PALESTINE 2.

II Géographie physique. Voir Atlas 20Les traits caractéristiques du relief qui constituent commel'ossature de la Palestine sont très simples dans leurs grandeslignes. Ils forment 4 bandes longitudinales parallèles: une zone côtière, succession de riches plainesbasses et sablonneuses, anciennes plages soulevées; la Cisjordanie, à l'Ouest du Jourdain, formée parune chaîne de montagnes et de collines enchevêtrées allant du N. auSud, du Liban au désert de Paran; une longue dépression axiale, le fossépalestinien, qui coupe le pays dans toute sa longueur pour constituerune vallée profonde dont le niveau est au-dessous du niveau de la merMéditerranée; elle comprend la plaine du Jourdain (el-Ghôr), la merMorte, la dépression de l'oued Djeîb (Araba), qui ne sont qu'unepartie de cette longue faille syro-africaine qui va du Taurus à lamer Rouge; la TransJordanie, à l'Est du Jourdain, est forméepar une série de plateaux ondulés de direction générale N.-S.; élevésde plus de 1.000 m., ils paraissent être un lointain prolongement del'Anti-Liban. 1. LA ZONE COTIERE.Elle s'infléchit légèrement du N.-N.-E. au Sud-S.-O. et prend troisaspects différents: (a) au Nord du cap Ras en-Nâkoûra, limite extrême de la Palestine, elleest formée par les derniers contreforts du Liban que les flots ontdécoupés en une multitude d'anses et de criques en dents de scie; (b) du Ras en-Nâkoûra à la pointe du Carmel, «régionde transition», le pied des montagnes s'éloigne de la côte, lescriques deviennent rares et une grande baie se creuse avec une plagede sable fin et un port à chaque extrémité: au Nord Akko (Ptolémaïs [v. ce mot], ou St-Jean d'Acre) et au Sud Caïffa ou Haîfa; (c) au Sud du Ras el-Kroûm, promontoire du Carmel, la côte estrectiligne, plate, sablonneuse et bordée de dunes. Elle rappellecelles du Languedoc ou de la Gascogne. Elle est très inhospitalière,car non seulement elle est ensablée, mais encore, parallèlement aurivage, il existe souvent un chapelet de récifs isolés à fleur d'eau,très dangereux pour la navigation. Aussi les ports de Césarée et deGaza ne sont guère que des points de débarquement artificiels, trèsmal protégés contre les vagues du large. Celui de Jaffa, le seul vraiport, mais qui est maintenant fortement concurrencé par Haïfa, estlui aussi inhospitalier à cause des brisants et inutilisable par grostemps. Entre le littoral et la montagne s'étend une plaine fertileconstituant une grande unité géographique mais dont les trois partiesportent des noms différents. Elle commence par une étroite bande quis'élargit en descendant du N. au Sud où elle se confond avec lessteppes du désert de Tih. Elle est coupée, sensiblement au tiers desa hauteur, par la chaîne du Carmel au pied de laquelle se développela plaine d'Esdrelon ou de Jizréel, la «mer d'émeraude», formée desables et d'alluvions fertiles lardés de nombreux épanchementsvolcaniques. Elle est arrosée par le Nahr el-Moukatta, l'ancientorrent de Kison que Débora a chanté (Jug 5:21). Du Carmel àJaffa s'étend la plaine du Saron, dont les auteurs bibliquescélèbrent la beauté et la fertilité (Esa 35:2). Elle est arroséepar de nombreux cours d'eau dont les plus importants sont le Nahrez-Zerka (le fleuve aux crocodiles) et le Nahr el-Fâlik qui forme unlarge étang marécageux. Au S. de Jaffa se trouve la Séphéla, dont unepartie, ancienne plage soulevée, est plate et sablonneuse, et dontl'autre est formée de collines peu élevées qui rejoignentinsensiblement les collines du désert de Paran, tandis que la plagesablonneuse, coupée par l'oued Gazzeh (Bésor) et l'oued el-Arîch, seprolonge par les steppes de Sur. C'est le pays où s'exerça l'activitéde Samson. Les plaines côtières constituent aussi la grande voied'invasion de la Palestine. C'est là que passèrent les armées desThoutmès, des Ramsès, des Sennachérib, des Alexandre, des Saladin,conquérants anciens, et aussi celles des Napoléon, des Allenby,conquérants modernes. 