accommodation de Semler(Mort en 1791) un moyen pratique de rejeter du christianisme tout cequi ne tombait pas sous le sens de la raison. Prophéties, miracles,révélation spirituelle disparaissent de la Bible distillée à l'usagedu public «éclairé». Grand tut l'émoi parmi les chrétiens pour qui la Bible,différente de tous les autres livres par son contenu et par seseffets, témoigne d'une initiative divine. Les uns revinrent plus oumoins aux arguments théopneustiques renouvelés des rabbins juifs,sans se douter qu'ils ne faisaient en cela que mettre la Bible sur lepied des autres livres sacrés des religions humaines. Les sectateursde l'antique religion de l'Inde, de celles de Zoroastre, deConfucius, de Mahomet réclament avec une égaie ferveur pour lesVédas, pour l'A\esta, pour les Kings ou pour le Coranl'infaillibilité du texte d'origine divine.--Doctrine où lespiritualisme et la magie s'unissent confusément, simpliste commetoute théorie du bloc, qui peut se concilier avec une orthodoxie sansvie et qui coupe les ponts entre la science historique et la foi. Lesautres, comprenant qu'un livre d'histoire comme la Bible ne peut êtrelégitimement soustrait à la critique historique et à l'épreuve de laphilologie, ont tait confiance à la science mais de la même façon queRoger Bacon, le «doctor mirabilis» du XIII° siècle, précurseur de laRenaissance et de la Réforme, qui paya de sa liberté la grandeur deson génie et le spiritualisme de sa foi. Il combattit la traditionecclésiastique et l'infaillibilité des Pères: Quod si vixissentusque nunc, déclara-t-il, multa plura correxissent etmutassent. Il dénonça les moeurs dissolues des gens d'Église; enfinil proclama--lait nouveau dans l'histoire de l'esprit humain--quel'expérience est la maîtresse de toutes les sciences parce qu'«atteignant seule les causes» elle conduit mieux à la vérité que ladéduction et la spéculation: Hoec est domina scientiarum omnium etfinis totius speculationis Voilà donc posé--et les siècles ont donné raison au Docteuradmirable--le fait que l'expérience possède une autorité supérieure àtoute interprétation de texte et à tout raisonnement abstrait. Enmatière religieuse, il tient la Bible pour le livre des révélationsde Dieu: Tota sapientia est ibi principaliter contenta etfundamentaliter. Il déclare que, pour connaître, il faut avoir faitl'expérience des choses invisibles qui s'appelle «la foi». Dès lors,n'est-on pas en droit, au nom de la science bien comprise, dedemander que quiconque veut expliquer la Bible se soitd'abord--indépendamment de toute science historique etphilologique--offert lui-même à l'expérience que la Bible propose, etcela pour qu'il puisse avoir part à l'Esprit qui anime la Bibleentière, et que possédaient de façon exceptionnelle et normative lesagents de la révélation? Que nous apprend l'histoire? Que l'élémentmystique--pénétration de l'objet par le sujet--féconda l'intuitiondes plus grands génies théologiques, à commencer par saint Paul. Ilen est de la révélation biblique sur le fond obscur de l'histoire,comme des verrières qui se détachent en clarté sur les sombres paroisde nos cathédrales. Pour en discerner les couleurs et en comprendreles tableaux, il faut être dedans, non dehors. Jésus nous en aavertis: «Si quelqu'un, disait-il, veut faire la volonté de Dieu, ilconnaîtra...» (Jn 7:17); saint Paul ajoute: «L'homme naturel nesaisit pas les choses qui sont de l'Esprit de Dieu;parce que c'estspirituellement qu'on en juge» (1Co 2:14). Sans aller jusqu'à prétendre avec les antiques voyants de l'Indeque rien de ce qui est essentiel ne peut être démontré, on doit bienreconnaître que le rationnel échoue dès qu'il veut appliquer lalogique humaine aux problèmes qui touchent à la question de la vie età celle des rapports de l'homme avec Dieu. Ici, chaque effort pourencadrer la réalité dans la raison fait saillir un irrationnelnouveau. Irrationnel qui n'est point déraisonnable, qui dépasse aucontraire les possibilités actuelles de la raison: «Nous neconnaissons qu'imparfaitement», disait saint Paul auxCorinthiens (1Co 13:9 et suivants); «nous voyons, mais commedans un miroir, confusément...» Admirable parole qui, tout enimpliquant la valeur de la raison humaine, la ramène à sesprétentions légitimes en marquant sa relativité comme moyen deconnaître. La tradition naturelle qui, par