THESSALONICIENS (2° épître aux)

I Le contenu. 1. ANALYSE ET PLAN. Bien que moins spontanée, plus doctrinale et de dessein plus arrêtéque la 1 re, la 2 e lettre aux Thessaloniciens s'ordonne malaisémentsuivant un plan systématique. On y distingue cependant undéveloppement eschatologique central, autour duquel on peut grouperle reste, en manière d'introduction, de conséquence et de conclusion.INTRODUCTION (2Th 1:1-12).La salutation, plus longue que celle de 1 Thess., mentionne Silaset Timothée (2Th 1:1). L'action de grâces est une occasiond'évoquer le passé de luttes, d'épreuves, de foi et de fidélité(verset 3); la récompense viendra pour ceux qui auront persévéréjusqu'au bout, le châtiment pour les persécuteurs (verset 5-10).L'apôtre intercède afin que Dieu parachève son oeuvre dans et parles Thessaloniciens; qu'il les rende dignes de leur vocation, etqu'il glorifie le Seigneur en eux (verset 11).I L'ENSEIGNEMENT CENTRAL (2Th 2:1-17) comprend une partie proprement didactique, et, incluse dans une double prière d'actions de grâces et d'intercession, une brève exhortation qui prélude à la partie parénétique.A. Le développement eschatologique (verset 1,12) constitue lenoyau de la lettre. Au verset 1, l'apôtre pose le problème de laparousie et de la réunion des fidèles avec le Seigneur. Au verset2,il indique le but de ses enseignements, but essentiel de l'épître:détruire des idées fausses, qui lui seraient attribuées, concernantl'imminence de la parousie. On fait rapporter habituellement hôsdi'hêmôn (=comme passant par nous, comme venant de nous) au seulterme qui précède: épistolês (=lettre); mais on peut aussi bienadjoindre à ce terme logou et pneumatos (=parole et esprit):au lieu de faire simplement allusion à la lettre d'un faussaire, Paulsignalerait ou préviendrait une erreur ou une machination tendant àlui faire penser, dire ou écrire ce qui n'a jamais été dans sonesprit.. Quoi qu'il en soit, l'apôtre va s'attaquer à une mentalitéplutôt qu'à une doctrine, car son apocalyptique est encore celle deses contemporains, transposée dans l'ordre chrétien. La constructionproleptique du verset 26 fait image, et dépeint l'attitude de ceuxqui, dans l'attente d'un événement qu'ils tiennent pour imminent,vivent comme s'il était déjà là. Or, cette imminence n'est pascertaine, car des signes précurseurs doivent se produire, qui ne sontpas encore apparus. Avant la parousie viendra l'apostasie, et l'hommed'iniquité, le fils de la perdition, l'adversaire, seramanifesté (2Th 2:3). Paul a donné cet enseignement auxThessaloniciens lorsqu'il était avec eux (2Th 2:3). Il ajoutemaintenant ce détail: le mystère d'iniquité, à l'oeuvre déjà, estcontenu, pour le moment, par une puissance ou une personne qui luitient lieu de frein (to katekhon, ho katekhôn). Quand ce freinlâchera, l'impie, l'inique (ho anomos), sera manifesté; alorsJésus viendra et le détruira du souffle de sa bouche 2Th 2:6-12.B. Une exhortation naturelle à la fermeté et a la fidélité, entreune prière d'actions de grâces et une intercession, vientclore ce développement central, et préluder à la parénèse (verset13-17).II LA PARTIE PARENETIQUE (2Th 3:1,15) groupe, sans ordre, un certain nombre de recommandations; elles se rapportent naturellement à la situation qui a motivé les observations précédentes. Que les Thessaloniciens prient pour l'apôtre et pour son oeuvre (2Th 3:1). Le Seigneur est fidèle; il les affermira, les dirigera, et leur donnera amour et patience (2Th 3:5). Qu'ils s'écartent de ceux qui ne savent pas régler leur conduite, et que leur vie soit ordonnée comme celle de l'apôtre; qu'ils travaillent comme lui, car celui qui ne veut pas travailler ne doit pas non plus manger (2Th 3:9,13). Qu'ils ne se lassent pas de faire le bien, et qu'ils soient charitables pour ceux qui n'obéiraient pas à ces préceptes, mais avec fermeté (2Th 