LÉVITIQUE

Nom et subdivision du livre. Comme pour la Genèse et l'Exode, le nom du 3 e livre du Pentateuquelui est venu du texte grec des LXX, en passant par la Vulgate latine.Ce nom ne signifie pas que le livre qui le porte va s'occuper desLévites proprement dits, de leurs fonctions et prérogatives, car lesLévites, au sens strict de ce mot, n'y sont nommés qu'une seulefois (Le 25:32), et le livre ne s'occupe que de la classesupérieure des prêtres; il ne porte ce nom que dans le sens où l'épîtreaux Heb (Heb 7:11) emploie l'adjectif lévitique, et il est,en somme, l'équivalent de sacerdotal. Les Juifs le désignent parle terme Vayyiqrâ, premier mot de Le 1:1: «il appela», oupar l'expression Thôrath kôhanîm =loi des prêtres. Bien que Lév. présente, à première vue, une certaine unitéextérieure, on y reconnaît facilement 5 parties principalesdistinctes: Lév. 1-7, rituel des 4 principaux genres desacrifices et des offrandes. Lév. 8-10, consécration et installation dans leursfonctions des prêtres aaronites (Le 8-9); première faute rituellecommise, et châtiment de Nadab et d'Abihu; règles à observer par lesprêtres (Le 10). Lév. 11-15, lois sur la distinction du Pur et del'Impur. Lév. 16, rituel du Jour des Expiations. Lév. 17-26, lois sur le lieu du culte; règlesreligieuses, lois civiles et préceptes moraux; promesses etmenaces.--Le 27 est un appendice ajouté à l'ensemble de ces différentsgroupes et contenant des règles sur le rachat des offrandes votives,des premiers-nés et des dîmes. On le rattache parfois au groupeprécédent.Question chronologique. Avant d'étudier les caractères propres à ces divers groupes et lerapport qui les relie les uns aux autres, il faut relever le faitque, pour Lév., la question chronologique ne Joue aucun rôle, car ilne renferme sur ce point qu'une seule indication, d'ailleursincomplète: «le 8 e jour, Moïse appela Aaron...» (Le 9:1); ils'agit sans doute du 8 e jour du I er mois de la 2° année de lasortie d'Egypte. (cf. Ex 40:2,17) Toutes les lois de Le sontdonc censées appartenir à cette époque-là. On pourrait toutefoiscroire qu'il existe une contradiction entre deux textes, quant au lieu de la promulgation de ces lois, Le 1:1 parlant de latente du Rendez-vous, tandis que Le 7:38 parle du Sinaï comme dulieu où les lois sur les sacrifices (Lév. 1-7) auraient été données àMoïse. Mais l'opinion généralement admise est que les mots de Le1:1: «de la tente du Rendez-vous», proviennent du rédacteur qui ainséré Lév. 1-7 dans Lév. et qui voulait faire cadrer ces chapitresavec la situation décrite Ex 40:34 et suivantsDocuments entrés dans la composition du Lévitique. Pour Lév., la question des documents ayant servi à le composer sepose d'une façon beaucoup plus simple que pour Gen., Ex et No Eneffet, on n'y trouve aucune trace des documents J, E et D; il a ététout entier emprunté aux diverses couches du document P. Rappelonsici brièvement (pour les détails, voir Pentateuque) que ce dernierdocument a pris naissance dans les milieux sacerdotaux, dont ilreflète les préoccupations de l'ordre rituel et juridique. Le but deceux qui en ont composé les diverses parties a été de tracer unehistoire des institutions religieuses et des rites de l'ancienIsraël. Partout on retrouve le même style, le même fondsd'expressions et de particularités de langage, les mêmes idées. Maisson unité d'inspiration, quelque remarquable qu'elle soit, neconstitue pas une unité de l'ordre littéraire, et nombreuses sont lespreuves de la multiplicité des mains qui ont travaillé à la rédactionde ce document, dont la composition s'étend sur une période de deuxsiècles, puisque certains critiques font même remonter jusqu'à lapériode antédeutéronomique les parties les plus anciennes du Codede Sainteté , Le 17-26 et qu'on doit descendre jusqu'à ladeuxième moitié du V° siècle pour en fixer la rédaction dernière.Pour se représenter le mode de formation de P, on peut dire que:autour d'un premier noyau Pg (g =l'allemand Grundschrift =écrit fondamental) composé de récits et de lois et rédigé vers 500av. J.