II Après l'exil. 1. IDEE D'EXPIATION.La réforme de Josias (622-621), avec la concentration du culte àJérusalem, et la ruine de l'existence nationale de Juda, quelquesannées plus tard (586), ont amené un profond changement dans leshabitudes et les conceptions cultuelles de la partie du peuple qui asurvécu à la ruine. La centralisation du culte a nécessairementrestreint le nombre des sacrifices et les a mis à part comme uneoeuvre spéciale à accomplir en dehors des devoirs de la viequotidienne. Auparavant, ils étaient intimement mêlés à tous lesévénements de l'existence; on allait au sanctuaire chaque fois qu'unfait heureux ou malheureux poussait l'Israélite à se présenter devantl'Éternel avec une offrande qui lui fût agréable. Ce n'était plus querarement possible quand il fallait pour cela faire un long voyage.Offerts seulement à certaines époques de l'année, les sacrifices ontpris le caractère d'actes distincts de piété, à côté des autresformes de la vie religieuse, et tout naturellement on les considéraitcomme ayant une valeur spécifique, que n'avaient pas au même degrédes actions qu'on pouvait accomplir tous les jours. Le châtiment del'exil a d'autre part donné au sentiment du péché une force qu'iln'avait jamais eue auparavant; en conséquence, la premièrepréoccupation des fidèles Israélites est devenue celle d'éloigner lacolère de Dieu et de rentrer en grâce auprès de lui. Le besoin depardon l'emportait sur tous les autres; quand le fidèle se présentaitdevant Dieu, il voulait avant tout obtenir l'effacement de sesfautes. Aussi la valeur spécifique des sacrifices, préparée par lacentralisation du culte, a-t-elle été attachée à la notiond'expiation.--Sans doute déjà avant l'exil cette notion n'était pasabsente (1Sa 7:9 3:14 26:19), mais les sacrifices par lesquelson cherchait à détourner la colère de Dieu n'étaient pas d'une espèceparticulière, et l'expiation n'occupait pas la première place dans lagénéralité des sacrifices; c'était une grâce que l'on pouvait obtenirà côté des autres, la seule que l'on visait dans certains cas, maisnon pas la seule que l'on recherchât en toutes circonstances au moyendes mêmes oblations. D'autre part, la notion ancienne de simpleoffrande agréable à Dieu persiste encore, après l'exil, dansplusieurs espèces de sacrifices, comme on le verra plus loin. Il n'enreste pas moins qu'il y a dans l'ensemble une différence profondeentre la notion ancienne et la notion nouvelle: avant l'exil,offrande; après l'exil, moyen d'expiation. 2. VALEUR DU SANG.L'expiation est attachée spécialement à l'effusion du sang ou, plusexactement, à la présentation du sang sur l'autel. (cf. Le17:11, qui est décisif sur ce point) Après la défense de manger dusang, Dieu ajoute: «Car l'âme de la chair est dans le sang; je vousl'ai donné sur l'autel afin qu'il serve d'expiation pour vos âmes,car c'est par l'âme que le sang fait expiation.» Ce passage estintéressant à plus d'un égard. Il montre tout d'abord comment nousdevons envisager la doctrine de l'expiation dans l'A.T. Le faitpremier est la volonté de Dieu de pardonner à son peuple. Il n'estpas un Dieu farouche qu'il faille bien disposer par toute espèce demoyens ayant en eux-mêmes la puissance d'apaiser sa colère: oùtrouver ces moyens? Il est au contraire le Dieu plein de miséricordequi veut demeurer en communion avec son peuple, et qui, sachant lepeuple pécheur, donne lui-même le moyen par lequel les péchés serontexpiés devant lui et les pécheurs mis de nouveau au bénéfice de sesgrâces. Sur l'étendue de l'expiation par le sacrifice et le pardonaccordé