DEUIL ET RITES FUNÉRAIRES

La Bible contient un grand nombre d'allusions aux diversesmanifestations du deuil chez les Hébreux, mais rares y sont lestableaux d'ensemble. Citons, parmi ceux qui nous donnent le plus dedétails, Ge 37:34,De 14:1,2Sa 1:3:31 et suivants, Eze24:16,Jer 16:6 et suivant, et le livre de Tobit. Un grand nombre decoutumes funéraires se sont du reste perpétuées en Orient jusqu'à nosjours. 1. Soins aux morts. Dès que le dernier soupir s'est exhalé des lèvres du moribond, on luiferme les yeux (Ge 46:4); parfois même on obture, à l'aide detampons, les autres ouvertures du corps; cela s'appelle «fermer lemort». Plusieurs écrits talmudiques s'élèvent contre cette habitude;il semble que par excès de zèle, et sans doute pour empêcher l'espritde s'échapper du corps, on étouffât parfois le mourant en luibouchant ainsi les narines et la bouche. Puis on lave lecadavre (Ac 9:37); on l'enveloppe dans un linceul blanc (Mr15:46) après l'avoir oint de substances aromatiques (Jn19:40). Notons aussi la coutume de baiser le mort (Ge 50:1),marque de tendresse et de respect. Les pieds et les mains liés debandelettes, le corps parfumé de myrrhe et d'aloès, la têterecouverte d'un suaire (Jn 11:44), le mort est déposé dans uncercueil ouvert ou sur une bière (Lu 7:14) appelée en hébreu mittâh; il est ainsi transporté par des amis (Ac 5:6,10)jusqu'au lieu de la sépulture. Les parents et connaissances suiventla bière, se livrant à de bruyantes démonstrations de douleur etpoussant des cris aigus; le cortège est accompagné de pleureuses deprofession (Jer 9:17), de joueurs de flûte (Mt 9:23). L'ensevelissement se fait le jour même, environ huit heures aprèsle décès; aux funérailles de certains grands personnages, on brûledes aromates. Le corps est mis si possible dans un caveau de famille:être enseveli «avec ses pères» est le voeu le plus ardent (Ge47:29-31). Si l'on ne couche pas le mort dans un tombeau, on élèvesur le lieu de l'inhumation un monceau de pierres (2Sa 18:17),ou l'on marque l'emplacement par une dalle dressée (Ge 35:20).Comme inscription on grave, en général, le nom du défunt, souventl'indication de ses ascendants, du mari, parfois on y ajoute uneformule de louange. Il est question plusieurs fois de parfums brûlésen l'honneur des rois défunts (Jer 34:5,2Ch 16:14 21:19). Quantaux offrandes d'aliments aux morts, si Tob 4:17 lesrecommande pour les justes, Sir 30:18 les condamne enles raillant. Voir Mort, Tombeau. 2. Vêtement de deuil. A la nouvelle du deuil qui le frappe, le premier geste de l'Israélitesera de déchirer son vêtement: presque toujours, lorsque ce geste estmentionné dans la Bible, il précède tous les autres (Ge 37:34,2Sa1:11,Job 1:20). Nous ne pouvons entrer dans la discussion de toutesles explications qui ont été proposées pour rendre compte de ce gesteet des différents rites funèbres; nous pensons pour notre part quel'affligé indiquait par là son intention de se dépouiller de sesvêtements pour revêtir le sac, qui normalement se portait sur lecorps nu (Esa 20:2). Le sac dont on se ceint (2Sa 3:31), etnon dont on se couvre, était une sorte de pagne, fait d'une étoffegrossière en poils de chèvre, de couleur sombre, qui servait aussipour la confection des sacs; ce pagne était cousu autour de lataille (Job 16:15) ou serré par une corde (Esa 3:24).Certains passages font allusion à d'autres vêtements de deuil ou deveuvage (Ge 38:14,2Sa 14:2,Jug 8:5) qui semblent différents dusac. On ôte ses chaussures (Mic 1:8), les porteurs de la bièrevont pieds nus; on arrache son turban, parfois on se rase barbe etcheveux (Am 8:10), ou du moins on couvre sa barbe (Eze24:17,22) et on se voile la tête (2Sa 15:30). La durée dudeuil semble avoir été de trente jours (No 20:29,De 34:8). Lesenfants portent le deuil de leurs parents, les maris celui de leurfemme et vice versa; le deuil le plus cruel est celui du filsunique (Jer 6:26,Za 12:10), plus encore du fils unique deveuve (Lu 7:12). 3. Autres rites. L'expression de la douleur chez les Hébreux emprunte mille formes,dont nous signalerons ici les plus courantes et les plus typiques. Onse met la main sur la tête (2Sa 13:19); en apprenant unemauvaise nouvelle, on se lève de son siège pour aller s'asseoir surla terre nue ou sur un tas de cendres (Job 1:20,Jon 3:6,La2:10). Au reste, la terre et la cendre jouent un grand rôle dans lerituel du deuil, on s'en couvre la tête ou le corps tout entier, ons'y roule, on saisit de la poussière que l'on jette vers leciel (Job 2:12). On se frappe la poitrine, on se déchire, on sefait des incisions (voir ce mot), coutume étrangère qu'à plusieursreprises les livres saints condamnent (De 14:1); il est reçu quependant tout le temps du deuil, il ne faut pas se laver, ne pasoindre son corps (Da 10:3), ne pas se faire les ongles; ladémarche de l'homme en deuil doit être grave et lente (1Ro21:27). Voir Gestes. Pour marquer sa douleur, l'Hébreu ne prend d'abord aucunenourriture et ce jeûne parfois se prolonge plusieurs jours (2Sa1:12,1Sa 31:13). On n'est pas d'accord sur le fait de la célébrationd'un repas funèbre; (cf. Os 9:4) toutefois les expressions:manger le pain du deuil et boire la coupe de consolation (Jer16:7) semblent indiquer que tout en apportant leurs consolations,les amis offraient en témoignage de sympathie des aliments ou unbreuvage à l'homme éprouvé par le deuil. 4. Les lamentations. Cris, gémissements, vociférations accompagnaient toute manifestationfunèbre. La lamentation pouvait prendre deux formes différentes: la tnisped, cri aigu, hurlement prolongé (Za 12:11), queMichée (Mic 1:8) compare au glapissement du chacal, au cri del'autruche; la qînâ, sorte de mélopée accompagnant une poésiefunèbre pour chanter les louanges du défunt. La plus célèbre de ceslamentations est la complainte de David sur Jonathan (2Sa1:17-27); comp. les complaintes sur Josias (2Ch 35:25). 5. Purification. Tout deuil se clôturait par une cérémonie purificatrice. La loi, eneffet, déclare impurs le cadavre, le tombeau, celui qui les approcheou celui qui les touche, et impose des purifications à ceux qui onteu quelque contact avec un mort (No 31:19). 6. L'Évangile Jésus-Christ recommande la discrétion dans les manifestationspubliques du jeûne et probablement du deuil (Mt 6:16-18,Mr 5:38et suivants); devant le tombeau de son ami Lazare, il verse des larmessilencieuses (Jn 11:35). Paul ne veut pas que les chrétiensmanifestent leur affliction comme ceux qui n'ont pointd'espérance (1Th 4:13 et suivant), et Jean salue le ciel nouveauet la terre nouvelle d'où le deuil, ses larmes et ses cris seront àjamais bannis, car la mort ne sera plus (Ap 21:4). P. B.-M.