-C, sont venus se grouper divers éléments, les uns plusanciens, les autres plus récents; de leur combinaison est résulté ledocument P. Mais il faut admettre en outre que, à des époques plusrécentes encore, il a été fait soit des adjonctions, soit desretouches à cette première grande rédaction. Les divers groupes de lois dans Lévitique. Quels sont, dans Lév.,les groupes de lois qui sont venus se fondre dans P, après avoirconstitué d'abord de petits codes ou recueils isolés? Les ch. 1-7 forment un petit code à part, désigné par P° (o =offrande); voy. l'introduction spéciale, Le 1:1-2. Il est dedate plus récente que la partie principale de P, bien qu'il réserveencore au seul grand-prêtre l'onction sacerdotale (Le 4:3); ilconnaît, d'autre part, l'existence de l'autel des parfums (Le4:7,18) qui ne paraît que dans les parties tardives de P, et ilmentionne le double holocauste journalier (Le 6:8 et suivants),indice de date également récente. Ces lois de 1-7, bienqu'introduites ici à une époque postérieure, reposent néanmoins surun fond de thôrôth (lois, instructions sacerdotales) plusanciennes, auxquelles on aura fait subir des additions et retouchessuccessives. D'ailleurs, P° ne forme pas un tout unique; il comporte deuxsubdivisions distinctes: ch. 1-5 et ch. 6-7; l'ordre dans lequel leslois y sont indiquées (le sacrifice de paix précédant, dans 1-5,et suivant, dans 6-7, les sacrifices pour le péché et deréparation), des différences dans la façon de formuler les lois et,enfin, la closule Le 7:37, qui ne se rapporte qu'aux ch. 6-7,montrent bien que ces deux derniers chapitres forment un tout à part.Il faut donc distinguer: A. Lév. 1-5, prescriptions adressées à l'ensemble de la communauté.Lév. 2 n'est pas à sa place dans le texte actuel, car il rompt laliaison entre Lév. 1 (rituel de l'holocauste) et Lév. 3 (ritueldu sacrifice de paix), en intercalant entre les deux la loi del'offrande végétale. B. Lév. 6-7 s'adressent aux prêtres et reprennent en partie lessujets traités par Lév. 1-5. Le texte hébreu rattache, avec raison, auch. 5 les versets 1,5 du ch. 6 dans nos versions. Ce groupe, Lév. 1-7,sépare actuellement deux textes dont l'un, ch. 8-10, est la suiterégulière de Ex 40. Ce dernier, en effet (Ex 40:12-15), al'ordre donné à Moïse de consacrer comme prêtres Aaron et ses fils,et cet ordre est précisément celui dont Le 8 racontel'exécution. On s'explique d'ailleurs la raison pour laquelle uncompilateur postérieur a cru devoir insérer ici les ch. 1-7: ilestima logique de faire précéder le récit de la consécration desprêtres par l'indication du rituel des sacrifices que ces prêtresallaient avoir à suivre dans l'exercice de leurs fonctions. Lév. 8-10. Le rapport de ces chapitres avec P apparaît nettement dansle fait qu'ils sont la suite directe du récit de l'établissement dela Tente du Rendez-vous ou Tabernacle (cf. les dates, Ex 40:17et Le 9:1) et qu'ils ont la même terminologie. Cependant, demême que les chapitres Ex 35 ss sont apparus comme étantd'origine postérieure par rapport à Ex 25 à Ex 30 (voirExode), il faut admettre aussi que Lév. 8-10 appartenaient à une couchesecondaire de P, plutôt qu'à Ps même. En effet, Ex 29 n'avaitpas prescrit l' onction du Tabernacle et de ses ustensiles, quiest racontée dans Le 8:10 et suivants, et certains traits de lacérémonie de consécration, dans Le 8:16-20,26, paraissentrappeler, non pas Ex 29, mais plutôt les prescriptions plustardives de Le 1-7. D'autre part, comme Le 8 ne connaît pasencore l'autel des parfums, il faudrait en conclure qu'il appartientà une des couches secondaires de P les moins récentes. Lois sur la distinction du Pur et de l'Impur (voir art.): Lév. 11-15:

--Le 11, les animaux purs et impurs.--Le 12, purification de la femme accouchée.--Le 13, loi sur la lèpre--Le 14, purification du lépreux.--Le 15, impuretés sexuelles.