aux pécheurs sans l'intervention d'un sacrifice, voir plusloin, III Le fait que le moyen d'expiation est donné par Dieu lui-mêmeexplique en même temps comment il peut être un moyen suffisant. Il nel'est pas nécessairement en vertu de sa valeur intrinsèque; il l'estparce qu'il vient de Dieu, parce que Dieu l'a institué et par là mêmea déclaré qu'il s'en contentait. Peu importe qu'il s'agisse d'uneinstitution directe ou d'une institution créée par l'histoire; on nemettait pas en doute au temps du Code sacerdotal que la loi dessacrifices ne fût l'expression de la volonté de Dieu à l'égard de sonpeuple.--Une exposition dogmatique sur la manière dont le sang desvictimes peut expier les péchés des hommes ne se trouve nulle partdans l'A.T. Pas plus qu'on ne se demandait autrefois pourquoi Dieuréclamait de ses adorateurs des sacrifices plutôt que toute autremanifestation de reconnaissance, pas plus on ne se demandait dans lejudaïsme comment le sang des victimes avait objectivement le pouvoirde purifier les pécheurs. Dieu l'avait ainsi ordonné, on n'allait pasplus loin. Il est certain cependant que l'on attribuait la valeur d'unsacrifice sanglant à un des éléments du rite plutôt qu'à un autre, etque l'on interprétait l'offrande du sang dans un sens plutôt que dansun autre. A ce point de vue on comprend que les exégèses modernesaient échafaudé de nombreuses théories sur la valeur des sacrifices.Mais ces théories sont toutes également fausses, dès qu'ellescherchent à fixer en vertu de quelle raison intrinsèque un sacrificedevait produire l'effet qui lui est attribué. Jamais le sang destaureaux et des boucs n'a pu objectivement effacer les péchés deshommes (Heb 10:1,14); il ne les a effacés qu'en vertu du bonplaisir divin qui a bien voulu établir (ou accepter) pour un temps unsemblable moyen d'expiation. Nous devons donc laisser de côté touteconsidération dogmatique et nous borner à rechercher comment lesJuifs comprenaient eux-mêmes les prescriptions divines relatives auxsacrifices. Le terme hébreu technique pour dire «expier», «produirel'expiation des péchés», est le verbe kipper. Quelle que soit lasignification primitive de la racine dont il dérive (couvrir;effacer, détruire, dans les langues voisines de l'hébreu), la forme kipper n'est jamais employée par la loi sacerdotale et parÉzéchiel que dans le sens de: faire expiation. Ailleurs elle peutavoir un sens plus général: pardonner (Ps 65:4 78:38),apaiser (Ge 32:20), mais toujours en rapport avec un péché dontil faut éloigner les conséquences. Très rapproché de la forme verbaleest le substantif kopher, rançon. Tout le monde n'est pasd'accord sur le lien qui existe entre les deux mots; mais, quand onconsidère les passages où ils sont employés, on ne peut se soustraireà la pensée qu'il est très étroit: le kopher est le moyen parlequel s'opère le kipper; en d'autres termes, c'est en payant larançon d'un péché qu'on en obtient l'expiation. D'après Le17:11, cette rançon est le sang, que Dieu lui-même a expressémentdonné pour cela: le sang, la vie, de la victime sacrifiée est le pretium expiationis et redemptionis.