JUSTIFICATION

I Le substantif «justification» ne se trouve que dans deuxversets du N.T (Ro 4:25 5:18). C'est le verbe «justifier» quiexprime ailleurs, et plus de quarante fois, l'une des plus grandesréalités de la vie chrétienne. La justification est entendue, dans quelques cas, comme lareconnaissance de ce qui est sans faute ou fraude. Ainsi, dans Mt11:19,Lu 7:35, la Sagesse est justifiée par ses enfants; dans Lu10:29, un docteur de la loi veut se justifier aux yeux de Jésus;dans Ro 3:4, il convient d'être justifié dans ses paroles, etc.Dans la plupart des textes, la justification est un fait religieux:du point de vue de Dieu, le fait de tenir pour justes certainshommes, et, du point de vue de l'homme, le fait d'être tenu pourjuste devant Dieu. Dans l'A.T., le juste, dans un sens général, est ce qui estconforme à la loi: objet (Le 19:36,Job 31:6,Eze 45:10), acte duculte (De 33:19,Ps 4:8 51:19) ou personne. Pour lespersonnes, le contexte précise de maintes manières le caractère dujuste. Sont justes: Noé qui marche avec Dieu (Ge 6:9), Jacob quiobserve le pacte conclu (Ge 30:33), le magistrat qui estintègre (Le 19:15), le roi qui défend le malheureux (Pr31:9), etc. Dans le domaine religieux, le serviteur que Jéhovahsuscitera, pleinement fidèle à Celui qui l'envoie, est le Juste parexcellence (Esa 53:11,Jer 23:5). Une certaine justice humainesemble, ici et là, admise, due à l'observation des commandementsdivins (Ex 23:7,De 6:25,Job 12:4 17:9 27:17,Ps 5:12 7:10 34:2037:29 etc.). Mais la justification véritable est déjà rattachéeà la foi. Abraham a mérité d'être appelé «le juste» parce qu'il a étéun inébranlable croyant (Ge 12:2 13:16 15:6). L'épître aux Romains etl'épître aux Ga reprendront les déclarations de la Genèse: la foid'Abraham lui fut comptée comme justice. Les évangiles n'ignorent pas le sens moral de «juste», synonymed'équitable: salaire normalement dû (Mt 20:4), rectitude d'unjugement (Jn 5:30), sagesse du discernement (Lu 12:57),etc. Mais dans sa vérité profonde, le juste dérive de l'exécution dela volonté de Dieu. La justice est pratiquée par Joseph se conduisantd'après la révélation reçue (Mt 1:19), par les disciplesécoutant les prescriptions de Jésus (Mt 5:20), par Jean-Baptistedans son ministère de préparation (Mt 21:32), par Pierre et Jeanobéissant à Dieu contre le sanhédrin (Ac 4:19). Souvent les hommes croient être justes, selon l'accord de leursactes avec l'opinion ou la tradition, et leur erreur estgrande (Mt 9:13 23:28,Lu 15:7 18:9). Les vrais justes le sontdevant Dieu, comme Zacharie et Elisabeth (Lu 1:6),Siméon (Lu 2:25), les croyants de l'Ancienne Alliance quiespéraient le salut (Mt 13:17) et les croyants de la NouvelleAlliance qui contemplent sa réalisation (Mt 13:43,49). Ceux-ciobtiennent d'En-haut la justice que leur coeur cherchait (Mt5:6). Justifié et pardonné sont deux termes équivalents (Lu 18:14);Mr et Jean emploient exclusivement le second. Jésus affirme le pardonen maintes circonstances; il en fait le moyen et l'origine d'unredressement moral (Jn 5:14 8:11). Justification, pardon sont enrapport immédiat avec la foi, et là même où la foi n'est pasexplicitement évoquée, comme dans Lu 18:10-14, la prière dupéager étant une preuve de foi, ou dans Mt 25:31,46, la fidélitédes justes envers leur Roi et leur amour envers leurs frères étantune foi agissante. Dans les ép. pauliniennes, la justification est l'une des thèsesmajeures du salut (voir ce mot). Déjà dans son passé de pharisien,Paul avait la conviction de la valeur sans égale, de la nécessitésans restriction de la justice (voir ce mot); cette notion est l'undes points cardinaux de son enseignement d'apôtre. Avec l'A.T, et lesévangile, il appelle juste, au sens ordinaire du mot, l'homme debien (Ro 5:7) ou le commandement de la loi (Ro 7:12). Maisle sens propre, technique, du terme domine chez lui de façon plusconstante, plus marquée que dans les autres livres du N.T. Le justec'est l'accord avec ce que Dieu veut. Le juste, avec le vrai, le pur,le bon, le vertueux, l'aimable, compose l'idéal de laconduite (Php 4:8) auquel les