Egypte Antique:Voir Atlas 14Histoire. Dans l'ouvrage qu'il composa sur l'ordre de Ptolémée III, Manéthon,prêtre de Sebennytos, divisait l'histoire d'Egypte en trentedynasties, répartition conforme à celle qu'établirent au cours desâges les Égyptiens eux-mêmes et qui correspond assez bien à laréalité. Les lambeaux de son ouvrage nous ont conservé les grandeslignes de cette histoire qui se complète progressivement grâce auxlistes royales plus anciennes et surtout aux monuments contemporains,mais la chronologie reste très incertaine, les Égyptiens n'ayant paseu d'ère et se bornant à compter les années de chaque règne. Deux dates astronomiques, retrouvées sur les monuments, ontpermis aux historiens allemands d'établir des chiffres précis pourtoute la durée de l'empire égyptien. Ce cadre rigide, qui est très enfaveur aujourd'hui, a pour inconvénient de comprimer à l'excèscertaines périodes obscures, et demanderait d'ailleurs à êtreconfirmé par d'autres données incontestables. Il me paraît plusprudent, pour le moment, d'employer une chronologie moins précise,avec des dates approximatives, qui doivent, par leur souplesse, mieuxcadrer avec la réalité. Le tableau suivant donne les grandesdivisions de l'histoire d'Egypte, avec un écart possible de cinqcents ans peut-être, en plus ou en moins, pour les premiers chiffres,et une exactitude approximative dès le début du Nouvel Empire; àpartir de l'époque saïte les dates peuvent être considérées commecertaines. L'histoire d'Egypte nous intéresse ici surtout dans la mesure oùce pays se trouve en relations avec l'Asie Antérieure, etparticulièrement avec le peuple d'Israël. A ce point de vue, lesdonnées précises sont rares et défectueuses, et nous devons nouscontenter, le plus souvent, de parallèles et même d'hypothèses. Après les chasseurs paléolithiques, errant sur les plateaux enbordure du désert, les indigènes des époques suivantes, néolithiqueet énéolithique, apparaissent fixés dans la vallée, s'occupantd'élevage et d'agriculture. Les nombreux monuments de cettecivilisation qui nous sont parvenus, conservés dans les tombes,montrent que ces peuplades devaient être déjà en rapports avec leursvoisins orientaux, sans doute par voie de commerce, et non par suited'une communauté d'origine. Il s'agit de certains procédés defabrication, par exemple ceux des vases de pierre, et l'emploi depetits objets assez particuliers tels que les cylindres-cachets. De cette époque, dont nous ignorons la durée et que nous appelonspréhistorique ou prédynastique, datent les premiers grands mouvementsd'organisation sociale et politique du pays, le groupement en tribus,la constitution de centres de vie commune, et enfin la formation dedeux monarchies exerçant une autorité absolue, l'une sur la valléemême du Nil, la Haute-Egypte, l'autre sur l'immense étendue du Delta. A un moment donné, un des rois du Sud prit possession de lacouronne du Nord, réunissant toute l'Egypte sous un seul sceptre; cetacte marque pour nous le commencement de l'âge historique, bien qu'ilne soit en réalité qu'un épisode dans l'évolution progressive dupays. Au point de vue de la civilisation, il n'y a d'autretransformation dans l'état des choses que l'apparition de l'écriture. Le début de l'Ancien Empire, appelé époque thinite d'après lelieu d'origine des premiers pharaons, est bien connuarchéologiquement par ses tombeaux, sa céramique, ses vases depierre, ses armes de silex, ses outils de bronze, mais historiquementnous n'avons guère pour cette période qu'une liste de noms desouverains avec la mention vague de quelques événements. Nousapprenons ainsi que ces rois envoyaient déjà des expéditions pourexploiter les richesses minières du Sinaï, hors des limitesnaturelles du pays; nous ne savons s'ils poussèrent plus loin versl'Est, mais nous constatons que beaucoup des matières employées deleur temps en Egypte provenaient d'Asie. Les rois thinites avaient accompli l'unification du