3:14).LA CONCLUSION vient ici, dans une prière (2Th 3:16), et une salutation autographe destinée à garantir l'authenticité de lalettre (2Th 3:17).Le passage apocalyptique (2Th 2:1-12) a donné lieu à nombred'interprétations, dont la plupart ne s'embarrassent d'aucun soucicritique, et font un extraordinaire mélange des lieux et des moments.Au temps des luttes religieuses, et, encore aujourd'hui, dans lessectes d'illuminés, les adversaires se lancent mutuellement cepassage à la tête, en s'accusant réciproquement d'être lamanifestation du mystère d'iniquité, la personnification del'Antéchrist, du fils de la perdition. C'est une triste histoire, oùapparaissent les Pères, les scolastiques et l'hérésie, les papes etles réformateurs, l'Église et les sectes les plus diverses; elle neprésente plus qu'un intérêt épisodique et symptomatique; le soucid'une vérité objective, digne de la Parole du Dieu de vérité, n'y aqu'une faible part. Dans la recherche de cette vérité, la critique,il est vrai, n'a pas réalisé l'accord, tant s'en faut; mais il étaitdéjà beau et juste d'essayer. Au reste, il paraît indéniable que,dans leur divergence, les efforts désintéressés ont jeté sur unproblème délicat des lumières successives et qui semblent maintenantconverger. On peut distinguer deux grandes catégories d'opinions critiques,avec de nombreux compromis. (a) L'interprétation réaliste du passage apocalyptique a eu le plus grand nombre de partisans. Ils estimentque l'auteur vise directement des personnages et des événementshistoriques. Les uns cherchent dans l'histoire romaine. L'antéchristserait Caligula; celui qui tient le frein (ho katekhôn), Vitellius, dont les sages conseils, inspirés de son expérience dugouvernement en Syrie, retiennent quelque temps l'empereur;l'impiété, l'érection de la statue de Caligula dans le Temple deJérusalem, le sanctuaire de Dieu (ho naos ton Theou). Telle estl'hypothèse de Grotius, reprise par Spitta.--Pour d'autres,l'antéchrist serait Titus. La plupart des auteurs de cette catégorie,et notamment les premiers partisans de l'école de Tubingue, pensentplutôt à Néron, avant, pendant, ou même après son règne, suivant lacroyance populaire à son prochain retour (sur la légende de Neroredivivus, cf. Tacite, Hist., II, 8). Certains critiques (Kern,Schmiedel, Hilgenfeld), après avoir noté judicieusement les analogiesentre ce développement eschatologique et certains passages de Danielou de l'Apocalypse, font du mystère d'iniquité l'hérésie gnostiquemenaçant le temple de Dieu, c'est-à-dire la chrétienté; le freinserait l'empire romain. D'autres auteurs cherchent dans l'histoire juive. Tertullienestimait déjà que l'antéchrist était un messie juif. Reprenant cettethèse, Schwedenburg cite les paroles de Jésus sur lespseudo-prophètes. Luthardt introduit l'idée d'incarnationssuccessives (Antiochus Épiphane, Hérode, etc.), avant l'incarnationdéfinitive de l'antéchrist dans un messie juif, ultime et suprêmeennemi de Dieu; le frein serait l'ordre moral. Reuss, Godet,Sabatier, B. Weiss, Green, etc. adoptent une interprétation analogue.B. Weiss précise: le mystère d'iniquité, c'est l'apostasie juive;l'hostilité du peuple élu s'exaspère de plus en plus jusqu'au momentoù paraîtra le pseudo-prophète, l'anti-messie blasphémateur qui,soutenu par Satan, fondera un royaume juif; le frein, c'est la loiromaine; et celui qui le tient, l'empereur. On constate que le symbolisme prend une place appréciable danscertaines de ces hypothèses, et cela dans la mesure où lesidentifications sont plus imprécises et plus diluées. Aussireparaît-il accru dans ces essais réalistes où les auteurs font unmélange de l'histoire juive et de l'histoire romaine. Ainsi, W.Luecken croit que l'auteur a caractérisé son antéchrist d'aprèsplusieurs personnages historiques, notamment Antiochus Épiphane,Hérode le Grand, Caligula; le