SOUCI

Il n'est mentionné que rarement dans l'A.T. (Ps 13:3 94:19,Sir 30:21-24, Sag 8:9), sans doute faute de nuances suffisammentsensibles dans la valeur des termes désignant en hébreu les diversaspects de la douleur. C'est l'enseignement de Jésus qui tend àexclure le souci de la vie des enfants de Dieu: pour ses exhortationsà «ne pas se mettre en souci»,voir PROVIDENCE. En effet, ce n'est pasl'imprévoyance qu'il leur prescrit, mais la confiance en cetteprévoyance de leur Roi que nous appelons la Providence. Quels que puissent être les motifs des soucis--moyens des'assurer nourriture et vêtement (Mat 6:25,30,Lu 12:23-28),incertitude du lendemain (Mt 6:34), missiondésintéressée (Mt 10:9), difficile et dangereuse (Mt10:19,Lu 12:11,Mr 13:11), complications des nécessitésmatérielles (Lu 10:41), etc. --le Seigneur répète: Ne vous inquiétez pas! Si Dieu étend sasollicitude jusqu'aux êtres inconscients, comme les oiseaux et lesfleurs, à combien plus forte raison a-t-il le souci d'assurer la viedes sujets de Son Royaume! (Mt 6:33,Lu 12:31) Ces deux développements parallèles de l'enseignement du Seigneursont rattachés à deux contextes différents mais parfaitementconciliables: dans Mt 6:24 et suivants, à l'impossibilité deservir deux maîtres; dans Lu 12:21 et suivants, à l'oppositionentre la richesse pour soi-même et la richesse en Dieu. (cf. Heb13:5) Moralement et religieusement, les deux points de vue seconfondent: la vision faussée de l'échelle des valeurs, matérielleset spirituelles, est plus qu'un défaut de perspective; c'est lesymptôme d'un défaut de lumière intérieure (cf. l'oeil à la vuesaine (Mt 6:22 et suivant), à propos des vrais trésors [6:19,21]). La parole de Dieu est étouffée par «les soucis de ce monde et laséduction des richesses» (Mr 4:19,Mt 13:22,Lu 8:14); l'oubli dela «seule chose nécessaire» laisse entrer l'inquiétude etl'agitation, la mauvaise part, exclusive de «la bonne part» (Lu10:41 et suivant); dans les circonstances tragiques, «lesinquiétudes de cette vie» peuvent accompagner «les excès, lesivresses», et surprendre les serviteurs non vigilants dans l'attentedu Fils de l'homme (Lu 21:34). La confiance en l'amour paternelde Dieu préserve des soucis d'ordre inférieur et inspire l'obéissancejoyeuse, jusque dans la voie du renoncement (voir ce mot). Déjà sous l'ancienne alliance, malgré le troublant problème dessouffrances des justes, leur robuste foi affirmait cette Providencede l'Éternel (Ps 37:5 55:23,Esa 26:3 etc.); à leur tour lesapôtres ont recommandé la foi sereine victorieuse des soucis (Php4:6,1Pi 5:7), apprise de leur Maître (Php 4:11 et suivant) aucours d'apostolats chargés par ailleurs de préoccupationslégitimes (2Co 11:28). En effet, le souci conforme à la volontéde Dieu, c'est celui de la charité: le souci envers leprochain (Ps 41:2 142:5), la préoccupation de porter lesfardeaux les uns des autres (Ga 6:2), de leur assurer nourritureet vêtement (Mt 25:35 et suivant). En français, souci est de même dérivation que sollicitude (ne pas confondre avec le nom de la plante, qui vient, lui, de solsequium --qui suit le soleil). Quant aux termes grecs du N.T., remarquer le verbe rare deLu 12:29, météôrizesthaï, allusion à un navire ballottéde-ci de-là sur les flots. Le terme habituel, mérimna, étaitd'une grande vigueur (de méris = division, brisure de l'esprit). Un certain Titedios Amerimnos, d'une inscription phrygienne,avait-il reçu son surnom lors de son baptême chrétien, par allusion àl'enseignement de Jésus (Mt 6:34) --un «Sans-Souci» del'Évangile? c'est possible, d'après W. Ramsay (Cit. and Bish. ofPhrygia, II, p. 465).