--On a compris cettedéclaration dans le sens de la «satisfaction vicaire», c'est-à-direde la substitution d'une victime innocente à l'individu coupable:Dieu aurait accepté la mort de l'animal comme remplaçant le châtimentmérité par le pécheur. On cite, pour appuyer cette manière de voir,De 21:1-9 (meurtre commis par un inconnu et dont lesconséquences doivent être effacées par le sacrifice d'une génisse);Ex 20:5 (châtiment des pères retombant sur les enfants); Ge22:1,14 (bélier sacrifié à la place d'Isaac). Mais dans ces deuxderniers passages il n'est pas question d'expiation proprement dite,et dans De 21:1,9 la génisse qu'on égorge pour effacer le sangrépandu rentre dans la catégorie des sacrifices pour le péché dont ilsera question plus loin (3, c). La satisfaction vicaire n'est sans doute pas étrangère àl'A.T, (cf. Esa 53,Le 16:21, bouc pour Azazel) mais elle n'estpas à la base des sacrifices sanglants dans la loi sacerdotale, carsi c'était le cas, l'égorgement de la victime serait l'acte importantdu sacrifice, tandis qu'il ne joue qu'un rôle secondaire dans lesrites prescrits. En outre la victime chargée des péchés del'Israélite serait impure, et sa chair ne pourrait pas venir surl'autel: le bouc pour Azazel (voir ce mot) était chassé audésert (Le 16:20,22). Surtout le sacrifice devrait être toutparticulièrement réclamé pour les péchés qui entraînaient la mort del'Israélite; mais, dans ce cas, il ne l'était jamais: la mort devaitêtre subie par le coupable. Pour se rendre compte de la manière dont la loi envisageait lesacrifice sanglant, il faut faire intervenir la notion générale dusacrifice qui est une offrande à Dieu, apportée par l'Israélite,transmise par le prêtre. Le sang, lui aussi, est une offrande, uneoffrande particulièrement précieuse devant Dieu, puisqu'il représentela vie qu'il a donnée et qui lui appartient à lui seul. C'est lavaleur de l'offrande qui en fait une rançon suffisante pour que Dieupardonne et que le pécheur rentre en grâce auprès de lui. Il estnaturel que, partant de là, on ait ajouté à la notion d'une choseparticulièrement précieuse celle d'une vie sacrifiée par la fauted'un autre, et qu'ainsi l'idée de substitution se soit introduite,plus ou moins clairement, dans les conceptions israélites de certainssacrifices. Mais elle n'a pas été l'idée première, et elle n'est pasdevenue l'idée générale. Elle perce en revanche dans les sacrificesdu grand jour des Expiations (voir Fêtes), car ici la chair desanimaux sacrifiés n'est pas apportée à l'autel, ni mangée par lesprêtres, mais brûlée hors du camp. 3. LES DIVERS SACRIFICES.C'est seulement à partir d'Ézéchiel, dans la loi sacerdotalepostexilique et dans les documents contemporains, qu'on trouve desdétails précis sur ce point: on ne peut donc en tenir compte que pourl'Israël d'après l'exil. Mais il va sans dire que la loi sacerdotalen'a pas créé de toutes pièces les prescriptions qu'elle contient. Onsait que dans les religions il n'y a rien de plus tenace que lesrites et que, transmis à travers les siècles, ils peuvent remontertrès haut. Aussi est-il extrêmement probable que la loi sacerdotale areproduit sur bien des points le rituel en usage avant l'exil dans lesanctuaire de Jérusalem, et ce rituel était sans doute plus ancienencore. Peut-être certains détails étaient-ils déjà fixés aux tempsdu désert, et la ressemblance que l'on a constatée entre des ritescananéens et les rites israélites permet de supposer que lespratiques des anciens habitants du pays ne sont pas étrangères audéveloppement du rituel observé dans les grands sanctuaires de Judaet d'Israël (voir l'ouvr. de R. Dussaud cité plus loin). Mais étantdonné le manque de renseignements dans les documents antérieurs àl'exil, on ne peut pas faire le départ entre ce qui est ancien et cequi est nouveau dans les lois cultuelles du Lévitique, et le plussimple est d'exposer la législation nouvelle sans tenir compte de cequi pouvait exister autrefois. Nous distinguons entre sacrifices non sanglants et sacrificessanglants. 