JONC, PAPYRUS, ROSEAU

1. agmôn (Job 40:21).Le mot se rattache par l'étym. à agam, marais; c'est une plantede marécage, qui a fort embarrassé les traducteurs: on a traduit le mothébreu par dard, muselière, anneau, entrave, roseau, jonc. L' agmôn est opposé à la palme comme la queue à la tête (Esa 9:1319:15), c-à-d, comme un végétal d'ordre inférieur à un végétald'ordre supérieur. Quand Ésaïe 58:5 demande si c'est jeûner que decourber la tête comme un agmôn, il évoque l'image d'une herbe quiplie au vent. Dans Job 41:11, l'agmôn est considéré commecombustible, d'où la traduction chaudière. L'hypothèse qui nous paraît laplus probable est celle qui fait de l'agmôn une Joncacée, juncus (il y en a 189 espèces), ou luzula (38 esp.). Ce sontdes plantes herbacées, terrestres ou aquatiques, vivaces ouannuelles, à rhizome traçant ou cespiteux, à tiges feuillées oumunies à leur basé d'écaillés engainantes; à feuilles linéaires,planes, canaliculées ou cylindriques, souvent marquées de plistransversaux de distance en distance, quelques fois toutesradicales; à fleurs petites, ordinairement brunâtres, solitaires ouen glomérules, en cymes ou en corymbes, les rameaux del'inflorescence munis chacun à la base de deux bractées constituantune gaine tubuleuse qui embrasse la base du rameau. 2. gômé Des rares données de l'A.T, la seule chose qui ressorte avecévidence, c'est que le gômé est une plante du bord deseaux (Esa 35:7), habitant avec le jonc les lieuxmarécageux (Job 8:11), assez vigoureuse pour qu'il fût possibled'en faire des esquifs comme le berceau du petit Moïse (Ex 2:3),ou même de véritables barques (Esa 18:2). Dans ce dernierpassage, la Vulg, traduit par papyrus, et c'est ainsi que l'entendentaujourd'hui de bons auteurs. Le papyrus est de la famille desCypéracées, genre cyperus (=souchet), dont il existe 400 espècestropicales et subtropicales, esp. cyperus papyrus L. (Afrique,Calabre, Sicile). Ce souchet est une grande et belle plante, dont latige, haute de 2-4 m. et grosse comme le bras, est triangulaire danssa partie supérieure, l'un des angles étant toujours opposé aucourant; elle porte à son sommet une ombelle composée très ample etfort élégante. La tige est remplie d'une moelle semblable à celle dusureau, mais traversée par des vaisseaux fibro-vasculaires et par delongs méats aérifères. Les anciens Égyptiens découpaient la moelle dusommet de la tige du papyrus en minces lanières longitudinales dontla largeur était déterminée par l'épaisseur de la tige (5-6 cm.), etdont la longueur pouvait varier considérablement (20-30 cm.); ceslanières étaient déposées côte à côte de manière à former unepremière feuille, sur laquelle on superposait à angle droit d'autreslanières; les couches étaient rattachées l'une à l'autre au moyen deglu, humectées avec de l'eau, de préférence de l'eau du Nil; lesfeuillets ainsi obtenus étaient pressés, séchés au soleil et polisavec des polissoirs d'ivoire pour faire disparaître toute inégalitéde la surface; c'est au papier ainsi obtenu, en apparence fragile etpérissable et qui servait pour la correspondance, les piècescommerciales et même officielles, qu'on est redevable desconnaissances actuelles relatives à l'ancienne Egypte. Aujourd'hui lepapyrus (voir ce mot) n'existe plus dans le Delta du Nil. VoirÉcriture, parag. V 3. âkhou Cette plante, mentionnée Ge 41:2,18 (Vers. Syn.: marécages), etJob 8:11 en même temps que le papyrus, était probablement, commele suggère la traduction de la Vulg, (carectum), une sorte de carex oulaîche (fam. des Cypéracées). 4. qânè Ce mot a plusieurs sens dans l'A.T. Le sens primitif est celui detuyau, tube, tige (Ge 41:5,22); les sens principaux et dérivéssont les suivants: (a) Le roseau (Esa 19:6 35:7), de la famille desGraminées. On pense que celui dont il est question dans l'A.T., puissous le nom de calamos dans le N.T., est l' arundo Donax L.