définition même, ne veut riensavoir de la révélation et de la régénération, impose à ses savantsla tâche de saisir le problème chrétien avec les seuls facteurshumains qui entrent dans ses données. Du coup, le problème devientune énigme. L'élément spirituel qui faisait le lien de toutes sesparties ayant disparu, le témoignage biblique se résout en une foulede petits procès d'histoire; quelques-uns par leur nature peuventêtre tranchés à l'aide d'arguments que la science seule fournit, maispour les autres, les plus nombreux et les plus délicats, le verdictdépendra de la philosophie du critique. On fera des rapprochementsavec l'histoire des autres religions, on glanera des ressemblances,on hasardera des conjectures, on groupera le tout dans un ensemblehypothétique, reconstruction profane de l'histoire biblique que l'ondonnera pour l'interprétation scientifique et objective des faits,sans se méfier que cinquante demi-preuves ne font pas une preuve, etque toute explication de la Bible qui ne peut rendre compte del'action de la Bible porte en elle les germes de sa propredissolution. A cet égard, l'histoire de la critique indépendanterelative à la christologie dans le demi-siècle qui vient des'écouler, est singulièrement instructive. On y voit--M. Guignebertle résume fort bien au début de son livre Jésus (1933)--d'abordla conviction que «le christianisme était, dans sa graine et dans sesracines, une plante juive autochtone», et un effort pour restaurerdans son relief le véritable Messie juif, génie hors de pair à quirevient tout l'honneur de la foi nouvelle. Renan et Havet ontconsacré à ce Christ homme de véritables monuments. Plus tard, ens'affranchissant toujours davantage de la tradition scripturaire, onen vient, grâce aux lumières nouvelles acquises sur l'hellénisme, àconsidérer saint Paul comme le grand agent, et jusqu'à un certainpoint comme l'agent créateur du christianisme; Paul, dontl'hellénisme opposé au judaïsme étroit avait fait de la nouvellereligion palestinienne une religion universelle. Il faut lire A. Schweitzer (Gesch. d. paulin. Forschung, 1911) pour être édifié sur cette étape où l'on ne sait plus, enréalité, qui de Jésus ou de Paul a fondé le christianisme. Si Jésusétait ainsi en partie dépossédé, il demeurait tout de même entenduque sa religion, dont Paul, par son génie, avait fait la fortune,était bien une création originale, due au doux Rabbi de Galilée ou aubouillant disciple de Gamaliel. Enfin, l'histoire des religionsétendant toujours ses conquêtes, on découvre de nos jours le«syncrétisme», mot obscur dont on pense qu'il doit son origine à laCrète aux cent villes, centre de la vieille civilisation minoenne, oùfermentaient comme en une cuve ardente les idées religieuses et lesmystères de l'Orient méditerranéen. On aurait dit «syncrétiser»,comme on disait «helléniser». C'est dans ce syncrétisme ques'accomplit le mélange des croyances et des rites dont vécut le mondegréco-romain en attendant qu'il se donnât à la forme la plus évoluéedu syncrétisme, la religion dite du Christ. Cette fois on tientl'explication du christianisme prêché par l'Église au monde:«Considéré dans la réalité de la vie, le christianisme n'y faitnullement figure, comme on l'a cru si longtemps, de rupture dufront religieux antique ; il prend, tout au contraire et toutnaturellement, sa place sur ce front; il reste tout dans la logiquede l'évolution religieuse de l'Orient grec.» Qu'est devenue la partdu Christ dans cette religion? Elle a achevé de se dissoudre dans lescreusets de la tradition naturelle. «L'authentique enseignement deJésus ne lui a point survécu; le prophète n'a ni prévu ni voulu cequi a remplacé le proche avenir qu'il croyait préparer; si lechristianisme est bien sorti de lui, puisque c'est par la spéculationautour de sa personne et de sa levée que la religion nouvelle s'estorganisée, ce n'est pas lui qui l'a fondé. Il ne l'a même passoupçonné...La vérité reste que la religion chrétienne n'est pas lareligion qui emplissait tout l'être de Jésus, qu'il ne l'a ni devinéeni voulue» (Guignebert, Jésus, pp. 13, 498, 665). Si, au lieu deprendre notre exemple dans la christologie, nous avions appelé encause la critique de l'Ancien Testament, nous aurions assisté, de parle «Système naturel», à la même dissolution. A qui serait troublé par de semblables constatations, il