--Ce code, qu'on désigne par les lettres Pp (p =purification, oupureté), a dû avoir, à l'origine, une existence indépendante. Il neprésente pas une unité littéraire complète: il renferme des textessortis de leur place naturelle et des marques de rédactionssuccessives. Ainsi dans Le 11, le passage Le 11:24,40(souillure par contact du cadavre d'un animal) interrompent la listedes animaux comestibles, Le 11:1-23 41-47. En outre, la closuleLe 11:47 n'y fait aucune allusion; ils ont été inséréspostérieurement et sont de Pg. Dans Le 13, les versets Le13:47-59, qui traitent de la lèpre des étoffes et des cuirs, ontété intercalés ici postérieurement, car Le 14:1 est la suiterégulière de Le 13:46, et ces 2 chapitres traitent exclusivementde la lèpre chez l'homme et de la purification du lépreux.--Enfin, l'unité n'existe pas dans Le 14:1,32; on y trouvedécrites deux cérémonies de purification, Le 14:1,8 9-20, quipourraient avoir constitué, à l'origine, deux rituels différents,dont Le 14:1,8 paraît être le plus ancien. Il est probable, enoutre, que Le 14:21-32 constitue une adjonction récente, ce quesemble indiquer la closule spéciale de Le 14:32, qui ne serapporte qu'à ces versets. --Le 16 décrit le rituel du Jour des Expiations. La place qu'iloccupe ici se justifie pleinement, car «le rituel si impressif de ceJour forme le point culminant et le couronnement des rites depurification de l'ancienne alliance» (A.R.S. Kennedy, Comment, surLév. et Nomb.). Il a été souvent considéré comme se rattachant àLe 10:1 et suivant, récit de la mort de Nadab et d'Abihu, parceque, dans Le 16:1, il est fait allusion à cet événement. Ces ch.10 et 16 auraient donc été séparés postérieurement, d'une façon toutextérieure, par l'insertion des ch. 11-15. Comme les précédents, lech. 16 présente des indices positifs du travail de plusieurs mains;on y rencontre plusieurs données à double, et l'opinion dominanteadmet que ce chapitre est le résultat de la combinaison d'au moins 2documents distincts, et que les versets 1,3,4, qui serventd'introduction à ce chapitre, contiendraient une formule detransition s'appuyant sur 10:1 et suivant (histoire de Nadab etd'Abihu) et qui aurait fourni l'occasion de donner au grand-prêtredes instructions sur le moment et la manière de se présenterdevant Dieu dans le Lieu Très-Saint.Les sources mises en oeuvre dans ch. 16 seraient:
(a) Le 16:3,5-10, mention d'un ancien rite de purification, comportantle sacrifice d'un taureau, d'un bélier et de deux boucs;(b) ce rite ancien aurait été développé postérieurement dans lesversets Le 16:4,11,28, qui parlent de l'expiation par le sang d'un taureau,d'un des boucs et de l'envoi de l'autre à Azazel.
Enfin, les versets Le 16:29-34 (a), qui indiquent la date du jour des Expiations (10e jour du 7 e mois), seraient la partie laplus récente, puisqu'à l'époque d'Esdras cette fête n'existait pasencore, du moins à la date et sous la forme que Le 16 luiassigne. Le Code dit de Sainteté, ch. 17-26.
--Le 17, ordonnance sur le lieu des sacrifices et l'emploi du sang.--Le 18, mariages interdits.--Le 19, prescriptions religieuses, morales et cérémonielles.--Le 20, pénalités frappant divers crimes.--Le 21, sainteté des prêtres et des sacrifices.--Le 22, cas dans lesquels les prêtres ne doivent pas manger des choses saintes.--Le 23, fêtes religieuses.--Le 24, prescriptions relatives à la préparation du candélabre et des pains de proposition; punition des blasphémateurs.--Le 25, années sabbatique et jubilaire.--Le 26, bénédictions et malédictions.