membres mêmes du corps doiventêtre soumis (Ro 6:13). Par le juste, l'homme monte vers lasanctification (Ro 6:19); le juste est donc le devoir duconducteur de l'Église (1Ti 6:11) et le devoir de tous lesfidèles (Ro 6:18). Paul n'a usé que des armes de la justice dansses luttes et ses épreuves (2Co 6:7); il a transposé dans sa vieavec le Christ ce qui était, auparavant, la norme de sa vie sans leChrist (Php 3:6). Norme si obligatoire que ses adversaires nesauraient la répudier ouvertement (2Co 11:15); idéal si élevéque Dieu lui-même peut et doit être dit un Dieu juste (Ro 3:5).Si bien que le type, le modèle des chrétiens peut être parfois unantéchrétien: Abraham le juste (Ro 4:3,9,11,13,22,Ga 3:6) et quel'apôtre, comme sceau de son oeuvre et de sa vie, attend la couronnede justice que le juste Juge lui donnera (2Ti 4:8 etc.). Mais cette norme et cet idéal dépassent en même temps le jugementhumain et le pouvoir humain. Le jugement appartient à Dieu; seul estjuste l'homme que Dieu déclare tel. Le pouvoir vient de Dieu; seulest juste l'homme auquel Dieu donne d'accomplir les dispositions desa grâce (voir ce mot). Il n'est pas d'autre justice véritable, iln'est pas d'autre possibilité de l'atteindre. Les Juifs qui seconfient dans la loi pour y trouver l'affranchissement n'y trouventque la condamnation; la loi est un tout, toute la loi doit êtreaccomplie (Ga 3:10), et nul n'a jamais pu satisfaire à cetteirréductible exigence (Ro 2:17 3:9 et suivant). Comme le peuplejuif que Dieu a instruit par Moïse, les peuples païens qui portentune loi naturelle en leurs coeurs (Ro 2:14 et suivant) sontpareillement coupables. Loi du Sinaï et loi de la conscience, loireligieuse et loi morale échouent de la même manière, totalement, àrendre l'homme juste devant Dieu. Si la justice, quoique précaire, setrouve parfois dans les relations entre les hommes, elle ne se trouvejamais dans les relations que les hommes ont avec Dieu. Intégrité,droiture, équité, fidélité, ces vertus humaines, qui portent unreflet de justice, portent surtout l'empreinte du péché qui lesstérilise. Le péché (voir ce mot) domine l'homme, tout l'homme, tousles hommes (Ro 3:9 et suivant, Eph 2:1 et suivant). Plus fortement accusée, plus logiquement exposée chez Paul, laconstatation de cet asservissement de l'homme au péché, cause de sonéternelle et irrémédiable impuissance à devenir juste, est commune àl'ensemble des écrivains bibliques, et l'A.T, la souligne, parendroits, aussi explicitement que le N.T. (1Ro 8:46,Job 14:425:4,Ps 14:1-3 53:1-4, Esa 64:5, etc.).II Ainsi, selon le témoignage biblique, l'homme devrait être juste pourvivre avec le Dieu saint et recevoir de lui lumière, paix et force;mais l'homme ne peut pas être et ne peut pas devenir juste. Du côtéde l'homme, l'impasse est sans issue. C'est du côté de Dieu ques'ouvre la voie de salut: Dieu justifie, Dieu tient pour justel'homme pécheur. Comme il a formulé avec le plus de rigueur la thèsenégative: l'incapacité de l'homme, Paul formule avec le plus denetteté la thèse positive de l'Évangile: la libération de l'hommeeffectuée par Dieu (Ga 2:16 3:8,24,1Co 6:11,Ro 3:23 5:1,16,18 8:3310:4,Tit 3:7,Eph 2:8). Dans la péricope Ro 3:21-30, où se condensent et s'harmonisentla plupart des autres déclarations pauliniennes, et la plupart desautres déclarations du N.T., l'apôtre oppose à l'universelleimpuissance humaine la grâce universelle de Dieu. La justificationest le premier don de cette grâce. Pas plus que les autres actionsdivines, celle-ci n'est arbitraire, sans motif et raison. Du point devue objectif, Dieu justifie l'homme en vertu de l'oeuvre accompliepar Jésus-Christ (voir Expiation); du point de vue subjectif, Dieujustifie l'homme en vertu de la foi de l'homme en Jésus-Christ (voirFoi). La justification se traduit immédiatement dans le pardon; elleest le pardon, le fait que les péchés de l'homme ne lui sont plusimputés, que la culpabilité de l'homme est effacée, que l'homme étantconsidéré comme juste la barrière dressée par le péché ne le sépareplus de Dieu (2Co 5:17 et suivant, Eph 4:32,Col 2:13). Parcet