(hébreu rôphé, participe de râphâ =guérir; grec iatros; lat. medicus, de medeor =soigner, guérir). Le soin des malades est dans l'humanité aussi vieux que lamaladie elle-même. Les premiers médecins furent des hommes qui, parleur puissance d'observation, leur potentiel nerveux et leur intérêtpour la souffrance, s'imposèrent à l'attention comme des autoritéssecourables. A mesure que la superstition peupla d'esprits la terre,les eaux et le ciel, la maladie fut attribuée à l'influence desesprits mauvais. Le malade devient un possédé, et le guérisseur faitfigure de magicien, c'est-à-dire d'homme capable de délivrer lesenvoûtés et de chasser les démons. A l'origine de la civilisation,mages, sorciers, prêtres et guérisseurs apparaissent comme desvariétés d'un même genre. Leur fonction c'est l'exorcisme. Cependant,peu à peu, l'empirisme ouvrait la voie à la science. Au tempsd'Abraham, déjà, le code de Hammourapi montre que l'on prend lemédecin au sérieux, et qu'il ne lui est pas permis d'ignorer sesresponsabilités. En cas d'insuccès, il arrivait que la peine dutalion lui fût appliquée. S'il tuait son patient au cours d'uneopération malheureuse, on lui laissait la VI° sauve, mais àl'occasion on coupait la main inexperte (art. 215-223). Les articles224 à 227 parlent aussi de vétérinaires... Le jéhovisme hébreu étant, par définition, l'irréductibleadversaire des moeurs idolâtriques et de la magie, le médecin ne peutpas jouir chez lui d'un grand crédit. C'est Dieu seul qui sauve, cen'est pas l'homme. Chercher dans des pratiques superstitieuses oudans des moyens empiriques la guérison plutôt que de la demander àJéhovah, n'était-ce pas manquer de foi? sacrifier aux vaines idoles?«Ton guérisseur c'est moi», dit Jéhovah à Israël (Ex 15:26, cf.2Ro 5). On trouve une marque certaine de cette défaveur de lamédecine dans le passage où l'annaliste hébreu ne dissimule point sonmépris pour le roi Asa, parce que celui-ci recourait aux hommes del'art plutôt que de demander la guérison au Dieu d'Israël (2Ch16:12). 2Ro 9:29 (cf. 2Ro 9:15) semble prouver qu'il yavait à la résidence royale de Jizréel tout au moins un médecin,auquel le roi Joram eut recours.--Dans le Code sacerdotal, Jéhovahconfie des attributions médicales aux fils d'Aaron (Le 13), quidevaient diagnostiquer certaines maladies contagieuses et éloigner dela société les individus atteints de lèpre ou d'affections analogues.Par là, en Israël, la médecine et la religion se réconcilièrent. Il faut arriver au début du II° siècle av. J.-C, pour trouverl'éloge du médecin sous la plume d'un Juif. Il est vrai que ce Juifde Jérusalem se vante d'avoir beaucoup voyagé (Sir 34:11et suivant, cf. 51:13). Si, comme il est probable, ses pas l'ontconduit au pays des lumières, l'Egypte, où plus tard son petit-filsdevait traduire son livre en grec, il connut ainsi la vraie patriedes médecins, voire des médecins spécialistes (Hérodote II, 84) etaussi des fameux rebouteux qui remettaient les fractures avec unedextérité merveilleuse. La réputation des guérisseurs de l'Egypteétait telle qu'encore au temps des Achéménides, les Perses,lorsqu'ils voulaient un médecin capable, le faisaient venir de laterre des Pharaons: «Honore le médecin», écrit Jésus fils de Sirach,«car on a besoin de lui, et lui aussi a été créé par le Seigneur.C'est du Très-Haut qu'il tient son art...» (Sir 38:1 etsuivants). On dirait dans ces lignes une réhabilitation, un appel aubon sens en faveur de l'intervention médicale. «C'est Dieu qui a faitproduire à la terre les médicaments, l'homme sensé n'en a pointhorreur» (Sir 38:4). Vient ensuite un conseil direct etfort avisé: «Mon fils, si tu es malade..., prie le Seigneur..., offrede l'encens...; puis accepte l'office du médecin et qu'il ne tequitte pas, car tu as besoin de lui...Mépriser le médecin, c'estpécher devant son Créateur» (Sir 38:9 et suivants). Onvoit ici déjà combien la moderne doctrine de la «Science chrétienne»est peu fondée à se réclamer de la littérature des milieux bibliques.Plus tard, Je Temple de Jérusalem s'attacha un médecin chargé desoigner les prêtres malades. Ce médecin était plus spécialementdésigné sous le nom de «médecin des entrailles» (Traité Cheqalim, V, 1), parce que les prêtres, grassement nourris, légèrement vêtus etobligés d'officier pieds nus dans le sanctuaire, étaient fort sujetsaux diverses formes de l'entérite. Le N.T. nomme un seul médecin, Luc (voir ce mot), l'ami de saintPaul (Col 4:14); mais il met en cause le corps médical dansl'histoire de la femme atteinte d'une perte de sang. Mr 5:26 ditde cette femme: «Elle avait beaucoup souffert d'un bon nombre demédecins et elle y avait dépensé tout son bien sans recevoir aucunsoulagement; son état avait plutôt empiré.» Lu 8:43 reprend laquestion et dit: «Elle avait dépensé tout son bien en médecins sansavoir pu être guérie par aucun.» Il y a une nuance. Dans cette nuanceon peut voir l'indication que le Luc médecin dont parle Col 4:14était bien, comme l'affirme la tradition, le même que Lucl'évangéliste (voir Luc, évangile de). Quoi qu'il en soit, le proverbecité par Jésus: «Médecin, guéris-toi toi-même» (Lu 4:23) et sadéclaration: «Ce ne sont pas les bien portants qui ont besoin demédecin, mais les malades» (Mt 9:12 et suivants), suffiraient àprouver qu'en Palestine, du moins depuis la conquête romaine, lesmédecins avaient plein droit de cité. --Bien que la science médicale à travers les siècles ait honoréle génie humain par l'étendue de ses découvertes, la présencepersistante du serpent parmi les attributs du corps médical maintientle lien qui unit ses origines à l'oracle d'Épidaure et à la magieantique. Alex. W.