Le groupe des ch. 17-26 doit retenir tout particulièrementl'attention du lecteur. Actuellement incorporé dans P, avec lequel ilprésente un certain nombre de points de ressemblance, il s'endistingue néanmoins par sa terminologie spéciale, par le fait que seslois se rapportent, non pas à la période du désert, mais à celle duséjour en Canaan (Le 19 23 23:10 25:2); par la présence, nonseulement de règles relatives au culte, mais par celle de préceptesde morale, de droit civil et criminel; par le fait que ces chapitress'adressent plus habituellement au peuple, alors que P s'adresse auxprêtres.--On a souvent relevé les rapports qui existent entre ce groupe, leCode de l'Alliance (Ex 20 Ex 21 Ex 22 Ex 23) et le Codedeutéronomique; tous trois présentent une même ordonnance générale;ils commencent par parler du lieu de culte; ils renferment des sériesde règles de l'ordre religieux, civil et moral, et tous trois seterminent par un discours exhortatif (Le 26,Ex 23:2-33,De 28).Quelques critiques (Ewald, Nöldeke, Schrader, Graf, Klostermann), sefondant sur le fait que les signes caractéristiques de ce groupeapparaissent tout d'abord dans l'introduction à Le 18:2,5,voyaient dans ce chapitre le début du groupe en question; lescritiques plus récents le font commencer déjà avec le ch. 17 (Knobel,Wellhausen, Horst, Gautier, Trabaud, Steuernagel, etc.). Depuis lestravaux de Klostermann (1877), qui lui assigna un nom distinct trèsheureusement choisi, on a pris l'habitude de nommer ce groupe «Codede Sainteté» et de le désigner par la lettre H (=Heilig, Saint).En effet, on y trouve (surtout dans Le 21 et Le 22)l'accent mis constamment sur le motif de la Sainteté de Yahvé,attribut suprême de la divinité et qui doit devenir pour Israël, s'ilveut atteindre à l'idéal moral qui lui est proposé, le principeinspirateur de sa conduite; voy. l'emploi de phrases comme celles-ci:«Car je suis saint, moi Yahvé qui vous sanctifie», ou «Je suis Yahvévotre Dieu qui vous sanctifie», ou encore «Je suis Yahvé qui vous aiséparés des peuples», ou enfin la simple déclaration qui vientsceller les ordres divins «Je suis Yahvé» ou «Je suis votre Dieu».Le 19:2 résume cette affirmation de la sainteté divine du Dieud'Israël sous cette forme solennelle: «Soyez saints, car je suissaint, moi Yahvé votre Dieu.»Un examen détaillé des ch. 17-26 montre que H actuel n'est pashomogène dans toutes ses parties; c'est un ensemble composite quirepose évidemment sur des travaux et des groupements antérieurs; illui a été fait des adjonctions diverses, surtout à l'époque où il aété réuni à P par le rédacteur, qu'on désigne sous la forme Rp, etqui fit son travail en se plaçant au point de vue de Pg; c'est ainsique la plupart des suscriptions et formules d'introduction dudiscours dateraient de cette époque. En outre, H ne paraît pas avoirété transmis tout entier dans Le 17 à Le 26, car on enretrouve des fragments ailleurs (ainsi dans Le 11:43-45,Ex31:13-14 No 15:37,41, peut-être aussi, d'après Driver, dans Ex6:6,8 12:12 et suivant, Le 10:9-10 et suivant). Enfin, Hpourrait être considéré comme provenant de la combinaison de deuxséries de textes juridiques distincts: on s'en rend compte par laprésence de répétitions telles que: Le 17:10-14 et Le19:26,19:3,30 26:2 19:4 26:1, 19:26,31 20:6-27.Indiquons ici quelques-uns des chapitres qui composent cet ensemble.Les ch. 18-20 présentent très marqués les signes caractéristiques deH. Le 18 renferme les lois concernant les unions illicites, maissans indiquer les sanctions pénales qui doivent frapper lescoupables, sanctions qui sont indiquées en partie dans Le 20 (Ilmanque celles qui concernaient les infractions aux lois de Le 187,10,17,18). Cependant, ces deux chap, ne doivent pas être de lamême main, car l'ordre d'énumération et la terminologie diffèrent; onne comprendrait pas non plus, si ch. 18 et 