pays; leurssuccesseurs, originaires du Delta et sans doute descendants desanciens rois du Nord, apportèrent un élément nouveau, unecivilisation plus évoluée que celle des peuples de la Haute-Egypte.Une ère de paix et de grande prospérité, qui devait durer près demille ans, s'ouvrait pour l'Egypte sous la sage domination de cesrois puissants qui nous ont laissé de leur passage sur le trône destémoins stupéfiants de hardiesse et de perfection, tels que lespyramides et les temples, des sculptures et des peintures dignes deprendre place parmi les chefs-d'oeuvre de l'art universel. A mesureque nous apprenons à le mieux connaître, l'Ancien Empire se révèle ànous comme une des plus grandes périodes de l'histoire d'Egypte, àtous les points de vue, et forme un frappant contraste avec l'état debarbarie ou était plongée à cette époque la presque totalité du monde Fondée sur le principe que le roi est héritier des dieux et dieului-même, l'autocratie pharaonique correspondait si bien aux idées etaux besoins de la population du pays qu'elle subsista pendant près dequatre mille ans, malgré toutes les vicissitudes et les crisespolitiques. Ce système à base théocratique a l'inconvénient de donnerune trop grande importance au clergé et au fonctionnarisme, mais tantque le sceptre resta dans des mains énergiques, ces puissants rouagesde l'État contribuèrent au développement du pays dans tous lesdomaines et à sa prospérité. Essentiellement pacifiques, les grands rois memphites seconsacrèrent à une oeuvre intérieure qui leur donna les résultats lesplus satisfaisants, mais ils n'eurent jamais de visées politiquesvers l'extérieur. La vallée du Nil constitue par elle-même un toutparfaitement bien délimité et isolé; la seule extension normale del'Egypte est vers le Sud où nous voyons les rois envoyer à diversesreprises des expéditions ayant surtout un but commercial, maisdestinées aussi à inspirer à des peuplades remuantes et malorganisées le respect du pharaon et de la puissance égyptienne. LeSinaï également a toujours été une dépendance, une marche del'Egypte, la couvrant du côté de l'Asie et lui fournissant en outredivers produits minéraux dont l'exploitation fut constante sousl'Ancien Empire. Certains indices nous montrent que les roismemphites entretenaient à cette époque avec leurs voisins de Syriedes relations ayant d'ailleurs un caractère exclusivement commercial. A côté du clergé, l'administration avait pris peu à peu, sous lesgrands pharaons memphites, un développement considérable. Les hautsfonctionnaires avaient réussi à se faire attribuer, par faveurroyale, des apanages héréditaires qui finirent par devenir devéritables provinces, d'où la constitution de puissances féodales quidevaient mettre plus tard en échec la maison régnante, puis lutterentre elles pour s'emparer du pouvoir suprême. La crise fatale seproduisit à la fin de la VI e dynastie et, pendant plusieurs siècles,la civilisation égyptienne passa par une de ces périodes dedépression et de désordre d'où elle se releva toujours avec unenouvelle vigueur. L'entrée en scène de princes énergiques natifs de Thèbes, oupeut-être d'une contrée plus méridionale, mit fin à cet étatd'anarchie et ramena rapidement l'Egypte à un état de puissance aumoins équivalent de celui qu'elle avait sous les Memphites. Montéssur le trône par la force des armes, les Amenemhat et les Senousritconservèrent à leur gouvernement un certain caractère militaireinconnu sous l'Ancien Empire, nécessaire sans doute pour contenir etutiliser une noblesse encore puissante, et aussi pour assurer ladéfense de l'Egypte du côté de l'étranger. Des événements graves sepassaient alors en Mésopotamie, et leur répercussion se faisaitsentir au loin: la pénétration d'éléments étrangers comprimait lesanciennes populations du pays et provoquait des poussées vers l'Ouestqui pouvaient menacer de s'étendre jusqu'à la vallée du Nil.L'attitude des rois thébains fut purement défensive: pas plus queleurs prédécesseurs, ils ne cherchèrent à étendre leurs frontièresvers l'Orient; leur barrière de déserts, jointe à la bonne renomméedes armes égyptiennes, qui imposaient aux tribus voisines, suffit àécarter pour quelques siècles tout danger d'invasion. La situationpolitique ne fut d'ailleurs jamais assez tendue pour empêcher lesÉgyptiens d'exploiter leurs mines du Sinaï, de commercer avec l'AsieAntérieure et sans doute aussi de protéger les établissements deSyrie, postes avancés de leur civilisation. Cependant l'infiltration sémitique commençait à se faire sentiren Egypte; des tribus nomades, poussées par la famine ou par lescirconstances politiques, venaient demander l'hospitalité dans unpays bien approvisionné où elles étaient d'ailleurs accueilliesfavorablement par l'administration locale. Nous en avons de bonsexemples dans l'histoire d'Abraham et dans un tableau bien connu deBeni-Hassan, qui est une vivante illustration de cet épisode. La dynastie de ces grands monarques était à peine éteinte que ledésordre recommença, par la scission de l'empire entre deux famillesrivales, l'une à Thèbes, l'autre en Basse-Egypte. C'est à cetteépoque que se place l'invasion des Hyksos, peuplade asiatique quivint s'implanter dans le Delta, réussit sans doute à réduire envasselage une des dynasties régnantes et à dominer ainsi le pays parson entremise, jusqu'au moment où ils se sentirent suffisammentégyptianisés pour prendre eux-mêmes le titre de pharaon. C'est certainement au cours de cette période qu'il faut placerl'arrivée en Egypte de Joseph et de la tribu de son père et laconcession d'un vaste domaine où ces nomades purent faire leurapprentissage de vie sédentaire; on a peine à s'imaginer un roiindigène faisant à des étrangers un accueil aussi empressé. Certains historiens réduisent à deux siècles cette période, surlaquelle nous n'avons que des renseignements sans cohésion niprécision, mais qui paraît avoir été sensiblement plus longue. Les Hyksos avaient pu pour un temps réduire toute opposition,mais le régime brutal qu'ils inaugurèrent et leur tyrannie eurent tôtfait de ranimer l'esprit national. La révolte s'organisa dans le Sud,dirigée par les princes thébains et, secondée sans doute par toute lapopulation lasse de la domination étrangère, elle balaya les Sémitesqui, après une résistance désespérée dans leur citadelle d'Avaris,furent repoussés jusqu'en Palestine, où une dernière bataille lesanéantit définitivement. L'Egypte redevenait donc maîtresse d'elle-même, et l'organisationdu pays reprit son antique tradition, avec cette différence qu'elleavait cette fois, pour un temps, un caractère militaire bien marqué:non que l'effort national et le succès obtenu aient pu modifierradicalement le caractère du peuple le plus paisible de l'antiquitéen lui donnant l'esprit d'aventure, mais la raison politiquecommandait. Le danger de la domination était bien écarté pour lemoment, mais il importait de se prémunir contre toute nouvelleinvasion et de constituer une marche solide du côté de l'Orient. Les rois de la XVIII e dynastie, successeurs des héros del'indépendance, les Aménophis et les Thoutmès, surent donner à leurpays un prestige et une richesse qu'il n'avait encore jamaisatteints, tant par la sage administration du royaume que par unepolitique extérieure ferme et brillante. A ce point de vue ils'agissait de maîtriser les tribus turbulentes de la Nubie et duSoudan, de pénétrer l'Asie Antérieure, de faire sentir la poigneénergique du pharaon aux peuplades de toute race habitant cettecontrée, et d'éviter ainsi la formation de nouveaux groupementshostiles et dangereux. Il n'y eut pas prise de possession du pays, nicolonisation égyptienne, mais on imposa aux chefs des villes et destribus des liens de vasselage envers le pharaon, sans pour cela lessoumettre à un régime nouveau. Des campagnes successives destinées àchâtier les rebelles ou les mécontents étaient dirigées