TÉNÈBRES

Dans l'A.T., est surtout employé pour traduire le mot hébreu khôchèq, qui se rencontre 78 fois dans ce sens (20 fois dansJob). Dans le N.T., il traduit les mots grecs skotia, employé 14fois (dont 7 dans Jean et 5 dans 1Jean), et skolos, employé 31fois (dont 6 dans Matthieu et 11 dans les ép. de Paul). Les ténèbres, c'est, au sens propre, l'obscurité, la nuit, dansle récit de la création (Ge 1:4), ou dans Mr 15:33 etparallèle, Ac 13:11,Jn 6:17 20:1. Mais le plus souvent ce motest pris dans un sens figuré: tantôt il signifie «en secret» (Ps139: et suivant, Mt 10:27), tantôt il désigne un étatd'ignorance (Ps 18:29 107:10,Mt 6:23), et, par extension, lepaganisme (Ac 26:18); tantôt un état de péché (Esa 5:2060:2,Jn 12:35,1Jn 2:9), tantôt la puissance du mal, opposée à Dieuqui est lumière (acception plus familière à saint Paul et à Jean), lemonde ou l'humanité asservie au péché (Jn 1:5), enfin un état deterreur ou de châtiment (Am 5:18,Joe 2:2,Soph,1:15,Mt 8:12 22:1325:30,Jude 1:13). Ce terme exprime donc, dans des proportions difficiles àdéterminer, les notions de crainte, d'ignorance, de péché ou de malen général. Son emploi dans le domaine moral ou spirituel s'expliquetrès facilement. Personne n'ignore combien l'obscurité peut créer de dangersimaginaires ou augmenter les terreurs de dangers réels, alors que lalumière dissipe les uns, ramène les autres à de justes mesures. Cette crainte s'explique encore mieux chez les primitifs,entourés de risques très réels que la nuit rend encore pluspressants; par exemple la crainte des fauves, particulièrementredoutables pour l'homme qui sortirait sans lumière. Ces grands dangers, les bruits mystérieux que la nuit amplifie,l'incertitude de l'homme à retrouver son chemin dans l'obscurité, demême que la longueur troublante des heures silencieuses d'insomnie,tout explique pourquoi les ténèbres ont toujours représenté lespuissances mauvaises, comme les puissances bonnes étaientreprésentées par la lumière. En ce cas comme en beaucoup d'autres, la Bible a repris une trèsvieille idée humaine, commune aux religions païennes, mais en laspiritualisant de plus en plus. Il vaut la peine de remarquer quecette image, qui répond aux terreurs de l'enfance de l'humanité, estemployée dans l'évangile le plus spirituel (voir Johannisme),pour exprimer la plus haute révélation: Jésus est la véritablelumière, qui dissipe tout ce que représentent les ténèbres,ignorance, crainte et péché. Pour Jean, les ténèbres sont en même temps toutes les puissancesmauvaises qui asservissent l'humanité et le monde esclave du mal.Mais cette conception n'est point exclusivement johannique, car on latrouve déjà en germe chez les Synoptiques (cf. Mt 6:23,Lu 11:3522:53) et plus encore dans les épîtres de Paul (cf. 1Th 5:4et suivant, Ro 13:12,1Co 4:5,2Co 6:14,Eph 5:11-6:12,Col1:13). Voir Lumière.