acte surnaturel, cet acte spécial de Dieu pour un être déterminé,l'accès à une vie nouvelle est ouvert, la communion est rétablieentre Dieu et l'homme, que le péché de l'homme avait rompue (Ga4:6 et suivant, Ro 8:15,Eph 2:14). Le pardon est l'assisefondamentale que, pour cette vie nouvelle, pour cette communion avecDieu, pose la justification. Après elle s'accomplissent, sedéveloppent les faits du salut individuel, toute la série d'actes dela grâce de Dieu et de la fidélité de l'homme, par lesquels seprécise, s'accroît, s'épure, se parfait la vie nouvelle jusqu'àdevenir en l'homme la vie même du Christ (Ac 11:21 14:1526:20,1Pi 1:23,1Co 1:2,2Co 7:1,1Th 4:3,2Th 2:13,Phi 1:21,Eph 4:13,etc.). Il faut que l'homme parcoure ces étapes qui suivent lajustification. Justifié, il doit rechercher et pratiquer la justice;il ne saurait vivre comme il vivait avant d'être l'objet du pardondivin. L'enseignement de Jésus, la prédication des apôtres énumèrentmaintes qualités morales, merveilleux fruits de l'Esprit, quimarquent l'être et l'action du chrétien. Pour vivre avec le Christ,estime Paul, il faut mourir aux choses de la chair; le véritablecroyant est celui qui agit conformément à ce qu'il croit. Nulletendance antinomienne des temps anciens ou des temps modernes nesaurait valablement invoquer Jean, Pierre, Paul, Jacques, un textequelconque d'un livre quelconque du N.T., sinon en l'isolantabusivement de son contexte, par suite en le faussant. Lajustification, la déclaration de grâce qui supprime laresponsabilité, la culpabilité de la vie passée, n'amène pas au seuild'une existence théorique, abstraite, mais d'une existence religieuseet morale dans laquelle la transformation des relations avec Dieu neva pas sans la transformation des relations avec les hommes, danslaquelle la croyance aux promesses divines ne se sépare pas de lapratique d'actions humaines. La justification a pour but de permettreces oeuvres bonnes, cette justice qui est, dans la vie personnelle del'homme, l'acceptation et le triomphe de la volonté de Dieu. Elle n'a rien de commun avec la propre justice humaine. Celle-cis'appuie sur certaines oeuvres, ou sur certaines croyances, ou surtels autres motifs, pour se parer d'un mérite, d'un droit à attendreet à revendiquer la grâce de Dieu. C'est l'attitude du pharisien dela parabole, des formalistes inconséquents des Églises de Corinthe etde Galatie. La justice qui naît de la justification résulte de lalumière, du secours de Dieu; le justifié reste conscient de safaiblesse et sait que Dieu produit en lui la volonté et laréalisation (Php 2:13), et plus la puissance qu'il possède estlarge, féconde, victorieuse, plus il rend toute gloire à Celui quiseul fortifie, après avoir «justifié gratuitement par sagrâce» (Ro 3:24). Sur le concept de la justification par la grâce de Dieu, toutes lesÉglises sont pauliniennes; et le contraste est ici le plus éclatantentre les religions naturelles qui exhortent l'homme à se rendre ladivinité favorable, par ses efforts, ses progrès, et la religion dela Bible qui met en Dieu seul la cause de la justification. Sur le concept de la justification par la foi, des divergencesnaissent. Dieu, selon la thèse protestante dominante, tient lecroyant pour juste avant que celui-ci soit juste réellement, avantqu'il ait pratiqué et atteint la justice; la justification, assurantà l'homme le pardon, le délivre de ses péchés, l'affranchit du jougsous lequel ils le courbaient, lui donne la possibilité de marchervers la justice effective; la justification est «déclarative». Et sacondition est la foi, la foi sans autre qualité, «la foi seule», ontprécisé les Réformateurs. Selon la thèse catholique dominante, lajustification est «une transformation de l'âme par la grâcesanctifiante» (A. d'Alès, Diction, apologét. de la Foi cathol, t II, p. 40, 1925). «Pour qu'un homme soit juste devant Dieu et pourque Dieu prononce qu'il est juste, il faut de deux choses l'une: ouque Dieu l'ait rendu juste au préalable, ou qu'il le rende juste parcette déclaration même. Dans cette dernière hypothèse, lajustification