REPAS

En dehors d'une légère collation matinale, que le Talmud appelle lemorceau du matin, et qui se composait le plus souvent d'une tranchede pain avec quelques olives ou des poissons grillés (Ex16:8,12,Jn 21:9), les Israélites prenaient deux repas par jour: l'unvers midi (Ge 43:18,25,Ru 2:14), l'autre un peu avant ou aprèsle coucher du soleil (Lu 14:17 17:7 et suivant). A l'ordinaire,le repas familial consistait en un potage (Ge 25:29,34,2Ro 4:38)ou en un ragoût de viande et de légumes étuvés ou bouillis ensembleet, selon le goût oriental, relevés d'épices variées (Eze 24:4et suivant, Mic 3:3). On connaissait aussi cependant les viandesgrillées sur des braises ardentes ou rôties à l'huile (Ex 12:8et suivant, 1Sa 2:15,Pr 12:27). Quand on le prenait dans leschamps, au temps de la moisson, le repas de midi était extrêmementfrugal: du grain torréfié et du pain trempé dans du vinacidulé (Ru 2:14), ou bien même une simple panade qu'onapportait chaude aux moissonneurs à l'heure de la sieste (Be 1:33).D'abord très simple et rudimentaire, à l'époque patriarcale etnomade, la cuisine devint, par la suite, plus délicate et raffinée;puis, avec la prospérité grandissante, se développa le goût de labonne chère, et les prophètes durent souvent s'élever contre le luxede la table des grands (Am 6:4,Esa 5:22:13). Voir Alimentation. A l'origine, les Hébreux mangeaient, comme le font encoreaujourd'hui les fellahs du Levant, assis ou plutôt accroupis à terre,sur une natte ou une peau de bête, autour d'un plat commun où chacunpuisait avec les doigts (Ge 37:25,Ex 32:6,Ru 2:14). Puis, àl'époque sédentaire, on connut la table, dont l'usage fut sans douteemprunté aux Cananéens, et l'on se servit de sièges (Jug 1:7,1Sa20:24 et suivant, 1Ro 13:20,2Ro 4:10). Vers le VIII e siècle,probablement sous l'influence syrienne, apparut la coutume, qui segénéralisa peu à peu malgré les admonestations des prophètes, des'étendre sur des sofas disposés autour de trois des côtés de latable, le quatrième restant libre pour permettre le service: (Am6:4,Eze 23:41,Jug 12:15) on s'y allongeait sur le côté gauche, lecoude appuyé sur la table, et l'on se servait uniquement de la maindroite. Les sofas, que partageaient le plus souvent deux ou troisconvives, faisaient avec la table un angle tel que chacun avait latête à la hauteur de la poitrine ou de la taille--comme on disaitalors, dans le sein (voir ce mot)--du voisin de gauche, auquel ilétait ainsi facile de parler en particulier (Jn 13:23,25). A l'époque de Jésus, avant de se mettre à table, on se lavait lesmains en les arrosant d'eau jusqu'au poignet: cette coutume nerépondait pas uniquement à une considération de propreté; elle avaitsurtout un caractère religieux, et les pharisiens y attachaient unegrande importance (Mt 15:2,Mr 7:3 et suivant, Lu 11:38); degrandes jarres d'eau réservées à cet usage se trouvaient dans toutesles maisons (Jn 2:6). Une fois les plats déposés sur la table par une des femmes de lamaison (Mt 8:15,Lu 10:40,Jn 12:2) ou par les domestiques (Jn2:5,9), un des convives rendait grâces à haute voix en récitant uneformule de bénédiction tirée du Deutéronome, et tous les assistantsensemble prononçaient l'amen final. Dans les familles pieuses, on nese bornait pas à bénir la table en général; on bénissait chaquealiment particulier: le pain, le vin, la viande, le fruit des arbreset de la terre. Jésus s'est conformé à l'usage général et l'a ainsisanctionné de son autorité (Mt 14:19 15:36 26:26 et suivant,Lu 24:30,Jn 6:11). L'apôtre Paul a fait de même (Ac 27:37).Voir Benedicite. La viande, découpée à l'avance en morceaux, était apportée avecles autres mets dans de la vaisselle de terre chez les petites gens,de cuivre chez les riches. Le maître de maison distribuait lesportions (1Sa 1:4), que chaque convive recevait sur le painplacé devant lui et mangeait ensuite avec les doigts, cuillers etfourchettes étant ustensiles inconnus; la sauce était servie dans unplat spécial où l'on trempait à tour de rôle un morceau depain (Pr 26:15,Mt 26:23,Jn 13:26). Le repas se terminait par unedernière bénédiction. Les Juifs, très hospitaliers, échangeaient entre eux defréquentes invitations: anniversaires de naissance (Mt 14:6),mariages (3Ma 4:8,Tob 8:19, Mt 22:3,Jn 2:1), funérailles(Lettre de Jérémie 32), vendanges et récoltes (Jug 9:27),tonte de la laine (1Sa 25:2,36), etc. étaient autant d'occasionsde convier amis et connaissances à la table de famille. La plupartdes grandes salles mentionnées dans la Bible le sont à propos derepas (Est 7:8,Da 5:10,Mr 14:14,Mt 22:10 25:10). Un banquetétant une occasion de réjouissances, les Juifs en avaient fait unsymbole de l'ère messianique, et Jésus applique l'image au bonheur dela vie future (Mt 8:11 26:29,Lu 14:15 22:30,Ap 19:9). Les invités, à la rencontre desquels des serviteurs étaientenvoyés à l'heure du festin (Mt 22:3,Lu 14:17), étaientaccueillis par un baiser de leur hôte (Lu 7:45); on leur lavaitles pieds, que les sandales protégeaient mal contre la poussière duchemin (Ge 18:4,Lu 7:44); on leur répandait sur la tête unehuile parfumée (Lu 7:46,Ps 23:5,Am 6:6); peut-être y déposait-onune couronne (Esa 28:1); et celui qu'on appelait en grec l'architriclin (voir Maître, parag. 6), maître d'hôtel ouordonnateur du repas (Jn 2:8), les menait à leurs placesrespectives selon la considération dont on voulait lesentourer (1Sa 9:22,Lu 14:8). Après les ablutions rituelles etl'action de grâces commençait le repas, qui comprenait plusieursservices: les morceaux de choix étaient réservés à ceux des convivesque l'on voulait honorer d'une façon particulière et qui setrouvaient assis aux «premières places» (1Sa 9:23 et suivant);des vins de qualités différentes accompagnaient les diversservices (Jn 2:10); et, pour égayer les convives, il y avait dela musique (1Ma 9:39-41, Esa 5:12,Am 6:5), deschants (2Sa 19:35,Jer 25:10), des danses (Mt 14:6,Lu 15:25)et des jeux d'esprit (Jug 14:12). Le festin nuptial durait septjours, qu'on appelait les sept jours du repas de noces (Jug14:10,12, Tob 11:19). Les repas de deuil (voir ce mot)suivaient immédiatement les funérailles; ils étaient, en général,offerts par les amis à la famille: c'était le pain dedeuil (2Sa 3:35,Os 9:4,Jer 16:7,Eze 24:17). Sur la bienséance à table, on consultera avec intérêt lespréceptes d'un bon sens parfois réaliste et terre à terre que donnele Siracide (Sir 31:12-32:6,37:29-31). Voir également laparole de Jésus sur l'hospitalité désintéressée (Lu 14:12 etsuivant) et la maxime de saint Paul (1Co 10:31). Pour le dernierrepas de Jésus, voir Cène et Agape. Ch. K.