frein, c'est la puissanteadministration romaine, dont Paul a su apprécier la valeur. (b) L'interprétation symbolique du passage apocalyptique arecueilli des suffrages importants, bien que moinsnombreux. Olshausen estime que l'antéchrist est une personnificationfigurée des puissances hostiles à Dieu. Il représente une sérieindéterminée d'êtres et d'événements, dont l'ensemble seul permettrade le définir. Olshausen ne craint pas de grouper sur sa liste despersonnages et des faits aussi différents que Néron, Mahomet, lespapes, la ruine de Jérusalem et la Révolution de 1789. Le frein,c'est la puissance encore prépondérante du christianisme qui s'opposeà l'apostasie. Martin Kahler rapproche cette péricope, de Daniel, dela petite apocalypse synoptique et de l'Apocalypse johannique. 11trouve dans ces divers passages un enseignement commun, à savoir quele mal doit s'intensifier et s'exaspérer avant le jugement final. Sesremarques judicieuses doivent être complétées; mais elles ne peuventl'être que dans le cadre historique-religieux (voir Apocalypse). (c) Sur la voie d'une solution rationnelle. Laplupart des interprètes symbolistes ne nient point que les événementshistoriques aient pu avoir une influence sur les conceptions de Paul.Quelques-uns des interprètes réalistes faisaient au symbolisme unecertaine place. Il y a là un terrain d'entente. En fait, les conceptions eschatologiques de Paul ne sontnullement isolées. Non seulement, elles présentent de multiplesrapports avec les apocalypses du temps, mais elles rentrent dans ungrand cycle de croyances fort anciennes, qu'elles revêtent ainsi d'unmanteau chrétien. A la fin des temps, une puissance mauvaise, vaincueet enchaînée depuis la création, recouvrera la liberté, et livrera auCréateur une lutte suprême qui se terminera par l'écrasement duMalin. Telle est la substance d'un mythe, dont on trouve l'expressionla plus complète dans le mazdéisme, et des traces plus ou moinsaccusées dans la plupart des cultes, jusqu'aux élucubrationseschatologiques de quelques sectaires et illuminés d'aujourd'hui. Cefonds commun constitue ce qu'on peut appeler: l'Évangileapocalyptique (cf. notre étude, avec renseignementsbibliographiques: l'Evangile Apocalyptique, 1931). L'auteur de 2Thess, a puisé dans ce fonds; il y a donc, dans son tableau succinct,mais dont chaque détail, replacé dans le cadre historique-religieux,est singulièrement évocateur, un symbolisme évident. Il est possiblecependant que, sans compter la part d'une formation chrétienne,certains événements importants, qui se déroulaient alors dans lemonde, aient influé sur sa manière d'accueillir et de présenter lesantiques symboles; cela paraît même certain. L'infidélité d'Israël,sa haine de l'Évangile et son hostilité systématique, retenueseulement, dans ses desseins de destruction, par la puissancerégulatrice de Rome, ont sans doute donné comme une forme historiqueà des traits séculaires. Ainsi, toute apocalyptique a sa part d'archaïsme et d'actualité,de symbolisme antique et de réalisme contemporain. 2. LE STYLE ET LES IDEES. La langue et le style des deux épîtres ne sont pas absolumentidentiques. Les adversaires de l'authenticité en tirent argument. En réalité,rien de décisif; des ressemblances indéniables, au point qu'enplusieurs passages la seconde épître a été considérée comme calquéesur la première (à tort, d'ailleurs, car il peut s'agir de simplesréminiscences); des divergences, qui s'expliquent par la nécessité determes différents pour exprimer des notions différentes; maissurtout, en ce qui concerne le style, une dualité de tons. L'auteurn'est pas en confiance avec ses lecteurs, comme dans la premièrelettre: moins d'abandon, de naturel, de spontanéité (comp. 1Th 1:22Th 1:3); plus de gravité, de distance, et l'autorité du chef quise tait sentir, au lieu de la cordialité de l'ami. (cf. 2Th 3:14) Quant aux idées, l'analyse du passage apocalyptique a montréce qu'elles ont de plus saillant, et qui caractérise l'épître parrapport à la précédente.II L'authenticité et l'intégrité. 