suivant lesbesoins d'un côté ou d'un autre, souvent jusqu'en Mésopotamie, etentre temps des expéditions de chasse, ayant à leur tête le roilui-même, maintenaient en respect les populations. Noussommes bien renseignés sur ce système de protectorat par ladécouverte, à Tell el-Amarna, de la correspondance avec le roid'Egypte des représentants en Orient de l'autorité pharaonique à unmoment où le pouvoir central fléchissait par suite d'une criseintérieure. Cette crise, d'une gravité exceptionnelle, éclata à la fin de laXVIII e dynastie. Le clergé d'Amon, favorisé par les rois thébains àla suite de la guerre d'indépendance, avait pris dans les affaires dupays une influence qui menaçait l'intégrité du pouvoir royal,jusqu'au moment où celui-ci prit le parti radical de le supprimer etd'instituer un culte nouveau qu'il imposa à l'Egypte comme religionunique. Les attaches sémitiques de la famille royale, où étaiententrées successivement plusieurs princesses asiatiques, ne sont sansdoute pas étrangères à la création de cette religion artificielle quine correspondait en rien à l'esprit religieux des Égyptiens et quioccupa pendant quelques années toute l'attention du pouvoir centraljusqu'à la détourner des questions politiques et militaires, à unmoment où le contrôle de l'Asie Antérieure était plus nécessaire quejamais, la situation étant très tendue avec les populations nomades. Quand ce système politico-religieux fut abandonné peu après lamort de son fondateur, le mal était fait; l'Egypte avait perdu sondomaine asiatique. Les rois de la XIX e dynastie, les Séti et lesRamsès, reprirent, il est vrai, la tradition militaire et firentsonner bien haut le succès de leurs campagnes, mais ils avaientdevant eux un adversaire redoutable, le royaume hittite, quicontre-balançait leur influence et leur interdisait le contrôle surl'ancien protectorat. Puis des hordes nouvelles, poussées par desinvasions venant du Nord, balayèrent toute l'Asie Antérieure, s'yincrustèrent et, avec l'aide des Libyens du Nord de l'Afrique,tentèrent d'envahir l'Egypte. Par deux fois les «peuples de la mer»furent refoulés, mais l'Egypte ne se releva pas de ces secousses; sonrôle politique international était pour ainsi dire terminé. L'exode des tribus israélites restées en Egypte après l'expulsiondes Hyksos date de cette période, désignée généralement par le termede Nouvel Empire, mais sa date reste encore à fixer. La traditioncourante veut que les Hébreux aient été tolérés dans le canton deGossen, à l'est du Delta, pendant près de quatre cents ans, c-à-d,pendant tout le cours de l'effervescence nationaliste, et qu'ils n'ensoient sortis qu'au moment où l'expansion de l'Egypte étaitdéfinitivement entravée et où s'annonçait la grande poussée despeuples de la mer. On conçoit mieux une oppression systématique seproduisant contre une peuplade qui se révélait non assimilable, peude temps après l'expulsion des Hyksos, quand l'Egypte était encorepleine de rancune contre ses anciens tyrans, plutôt que sous lesRamessides qui manifestent certaines tendances à se rapprocher desSémites. Le stage au désert correspondrait alors au protectoratégyptien sur la Syrie et la Palestine, et la conquête de Canaan auxincursions des Hapirti mentionnées dans la correspondance de Tellel-Amarna. De plus, la première mention du nom d'Israël à côté decelui des autres peuples syro-palestiniens dans la stèle de l'an 5 deMenephtah ne peut guère s'appliquer à une tribu errant dans ledésert, comme ce serait le cas si l'exode avait eu lieu très peud'années auparavant, mais bien à une nation sédentaire. L'Egypte, épuisée après la lutte contre les barbares du Nord,doit donc une fois de plus se replier sur elle-même et abandonnertoutes ses ambitions; les derniers Ramessides dégénérés cèdent laplace aux prêtres d'Amon, puis à des dynastes locaux originaires duDelta, qui le plus souvent ne sont que des Libyens chefs demercenaires. Le pouvoir est morcelé et