FEU

Le feu et la flamme sont cités plus d'un millier de fois dans laBible.I Sens littéral. 1. Dans la nature.Il apparaît d'abord comme l' éclair (voir ce mot), appelé le feude Dieu (Job 1:16), le feu du ciel envoyé par Jéhovah (Ex9:23 et suivant). Maître de l'orage comme de la nature (Ps18:13-15), l'Éternel peut faire tomber une pluie de feu et desoufre (Ge 19:24 et suivant), et se servir des flammes aussibien que du vent (Ps 104:4, Lettre de Jérémie 63); parmi sesoeuvres admirables, le soleil aussi est célébré comme unfeu (Sir 43:2-4).La Révélation biblique du Dieu unique, personnel, moral ettout-puissant, n'a pas de place pour le culte du feu, qui joua unsi grand rôle dans les Védas de l'Inde, plus encore dans le mazdéismeperse de Zoroastre, et qui dans le panthéon gréco-romain fut rattachéaux divinités Hestia-Vesta et Héphaïstos-Vulcain; Sag 13:2 cite lefeu parmi les objets des idolâtries humaines. La Révélation n'a pasdavantage de place pour une explication mythologique de l'originedu feu dans l'humanité, analogue à la fable de Prométhée, quil'aurait dérobé au dieu des dieux, Zeus foudroyant: la vision deAp 13:13 ne doit même pas faire allusion à ce mythe, mais plussimplement aux sorciers orientaux qui se prétendaient maîtres defaire tomber la foudre.La Bible n'est pas un livre scientifique et ne parle pas de laconquête du feu par l'homme, qui dut consacrer définitivement sadomination sur les animaux. Si la possession du feu est supposée pourla fabrication d'instruments d'airain et de fer sur la forge (Ge4:22), puis impliquée pour les holocaustes offerts par Noé (Ge8:20), il n'est spécifié ni comment on le produisait, ni comment onle transportait (Ge 22:6 et suivant); probablement leconservait-on à l'état de braises. Ce n'est que dans les livresapocr, qu'est mentionné un feu «fait avec des pierres» (2Ma10:3), c-à-d, produit par le choc des silex. 2. Dans la vie quotidienne.Le feu sert couramment à la cuisson des aliments (Ex 12:8 etsuivant, 2Ch 35:13,Jn 21:9, etc.), au chauffage et à l'éclairage (Esa 44:16, 1Ma 12:29, Judith 7:5 13:13,Mr 14:54,Ac 28:2 etc.); la législation sacerdotale interditd'allumer ces feux domestiques le jour du sabbat (Ex 35:3),défense qui fut renforcée par les rabbins. Dans les demeures aiséesil s'agissait ordinairement d'espèces de brasiers portatifs; lespauvres se contentaient de brûler leur combustible dans un creux dusol battu: on comprend qu'ait pu souvent y tomber l'enfant sujet auxcrises;voir (Mr 9:22) Charbon, Chauffage.Le feu sert aussi à la fabrication des métaux, pour les fondre,forger, affiner, etc (Ex 32:21,Jer 6:29,Mal 3:2 et suivant, Sir 38:28).;voir Fondeur. 3. Comme agent de destruction, le feu n'est pas moins employé; on arecours à lui pour faire disparaître bien des objets encombrants,malsains ou indésirables: mauvaises herbes, broussailles, débrisvégétaux (Mt 6:30 13:30,Lu 3:17); mais il faut prendre garde auxrisques d'incendie (Ex 22:6,Jug 9:15,Esa 5:24,Jas 3:6).Il anéantit les détritus animaux des sacrifices ou desmaladies (Ex 12:10,Le 4:11 8:17 9:11 13:52); mais les Israélitesne brûlaient pas les cadavres: le cas de Saül (1Sa 31:12) estexceptionnel, Am 2:1 dénonce cette pratique en Moab, et Am6:10 est un texte fort obscur.Le feu consume les livres condamnés (Jer 36:23, 1Ma1:56, Ac 19:19), et surtout les idoles et les imagestaillées.(Ex 32:20,De 7:5,25 12:3,2Ro 23:4 et suivants, etc.) --Le feu est une des armes principales des guerres, enparticulier des sièges; on y fait brûler: portes (Jug 9:52,Ne1:3, 2Ma 14:41 etc.), tours et forteresses (Jug 9:19,2Ma 10:36), chars (Jos 11:9), palais (Jer 17:27),temple (2Ro 25:9), villes (Jos 6:24,Jug 18:27, Esa1:7, 1Ma 1:31 16:10 etc.), tellement que le feu devient unefigure de la guerre dévastatrice (Esa 10:17 26:11, Bar 4:35,etc.) et des maux qu'elle provoque (Joe 2:30,Ap 8:7 etc.). Les«machines pour lancer le feu et des pierres» sont citées dans 1Ma 6:51; le javelot incendiaire, dans Eph 6:16 (cf.Sag 5:21). --Le supplice du feu était prévu par la loi pour certainscrimes abominables;voir (Le 20:14 21:9,Jos 7:16) Crimes, délitset peines. Il est quelquefois infligé à des Juifs par leurspersécuteurs.