1. LES TEMOIGNAGES DES PREMIERS SIECLES sont au moins aussi nombreux, età peu près les mêmes, que pour la première épître. On peut y ajouterune utilisation probable de 3:15 par Polycarpe. 2. L'AUTHENTICITE a été discutée plus anciennement et plus fréquemmentque celle de 1Th Les attaques ont commencé au XVIII° siècle, avecChristian Schmidt. Elles ont repris, sans grandes modifications, avecl'école de Tubingue et, plus récemment, von Soden, Wrede, etc.L'argument de la langue et du style n'a pas grande valeur; les uns sefondent sur les ressemblances, à les en croire, trop accusées;d'autres, sur les divergences des deux épîtres. Sauf dans dessituations bien tranchées, les objections de cette espèce relèvent del'instinct, du sentiment, du goût; elles n'entrent pas en ligne decompte. Un argument plus précis est tiré de la comparaison de 2Th2:2 et 2Th 3:17. Au premier de ces versets, l'auteur faitallusion à une lettre apocryphe; il s'agirait de 1 Thess., dont lefaussaire chercherait ainsi à ruiner l'autorité. Dans le deuxièmeverset, le machiavélique personnage affirme avec une insistancemaladroite que c'est lui qui est Paul. Ce raffinement imaginaireaurait eu, comme bien l'on pense, des résultats diamétralementopposés à ceux qui étaient recherchés. Un argument qui peut faireimpression est fondé sur le passage apocalyptique, sur les notionsqui s'y trouvent exprimées, ou sur les événements qu'il supposerait.L'examen de cette péricope a montré ce qu'il fallait penser desinterprétations réalistes et symboliques; la conséquence en est icique l'on peut écarter l'argument soi-disant historique, lequels'appuie sur de prétendues allusions à des faits qui seraient plus oumoins postérieurs à la vie de l'apôtre. Il est curieux de constaterquelle variété de dates ont été ainsi proposées. Quant aux traitsgénéraux de cette petite apocalypse, ils sont d'un archaïsmeincontestable, mais qui se retrouve dans tous les essais de ce genre,à l'époque, et même de nos jours; ils ne permettent aucune fixationde temps. D'autre part, aucun détail ne contredit absolumentl'eschatologie de 1Th Il n'est même pas certain que le moment de laparousie soit reculé; car 1 Thess, insiste sur la soudaineté plutôtque sur l'imminence de l'événement. Et s'il y a, ce que l'on croit,un écart de nuances entre les deux lettres, il pose un problème decomposition plutôt que d'authenticité. Il faut en dire autant de ladifférence de ton et de situation. Spitta a cru nécessaire, pourl'expliquer, d'attribuer la composition de la lettre à Timothée, qui,après avoir écrit 1 Thess, sous la dictée de Paul, aurait écrit 2Thess, sur son conseil; d'où les ressemblances et les divergences;l'attestation des derniers versets serait un simple témoignage del'apôtre à son fidèle compagnon. Cette bizarre hypothèse ne résoutaucune difficulté, et en crée de nouvelles. Pourquoi l'apôtre a-t-ilvoulu ce complément qui n'est pas de lui, et qu'il affirme être delui? La différence des situations impliquées par les deux lettresdevient inexplicable quand on les fait adresser en même temps auxmêmes lecteurs. L'hypothèse traditionnelle admet un intervalle dequelques mois, ce qui permet d'en rendre compte. 3. L'INTEGRITE a été sacrifiée par certains auteurs, notamment P.Schmidt, qui ont cru ne pouvoir sortir autrement d'embarras. Lespassages difficiles seraient interpolés (2Th 1 5,12 2:3-12), ouremaniés (2Th 2 2,3,17). Cette solution paresseuse ne peut mêmeinvoquer l'argument littéraire, car aucun des textes incriminés neporte trace de soudure. Il est donc raisonnable d'admettre, avec lamajorité des critiques, la thèse traditionnelle de l'authenticitépaulinienne intégrale.III La composition. 