2. LA CISJORDANIE.Zone montagneuse, qui se développe entre la plaine maritime et lefossé central du Jourdain et de la mer Morte. Elle comprend troismassifs principaux, de constitution géologique analogue, maisd'aspects assez différents: les montagnes, au Nord, de Galilée; aucentre, de Samarie; et au Sud, de Judée. (a) Le massif de Galilée (voir ce mot) est séparédu Liban par la coupure profonde du Nahr el-Kâsimîyé (dernier coudedu fleuve Litani). Le Liban (voir ce mot), longue et haute chaînemassive, sombre et découpée. Il possède les sommets les plus élevésde Syrie (plus de 3.000 m.). Les monts de Nephthali et de Galiléeprolongent le Liban. Avec eux on entre dans le territoire palestinienproprement dit. Ils ont un aspect très différent du Liban. Formés decalcaires crayeux et de marnes de couleur blanchâtre, non seulementils sont moins élevés, mais ils donnent moins nettement l'impressiond'une chaîne. Ils constituent un ensemble de montagnes bizarrementenchevêtrées et d'une orientation générale imprécise. Les plus hautesde ces montagnes: djebel Heider (1.049 m.), dj. Djermak (1.198), dj.Adathir (1.006) forment la Haute-Galilée. Le deuxième groupe demontagnes, de moitié moins élevées, Basse-Galilée. Ce sont celles des environs de Nazareth (560 m.)et le Thabor (562 m.), dont le sommet isolé forme une élégantecoupole. Une petite rangée d'élévations longe le bord du Jourdain.Cette région, dont le sous-sol renferme de nombreuses sources et dontle climat est plus humide que celui du S., a toujours été fertile. Onl'a appelée quelquefois «la riche Galilée», par opposition à «lapauvre Judée». Le réseau de collines est interrompu par la riche plained'Esdrelon ou de Jizréel (voir ces mots), qui s'avance comme un coin,au coeur même du pays. C'est la «trouée de Judée», la «cléstratégique de la Palestine». C'est à Méguiddo que les pharaonsThoutmès III et plus tard Néco luttèrent contre les armées du nord.C'est sur les bords du Kison que se livrèrent des combats sousDébora; c'est au mont Guilboa que furent tués Saül et ses fils, etBonaparte livra bataille aux environs du mont Thabor. Aussi le coursd'eau qui traverse la région a-t-il pris le nom de Nahr el-Moukatta =rivière du massacre. (b) Les montagnes de Samarie (voir ce mot). Ellesconstituent le massif central de la Palestine, dont le noyau estformé par les deux pointements tertiaires de l'Ébal et du Garizim(voir ces mots). L'Ebal (dj. Eslamîyé, 938 m.) est couronné par unplateau sur lequel Josué érigea un monument de pierres. Le Garizim(dj. et-Tour, 868 m.) est surtout constitué de calcairesnummulitiques. Les Samaritains y construisirent leur grand temple. Aces montagnes centrales vient s'articuler au Nord-E, la chaîne, enarc, formée par le dj. Akra et le dj. Foukoua dont fait partie lecélèbre mont Guilboa; elle est séparée. des dernières collines deGalilée par la vallée encaissée du Nahr Djâloud qui passe à Beisân.Au N.-O, diverge obliquement la longue arête du Carmel, dont le pointculminant atteint 518 m. Elle s'avance vers la mer et forme unpromontoire escarpe, môle naturel, qui abrite la baie de St-Jeand'Acre. Au S. et au Sud-O, de l'Ébal et du Garizim s'irradient ungrand nombre de petites chaînes secondaires divergentes quidélimitent des vallées plus ou moins fertiles. (c) Les monts de Judée (voir ce mot). Ils sontformés par des calcaires crétacés constituant un massif compact etcompliqué de montagnes, rocailleuses et sauvages, dont les pointsculminants forment une chaîne allongée dans la direction généraleN.-S. Ils sont comme «l'épine dorsale» de la Palestine. On distingue dans cet ensemble un premier massif, au Nord deJérusalem, à peine séparé du reste par une entaille, celle de l'ouedBodros qui s'ouvre dans la plaine en face de Lydda. On y remarque:les hauteurs de Kouriout (720 m.) près de Silo, Tell Ajour (960),Béitin (880), Bîré (890). Très souvent le sommet de ces montagnesporte un village dont les champs sont au pied. Le deuxième massif va de Jérusalem (755 m. au St-Sépulcre) àHébron (el-Khâlil, 927 m.). Les sommets les plus élevés de la chaînevarient entre ces deux hauteurs: Tekoûa (850 m.), djebel Ferdès (lamontagne des Francs, 759 m.), Tell