1. Sacrifices non sanglants. (a) Libation (hébreu nések) Les libations, comme sacrifices indépendants, n'ont jamais joué ungrand rôle en Israël. Avant l'exil elles ne sont mentionnées que1Sa 7:6 (2Sa 23:16 n'entre pas en ligne de compte parcequ'il s'agit d'un fait très spécial). Quand les prophètes parlent delibations, ils entendent des libations faites en l'honneur des dieuxpaïens (Jer 7:18 32:29 44:17 et suivant, Os 9:4).--Dans leCode sacerdotal les libations accompagnent toujours d'autressacrifices: les libations de vin, dans un grand nombre de cas, lessacrifices sanglants (No 15:1,16 28:31 etc.); les libationsd'huile, les offrandes non sanglantes (Le 2). D'après le traité Sukka (4:9), une libation d'eau figurait dans le rituel de lafête des Tabernacles. (b) Offrande (hébreu minkhâ) Le mot offrande, qui désignait dans l'ancien Israël toute espèce desacrifices, n'est plus employé dans le Code sacerdotal que pour lesoffrandes non sanglantes: prémices, gâteaux, grains rôtis et broyés,etc. Les offrandes pouvaient être présentées seules à l'autel.C'étaient alors généralement des offrandes privées: une partie étaitbrûlée sur l'autel et le reste revenait au prêtre. Elles étaientapprêtées de différentes façons; on ajoutait à la fleur de farine del'huile et quelquefois de l'encens, mais pas de levain, sauf danscertains cas spéciaux.--Voir (Le 23:17 7:13) Le 2, quiindique cinq espèces d'offrandes laissées au choix des particuliers;Le 6:7,11, qui précise le rituel; Le 6:12,16, qui concernel'offrande que le grand-prêtre doit présenter au jour de sonordination (elle est brûlée tout entière); Le 24:5,9, pains deproposition, qui sont l'offrande perpétuelle de la communauté; No15:17,21, offrande des prémices de la pâte. Mais le plus souventles offrandes accompagnaient un holocauste ou un sacrifice d'actionsde grâces, soit privé, soit de communauté. Voir spécialement No15:1,16, qui précise la grandeur de l'offrande d'après l'importancede la victime offerte en sacrifice; cf. en outre No 15:24,Le7:11,14.--L'offrande n'avait pas de valeur expiatoire, sauf en unseul cas: quand un homme était trop pauvre pour présenter un«sacrifice pour le péché»; la loi l'autorisait alors à n'offrir qu'undixième d'épha de fleur de farine, sans huile ni encens (Le5:11-13). (c) Offrande de parfum (hébreu qetôreth) Il ne s'agit pas ici de l'encens qui servait à la préparation decertaines offrandes non sanglantes (Le 2:2,15 24:6 et suivant);il s'agit d'oblations consistant uniquement en parfums. Elles sontmentionnées Jer 6:20, et nous pouvons conclure de là qu'ellesexistaient déjà avant l'exil, mais les autres passages qui lesmentionnent dans nos traductions françaises (1Ro 3:3 22:44,2Ro16:4) ont un autre sens dans l'original hébreu. En revanche, ellesoccupent une assez grande place dans le Code sacerdotal. On offraittout d'abord les parfums sur des brasiers (Le 10:1,No16:6,17,36-40,46-48), et la coutume s'en est établie le grand jourdes Expiations (Le 16:12 et suivant). Mais, avec le temps,l'offrande de parfum devint un sacrifice régulier qu'on présentaitchaque matin et chaque soir, sur un autel spécial, l'autel desparfums placé dans le lieu saint devant le voile (Ex30:1,10,34,38). Ces passages sont de date récente; d'autres passagesdu Code sacerdotal qui énumèrent les différentes espèces desacrifices ne mentionnent pas encore l'offrande de parfum commesacrifice régulier. Le parfum était, à cause de sa valeurintrinsèque, une offrande particulièrement précieuse. Dans No16:46,48 il a valeur expiatoire. C'est pendant que Zacharieprésentait à Dieu l'offrande de parfum dans le temple qu'il reçut lapromesse qu'il aurait un fils, le futur Jean-Baptiste (Lu 1:9et suivants). 