1. LES CIRCONSTANCES de la composition sont beaucoup moins claires quepour la 1 re épître. La situation respective de l'apôtre et del'Église, surtout en regard de 1 Thess., est difficile à déterminer.Devant ces difficultés, certains des partisans de l'authenticitépaulinienne ont jugé nécessaire de modifier l'ordre chronologique desdeux lettres, ou de leur attribuer des destinataires différents. 2. LE TEMPS, LE LIEU DE LA COMPOSITION. Hugo Grotius, au XVII e siècle, estimait la 2 e épître antérieureà la 1re; son opinion a été suivie par divers critiques modernes,notamment Renan, J. Weiss, Hadorn. 3:17 serait l'indication que Paulécrit aux Thessaloniciens pour la première fois; mais si l'apôtreattire l'attention sur son écriture, cela peut provenir du fait quedes lettres apocryphes ont circulé sous son nom. 1Th 4:11, oùl'apôtre rappelle ses recommandations, s'expliquerait par 2Th3:6,12, où il les donne; mais pourquoi pas aussi bien par unenseignement oral antérieur? Les persécutions mentionnées au présentdans 2Th 1:4 le seraient au passé dans 1Th 2:14 3:1; maispourquoi serait-ce les mêmes? L'Église de 2 Thess, serait plus jeune,plus enthousiaste et plus instable dans son attente de la parousie;mais n'a-t-il pas suffi parfois d'un illuminé pour transformer enquelques mois l'atmosphère d'une Église aux traditions anciennes? Ilconvient, d'ailleurs, de distinguer, dans l'histoire des sociétéscomme des individus, l'enfance et les retours anachroniques à uneenfance qui a perdu son naturel, son charme et sa simplicité;l'infantilisme apocalyptique en fournit de nombreux exemples.--J. Weiss voit dans 2Th 3:1 et suivant, où il est questionde méchants et de trublions, une allusion aux difficultés rencontréesà Athènes; mais ces termes s'appliquent mieux au genre d'oppositionque l'apôtre a éprouvé à Corinthe. Enfin, entre autres arguments positifs, on peut invoquer, enfaveur de l'ordre traditionnel, le fait que 1 Thess, commence parrappeler aux Thessaloniciens un passé encore proche, mentionne lesefforts successifs de l'apôtre pour entrer en rapport avec l'Églisequ'il a fondée, mais ne fait point allusion à une lettre. Il reste donc.simplement à expliquer par un intervalleraisonnable, mais qui ne doit pas excéder quelques mois, lechangement de situation impliqué par 2Th La parenté des deux lettresoblige, en effet, à les rapprocher suffisamment dans le temps. QuandPaul écrit la seconde, Silas et Timothée sont encore avec lui; or,d'après les renseignements concordants des Actes et des épîtres, celaparaît avoir été le cas seulement à Corinthe, pendant le premierséjour, soit, d'après la chronologie qui paraît la plus sûre, de lafin de 50 jusque vers le milieu de 52. Si 1 Thess, est du début de51, 2 Thess, pourrait être du courant de la même année, ou du débutde l'année suivante. 3. LES DESTINATAIRES. L'obscurité des circonstances par rapport à celles de 1 Thess, aincliné certains critiques à supposer des lecteurs différents;d'autre part la similitude, exagérée, des deux lettres devient unargument de plus, en obligeant à leur assigner la même date decomposition. Harnack a supposé que l'Église de Thessalonique étaitformée de deux partis concentriques plutôt qu'opposés: un petit noyaude judéo-chrétiens, les premiers convertis, constituant l'ecclesiola, dans la masse croissante des pagano-chrétiens, l' ecclesia. Cette formation originale a nécessité l'envoi simultanéde deux lettres, 1 Thess, est adressée à l'ensemble de la communauté;il est spécifié qu'elle doit être lue à tous les frères (5:27); mais,en réalité, elle est destinée surtout aux pagano-chrétiens, plusnombreux, pour lesquels Paul nourrit une affection particulière etpayée de retour; elle doit les mettre sur la voie d'une eschatologiedont ils ont besoin. 