Zîf (862 m.). A partir d'Hébron, les altitudes diminuent progressivement, enallant vers le sud. Les dernières hauteurs de Judée finissent par seconfondre avec les basses collines des déserts iduméens de Sur et deParan; ce sont plutôt des steppes ou des landes arides que devéritables déserts, car les troupeaux peuvent encore y pacager encertaines saisons. Le midbâr de la Bible n'est pas le désertabsolu des géographes (voir Désert). La véritable zone désertique necommence que plus près des montagnes sinaïtiques, au désert de Tih,le «désert de l'égarement». L'ensemble des landessteppico-désertiques du S. de la Judée constitue le Négeb (voir cemot), le pays sec du Midi palestinien. Quelques torrents asséchés une très grande partie de l'annéedrainent les eaux de pluie de cette région: le Sorek (oued Sarar) etle Bésor (oued Gazzeh), l'oued Abyad qui se jette dans le «torrentd'Egypte» (oued el-Arîch). Du flanc oriental de l'arête centrale des monts de Juda sedétachent les collines parallèles qui aboutissent aux rives de la merMorte, où elles forment une bordure de falaises à pic. Leur aspectdénudé, leur aridité leur ont fait donner le nom de «désert de Juda».Les collines qui se détachent du côté occidental, vers laMéditerranée, laissent entre elles, au contraire, des plaines plus oumoins fertiles. Elles vont former, en s'abaissant trèsprogressivement, la région des coteaux de la Séphéla. 3. LA VALLEE DU JOURDAIN.Dénommée par les Arabes el-Ghôr (=terre basse), elle constitue unedépression occupant une partie de la grande fissure qui va du Taurusà la mer Rouge, connue sous le nom de fossé ou couloir syro-africain.Il a été produit par un long effondrement consécutif à unedislocation terrestre longitudinale. La vallée débute au Merdj Ayoûn (=plaine des sources), àl'extrémité de laquelle se rejoignent les 3 sources principales duJourdain qui naissent des contreforts du mont Hermon: sourced'Hâsbeiyâ; de Tell el-Kâdi, près de Dan; et de Banias, l'ancienneCésarée de Philippe. Le cours d'eau qu'elles forment prend le nom deJourdain (voir ce mot), qui se jette d'abord dans le petit lac Hoûlé.Celui-ci, de forme triangulaire, a 5 ou 6 km. de long, sur autant delarge. Ses rives sont entourées d'épais marécages, surtout au NordLes auteurs bibliques appellent tout cet ensemble «les eaux de Mérom»(voir ce mot). De ce lac, d'une altitude de 2 m. au-dessus de laMéditerranée, au lac de Tibériade qui est à 210 m. au-dessous, lecours du fleuve est très rapide. Il suit une gorge resserrée forméepar les contreforts des montagnes de Safed et du Djôlân. Il atteintbientôt le lac de Tibériade, appelé aussi mer de Galilée ou lac deGénézareth. Cette magnifique nappe d'eau de forme ovale, entourée parun cirque de montagnes, rappelle par ses dimensions le lac deNeuchâtel (21 km. de long sur 12 de large et 42-48 m. de profondeur)et, par son site, le lac du Bourget. Le fleuve franchit le seuilbasaltique qui barre le lac au Sud et coule en serpentant dans unevallée bordée de terrasses alluviales que le fleuve a déposées aucours de son histoire. Ces terrasses s'appuient sur les flancs dechaînes parallèles aux rives. Cette vallée longue de 104 km. estrelativement étroite d'abord, puis elle s'élargit peu à peu. Ellereçoit comme affluents, sur la rive gauche: le Yarmouk (l'ancienHiéromax, le Cherîat el-Ménâdireh des Arabes), l'oued Arbaîn quipasse à Tibné, le Jabbok (oued Zerka) qui coule dans une valléebordée de lauriers-roses, et quelques autres; sur la rive droite:l'oued Bîré qui sort du Thabor, l'oued Djâloûd qui sort du Guilboa etpasse à Beisân, l'oued Fâria qui prend sa source au Garizim. Al'embouchure du Jourdain, la vallée atteint de 18 à 22 km. Le fleuvese perd dans la mer Morte par deux bras marécageux. Ses rives sontcouvertes d'une végétation abondante formant d'épais fourrés quicontrastent avec les bords désolés de la mer Morte. La mer Morte (lac Asphaltite, mer de Lot), de forme allongée, a75 km. de long sur 16 de large dans ses plus grandes dimensions; elleest un peu plus étendue que le lac Léman. Sa surface, d'un