DONS ET PRÉSENTS

1. Dans l'A.T. Ce qu'on appelle ainsi en Orient est, la plupart du temps, bien peudigne de ces noms. Ce sont souvent des mots polis qui désignent toutautre chose qu'un cadeau désintéressé: un trafic, un échange, untribut, un hommage plus ou moins obligatoire, ou même une tentativede corruption. Il est bien entendu qu'en acceptant un présent, on semet dans l'obligation de rendre la politesse d'une manière ou d'uneautre. Les présents de la reine de Séba à Salomon et ceux qu'il luioffre sont une sorte de traité de commerce royal (1Ro 10:10-13).La délicieuse scène qui se passe entre Abraham et Éphron pourl'acquisition de la caverne de Mac-péla (Ge 23:8-16) estcaractéristique des coutumes orientales: la générosité d'Éphron estune pure et simple forme de politesse, qui ne fait illusion àpersonne. Il en est de même de la transaction entre David etAravna (2Sa 24:21,24). Dans certains cas, ce trafic présente unaspect moins matériel: on offre un présent pour obtenir en retour unefaveur ou l'exaucement d'une requête. Cela explique chez Jacobl'ardent désir de voir Ésaü accepter ses présents (Ge 32:13-2133:8-11), le cadeau envoyé par Israël à Joseph (Ge 43:11), lesdons mentionnés dans 1Sa 25:27 30:26-31, etc. Cette manièred'envisager les dons vient d'un principe parfaitement formulé dansPr 18:16: «Les présents d'un homme lui élargissent la voie etlui donnent accès auprès des grands». (cf. Pr 19:6) Il estévident qu'un présent de ce genre devient facilement une tentative decorruption. La loi défendait bien de faire des présents aux juges etaux témoins, et flétrit cette honteuse pratique (Ex 23:8,De 16:1927:25, cf. 1Sa 12:3,Ps 15:5,Pr 15:27,Esa 33:15, etc.), maiselle n'en a pas moins été courante, et bien des magistrats ontaccepté les présents qu'on leur offrait (1Sa 8:3), et comptaientmême dessus (Ac 24:26). Aussi la Bible est-elle remplie dereproches à cet égard (Job 15:34,Ps 26:10,Pr 17:23,Esa 1:235:23,Eze 22:12,Mic 3:11 etc.). Les présents offerts aux rois sous forme d'hommage (1Sa 10:27,Ps 45:12)ou de tribut (Jug 3:15,2Sa 8:2,6,1Ro 4:21,Ps 72:10)ne sont pas non plus des dons désintéressés: leur caractèreobligatoire leur enlève toute trace de générosité. On offrait desprésents à un chef puissant pour en être protégé. On apportait aussides dons pour consulter un prophète ou un oracle (No 22:7,1Sa9:7,2Ro 5:5,15 8:9,Da 5:16). Réguliers ou irréguliers, les présentsqu'on leur apportait formaient le principal moyen d'existence desprêtres et des lévites, et des offrandes accompagnaientobligatoirement le culte: «On ne se présentera pas les mains videsdevant ma face» (Ex 23:15 34:20). Certes la piété prophétiquecomprenait que les faveurs de l'Éternel ne dépendaient pas de cesoffrandes (Esa 1:10-15,Ps 50:8-15), et, à plus forte raison,qu'on ne pouvait le corrompre (De 10:17).; le terme ici traduitpar «présents» signifie au sens propre «présents destinés àcorrompre» Mais il n'est pas douteux que, dans les croyancespopulaires, on considérait une offrande à Dieu comme devant agirprécisément de la même manière qu'un présent à un juge ou à un roiterrestre (Mal 1:8). Si Dieu agréait cette offrande, c'était lesigne de sa faveur et de l'exaucement de la requête (Jug 13:23);s'il la rejetait, c'était le signe de sa colère (Ge 4:4 etsuivant, Mal 1:10). Une offrande était considérée commepropitiatoire,;voir (1Sa 26:19) Sacrifice (théorie du)Sacrifices et Offrandes.Dans certains cas pourtant, les dons et les présents n'étaientpas uniquement intéressés, et ils avaient un réel caractère degénérosité. Les rois faisaient parfois des largesses à leurs sujets,surtout à l'occasion de fêtes (Est 2:18,Ge 43:34,2Sa 11:8,Jer40:5). On trouve souvent mentionnés des dons aux indigents (Ne8:10,Est 9:22,Ps 112:9,Ec 11:2, etc.;voir Aumône). On faisaitparfois des échanges désintéressés de cadeaux (Est 9:19,Ap11:10). A l'occasion d'un mariage, des présents sont envoyés par lesamis à la maison de l'époux, et le fiancé envoie des cadeaux à safiancée ou à ses futurs beaux-parents (Ge 24:53 34:12). Parfoisc'est le père de la fiancée qui fait des cadeaux (Jug 1:15,1Ro9:16;voir Mariage).Les dons et présents consistaient en argent ou en armes, envêtements, en fruits ou provisions de toute espèce. La présentationdes cadeaux se faisait, et se fait encore en Orient, avec forcecérémonies, proportionnées à l'importance des présents. 2. Dans le N.T. La plupart des cas où est utilisé le mot «don» s'appliquent aux donsspirituels, ou dons de Dieu aux hommes: son Fils, la Vie éternelle,le Saint-Esprit, la Grâce, etc. (voir Charisme). Dans Eph 4:8,où Paul cite Ps 68:19, se montre le changement d'attitude entrel'A.T. et le N.T.; alors qu'autrefois l'Éternel prenait «en don deshommes» (trad. Sg.), le Christ «fait aux hommes des dons»: la gloirede Dieu se manifeste mieux dans ce qu'il donne que dans ce qu'ilreçoit; c'est le nouvel enseignement du christianisme. De là découlel'attitude du chrétien. Comme le Père et le Fils donnent librementtoutes choses, le chrétien doit donner librement. L'aumône reprend savéritable signification: un acte d'amour désintéressé, et non plus unmérite acquis (Mt 6:1-4,Lu 7:37,8:3,Jn 12:3,Mt 25:36-46). Ledon, hommage volontaire à Dieu, sans contrainte ni pression, estainsi devenu un des éléments vivants du culte chrétien (Mt 2:115:23,2Co 9:7 et suivants, cf. 1Ch 29:14). Les dons que Paulreçoit de ses convertis (Php 4:16) et ceux que l'Église deJérusalem reçut des Églises pagano-chrétiennes (Ac 11:29,Ro15:26,1Co 16:1-3,2Co 8 et 2Co 9), jouent un rôle trèsimportant dans l'histoire de l'Église primitive.R. de R.