20 étaient du mêmerédacteur, pourquoi le texte aurait traité distinctement lesinfractions au ch. 18, et les sanctions pénales au ch. 20. Quant àLe 19, il renferme, selon la très juste observation de Moore,«un bref manuel d'instruction morale qui fait de lui le représentantpeut-être le meilleur de la morale d'Israël» (EB, art.Lévitique). C'est là qu'on trouve les deux grands préceptes: «tuaimeras ton prochain comme toi-même» (verset 18), et: «tu aimerasl'étranger comme toi-même» (verset 34). Plusieurs critiques ontétabli un rapprochement entre les versets 3 et suivant et la premièretable du Décalogue, tandis que v. 11, 18 rappelleraient la deuxième.Le 23 renferme les prescriptions concernant les Fêtes (voir cemot), ou «Saintes Convocations» (Sabbat, Pâque, Pains sans levain,Fête des Semaines, Nouvel An, Jour des Expiations, Tabernacles). Dansce Calendrier des Fêtes, on retrouve la combinaison d'au moinsdeux lois sur le sujet. La majeure partie du chap, provient de P,dont on retrouve les signes caractéristiques dans v. 1, 8, 21 - 23,38, 44, tandis que v. 9 - 20, 22, 39, 40 - 43 présentent ceux de H.Sous sa forme actuelle, ce Calendrier résulte donc de la réunion desdonnées de P et de H, auxquelles le rédacteur (Rp) a ajouté uncertain nombre d'éléments de date plus récente. On a remarqué que,comme dans les plus anciens documents, les fêtes sont encore mises,par la tradition de H, en relation avec la vie agricole (récolte descéréales et des fruits du sol); seulement, ici, les sacrificesofferts le sont par la collectivité et non plus par les individus; enoutre, aucune date fixe n'est prescrite. Dans la série des fêtes deP, au contraire, la corrélation de ces fêtes avec l'année agricolen'est plus marquée, elles ont pris une signification nettementreligieuse, et on doit les célébrer à des époques fixes. Enfin, dansla série de P, on a même discerné un groupe plus récent, v. 23-32,qui, à la liste des trois grandes fêtes anciennes, ajoute celle duNouvel-An et (verset 3) le Sabbat.--Le 25 ne paraît pas non plus former un tout homogène, cequ'indiquent déjà les changements de nombre (sing, et pluriel)qu'on observe ici. Il présente de nombreuses difficultés de l'ordrelittéraire et archéologique dans le détail desquelles on ne peutentrer ici (voy. les Commentaires de Baentsch, Kennedy, etc.). Ilsemble que l'on soit en présence de deux parties qui, primitivement,étaient distinctes: l'une ne contenait que la loi sur l'annéesabbatique et un ensemble de prescriptions de portée humanitaire;l'autre avait trait à l'année jubilaire. Une main plus récente auraconstitué, de ces deux parties, un tout unique, et établi le rapportentre l'année du Jubilé et les prescriptions humanitaires enquestion. Ce qui concerne l'année sabbatique proviendrait de H(2-7,14,17-25.35-40,43,47,53,55) et ce qui a trait à l'année duJubilé, en y comprenant les adjonctions du rédacteur qui a uni lesdeux groupes (8-12.15s.26-34,40b,44-46,48-52.54) de Ps c-à-d. unecouche secondaire de P.--Enfin, Le 26. Cette conclusion exhortative de H se compose decinq bénédictions et cinq malédictions. Elle paraît être du mêmeauteur qui a compilé le Code de Sainteté en y incorporant les diversgroupes de thôrôth plus anciennes qui le composent.Pour l'analyse critique détaillée de H, voy. H. Trabaud, L'introd.à l'A.T, dans sa phase actuelle, 1911, p. 109SS, et Steuernagel, Lehrb. der Einleit. 