(roseau à quenouille, canne de Provence, grand roseau, roseau desjardins), plante vivace de l'Europe mérid., dont les souches charnueset rampantes deviennent très ligneuses en vieillissant. Ellesémettent des tiges nombreuses, dressées en touffes, et d'un port quirappelle celui du bambou, entourées de grandes et belles feuillesalternes, rubanées, retombantes, planes, lancéolées-aiguës, lissessur les bords, d'un vert glauque. Les épillets de l'inflorescence,très nombreux, forment une vaste panicule compacte, très poilue, de30-40 cm. de haut., roussâtre puis blanchâtre. Cette graminée estencore très commune sur les rives du Jourdain et en particulier dansles marécages de Hoûlé (eaux de Mérom). Ses longs épis plumeux,continuellement agités par la brise, sont un trait caractéristique dupaysage (Mt 11:7,Lu 7:24); comp, le chuchotement des roseauxdans la fable de Midas. C'est des petites tiges que les anciensfirent la plume: calamos (3Jn 13). On en faisait aussi despipeaux champêtres. Un roseau servit à élever jusqu'au Crucifiél'éponge vinaigrée (Mt 27:48). C'est aussi d'un roseau que lessoldats avaient fait au roi des Juifs un sceptre dérisoire, dont ilsle frappèrent (Mt 27:29 et suivant). Dans la Bible, le roseauest surtout l'image de la fragilité (1Ro 14:15,Eze 29:6); d'oùla page célèbre de Pascal: «L'homme n'est qu'un roseau...» Sansdoute, il plie au vent (comp. La Font., le Chêne et le Roseau), mais parfois il rompt aussi: s'il est «froissé», c-à-d, écrasé oudétérioré en un point de sa tige, il devient non seulement inutilemais encore dangereux, car malgré son apparence normale il est prêt àcéder sous la moindre pesée et la main qui s'y appuyait risque d'êtrepercée par la pointe de sa cassure; d'où l'image de l'Egyptetraîtresse (2Ro 18:21 parallèle Esa 36:6), et aussi celledu Serviteur de Jéhovah qui n'achèvera pas les malheureux meurtris(Esa 42:3, cité et réalisé par le Seigneur Jésus: Mt 12:20). (b) Le roseau ou canne aromatique,(Ex 30:23,Ca 4:14,Esa 43:24) r. odorant, galanga des marais, acorus calamus L., est de la fam. des Aracées. C'est une herbe qui croît surtoutdans les lieux humides de l'Inde et de l'Arabie,(Jer 6:20,Eze 27:19) et qui a été introduite en Europe dès le Moyen âge. Laracine, d'où l'on extrayait une huile aromatique, consiste en unesouche cylindrique, rhizomateuse, roussâtre, cannelée, très odorante,d'où s'élèvent perpendiculairement des feuilles en forme de glaive,striées, longues d'environ 1 m., et des hampes un peu plus courtes,terminées chacune par une bractée ample et membraneuse (spathe) delaquelle sort un support cylindrique, grêle, long de 10-15 cm., unpeu arqué, portant des fleurs très serrées, sessiles, hermaphrodites,d'un jaune verdâtre (spadice); l'ovaire est trigone; une baieglobuleuse rouge lui succède. (c) Canne à mesurer: celle avec laquelle Ézéchielévalue les dimensions dans le temple de sa vision (Eze 40:3,5,etc.; cf. Apo 11:1 21:15). Le mot franc, canne vient, à travers legrec et le latin, de l'hébreu qânè (d) Fléau de balance et, dans Esa 46:6, balance,la partie étant prise pour le tout. (e) A la fois tige et branches du chandelier duTemple (Ex 25:31 37:17) et suivants, etc. 5. souf. Ce doit être une espèce de roseau; il est mentionné àpropos de l'Egypte: roseaux du Nil (Ex 2:3,5) ou descanaux (Esa 19:6), et dans l'expression devenue nom propre: yam-souf =mer des roseaux, et traduite mer Rouge (voir ce mot)depuis les LXX (Ex 10:19 13:18,Jos 2:10 etc.); Reuss etd'autres traduisent «mer aux algues». Ce dernier sens doit être entout cas celui de souf dans Jon 2:6, et il s'agirait dequelque fucus, ou varech. 6. Grec khortos (Sir 40:16). Le sens de ce terme doitêtre générique, et correspondre indistinctement à quelques-uns des termeshébreu ci-dessus. Ch.-Ed. M.