ISRAËL (Histoire et Religion 5.)

4. Le schisme. Au terme des trente années de ce règne, l'oeuvre de David n'était pasachevée. La cohésion entre les différents clans et tribus était loind'être parfaite. Dans ce pays de peu d'étendue, les moyens decommunication étaient lents et incommodes. Les Hébreux, peuple au«col raide», étaient réfractaires à toute organisation. Si le motmoderne de «démocratie» ne saurait leur convenir, du moins ilsrefusèrent d'être opprimés et façonnés comme les fellahs d'Egypte oules classes inférieures de Babylone. Leur roi n'était pas un dieuqu'il fallût adorer à genoux en obéissant à ses ordresarbitraires (1Ro 12:14). La gloire exagérée dont Salomon avaittrop hâtivement environné Jérusalem ne pouvait manquer de semer lesgermes de la division. L'inintelligence et l'entêtement de Roboam,d'une part, l'habileté de Jéroboam, d'autre part, agissaientparallèlement. Quel jugement faut-il porter sur le schisme? En tant quecatastrophe politique, il est aisément explicable. Toutes lesinfluences humaines nécessaires y ont contribué. Que serait-il advenusi le schisme ne s'était pas produit? Nul ne le sait et lessuppositions sont vaines. Il fut considéré plus tard comme la grandeapostasie, d'où la phrase souvent citée: «Jéroboam, fils de Nébat,entraîna les Israélites dans le péché» (1Ro 16:26). Cetteopinion est justifiée par ses actes. En plaçant des veaux d'or à Danet à Béthel afin d'empêcher le peuple d'aller en pèlerinage àJérusalem, il rabaissa la religion dans le royaume du Nord (1Ro12:26-32). adroite manoeuvre politique, de même que l'institution,au quinzième jour du huitième mois, d'une fête semblable à «cellequ'on célébrait en Juda». Et cependant la pensée de placer pareilsévénements sous le contrôle de Jéhovah n'est pas absente. Le schismeavait été prédit par le prophète Ahija de Silo (1Ro 11:30-32);et quand Roboam réunit une armée pour attaquer Israël, Sémaja, «hommede Dieu», déclara: «Ainsi parle l'Éternel: Vous ne combattrez pointcontre vos frères, les Israélites, car tout cela est arrivé par mavolonté» (1Ro 12:22-24). Autour d'un événement aussi important, des opinions etappréciations diverses se donnent carrière; mais, malgré defréquentes discordes, un sentiment de fraternité persista avecl'espoir d'un glorieux retour à l'union dans l'avenir. Nous avons àexpliquer le fait qu'au moment du partage, après deux cents ansd'existence en tant que nation, l'Israël du Nord possédait unpays plus vaste et plus riche, une population plus nombreuse etd'autres avantages encore. Bien qu'un examen complet, du point de vuelittéraire, n'entre pas dans le cadre de notre étude, il importe denoter que, dans le royaume du Nord, une grande activité a dû êtredéployée. L'opinion généralement admise établit un rapport entrel'origine du document élohiste et la vie des Israélites du royaume duNord. Des comparaisons minutieuses ont révélé en eux un donexceptionnel pour la narration et un affinement croissant de lapensée. Le récit du sacrifice d'Isaac (Ge 22:1-14), drameréaliste de la vie antique, présenté avec art sous une forme concise,en est un des plus remarquables exemples. Et dans la périodehistorique, les faits qui se groupent autour de la personne d'Élie,décrivant l'indomptable énergie, les promptes impulsions et lecaractère mobile du prophète de Thisbé, frappent par leurs qualitéspittoresques. Le mérite de décrire nettement en peu de phrases desscènes d'actualité caractérise aussi les récits effrayants desexploits de Jéhu et de la mort de Jézabel. Il est certain que lesIsraélites furent des précurseurs dans cet art de la narration auquelles Grecs donnèrent plus tard un si vif éclat. Ce n'est pas un simplegroupement de faits, mais un récit où se confondent, dans unemerveilleuse harmonie, la mémoire et l'imagination. Dans bien des casla vérité qu'il recouvre est plus large et plus significative que lesdétails concernant les personnes et les circonstances locales. Sic'est le royaume de Juda qui nous a transmis la contribution d'Israëlà la littérature sacrée, il ne faut pas oublier que, même après ladestruction de la nation, l'héritage littéraire venu du Nord continuade vivre et d'exercer son influence. Pendant deux cents ans, les deux royaumes des Hébreux existèrentcôte à côte, parfois amis, parfois rivaux. Tout proche, un royaumearaméen, dont la capitale était Damas, avait été fondé dans le N.-E.;ce qui, dans la suite, compliqua la situation. A la faveur de la paixqui régnait en Egypte et en Assyrie, ces puissances se fortifièrent,mais bientôt elles intervinrent à nouveau dans les affaires de laPalestine. Nos documents historiques concernant les deux royaumeshébreux sont rares et fragmentaires; la préoccupation dominante desécrivains a trait à la religion, les vies des prophètes sont plusimportantes à leurs yeux que les règnes des rois. Plusieurs chapitressont consacrés au prophète Elisée, un seul au règne de Manassé quiest supposé avoir duré cinquante-cinq ans (2Ro 21). Poursimplifier, nous parlerons en premier lieu du nouveau royaumed'Israël, afin d'être libre de développer en finissant ce quiconcerne la ligne juive, au risque de nous répéter parfois. Un rapideaperçu de la situation politique aidera à apprécier les faits dansleurs relations avec la religion d'Israël et de Juda.