8n das A.T., 1912, p. 163SS.La fixation de la date à laquelle il convient d'assigner H dans sesparties les plus anciennes, les thôrôth ou décisions juridiquesque rendaient les prêtres sur les questions soumises à leur jugement,et celle de la date à laquelle il faut fixer la rédaction du Code deSainteté sous sa forme actuelle, dépendent de la solution qu'oncroira devoir donner à un problème qui a frappé depuis longtemps lescritiques: les ressemblances très marquées qui existent entre lelivre d'Ézéchiel et le Code H. Le prophète et H sont inspirés par lemême esprit; ils poursuivent le même but et, de l'un à l'autre, lesanalogies de pensée et d'expression sont frappantes; tel chapitre deH (ainsi le ch. 26) est tout rempli d'expressions qu'on retrouve dansÉzéchiel.Ces constatations mettent les critiques en face de deux suppositionspossibles: ou bien Ezéchiel est antérieur à H, et alors ce dernier sesera inspiré de lui et imprégné des particularités de son style; ou bien H est antérieur à Ezéchiel et a fortement influésur la pensée et le style du prophète.Si l'on s'en tenait à la rédaction de H telle que nous la possédonsaujourd'hui, dans laquelle sont entrés bien des éléments tardifsempruntés aux diverses couches de P, on serait tenté de souscrire àla première de ces suppositions. Mais, d'autre part, s'il existe denombreuses ressemblances, il y a aussi des différences non moinsmarquées entre l'un et l'autre, et les raisons qui militent en faveurde l'antériorité de H paraissent l'emporter sur la conclusioncontraire. Citons, par exemple, le fait que H ne connaît pas ladistinction établie par Eze entre prêtres et lévites; laclassification des sacrifices est plus minutieuse dans Eze etrapproche ces derniers des lois de P; les prescriptions de Hconcernant «le prêtre qui est plus grand que ses frères» (Le21:10) montrent qu'il existait alors un prêtre qui était considérécomme le primus inter pares, comme l'indiquent plusieurs passagesdes livres historiques; mais ce n'était pas encore le grand-prêtre tel que P le représentera plus tard et qu' Ezéchielne connaît pas encore. On remarquera aussi que Le 26, lediscours parénétique qui termine H et qui, selon l'expression de L.Gautier, «fourmille» d'expressions qu'on retrouve dans Ezéch.,produit une impression de vigueur et d'originalité que ne produiraitpas une composition littéraire, laquelle n'aurait consisté qu'enpièces et morceaux empruntés à Ézéchiel.Klostermann, comparant H et Ezéchiel dans le détail, a montré quesouvent le prophète paraît développer ou accentuer les données d'unoriginal plus simple qu'il aurait sous les yeux; d'autres, tels queWellhausen et Kuenen, ont relevé un certain nombre de différences quiparaissent exclure nettement l'autoricité d' Ezéchiel en ce quiconcerne H (voy. cette question exposée par Driver, Introd. O.T., 9 th éd. 1913, pp. 145-151).On pourrait aboutir aux conclusions suivantes, quant à la date de H: la partie la plus ancienne qui soit à la base del'ensemble de ces chapitres remonterait à la période qui a suivicelle du Code deutéronomique, avec lequel H présente, comme on l'aobservé plus haut, de réels points de contact; on aurait donc affaireavec un document antérieur à Eze d'environ un demi-siècle et datantdes derniers temps de la monarchie, antérieur aussi à la partiefondamentale de P, c'est-à-dire à Pg. Il s'est poursuivi de l'un àl'autre, dans les institutions cultuelles d'Israël, un développementqui apparaît très marqué. Dans l'élaboration de ce code initialentrèrent sans doute des éléments littéraires provenant de diversessources, ce qui expliquerait la présence, dans H, des répétitionsqu'on y a relevées. Plus tard, un grand travail de rédaction, conçu dansl'esprit de P, se poursuivit à propos des groupes de thôrôth quiappartenaient à la couche ancienne de H; le recueil primitif futincorporé à l'ensemble du grand document P, retouché et augmenté desuscriptions qui ne s'accordent pas toujours avec le contenu desfragments qui en ont été pourvus.