2. Sacrifices sanglants. (a) Sacrifices d'actions de grâces ou de prospérité (hébreu chelem,chelâmim) Ils ont conservé plus que les suivants l'ancien caractère dessacrifices, celui d'offrande pour remercier Dieu de ses bienfaits etimplorer de nouvelles bénédictions. Ézéchiel les range parmi lessacrifices expiatoires (Eze 45:17), mais dans le Code sacerdotalcette signification n'est pas relevée, quoique le sang versé surl'autel suppose qu'elle n'était pas complètement absente.--Il y avaitdifférentes catégories de sacrifices d'actions de grâces: lesacrifice de louange (tôda), le sacrifice pour l'accomplissementd'un voeu (néder), le sacrifice volontaire (nedâbâ). Le7:11-21 mentionne les trois catégories, Le 22:17,25 et No15:1,16 les deux dernières. Ces passages contiennent en outre desindications sur le rituel, mais le plus complet à ce point de vue estLe 3. Nous notons qu'il n'y a pas de catégorie spéciale pour lessacrifices de supplication: vu l'éloignement du sanctuaire, ilsétaient remplacés par les sacrifices pour l'accomplissement d'unvoeu.--Du reste la loi ne précise pas, en dehors du catalogue desfêtes (Le 23), les occasions dans lesquelles les diverssacrifices devaient être offerts; elle se contente d'en fixer lerituel, comme c'était déjà le cas pour les sacrifices non sanglants.Les uns et les autres étaient laissés à la liberté des fidèles. Ilsn'avaient en réalité qu'une importance secondaire. (b) Holocauste (hébreu ôlâh) L'holocauste ne se distinguait autrefois du sacrifice d'actions degrâces que par la grandeur du don, toute la victime étant brûlée surl'autel, et ce caractère lui est resté, dans une certaine mesure,jusqu'à la fin (cf. Le 22:17,25, cité plus haut; Ps 20:466:13,15). Mais après l'exil il a reçu en outre une portéeexpiatoire (Job 1:5,Le 1:4). Aussi la loi, pour le rendreaccessible à toutes les bourses, admet-elle de très petits animaux,comme la tourterelle et le pigeon, parmi ceux qui peuvent êtreofferts en holocauste. Le rituel est indiqué Le 22:17-25(victimes sans tare quelconque), Le 6:1,6; cf. No 15:1,16.Mais quand il s'agit de sacrifices de particuliers, la loi ne précisepas les occasions concrètes dans lesquelles il faut offrir unholocauste, sauf en certains cas spéciaux: Le 12:6-8 (femmeaccouchée); Le 15:15,30 (impureté lévitique); No 6:14 (naziréen àla fin de son voeu); Le 8:18,21 (consécration des prêtres).Quand plusieurs sacrifices étaient offerts à la fois, l'holocauste nepouvait pas manquer.--Dans la loi, il est essentiellement sacrificede la communauté: chaque jour, matin et soir, on devait offrir unagneau d'un an en holocauste à l'Éternel. C'était le tâmid ousacrifice perpétuel, qui ne devait jamais manquer et qui était ainsila base du culte rituel. Il était toujours accompagné d'une offrande(au nom du grand-prêtre) et d'une libation, souvent d'un sacrificed'expiation. Voir No 28 et 29, prescriptions du rituel pour lesjours ordinaires, les sabbats et les différentes fêtes. C'était commela prière quotidienne de la communauté, augmentée les jours fériés,et le sang versé sur l'autel devait en même temps la couvrir devantla colère de Dieu. L'interruption du tâmid était considérée commele plus grand malheur qui pût arriver au peuple: c'est ce qui seproduisit au temps des persécutions d'Antiochus Épiphane (168-165),prélude des guerres de l'indépendance et de l'époquemacchabéenne.