bleuindigo, est à 394 m. au-dessous de la Méditerranée, et comme l'eau aune profondeur maxima d'environ 400 m., le fond est à 794 m.au-dessous du niveau de la Méditerranée. Les eaux de la mer Morte(voir art.) sont chargées de sels divers. Elles sont si denses que lecorps humain immobile ne peut s'y enfoncer complètement. Les espècesqui peuvent y vivre sont relativement peu nombreuses, ce qui, ajoutéà la chaleur torride de ses bords encaissés, explique le silence etla désolation de ses plages. Celles-ci sont surplombées à l'Ouest parde hautes falaises, derniers contreforts des monts de Juda dont leséperons avancés forment des promontoires; à l'Est par les montsAbarim avec le Nébo, et les monts de Moab. Ces chaînes présentent delongues coupures transversales où passent les ouadi, dont lesprincipaux sont: le Zerka Maîn dont les gorges ont une luxuriantevégétation et qui reçoit les sources thermales de Callirhoé; l'ouedMôdjib (l'Arnon des anciens) qui fut longtemps la limite entre lepays d'Israël et celui de Moab. La dépression de la mer Morte se poursuit par la plainemarécageuse de la Sebka ou Sabkha, tout imprégnée de sel, qui bordel'embouchure de l'oued el-Djeîb (360 m. au-dessous de laMéditerranée). Les montures s'enlisent dans son sol mou et gluant.C'est «la vallée des Salines» où David vainquit les Edomites. Elle secontinue par la longue vallée de l'oued el-Djeîb ou dépression del'Araba (voir ce mot), «région stérile». Elle est flanquée d'un côté pardes collines gréseuses de teinte fauve, la chaîne des monts de Séir; del'autre, par le rebord fortement dressé du plateau désertique de Tih. Cettedépression, qui va jusqu'à la mer Rouge, est coupée en écharpe parles petites collines de Saté, formant un seuil à peu de distance dugolfe Aelanitique, qui n'est lui-même que le prolongement marin dufossé syro-palestinien. 4. LA TRANSJORDANIE.Elle s'étend à l'Est du Jourdain et de la mer Morte. C'est une régionde plateaux élevés et ondulés qui commencent au pied de l'Hermon(2.760 m.). Elle débute par le plateau du Djôlân, l'ancienneGaulanitide. Il est couvert de vastes nappes basaltiques rappelantles planèzes d'Auvergne, dont le sol est jonché de rochesgris-noirâtre. Par endroits surgissent de petites éminences plus oumoins coniques ou pyramidales, anciens cratères qui ont déversé leurslaves sur cette étendue qu'ils ont contribué à aplanir. L'un d'eux,le Birket er-Râm, en forme de coupe, est rempli par une importantemasse d'eau formant un «lac-cratère». Une coulée descendant vers lavallée du Jourdain a constitué un seuil, barrant le fleuve etl'obligeant à s'élargir. Elle a contribué ainsi à former le lac deGalilée, qui est un «lac de barrage». A l'Est de cette contrées'élève un massif volcanique montagneux, le djebel Hauran (voir cemot). Le Djôlân, très étendu, se prolonge jusqu'à la coupure duHiéromax (Yarmouk). Cette région est riche en fontaines et enruisseaux; les indigènes l'appellent le «pays de verdure». Aux plateaux basaltiques, formés de roches foncées, succèdent desplateaux calcaires, aux roches crayeuses et claires: c'est le pays deGalaad (voir ce mot), l'ancienne Pérée romaine. Elle s'étend del'embouchure du Yarmouk à celle de l'Arnon (oued Môdjib). La premièrepartie du plateau est l'Adjloûn, dont le point culminant atteint1.260 m. Elle est séparée de l'el-Belkâ par le Jabbok (oued Zerka),la «rivière bleue». Sa partie S. est formée par les monts Abarim avecle mont Nébo où mourut Moïse (De 32:49,34:1). Ces vastesplateaux étaient en partie couverts, autrefois, par des forêts. Ilsproduisaient les baumes précieux qui les ont rendus célèbres. Laforêt a disparu, en grande partie, aujourd'hui. Le pays est couvertpresque entièrement de riches steppes où les bédouins nomades fontpaître leurs troupeaux. Au S. de l'Arnon commence le pays de Moab, appelé aujourd'hui«pays de Kérak», avec la chaîne des monts de Séir dont le mont Hor(1.328 m.) est le point culminant. Aaron fut enseveli, dit-on, surcette montagne, non loin de laquelle est construite la célèbre villede Pétra (voir ce mot).