INTERPRÉTATION

(grec, herméneuïa, d'où le terme d'école: herméneutique =artd'interpréter les textes sacrés). Ce mot désigne l'une des démarchesnécessaires et primordiales de l'esprit humain; aussi letrouvons-nous avec ses synonymes à travers toute la littératurebiblique. 1. Interprétation des songes. A tous les stades de la civilisation,chez les Hébreux comme chez les autres peuples de l'antiquité, lessonges furent considérés comme d'origine divine. La connaissance deleur signification était donc de grande importance. Leurinterprétation constituait toute une science. A la cour des pharaonscomme à celle des rois de Babylone, magiciens, sages, devins,astrologues, caldéens forment une classe de savants spécialementaffectés à cet art (Ge 41:8-24,Da 2:2,27 4:6 s). Ils y sontsurpassés par Joseph et Daniel, qui attribuent leur science àDieu (Ge 40:8 41:18-37,Da 2:20-28,45 4:18 5). Voy. encore, pourun songe et son interprétation, Jug 7:15. Dans le N.T. lessonges tiennent moins de place. Ceux qui sont mentionnés sontregardés comme des révélations directes de Dieu ou de sa volonté. Lespersonnes qui les reçoivent ne semblent éprouver nulle difficultéquant à leur signification (Mt 1:20 2:12-22). 2. Interprétation d'une langue. L'histoire de Joseph nous apprendqu'il y avait également à la cour des pharaons des interprètesofficiels, chargés de traduire les langues étrangères en égyptien ouvice versa (Ge 42:23). Les ambassadeurs devaient avoir lesqualités d'interprètes (2Ro 18:26 et suivants). Au tempsd'Esdras et de Néhémie, la loi devait être expliquée aupeuple (Ne 8:7 et suivant), soit que les lévites dussent endonner des interprétations pratiques, soit plus probablement que lalangue du «livre de la loi de Dieu» dans lequel «ils lisaientdistinctement» ne fût plus celle que parlaient les Juifs revenus deBabylonie et ceux qui avaient épousé des femmes étrangères (Ne13:24); dans ce cas, il fallait traduire l'hébreu en araméen. Aucontraire, 260 ans plus tôt, le Rabsaké assyrien, voulant se fairecomprendre du peuple juif, lui parlait «en langue judaïque», au granddéplaisir des dignitaires d'Ézéchias; ils auraient voulu que leRabsaké parlât aram, pour n'être compris que d'eux-mêmes (Esa36:11,13). Depuis l'exil, cet usage de traduire le texte sacré de laloi en aram, devint général; dans toute synagogue, à côté du lecteur,il y avait le targumiste ou interprète (voir Targum). Il devaiten être ainsi du temps de Jésus, à Nazareth et Capernaüm. Dans leN.T. se trouvent de nombreuses citations de mots hébreux ou aram, avecleur interprétation grecque: Mr 3:17 5:41 7:34 15:22-34,Jn 1:38,41,429:7 Ac 4:36 9:36 13:8,Ro 8:15,Heb 7:2. Pour le titre de Marc«interprète de Pierre», voir Marc (évangile). 3. Prophètes interprètes de l'Éternel. Esa 43:27 attribue lafonction d'interprète aux prophètes d'Israël. Ceux-ci avaient pourmission de rendre accessibles au peuple, par leur parole, lesrévélations divines reçues dans l'intimité de leur conscience. D'aprèsce passage et bien des exemples connus, beaucoup d'entre eux furentd'infidèles interprètes de l'Éternel (1Ro 22:6,23 13:11-22,Jer23:9-32,Eze 13:1-16 etc.). 4. Interprétation des langues (1Co 12:10,30 14). Le «don deslangues» (grec glossolalie), langue extatique d'ordre émotionnel,dut donner lieu à des manifestations confuses et tumultueuses dansl'Église de Corinthe, ce qui obligea l'apôtre Paul à intervenir. VoirLangues (don des). 5. Interprétation privée. On lit dans 2Pi 1:20: «Nulleprophétie de l'Écriture n'est affaire d'interprétation privée»,déclaration qui a donné lieu elle-même à des interprétations fortdisparates. D'abord l'Église romaine s'est souvent servie de ce textepour appuyer la prétention de son magistère: seule l'Église,hiérarchiquement constituée, a pouvoir et autorité pour interpréterles Écritures; les laïques et les simples clercs ne peuvent qu'errer.Crampon néanmoins, d'accord avec les exégètes protestants, commente:«Ce n'est pas de la pensée humaine et personnelle du prophète quevient la prophétie; car c'est poussés par le Saint-Esprit, etc.»Seul l'Esprit peut expliquer ce que l'Esprit a inspiré. La Bbl. Fam.y voit une «protestation contre les procédés arbitraires de l'exégèseallégorique». Explication fort plausible, surtout quand on connaîtles méthodes d'interprétation des rabbins qui découvraient à touteparole de l'Écriture, outre son sens propre, au moins septsignifications différentes. Il nous semble en tout cas difficiled'admettre l'idée d'un certain nombre d'exégètes (Rochedieu) que lesprophètes ignoraient eux-mêmes le plus souvent le sens de leursprophéties. Ce qui n'est pas déclarer illégitimes les interprétationsdonnées après coup par des chrétiens à d'anciennes prophéties.--VoirBible (commentaires sur la), Nouveau Testament (interprétation du),Symbolisme. A. E.