(Da 3, 2Ma 7:6) --Le feu qui consume est présenté plusieurs fois comme peine infligée par Dieu (Ge 19:24, cf. Sag 10:6 et Lu17:29 Ex 9:23, cf. Sag 16:16; No 11:1-3, etc.); le Dieu quipunit ainsi est un feu consumant (De 4:24). Mais lorsque deuxapôtres, pensant à l'exemple d'Élie (2Ro 1:10 et suivants),proposent à Jésus de foudroyer les Samaritains inhospitaliers, leSeigneur les réprimande (Lu 9:54 et suivant); à Élie lui-mêmel'Éternel avait un jour montré qu'il n'est pas dans le feu (1Ro19:12). 4. Dans les sacrifices, en Israël comme chez presque tous les peuplesprimitifs, «l'union mystérieuse de la flamme, au pouvoir consumant,et de la fumée qui monte en spirales vers le ciel, présente à elleseule tout un culte en action. C'est l'offrande et c'est la prière».(A. Westphal, Sources,). Le feu consume sur l'autel soit lesvégétaux préparés pour l' oblation (Le 2:2,9,16), soit lesanimaux de l'holocauste--combustion totale--,(Ex 29:18,Le1:9 etc.) soit certaines parties d'animaux;voir (Le 3:34:8-10 etc.) Sacrifices. Plusieurs fois, la combustion spontanéede l'offrande par le feu de l'Éternel est le signe de sa réponsefavorable (Ge 15:17,Le 9:24,Jug 6:21,1Ro 18:24,38).La loi sacerdotale juive, tout en excluant absolument le culte dufeu, prescrit comme un symbole la règle qui s'impose à ses adorateurs(Vestales, etc.) d'entretenir continuellement le feu sacré del'autel (Le 6:13); l'Église catholique romaine et l'Églisegrecque orthodoxe ont conservé ce rite, et elles célèbrent le matindu samedi saint la bénédiction du «feu nouveau», qui estordinairement l'attristante occasion, au Saint-Sépulcre de Jérusalem,de batailles invraisemblables entre les représentants des diversesconfessions. Un historien de la première croisade, Foucher deChartres, prétend que le jour de Pâques 1101 le feu de l'autel s'yalluma miraculeusement. Dans 2Ma 1:19-36, le naphte estprésenté comme une eau épaisse en laquelle se serait mué le feu del'autel caché par les prêtres, et qui, versée de nouveau sur l'autel,des années après, se serait aussitôt enflammée. --L'interprétation du feu étranger (Le 10:1,No 3:4 26:61)est très discutée; il s'agit probablement, d'après Bbl.Cent., d'un sacrifice par le feu entaché d'irrégularité, par ex.offert en dehors des heures prescrites. --Quant à l'expression: faire passer par le feu ses fils et ses filles, elle désignait la pratique courante en Canaan desholocaustes d'enfants offerts à Baal et à Moloch, pratique qui sousla royauté fut imitée en Israël quoique interdite par la loi (De18:10,2Ro 16:3 17:17 21:6 23:10 Jer 7:31)II Sens symbolique. 1. Théophanies.Ce sont des manifestations visibles de Dieu (voir ce mot); on lesdécrit ordinairement comme accompagnées de flammes (Ex 3:2,Ac7:30 etc.), symbole de sa présence sainte (De4:11 5:5,22-26); glorieuse (Ex 24:17,Da 7:9 et suivants),protectrice (Ex 13:22 40:38,Ps 78:14), de son ubiquité (Eze1:13 et suivant), ou bien de sa parole menaçante (Jer 23:29) etde sa colère contre le péché (De 4:24,Am 5:6,Jer 4:4,Ps 89:47,Heb12:29 etc.). On a vu plus haut des exemples non pas seulementsymboliques mais matériels de châtiments par le feu de l'Éternel(parag. 3). Les yeux du Seigneur glorifié sont comparés à une flammede feu (Apo 1:14 2:18 19:12), emblème de sa toute-science quipénètre partout; (cf. Ap 2:23) la vision de Da 10:6 qui ainspiré ce détail a aussi inspiré l'image des colonnes de feu dansAp 10:1. Voir encore le tableau du trône de feu du Seigneur etdu torrent de feu qui en jaillit (Da 7:9 et suivant). 