fautconseiller de relire les huit premiers chapitres de l'épître auxRomains, où Paul, après avoir fait leur juste part aux droits del'humanisme en déclarant que l'homme naturel est à même dereconnaître le Créateur dans ses oeuvres, dénie au Juif comme aupaïen la faculté non seulement d'obéir à la Loi divine, mais decomprendre le développement de la révélation, avant d'avoir eu leurnature restaurée par la rédemption qui est en Jésus-Christ. Il faut àl'homme déchu un redressement spirituel pour qu'il puisse comprendreles choses de l'Esprit. Or, ce redressement ne peut s'accomplir sansque la raison humaine soit humiliée. D'où il appert que le grandcoupable en tout ceci est l'orgueil de l'homme. Qu'il s'agisse de la tradition naturelle, qui ne connaît d'autreidéal que la puissance et la beauté, et qui déifie l'homme dans sachair et dans sa raison, ou qu'il s'agisse de la traditionsacerdotale, qui ne connaît d'autre autorité que la hiérarchieépiscopale, c'est toujours l'homme mis à la place de Dieu; l'hommequi, tout en cherchant la vérité, s'est soustrait à la condition parlaquelle la vérité s'acquiert, la régénération spirituelle apportéepar Jésus-Christ au monde déchu: humiliation totale de l'homme, detout l'homme, et obéissance totale à Jésus-Christ, dont l'espritconduit «dans toute la vérité» (Jn 16:13). Tant que l'homme,qu'il s'agisse du sanctuaire de la religion chrétienne ou dusanctuaire de la science biblique, s'estime capable d'atteindre à sonbut par ses oeuvres, il s'égare, et son chemin se perd à droite dansla superstition, à gauche dans la négation. La vérité se dérobe àl'homme, parce que l'homme s'est dérobé à Dieu. Le sens spirituel,émoussé ou faussé, devient incapable de reconnaître que la Bible estl'authentique dépôt des révélations divines, que la parole de Dieuest l'unique instrument de salut, instrument opérant dans la mesuremême où on lui rend les organes dont la tradition naturelle le prive,et où on le débarrasse des superfétations par lesquelles la traditionromaine le dénature. Ainsi, nous arrivons à la conclusion que ceux-làseuls atteignent à l'affranchissement dont parle Jésus quimaintiennent au mot «tradition» le sens que lui donnait saint Paul.La tradition pour lui, c'était le témoignage inspiré que renferment«les saintes lettres» de la Bible hébraïque et le «type de doctrine»formulée par la prédication des apôtres de Jésus-Christ (Jn8:32,2Th 2:15,1Co 1:11,2Ti 3:15,Ro 6:17). Parmi les dangers que présentent la tradition naturelle et latradition romaine, il en est un, assez imprévu, qu'il faut signaleren terminant. C'est que ces deux irréconciliables adversaires, qui secombattent sans trêve, s'engendrent mutuellement. Les abus du prêtreprovoquent l'émancipation du docteur. Les négations du docteurramènent les âmes dans les bras du prêtre. Au XVI° siècle, c'estl'oppression de l'Église qui provoqua l'explosion de la Renaissance;aujourd'hui, ce sont les excès de la critique rationaliste quiremettent en faveur l'apologétique du catholicisme. Quoi qu'il ensoit, puisque pour celui-ci ce n'est pas Jésus, c'est-à-dire lapersonnification de la révélation biblique, mais bien la traditionromaine qui a fait le christianisme, et que d'autre part lechristianisme demeure, de par l'évidence de ses oeuvres, la grandeécole de salut pour l'humanité, il ne reste plus à Rome qu'à modifierle texte de Jn 3:16 et à lire: Dieu a tellement aimé le mondequ'il a donné l'Église romaine au monde, afin que quiconque croit parelle en Jésus ne périsse pas, mais qu'il ait la vie éternelle. Il semble qu'il y ait là de quoi faire réfléchir les héritiers dela Réforme; de quoi aussi les attacher plus fortement à la Parole deDieu, dont Olivétan disait dans son langage savoureux, en dédiant àl'Église de France sa traduction de la Bible (1535): «Cette parolecontient tout ton patrimoine...Par la foi et l'assurance que tu as enicelle, en pauvreté tu te réputes riche; en malheur, bienheureuse; ensolitude, bien accompagnée; en doute, acertainée; en péril, assurée;en tourments, allégée; en reproches, honorée; en adversité, prospère;en maladie, saine; en mort, vivifiée. Tu accepteras donc, ô pauvrettepetite Église, ce présent...Or, avant, va décrotter tes haillons toutpoudreux et terreux d'avoir couru, viré et tracassé, par le marchéfangeux de vaines traditions...» Alex. W.