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I Au sens concret d' «idole», ce terme est fréquent sous diversesformes. Peut-être les législations israélites gardent-elles les tracesd'une évolution dans les interdictions de plus en plus strictesrelatives à la fabrication et à l'adoration d'effigies de ladivinité. Ainsi, Ex 34:17 prohibe tout dieu de métal, et Ex20:23 tout dieu d'argent ou d'or; primitivement, la stèle ou lepieu sacré pouvait parfois représenter Dieu (Ge 28:18;voirColonne). Le Décalogue interdit l'image taillée (Ex 20:4,De 5:8),et le considérant est sans doute plus tardif, qui, «pour déjouertoute tentative d'éluder le commandement, ajouta: ni aucunereprésentation quelconque de ce qui est dans les cieux en haut ou surla terre en bas, etc.» (L. Gautier). Le 26:1 énumère diversgenres d'images, taillées, sculptées, ornées, pour les envelopperdans la même condamnation. Quelques-unes des protestations les plusvirulentes, souvent cinglantes d'ironie, contre les images,fournissent de précieux renseignements sur leur fabrication (Os8:4 13:2,Jer 10:1-16,Esa 44:9-20 46:5-7,Da 5:4, Be 1:7, Lettre Jertout entière, Sag 13:10-15:17, etc.). Voir: Idolâtrie.II Au sens abstrait de «ressemblance», ce terme exprime lesrelations qui unissent l'homme ou le Christ à Dieu. 1. Le principal passage où s'exprime cette notion est celui de laGenèse: «Dieu dit: Faisons l'homme à notre image et à notreressemblance...Et Dieu créa l'homme à son image. Il le créa à l'imagede Dieu» (Ge 12:6 et suivant). On a voulu voir ici unedifférence essentielle entre «image» et «ressemblance» (le premierterme désignant l'intelligence, le deuxième les facultés morales; ouencore, comme dans la théologie catholique, «image» se rapportant auxattributs naturels, intelligence, liberté, et «ressemblance» aux donssurnaturels, justice, innocence). Le fait qu'au v. 27, seul le mot«image» est employé et, dans Ge 5:1, seul le mot «ressemblance»,prouve suffisamment qu'il n'y faut voir qu'une répétition parparallélisme, cas fréquent en hébreu. Dans la Genèse ce terme estparticulier aux textes venant du Code Sacerdotal, mais l'idée en aété très souvent reprise ailleurs: dans l'A.T. (Ps 8:6), lesApocryphes (Sir 17:3 Sag 2:23) et surtout le N.T (1Co11:7,Jas 3:9 etc.). Certains savants, rapprochant Ge 12:6 etsuivant de Ge 5:1,3, de No 12:8,Ps 17:15, et de diversestraditions babyloniennes, ont supposé qu'on avait d'abord cru à uneressemblance corporelle de Dieu avec l'homme, le corps humainconstituant déjà une supériorité décisive à l'égard de l'animal. Cette hypothèse cadre mal avec le spiritualisme du monothéismehébreu: «L'homme ne peut voir Dieu et vivre» (Ex 33:20). Aussila déclaration de la Gen., prise au sens spirituel, est-elle riche designification et tout à fait caractéristique du point de vue de laRévélation. Il y faut voir tout d'abord l'affirmation de l'innocenceoriginelle de l'homme, sorti pur des mains de Dieu, capable devouloir le bien et de l'accomplir. La chute, d'ailleurs, n'effacerapas entièrement cette image de Dieu en l'homme, qui toujours seradistinct du reste des créatures, y compris les animaux. Seul en effetdans l'univers, l'homme est doué de raison et de conscience, c-à-d,capable de s'élever de l'intelligence des faits particuliers qu'ilconstate à la compréhension des lois générales du monde, etd'éprouver le désir d'un idéal moral, la souffrance de n'y pasparvenir, la repentance, la joie de devenir meilleur; grâce à cetteressemblance divine, il pourra connaître, aimer et servir sonCréateur. Inversement, ce texte de la Genèse peut sans doute nous donnerquelque idée de Dieu, sans que ce soit un anthropomorphisme trophardi: Dieu n'est ni une force de la nature (tonnerre, soleil), niune puissance spirituelle immanente au monde ou à l'humanité (énergievitale, bien, raison), mais un être personnel, doué comme l'homme deraison et de conscience. Dieu, certes, dépasse infiniment toutecréature par ses attributs, ce qui nous interdit de définir le pluspar le moins, l'infini par la créature limitée; mais Dieu possède au moins les caractères qui font la supériorité de l'homme surl'univers entier (voir Connaissance). 2. Avec Jésus, l'image de Dieu reparaît dans l'humanité tellequ'elle était au début (Ro 5:14). L'apôtre Paul nous montre enlui «l'image du Dieu invisible, le premier-né de toute création»(Col 1:15,2Co 4:4, cf. Heb 1:3 et le prologue du 4 eévangile). Jésus apparaît là comme un être unique dans l'univers,intermédiaire entre le Créateur et le monde, créé le premier avanttoute création. Ces déclarations devaient être particulièrementexpressives dans les milieux païens, qui dressaient des images deleurs dieux ou en célébraient hyperboliquement de prétenduesincarnations, comme la pierre de Rosette (196 av. J.-C.) appelantPtolémée Épiphane «l'image vivante de Zeus», ou comme les fables de«dieux descendus sous forme humaine» (Ac 14:11) qui valurent lenom grec d'icône (=image) à la ville d'Iconie (voir ce mot). Aussi ces affirmations de l'apôtre, bien loin de vouloir éleverle Christ, par des attributs métaphysiques, hors de l'humanité, nousmontrent au contraire Dieu, en Jésus, descendant vers l'homme afinque celui-ci puisse plus aisément parvenir encore à lui ressembler.Comment se fera cette ascension? Par la naissance en nous de l'hommenouveau qui se «renouvelle incessamment à l'image de Celui qui l'acréé» (Col 3:10,Eph 4:24). C'est à cela que Dieu appelle sesélus; il les voudrait «conformes à l'image de son Fils, afin quecelui-ci fût le premier-né d'une multitude de frères» (Ro 8:29).Ainsi s'exprime l'idéal de l'Évangile, que Jésus lui-même avaitapporté dès le début de son ministère (Mt 5:48). Dieu ne veutpas seulement pardonner aux hommes et les réconcilier avec lui-même;il veut aboutir enfin au but qu'il s'était fixé dès le commencementdu monde: «faisons l'homme à notre image». Voir Homme. J-P- B.