de l'impie est déclarative dans sa forme mais effectiveen réalité. La sentence divine de justification produit son effet unpeu à la manière des formules sacramentelles, comme les paroles de laconsécration, comme les paroles du Christ opèrent des miracles» (E.Prat, La théol. de saint Paul, t. II, p. 352). Et si la foidemeure, sans doute, une condition indispensable, il apparaît bienévident que, pour cette justification «effective», elle ne sauraitplus être l'unique condition; elle est «une disposition nécessairemais non suffisante» (A. d'Alès, loc. cit.) L'argumentation contre la justification déclarative est erronée. Lejugement de Dieu «porterait à faux», comme E. Prat l'écrit (loc.cit.), s'il déclarait le pécheur juste d'une justice positive,réalisée. Mais Dieu déclare juste le pécheur parce qu'il lui accordele pardon, parce que les péchés dont Dieu ne tient plus compte nesont plus imputés au pécheur; n'est-ce point là un fait qui mérite lenom de justification? Un fait qui se suffit à lui-même en ce sens, etqui ne comporte pas nécessairement, comme tel, que Dieu confère dumême coup à l'homme la possession de la justice! Un créancier quiremet ses dettes à son débiteur le tient quitte vis-à-vis de lui,mais le débiteur ainsi acquitté n'est point par là renduimmédiatement riche; il peut seulement le devenir. Le pécheurpardonné est absous, est justifié sans être par là renduimmédiatement juste; il peut, et il doit acquérir la justice, maiscelle-ci est le résultat d'autre chose que de la justification.Réduite à elle-même, la justification déclarative, loin d'être«fictive», procure à l'homme cette réalité du salut, première etfondamentale, qui s'appelle «le pardon» et que Paul met à la base dela rédemption. Quant à la justification «effective», créant une justicepersonnelle chez le pécheur, la créant par un opus operatum, parun acte magique qui transforme l'homme comme sont transformées lesespèces eucharistiques, elle écarte, elle supprime, là où il faudraitles faire intervenir, le concours de l'homme, l'oeuvre de l'homme,l'élément moral que Dieu ne méconnaît jamais dans son action surl'homme. En réalité cette justification effective est une manière desanctification puisqu'elle est «une transformation de l'âme par lagrâce sanctifiante». Et la sanctification est bien liée à lajustification, mais ne saurait lui être comparée, ni, a fortiori, assimilée. Certes la grâce de Dieu est le principe de l'une et del'autre, mais la grâce de Dieu est productrice d'effets différentsqui ne souffrent pas d'être confondus. Pour s'en tenir à lacaractéristique principale: la justification est immédiate, elle nerenferme ni degrés, ni développements, elle coïncide avec le pardon,elle est ou elle n'est pas; la sanctification (voir ce mot) estprogressive, elle suit le pardon et, par étapes successives,multiples, elle s'élève sans cesse vers le terme jamais atteintici-bas: la sainteté parfaite. Justifié donc, c'est-à-dire absous et libéré de ses péchés, l'hommedont le passé coupable est aboli par le pardon de Dieu dispose ànouveau de son avenir. Mais pour cet avenir, tout est encore à faire.Une vie possible est loin d'être une vie vécue; c'est pour la vivreque la grâce de Dieu, toujours présente et agissante, exige désormaisl'action de l'homme, «les oeuvres» (voir ce mot), témoignages etfruits de la foi, critère qui révèle l'authentique croyant (Mt5:6,Jn 14:12,1Th 1:3,2Th 2:17,Ro 2:7 7:4,2Co 9:10,Ga 5:22,Eph2:10,Phil 1:11,Col 1:10,1Ti 6:18,Tit 3:8,1Pi 2:12,Jas 2:18,24).La justification n'a la portée voulue par Dieu qu'avec sesconséquences moralement inéluctables. Justifié, l'homme ne sauraitrester dans l'indécision ou l'indifférence; il faut qu'il prenneposition pour ou contre le mal; la justification reçue lui permet deprendre position contre le mal. S'il ne le faisait pas, s'ils'abandonnait à son milieu, à sa nature, aux souvenirs et auxsurvivances du passé, il redeviendrait l'esclave du péché; aprèsavoir reçu le don de la grâce, ce serait, inévitablement etvolontairement, le perdre. Il ne peut surmonter le mal qu'en voulantle bien, en