-Enfin, Le 27. Cet appendice, qui connaît l'année du Jubilé(Le 27:17,24), qui exige la dîme du bétail (Le 27:32 etsuivant) que P ignore encore dans No 18:21 et suivant, etqui range les objets voués à Yahvé parmi les choses «trèssaintes» (No 18:28), et non pas seulement «saintes», (commeNo 18:14) appartient à une couche récente de P.Il est évident que, comparé, par exemple, au livre qui le précèdedans le Pentateuque, à l'Ex., avec les multiples questions que celivre soulève (caractère historique du séjour des tribus en Egypte,de leur sortie de ce pays et des premières étapes au désert; questiondu séjour au Sinaï et du Sinaï lui-même; historicité et vocation deMoïse; origine du culte de Yahvé; examen des questions de date despremiers codes des lois attribués par la tradition à cette époque,etc.), l'intérêt du Le apparaît, à première vue, un peu terne et bienrestreint. Ce sont les prescriptions tardives de P sur le rituel desdiverses espèces de sacrifices, les règles concernant la distinctiondu Pur et de l'Impur, les lois relatives aux fêtes et à diversesquestions d'hygiène domestique, qui remplissent les pages de celivre. Cependant, il serait aussi faux qu'injuste d'en déprécier lavaleur et de lui refuser, au point de vue de l'évolution religieusequi s'est produite dans l'Israël des époques tardives et qui s'estpoursuivie dans les premiers temps de l'histoire du christianisme,une importance et un intérêt qui ne sont pas à sous-estimer.Comment, en effet, oublier que, au moment où Jésus paraît,l'atmosphère juive de son temps est tout imprégnée des idéesreligieuses et cultuelles qu'on voit inspirer le Lévitique, la viejuive tout entière dominée par les conceptions formalistes que lemonde rabbinique du temps n'a fait qu'exagérer, que développer dansle sens parfois le plus puéril? La lutte que Jésus doit soutenircontre le sacerdoce et les scribes de son temps n'a-t-elle pas pourbut d'élever ses contemporains au-dessus de la lettre d'une loi àlaquelle on avait cru devoir se tenir servilement, pour les amener àen dégager l'esprit et la portée supérieure? Pour se faire comprendred'eux, et des disciples auxquels il confiait la mission de continuerson oeuvre, Jésus a employé les termes et les images auxquels ceux-ciétaient habitués par le fait de leur éducation judaïque et du milieudans lequel leur mentalité s'était formée. Comme on l'a observé très justement, lorsque, dans l'institutionsolennelle du repas sacré de la Cène, Jésus dit à sesdisciples: (Mt 26:26,29) «Ceci est mon corps...ceci est monsang, le sang de l'alliance qui est répandu pour plusieurs, pour larémission des péchés», n'applique-t-il pas à sa personne et à sonoeuvre rédemptrice les images et les expressions du rituel dessacrifices qui étaient familières à ses futurs apôtres? (Gayford,dans A new Commentary on Holy Scripture, p. 100). Et après lui,ces derniers, habitués qu'ils étaient, de par leur première éducationreligieuse, aux notions et à la terminologie des anciennes loisrituelles de leur race, n'ont-ils pas présenté les doctrinesessentielles du péché et de l'expiation en prenant leur point dedépart dans les pages de la loi ancienne qui traitent del'institution du sacrifice et de la signification cultuelle du sang? Qu'on prenne l'épître aux Hébreux, et en particulier toute sapartie centrale (Heb 4:14 à Heb 10:18) où l'auteur établitle rôle de type, assigné à la personne du grand-prêtre del'ancienne alliance, et où il fait ressortir d'une façon si frappantela différence qui existe entre ce dernier et Christ «le Grand-Prêtredes biens à venir» (Heb 9:11), «le Médiateur d'une nouvelleAlliance» (Heb 9:15), et où il montre l'impuissance etl'inutilité du sacerdoce lévitique, et l'on se rendra compte del'importance et de l'intérêt que présente encore, sous une forme àpremière vue bien aride, le livre du rituel des sacrifices pour ceuxqui aujourd'hui veulent arriver à pénétrer la pensée des plus anciensécrivains de l'Église chrétienne et à en dégager la portée religieuse. BIBLIOGRAPHIE --Commentaires: --H. Traraud, 'Introd. à l'A.T, dans sa phase actuelle, et la Bbl.Cent.--Introduction à l'A.T.: Lucien Gautier; AnT.-J. B.