SAMARIE

Aujourd'hui Sébastîyé, petit village à 10 km. au Nord-O, deNaplouse (Sichem-Néapolis). L'origine de Samarie est relativement tardive puisqu'elle neremonte qu'au roi d'Israël Omri (IX° siècle av. J.-C), qui fit choixde la colline (fig. 230) appartenant à un certain Semer pour y fonderla capitale de son royaume (1Ro 16:24). La position étaitremarquable, et si Omri dut céder quelques villes au roi deDamas (1Ro 20:31), Achab son fils put y résister aux attaques deBen-Hadad dont les troupes s'adaptaient mal aux alentours accidentésde «la montagne de Samarie» (1Ro 20:23). L'alliance conclue avecDamas s'accompagna pour la ville d'une grande prospérité. Achabagrandit le palais d'Omri et le décora de plaques d'ivoire (1Ro22:39), d'un ivoire acheté sans doute sur les marchés deTyr (Eze 27:15). Le roi d'Israël était devenu le gendre du roide Tyr, Ethbaal, en épousant sa fille Jézabel, qui introduisit àSamarie le culte des dieux phéniciens (1Ro 16:31 et suivant).Joram fit disparaître une des idoles (2Ro 3:2), sans pourtantproscrire l'adoration des veaux, le «péché de Jéroboam» (2Ro3:3,1Ro 12:28) et le culte d'Astarté. Il fut tantôt l'allié, tantôtl'adversaire du roi de Syrie qui revint mettre le siège devantSamarie (2Ro 6:24), mais la ville fut délivrée, les assiégeantsayant brusquement pris la fuite (2Ro 7:7). On sait que Jéhuarriva au pouvoir en faisant massacrer tous les membres de la familleroyale. Son entrée à Samarie fut suivie de l'extermination desprêtres «de Baal» et de la destruction de son temple et de sesstatues (2Ro 10:24,27). Il serait trop long d'énumérer tous les événements qui marquèrentles règnes des rois d'Israël. On peut pourtant signaler, à l'époqueprospère de Jéroboam II (782-743 av. J.-C), la prédicationdiscordante d'Amos, tonnant contre le luxe des grands de Samarie dansdes «palais d'ivoire» (Am 3:15, cf. 1Ro 22:39) et contrecelui de leurs femmes, ces «génisses de Basan!» (Am 4:1). Lesjours de la ruine étaient proches. (cf. Mic 1:1-16) Au roid'Assyrie Salmanasar III, Jéhu avait déjà dû payer un tribut. Ménahem (Me-ni-hi-me du pays de Sa-me-ri-na-a) fut imposé pluslourdement encore par Pul (Tiglath-Piléser), qui perçut 1.000 talentsd'argent (2Ro 15:19). Sous Osée, Samarie assiégée par Salmanasar fut prise par sonsuccesseur Sargon II, en 722 av. J.-C. Les textes bibliquesattribuent, à tort, la prise de Samarie à Salmanasar (voir ce mot);le «roi d'Assyrie» (2Ro 17:4) est bien Sargon et non Salmanasar,malgré. 2Ro 18:9; les textes cunéiformes sont, à ce sujet,particulièrement précis. Les Israélites (27.290) furent déportés à Chalah (non loin deCaran), le long du Chabor et en Médie. Des colons babyloniens etaraméens furent installés dans «les villes de Samarie», et l'onconnaît tous leurs déboires jusqu'au jour où un prêtre, d'entre lescaptifs, vint s'établir au milieu d'eux pour leur enseigner «lamanière de servir le dieu du pays» (2Ro 17). On sait comment lesSamaritains furent tenus à l'écart par les Juifs revenus d'exil.Samarie vécut encore des jours troublés quand elle se révolta contreAlexandre le Grand (331 av. J.-C.) ou résista à Jean Hyrcan (120 av.J.-C). Rattachée par Pompée à la province de Syrie, reconstruite parGabinius, Samarie retrouva une ère de prospérité sous Hérode leGrand, qui avait reçu la ville d'Auguste; cela lui valut de prendrele nom de Sébasté (=Auguste) et de connaître des embellissementsmultiples. Jésus aurait pu les voir de loin, car il semble qu'il aittraversé une ou deux fois la Samarie (Lu 8:52,Jn 4:4). Lechristianisme y fut prêché par Philippe (Ac 8:5), que vinrentrenforcer Pierre et Jean (Jn 8:14); Simon le magicien essaya,mais en vain, d'acheter d'eux le charisme de l'imposition desmains (Jn 8:18). Les croisés restaurèrent au XII e siècle uneéglise byzantine, élevée à Samarie, sur la route de Jean-Baptiste;cette tradition, déjà attestée par saint Jérôme, n'est pas pourtantsans soulever bien des difficultés. Moins hypothétiques sont les résultats des fouilles entreprisessur le site de Samarie, dès 1908, par une mission américaine del'Université de Harvard. Bien des monuments ont été dégagés qui sontdu plus grand intérêt pour l'histoire biblique. Sans parler desruines d'époque romaine (basilique, colonnade hérodienne, templed'Auguste, statue colossale d'Auguste malheureusement très mutilée),les travaux ont exhumé des vestiges de palais attribués à Omri etAchab (fig. 232). Les explorateurs croient aussi avoir retrouvé lesfondements de la tour («citadelle du palais royal») où Pékahassassina Pékahia (2Ro 15:25), la piscine («l'étang de Samarie»)où fut lavé le char ensanglanté d'Achab (1Ro 22:38). Dans lesruines des palais, on recueillit aussi toute une collection detessons (ostraka), portant de courtes inscriptions hébraïques,véritables étiquettes apposées à des jarres d'huile ou de vin et quisont datées des environs de 865 av. J.-C, grâce à un fragment de vaseau nom du pharaon Osorkon II (874-853), trouvé dans les parages. Avecquelques lignes d'écriture trouvées à Guézer (date: 900 av. J.-C),les ostraka de Samarie sont les plus anciens spécimens de l'écriturehébraïque. (Vient ensuite l'inscription de Siloé, un peu plustardive, puisqu'elle fut gravée sous Ézéchias [700 av. J.-C].) Sur lapente occidentale de la colline, les fouilles ont dégagé la porte dela ville et l'on y distingue des remaniements successifs destinés àrenforcer le système de défense. Avec ses contreforts bienappareillés et épaulés par deux solides tours, la porte de Samarie,devant laquelle se déroulèrent tant d'événements (1Ro 22:10 etsuivant, 2Ro 7:1,3,17,20), est un des documents les plusexpressifs de tous ceux que l'expédition de Harvard remit à lalumière (fig- 231). Souhaitons la reprise des recherches etsurtout la découverte des tombes royales, jusqu'ici non localisées,et peut-être non violées. A. P.