pratiquant le bien, en se fortifiant pour ce vouloir etce faire, en progressant assez pour que ce vouloir et ce faire luideviennent plus faciles, plus spontanés, qu'ils constituent pour luiune nouvelle nature et que lui-même soit, en son être le plusprofond, une création nouvelle. Justifié, l'homme est appelé à réaliser les prescriptionsreligieuses et morales que formule le N.T. et qui présupposent sadécision, son effort, sa persévérance, et sa responsabilité, sesrisques, son obligation de progresser pour ne pas reculer. La viechrétienne, la plus haute forme de la vie morale, est plus que touteautre soumise à l'obligation du devoir, du devoir envers Dieu etenvers les hommes, et le «tu dois» impératif retentit plusimpérieusement dans la conscience de l'homme justifié que dans lecoeur de l'homme pécheur. La grâce de Dieu n'abandonne pas celuiqu'elle a justifié; la lumière, l'inspiration, la puissance del'Esprit de Dieu sont données à l'être, à la vie consacrés à Dieu;c'est l'influence de Dieu en l'homme qui transforme l'homme; mais siDieu fait à la place de l'homme ce que l'homme ne peut pas faire,Dieu ne fait pas à la place de l'homme ce que l'homme doit faire.C'est là ce qui explique les avertissements adressés aux croyantsjustifiés et qui ont l'apparence d'une limitation, d'une restrictiondu fait de la justification: «Si quelqu'un n'a pas l'Esprit duChrist, il ne lui appartient pas» (Ro 8:9), «Christ est devenul'auteur d'un salut éternel pour ceux qui lui obéissent» (Heb5:9), etc. La justification peut être située de façon précise dans les diversstades de la rédemption réalisée dans une vie humaine, et quoique lesactes successifs semblent souvent simultanés dans le retour du filsprodigue vers le Père. Dieu a l'initiative toujours, il aime lepremier. Pour être sauvé, il faut que l'homme accepte le don de lavie éternelle que Dieu lui offre en Jésus-Christ. Or l'homme estséparé de Dieu par le péché; il ne peut effacer son péché et Dieu nesaurait accepter l'homme avec son péché comme l'un de ses enfants. Delà l'absolue nécessité de l'intervention divine, de la justificationgratuite accordant le pardon à l'homme qui croit. Justification etconversion (voir ce mot) sont deux actes étroitement liés dans laconscience et dans le temps, mais pourtant différents. Différents ence que la justification est uniquement le fait de Dieu, et laconversion est en partie le fait de l'homme; différents aussi en ceque pour se convertir, se donner à Dieu, l'homme doit avoir lesentiment que Dieu ne lui tient plus compte de ses péchés. Lajustification précède la conversion et la rend possible. Dans la vie nouvelle qu'ouvre la justification et où la conversionintroduit, l'homme a besoin non seulement du pardon, qui abolit lepassé, mais de la force qui le rendra capable de vivre cette vie; àla conversion, au don de lui-même que fait l'homme, Dieu répond parla régénération, par la dotation de l'homme qui reçoit pour sonesprit, son coeur, sa volonté, les indispensables qualités, vertus etpouvoirs. Conversion et régénération paraissent aussi se confondresouvent, et, en fait, sont presque simultanées; mais la conversionimplique une résolution, une décision formelles de l'homme; larégénération procède de Dieu; même converti, déterminé à appartenir àDieu, l'homme ne saurait créer en lui l'être nouveau qu'il doitdevenir; la régénération qui met en lui l'inspiration du vouloir etla possibilité du faire, lui permet de «marcher comme un enfant delumière». La régénération est le complément divin de lajustification, et, pour être non plus un opus operatum mais unacte de Dieu, un acte moral, elle doit bien intervenir après ladétermination de l'homme qui se donne et s'offre à l'action de lagrâce. Enfin les actions jusqu'ici alternées de Dieu et de l'homme seconjuguent, s'unissent, jouent simultanément dans le développement,l'épanouissement de la vie chrétienne, dans la sanctification. Lasanctification est l'ascension sans terme terrestre vers Dieu, ellepréfigure la vie étemelle où Dieu sera tout en tous, elle en est lecommencement ici-bas. And. A.