l'antique civilisation ne semaintient que grâce à l'impulsion acquise au cours des siècles. Une fois, cependant, un effort fut tenté pour retrouverl'ancienne gloire, celui des princes bubastites dont l'un, Sheshonq Ier, le Sisak de la Bible, entreprit une grande expédition enPalestine au temps de Roboam, campagne victorieuse mais sanslendemain, après laquelle les pharaons durent se contenter de menéesdiplomatiques destinées à entretenir l'effervescence des Juifs contreleurs grands voisins orientaux. Cette politique n'eut jamais d'autrerésultat que de mener à la ruine ceux que l'Egypte se flattait desoutenir. Cette période se termine par l'arrivée des rois éthiopiens qui,se posant en représentants de la légitimité, réalisèrent à nouveaul'unité de l'Egypte et tentèrent de restaurer son ancienne splendeur;mais l'heure des expansions territoriales était passée, devant eux sedressait la puissance formidable des rois d'Assyrie qui tenaienttoute l'Asie Antérieure et qui, envahissant et dévastant l'Egypte pardeux fois, repoussèrent les Éthiopiens dans leur pays d'origine. Les princes saïtes qui prirent la succession furent plus heureuxet leurs règnes méritent l'appellation de «renaissance égyptienne».Ces rois encouragèrent, dans tous les domaines, le retour auxcoutumes antiques et vraiment nationales, et d'autre part ilsautorisèrent pour la première fois des étrangers à constituer enEgypte même des colonies autonomes; cette mesure leur assurait leconcours des Grecs qui leur fournirent les moyens d'avoir unepuissante armée et de faire ainsi bonne figure parmi les puissancesorientales. Le périple de l'Afrique, le percement d'un canal du Nilau golfe de Suez, sont des exemples de l'esprit d'initiative de cessouverains remarquables, les derniers vrais pharaons. L'Egypte saïte n'était pas de taille à résister à l'effortcolossal fourni par l'empire perse, et Cam-byse réduisit le pays aurang de simple satrapie, traité comme les autres pays conquis avec latyrannie des despotes orientaux. Ce régime suscita de nombreusesrévoltes, dont certaines réussirent à affranchir la vallée du Nil dujoug étranger pour quelques années, mais finirent toujours par êtreréprimées; enfin l'Egypte salua Alexandre comme un libérateur, sansse rendre compte qu'avec les Grecs la transformation serait plusradicale encore, sinon plus dure. Sous les Perses déjà, l'Egypte s'était assez largement ouverteaux étrangers, c-à-d, que ceux-ci, au lieu de devoir se mélanger à lapopulation indigène, formaient un peu partout des groupes quigardaient leurs coutumes et leurs langues, petites coloniesencouragées par le gouvernement, ainsi celle des Juifs d'Éléphantine,colonie autonome parfaitement organisée, dont les archives nous ontété conservées. A partir des Ptolémées, des groupes importants decolons grecs s'installent dans tous les centres et prennent la hautemain dans le pays en lui imposant une administration calquée sur lemodèle hellénique. Les indigènes, malgré leur nombre, vivent endehors des affaires de leur patrie, considérés comme une raceinférieure, et il ne leur reste, pour masquer leur déchéancepolitique, que le domaine religieux auquel les dominateurs du paysfont au moins le simulacre de se rattacher. Politiquement, les Égyptiens pouvaient avoir la consolation desentir que leur patrie était un État indépendant qui jouait un rôleimportant dans le monde et dont le souverain se parait des titres desanciens pharaons. Avec la conquête romaine, cela même disparut et lavallée du Nil ne fut plus qu'une province administrée en vue durendement de son sol, une vaste exploitation agricole. Qui sait sidans l'empressement avec lequel les Égyptiens acceptèrent lechristianisme, il n'entre pas pour une bonne part un sentiment derancune contre les maîtres qui, depuis de longs siècles, les avaientravalés au rang de peuples inférieurs et serviles, et le besoin dedonner la preuve que l'énergie de l'antique race n'était pas éteinte?