MALICE

Le mot «malice» n'a jamais, dans la Bible, le sens dérivé que nouslui donnons actuellement. Bien que le dictionnaire l'explique par«inclination à faire le mal», il ne signifie plus de nos jours qu'unacte ou une parole plaisanté, dénotant chez son auteur uneintelligence vive et sur lesquels on ne porte guère de jugementmoral. Dans le langage biblique, hérité des versions du XVI e siècle,ce mot conserve le sens primitif qu'il avait alors (la Confession defoi de La Rochelle, parag. XI, dit du péché originel «que c'est uneperversité produisant toujours des fruits de malice et derébellion»). La malice, pour la Bible, c'est l'état d'âme de l'homme que lapente naturelle de son esprit conduit au mal. C'est la source impureque la chute a fait sourdre en son coeur, l'origine de toutes sesmauvaises actions. Il y a donc un rapport très étroit à établir entrele Malin, nom biblique du Diable, qu'employa quelquefois Jésus, et lamalice qui est le résultat de son action malfaisante dans l'homme(voir Satan). On comprend que les traducteurs modernes aient renoncéla plupart du temps à employer un terme qui prêtait à confusion etl'aient souvent remplacé par «méchanceté». C'est d'ailleurs parfoisregrettable, car il s'agit alors d'un défaut, parmi d'autres, tandisque la malice apparaît surtout dans la Bible comme une inclination àfaire le mal (Ge 6:5,Jer 4:18, Sag 12:2-10, etc.); «iniquité» ou«perversité» seraient préférables (Ps 94:4-23 etc.). Les «méchants» dont parlent tant de textes bibliques(désignation qui peut représenter près d'une dizaine de mots hébreuxdifférents) sont avant tout les «impies», en contraste constant avecles justes (Ps 1:4-6,Pr 10:6 et suivant, Eccl,9:2,Eze 21:8,Mt5:45 13:49 etc.). Une hypothèse récente (Mowinckel) considère lesnombreuses dénonciations de ces méchants, malfaiteurs, adversaires ouennemis, dans les Psaumes (Ps 34:22 35:1 119:115 etc.) commedes formes spiritualisées d'anciennes malédictions qui auraient servide formules magiques contre les maléfices des sorciers en dessociétés plus primitives (voir Prière, parag. I). Quoi qu'il en soit de cette explication, qu'il ne faut pasgénéraliser, il n'en demeure pas moins que l'hostilité agissante desimpies contre les gens pieux, c'est-à-dire dans l'ancien Israëlsurtout les humbles et les pauvres, explique la fortune de ce termede méchants pour désigner chez les croyants l'esprit malveillant etles actes malfaisants des ennemis de Dieu qui se faisaient leurspropres ennemis. Et l'on trouve aussi, certes, la méchancetéproprement dite parmi les vices condamnés dans la Bible (1Sa25:3,Pr 13:17, Sir 25:17 et suivants 42:13, Sag 16:14,Mt 12:39,45 18:32,3Jn 1:10 etc.);voir Cruauté. Dans l'A.T., nos versions modernes traduisent encore quelquefois rââ par malice pour varier les synonymes lorsque le passage nerisque pas de prêter à confusion (1Sa 17:28,Ps 7:10,Esa13:11, Sir 33:28 etc.). Dans les LXX, rââ est traduit soit par ponêria, soit par kakia, et ce sont aussi ces deux mots (surtout le dernier) quel'on traduit parfois par malice dans le N.T. Le sens est fort voisinde celui de l'A.T., mais à l'idée du mal s'ajoute l'idée de ruse: lamalice devient l'emploi astucieux de l'intelligence au service del'iniquité. Le mot ponêria signifie méchanceté, perversité: il apparaît 7fois dans le N.T., et la Vers. Syn. ne le traduit qu'une fois parmalice (Mt 22:18), car dans ce cas il s'agit d'un piège où lesPharisiens s'efforcent de faire tomber Jésus. Quant au mot kakia, un peu plus fréquent dans le N.T, (11fois), il est pris une fois dans le sens de trouble, peine (Mt6:34); mais la plupart du temps, il a un sens très proche de celuide ponêria avec lequel on le trouve une fois accouplé (1Co5:8), et c'est lui que, dans ce cas comme dans quelquesautres (1Co 14:20,1Pi 2:1), la Vers. Syn. traduit par malice. Lorsqu'il y a nuance entre les deux termes, kakia représenteraitplutôt l'état d'âme mauvais et malfaisant, ponêria samanifestation par des actes (Trench, Syn. N.T., parag. XI).--Voir Mal.