HEURE

Pour la division du jour en heures,voir Temps. Dans l'A.T., c'est lemot hébreu très général èth =temps, qui exprime l'idée d'heure,même dans la locution courante «demain à pareille heure» (Ex9:18,1Sa 9:16 20:12,1Ro 19:2 etc.). Dans le N.T., c'est le mot grec hôra qui peut désigner, suivant les cas, toute période, jour ounuit, partie de mois, saison, année, ou même durée, aussi bien qu'uneheure précise ou un moment convenable; de même le grec kaïros, dans Jn 7:6,8, etc. La notion d'heure est donc assezindéterminée et variable, d'autant que pour les anciens les moyens del'enregistrer étaient fort approximatifs. Le Christ du quatrième évangile, par l'expression répétée:«L'heure vient», plusieurs fois suivie de la précision: «et elle estdéjà venue», fait allusion au régime nouveau que son ministèreinaugure dans le monde, régime tout spirituel, quant au culte (appelà la Samaritaine: Jn 4:21,23), quant à la vie des croyants(appel aux Juifs: Jn 5:25,28), quant à l'épreuve de leur foi(appel aux disciples: Jn 16:2,25-32). Une expression analoguedans le même évang, comporte un sens beaucoup plus limité: comme leChrist parle de la future mère qui voit «son heure venue»--l'heuredouloureuse de l'enfantement (Jn 16:21) --, de même il parletrois fois de la venue de «son heure» à lui (Jn 2:4 12:23 17:1),et trois fois l'évangéliste en parle aussi (Jn 7:30 8:20 13:1).Il s'agit de l'heure de sa manifestation de Messie, glorieuse dans ladouleur; cette heure n'est pas celle de son choix, mais celle qu'aurachoisie le Père. Dans l'épisode de Jn 12:20,32, lorsque desGrecs pieux viennent à lui, le Seigneur s'émeut en pensant auxconditions tragiques de l'heure qui «est venue»: celle de saglorification (verset 23), de son élévation destinée à attirer tousles hommes; son trouble s'exprime en un dialogue avec lui-même:«Maintenant mon âme est troublée; et que dirai-je? Père, délivre-moide cette heure! Mais c'est pour cela même que je suis venu jusqu'àcette heure! Père, glorifie ton nom!» (verset 27 et suivant). Cettetraduction, la plus probable, montre bien l'opposition entre la voixde la nature, si Jésus la laissait parler: «Dirai-je: Père,délivre-moi de cette heure?» et la voix de l'Esprit et de savocation: «Mais c'est pour cela même que je suis venu jusqu'à cetteheure!» puis la solution de la crise dans la prière confiante: «Père,glorifie ton nom!» Pour certains critiques, l'évangélisteattribuerait ici à Jésus la répudiation de la prière même que luiprête Marc (Mr 14:35) en Gethsémané, parce que son agonie,rapportée par les évangiles synopt., aurait paru à ce quatrièmeévangéliste incompatible avec sa conception du Christ (Bbl. Cent.);F. Godet nous paraît plus psychologue quand il voit dans cette scène«le prélude de celle de Gethsémané; seulement, dans cette dernière,Jésus, au comble de l'angoisse, pousse réellement le cri devantlequel il s'arrête ici. Cette nuance délicate, conforme à ladifférence des deux situations, prouve le caractère strictementhistorique de chacune d'elles...Admirons la gradation entre Lu12:49 et suivant, Jn 12:27 et la scène de Gethsémané,gradation qui peint si naturellement l'émotion croissante aveclaquelle Jésus s'approchait lentement de la croix».(Comment, surJn, III, pp. 279-283.) Les synoptiques montrent en effet, eux aussi, cette approche de«l'heure»: celle où les disciples n'ont pu veiller (Mr 14:37,Mt26:40), celle qui est venue avec le disciple traître (Mr 14:41et suivant, Mt 26:45), celle que le Maître dénonce auxprêtres responsables comme «leur heure», où se déchaîne «la puissancedes ténèbres» (Lu 22:58). D'ailleurs, les synoptiques n'ignorentpas non plus l'heure de l'élévation du Seigneur après celle de sonsacrifice: tandis que l'évangile spirituel a annoncé sa«glorification» (Jn 13:1 17:1 etc.), eux ont conservé l'annoncede «l'heure» future, solennelle entre toutes, celle où le Fils del'homme viendra (Mt 24:43,50 Lu 12:39,46). le point précis dutemps qu'elle marquera, nul ne le sait, que Dieu, le seul Maître del'heure; d'où le devoir pour les croyants d'être prêts, dans lavigilance et le fidèle service (Mr 14:32 et suivants etparallèle, Mt 25:13). Le voyant de l'Apocalypse s'inspire de cesexhortations du Maître quand il annonce, non seulement l'heure del'épreuve (Ap 3:10), mais aussi celle de sa venue (Ap 3:3),de ses châtiments (Ap 9:15) et du jugement (Ap 14:7).L'apocryphe Siracide, qui parle quelque part de la mort comme de«l'heure du compte à rendre» (18:20), clôt son livre par une paroleprophétique lorsqu'il conclut: «Accomplissez votre tâche avantl'heure (par où il entend: l'heure dernière), et Dieu vous donneravotre récompense, à Son heure!» (51:30). Jn L.