2. Le Saint-Esprit.Comme l'Esprit de Dieu dans l'A.T., le Saint-Esprit est quelquesfoiss représenté dans le N.T. sous l'emblème du feu: Jean-Baptistedésigne ainsi la puissance de renouvellement intérieur par laquellele Seigneur va venir compléter l'effet du baptême d'eau qu'iladministre en simple précurseur (Mt 3:11,Lu 3:16). L'effusion duSaint-Esprit le jour de la Pentecôte est accompagnée du signe visiblede «langues séparées qui semblaient de feu» (Ac 2:3), c-à-d,ayant la forme de petites flammes: symbole d'un don approprié àchacun, mais de même nature pour tous. Ce peut être ici le lieu deciter la parole attribuée à Jésus par Origène: «Qui est près de moiest près du feu; qui est loin de moi est loin du Royaume.» (Homéliesur Jer 20:3) 3. Purification.De même que le feu affine les métaux précieux (ci-dessus, I, 2),ainsi la souffrance est destinée à épurer, à éprouver la foi commel'or ou l'argent (Za 12:9, Sir 2:5, 1Pi 1:7,Ap 3:18), cequi donne toute sa valeur au terme d' «épreuve» Jas 1:2, etc.) età l'image du creuset (Ps 26:2,Esa 48:10,Eze 22:18-22,Da 11:3512:10). C'est probablement un sens analogue que comporte ladéclaration de Jésus: «Chacun sera salé de feu» (Mr 9:49),allusion au sel obligatoire dans les sacrifices d'obla-tion, carc'est «le signe de l'alliance avec ton Dieu» (Le 2:13); ils'agit sans doute de la discipline spirituelle en ce monde, qui sauvele fidèle du feu de la géhenne en l'autre monde (Mr 9:43,46,47).Le feu que le Seigneur est «venu jeter sur la terre» représente aussià certains égards une purification dans ce monde, où sa présenceprovoque inévitablement la séparation entre ceux qui se déclarentpour lui ou contre lui (Lu 12:49 et suivants). Quand l'apôtrePaul parle d'être «sauvé, mais comme au travers du feu» (1Co3:15), il parle d'échapper au jugement mais non sans avoir subiquelque dommage (comp. Jude 1:23, et «le tison arraché du feu»:Am 4:11,Za 3:2). Ces trois derniers passages introduisentl'aspect complémentaire, qui est le plus fréquent, de l'image du feu: 4. Châtiment.Tels les végétaux inutiles ou nuisibles, destinés à êtrebrûlés (Mt 3:10 7:19,Jn 15:6), tels les méchants, les pécheurs,les rebelles à l'égard de Dieu, sont destinés au feu dujugement (Ps 68:8,9 Esa 47:14 Sir 21:9,Judith 16:17 etc.),à la «fournaise ardente», litt, «de feu» (Mt 13:43-50), à la«géhenne de feu» (Mt 5:22 18:9,Mr 9:43 et suivants), au «feuéternel» (Mt 18:8 25:41,Jude 5:7), au «feu qui ne s'éteintpoint» (Mt 3:12, cf. Esa 66:24), au «feu ardentdévorant» (Heb 10:27), aux «flammes de feu» qui sont l'attributdu Seigneur Juge (2Th 1:7 et suivants), à «l'étang ardent de feuet de soufre» (Ap 19:20, cf. Ap 17:16 18:8, etc.). C'estnaturellement un élément essentiel des tableaux apocalyptiques dujugement final, qu'on retrouve presque à chaque page duPseudépigraphe Esdr., du livre d'Hénoch, etc. Voir Géhenne,Eschatologie, etc. 5. Émotions et sentiments humains.Diverses comparaisons sont entrées dans le langage ordinaire, où lefeu est pris soit en bonne part soit en mauvaise part; le pointd'analogie est son caractère irrésistible, et parfois destructeur: lecoeur et les pensées qui obligent à parler (Ps 39:4),l'inspiration que le prophète né peut contenir (Jer 20:8),l'amour indomptable (Ca 8:6) ont la puissance d'un feuintérieur; mais sont aussi comme un feu qui brûle et dévore:mauvaises passions (Sir 9:8), méchanceté (Esa 9:17),langue malveillante (Jas 3:5), violence, mendicité,persécutions (Sir 28:10 40:30 51:4), etc. On voit combien le Siracide a raison de parler du feu comme Ésopede la langue, lorsqu'il le cite d'abord parmi «les choses les plusnécessaires à la vie de l'homme», puis parmi celles qui ont été«créées pour la punition» (39:26-29). Au point de vue matériel et aupoint de vue spirituel, en Dieu comme en l'homme, il y a un feubienfaisant et un feu dévorant. Jn L.