--Nous notons que No 15:22-26 réclame un holocaustepour un péché involontaire de la communauté, tandis que, pour lepéché involontaire d'un simple Israélite, les versets 27,31 réclamentun sacrifice pour le péché. (c) Sacrifice pour le péché ou sacrifice d'expiation (hébreu khattâth) et (d) sacrifice de culpabilité (hébreu âchâm). Nousles traitons ensemble, parce qu'il est souvent difficile de lesdistinguer et qu'ils occupent ensemble une place prépondérante dansle Code sacerdotal. Ils sont devenus, après l'exil, les plusimportants des sacrifices et ils sont réclamés dans les occasions lesplus diverses. Avant l'exil les deux mots de âchâm et de khattâth ne figurent ensemble que 2Ro 12:16, où ilsdésignent plutôt des amendes à payer aux prêtres (voir plus haut, I,3). Mais on peut voir dans Os 4:8 une allusion au sacrifice pourle péché (les prêtres se repaissent des péchés de mon peuple) et le âchâm est mentionné 1Sa 6:3 (offrande à ajouter au renvoi del'arche pour apaiser la colère de l'Éternel). Le petit nombre decitations ou d'allusions nous paraît indiquer que les deux sacrificesn'avaient pas avant l'exil la même importance que plus tard.Cependant ils étaient déjà connus, du moins dans certainssanctuaires; sans cela nous nous expliquerions difficilement la placequ'Ézéchiel leur attribue dans sa reconstruction de l'avenir (Eze.40-48). Ils figurent dans la consécration de l'autel (Eze43:18,27), dans la purification du sanctuaire (Eze 45:18,25);ils sont en outre mentionnés ensemble Eze 40:39 42:13 44:2946:20. Mais, s'ils étaient déjà connus, c'est probablement àÉzéchiel lui-même qu'ils doivent d'avoir acquis le premier rang dansle culte postexilique. Les principaux passages de la loi relatifs au sacrifice pour lepéché et au sacrifice de culpabilité sont: pour le premier Le4:1-5:13 6:17,23,No 15:22-31; pour le second Le 5:14-6:7 7:1,714:12-18. Les deux sacrifices n'ont pas toujours été distinguéstrès nettement l'un de l'autre. C'est ainsi que l'on trouve, dansLe 4:1-5:13, un passage postérieur (Le 5:1,6) où le mot âchâm est employé au lieu de khattâth pour une série de casqui entrent dans les fautes à expier par un sacrifice pour le péché,et le mot âchâm figure également à tort v. 7. De même, dans Le5:14-6:7 (sacrifice de culpabilité), le passage Le 5:17,19 estpostérieur et mêle les deux espèces de sacrifices. Si, pour le sacrifice de culpabilité (âchâm), on s'en tient àLe 5:14-16 6:1-7, la signification spéciale de ce sacrifice estassez claire. On l'offrait quand il y avait eu atteinte à lapropriété d'autrui. Le péché à expier est appelé maal: infidélité, sacrilège. Il y avait infidélité vis-à-vis de Dieu, quandl'Israélite s'appropriait indûment des choses consacrées àl'Éternel (cf. Jer 28,Le 22:16) ou quand il cherchait à tromperdans les redevances qui lui incombaient vis-à-vis du sanctuaire. Il yavait infidélité vis-à-vis des hommes, quand on s'appropriait un bienconfié ou quand on prenait par ruse ou par violence ce quiappartenait au prochain. Une infidélité vis-à-vis des hommes était enmême temps une infidélité vis-à-vis de Dieu. Dans les cas de cettenature, on devait offrir non seulement un sacrifice deculpabilité, (rituel: Le 7:1-7) mais restituer complètement lachose mal acquise en y ajoutant un cinquième de sa valeur (Le5:16 6:4,No 5:5-8). Le sacrifice de culpabilité était réclamé danscertains cas spéciaux: purification d'un lépreux guéri, quinécessitait également un sacrifice pour le péché (Le 14:12-18);expiation d'une faute commise avec une femme fiancée, mais nonaffranchie (Le 19:20,22); renouvellement du voeu du naziréensouillé par le contact d'un mort (No 6:12). Comp. Esd10:19: les fils de prêtres qui ont épousé des femmes étrangèresdoivent les renvoyer et offrir un sacrifice de culpabilité. Le sacrifice pour le péché portait sur un domaine beaucoup plusétendu. Il devait être offert «toutes les fois que quelqu'un avaitpéché involontairement contre l'un des commandements de l'Éternel, enfaisant des choses qui ne doivent point se faire» (Le 4:2). Lepassage Le 4:1-5:13 indique le rituel à observer suivant lesdifférentes catégories de personnes: grand-prêtre (Lev 4:3, 12);assemblée d'Israël (Lev 4:13, 21); un chef (Lev 4:22 - 26); un hommedu peuple (Lev 4:27-35). un pauvre: deux tourterelles ou deux pigeons(Lev 5:7, 10); un très pauvre: l'offrande d'un dixième d'épha defleur de farine (Lev 5:11, 13; voir aussi Lev 6:24, 30). Nous nousbornons à relever les détails suivants: 1° celui qui offrait le sacrifice devait poser lamain sur la victime avant de l'égorger lui-même au lieu réservé pourcela; 2° le prêtre prenait un peu de sang avec son doigtet en mettait sur les cornes de l'autel, puis il versait le reste aupied de celui-ci; 3° il brûlait ensuite sur l'autel les partiesgrasses de la victime; 4° quand il s'agissait du sacrifice du grand-prêtreou de celui de la communauté, le reste de la victime devait êtrebrûlé hors du camp dans un lieu pur; 5° s'il s'agissait de sacrifices de particuliers, lereste de la victime revenait aux prêtres, mais seuls les mâles de lafamille pouvaient en manger; 6° pour le grand-prêtre et pour la communauté,l'autel dont les coins doivent être teintés du sang de la victime estl'autel des parfums dans le sanctuaire, et en outre il doit y avoirsept fois aspersion du sang devant le voile, tandis que pour lessimples particuliers l'autel des holocaustes entre- seul en ligne decompte; cette différence est sans doute un développement du rituelprimitif; 7° l'imposition de la main du sacrifiant sur lavictime, avant qu'elle soit immolée, ne signifie pas qu'il luitransmet les fautes dont il désire obtenir l'expiation, mais qu'il laprésente comme un don venant de lui, car le même rite est commandéaussi pour les autres sacrifices sanglants (sacrifice d'actions degrâces et holocauste).--Nous ajoutons que, pour ces autressacrifices, le sang n'était pas appliqué aux cornes, puis versé aupied de l'autel, mais que le prêtre le répandait tout autour del'autel et en aspergeait les quatre côtés.--Les divers cas danslesquels il fallait offrir un sacrifice pour le péché ne pouvaientpas être énumérés en détail, puisque ce sacrifice était réclamétoutes les fois qu'il y avait faute contre un commandementquelconque. Aussi ne trouvons-nous à ce sujet que quelquesindications: voir Le 5:1,6, qui énumère quatre fautes, deuxrituelles et deux morales; Le 12:6,8, cas de l'accouchée oùl'holocauste de purification doit être accompagné d'un sacrifice pourle péché; Le 14:19, purification du lépreux guéri, oui réclameun sacrifice pour le péché à côté du sacrifice de culpabilité; Le15:30 (impureté lévitique), sacrifice pour le péché à côté del'holocauste; No 6:8 et suivants (naziréen souillé par lecontact d'un mort), sacrifice pour le péché à côté de l'holocausteet, pour le renouvellement du voeu, d'un sacrifice de culpabilité. Enoutre, les sacrifices pour le péché figurent spécialement, à côté desautres sacrifices réglementaires, dans le rituel des jours de fête(No 28 et No 20) et dans la cérémonie de la consécrationdes prêtres (Le 8 Ex 29:1-28). Voir plus haut les passagesd'Ézéchiel relatifs à la consécration de l'autel (Eze45:18-25) et à la purification du sanctuaire;voir (Eze45:18,25) Autel.