2 Thess., moins cordiale, plus distante, estadressée en même temps au petit groupe judéo-chrétien, quel'enseignement préparatoire de 1 Thess, risquait de troubler. Cettehypothèse, reprise par Lake, soulève beaucoup plus de difficultésqu'elle n'en résout. La situation décrite est une pure vue del'esprit, de même que le manège de Paul, qui aurait naturellement étédécouvert, et lui aurait aliéné toutes les sympathies. M. Goguel a présenté la même thèse générale avec plus de réserve,et sous une forme plus acceptable, en proposant comme destinataire de2Th l'Église de Bérée. Cette Église, voisine de celle deThessalonique, en est cependant assez différente. Elle a été recrutéeen grande partie dans la synagogue (Ac 17:11 et suivants),tandis que les Thessaloniciens sont, pour la plupart, d'originepaïenne. Une eschatologie plus développée que celle qui peut leurêtre offerte lui convient donc parfaitement. Il serait étrange quePaul n'eût pas écrit à l'Église de Bérée en même temps qu'à celle deThessalonique. Quant à la confusion d'adresses, elle s'est produitede très bonne heure, et s'explique du fait que ces Églises voisinesétaient en relations constantes, et se passaient des copies de leurslettres. --Cette hypothèse échappe à plusieurs des difficultés soulevéespar celle de Harnack; elle ne suppose pas une situationecclésiastique, et des rapports avec l'apôtre, aussi peuvraisemblables. Mais il ne semble pas qu'elle évite l'objectionprincipale, qui vient de l'attitude de Paul, donnant au même moment,à deux cercles voisins, et en fréquentes relations, deuxenseignements différents sur des tons aussi différents. N'y aurait-ilpas là, à peine atténués, le même détour et la même imprudence? Nesaisit-on pas cet inconvénient dans la conjecture même par laquelleon cherche à résoudre une grave difficulté supplémentaire: l'abandondu témoignage unanime de la tradition concernant les destinataires dela 2 e épître? La confusion supposée doit remonter aussi haut quepossible, et s'expliquer par un échange habituel de lettres. Or, sil'échange s'est produit peu après la réception des épîtres par leursdestinataires, il réduit à néant les précautions de Paul. D'autre part, la ressemblance des lettres est moindre qu'on nedit et s'explique fort bien à quelque intervalle, sans mêmenécessiter la conjecture d'un brouillon de la première, que Paulaurait relu avant d'écrire la seconde (Zahn). Il est donc permis des'en tenir à la thèse traditionnelle qui, malgré quelquesdifficultés, apparaît comme la plus simple et la plus raisonnable. 4. LE BUT DE LA COMPOSITION ressort des circonstances et du contenu. Ilparaît plus précis que celui de 1 Thess., sans exclure cependant desintentions variées. Paul veut essentiellement parer aux risquesd'illuminisme et d'oisiveté pieuse, arrêter les désordres quemenaçait de propager, après les avoir suscités, une fausse conceptionde la parousie. Dans ce dessein, il apporte à son enseignementeschatologique, avec des compléments, certaines retouches. Dans la1re lettre, la soudaineté de la parousie pouvait faire croire à sonimminence. L'apôtre s'est rendu compte du danger de cette confusion,et peut-être a-t-il dû modifier lui-même sa pensée au choc del'expérience. Toujours est-il que son but principal est d'éclairerl'Église sur ce point, de calmer sa fièvre, et de lui rappeler, dansson illuminisme anti-social, cette loi rude mais salutaire: qui neveut pas travailler ne doit pas non plus manger. La liste des ouvrages sur les épîtres en général, et sur chacuneen particulier, étant fort longue, même après sélection nécessaire,il y a lieu de consulter, pour une bibliographie à jour, comme pourles détails d'érudition, l'une des récentes Introd, au N.T. Laplus complète, et la plus remarquable, en français, est certainementcelle de M. Goguel, où l'on trouvera une mine de renseignementsprécieux. F. Godet, bien que déjà ancien (1897), reste toujours utileà mettre en parallèle. JL Cl.