CHRONIQUES

NOM. Les deux livres des Chroniques--qui primitivement n'en formaientqu'un seul--sont, dans nos Bibles, les derniers des Livreshistoriques. Dans la Bible hébraïque, ils figurent à la fin du 3 egroupe, les Écrits, et par conséquent terminent l'A.T. Le livredes Chr. avait pour suite les livres d'Esdras et de Néhémie; si, dansle canon hébr., il les suit, c'est qu'il n'a été admis qu'après euxdans la Bible. Le titre hébreu du livre signifie litt. Événementsdes jours ; dans les LXX et la Vulgate, le titre est Paralipomena, ce qui peut signifier «les choses transmises» ou«les choses laissées de côté» par les autres livres historiques. Lenom de Paralipomènes s'est conservé dans les éd. cath. de laBible. Le nom de Chroniques vient de Jérôme et a été adopté parLuther.CONTENU. La période embrassée par le Chroniste (on appelle ainsi l'auteurdu livre) va d'Adam jusqu'à la fin de l'exil babylonien (538 av.J.-C); cette période correspond à celle qui est traitée dans lePentateuque et dans les livres de Josué, Juges, Samuel et Rois. Lelivre se divise en quatre parties: D'Adam à la mort de Saül (1Ch 1-9).L'histoire est remplacée par un fil généalogique. Le règne de David (1Ch 10-29). Nous yretrouvons beaucoup d'indications contenues dans 2 Sam., maisl'auteur attribue à David les préparatifs de la construction dutemple, le plan détaillé de sa construction et la liturgie du culte. Le règne de Salomon (2Ch 1-9). Le récit estparallèle (avec variantes et compléments) à 1Ro 3-11. Les règnes des rois de Juda, du schisme jusqu'àl'exil (2Ch 10 à 2Ch 36). L'édit libérateur de Cyrus y estmentionné (2Ch 36:22 et suivant). Le récit est parallèle à1Ro 12 - 2Ro 25, mais seulement pour les rois de Juda; leChroniste ne dit rien des rois d'Israël.CARACTERE ET TENDANCE. Le Chroniste est un Judéen, très attaché ausouvenir de David et de sa dynastie. Il ne connaît que l'histoire duroyaume de Juda et admire sans réserve David et Salomon; il taittoutes leurs fautes. La piété de David est spécialement relevée: ilest l'organisateur du culte du temple, que bâtira son fils.L'écrivain vante la richesse de David (1Ch 21:25 22:14 29:3-7),les sacrifices de Salomon (2Ch 7:4 et suivant), l'effectif desarmées (2Ch 14:7 17:14-18). Le Chroniste est profondément RELIGIEUX Il veutécrire une histoire édifiante en faisant un choix dans les événementsdu passé. Sa conception historique est dominée par le dogme de larétribution, qui établit une étroite corrélation entre le sort d'unhomme et sa conduite: pas de vertu sans bonheur qui la récompense,pas de péché sans malheur qui le punit; mais aussi pas de bonheursans vertu pour le justifier, pas de malheur sans péché pourl'expliquer. Ainsi, par ex., si Asa (2Ch 16), Josaphat (2Ch20), Joas (2Ch 24), Amatsia (2Ch 25), Ozias (2Ch 26),Josias (2Ch 35:22) ont eu des malheurs bien qu'ayant été desrois pieux, c'est que, à un moment, ils ont commis une faute. Al'inverse, si le roi impie Manassé a terminé en paix un très longrègne, c'est qu'à la fin de sa vie il se serait repenti (2Ch33:12-22). Le roi qui fut le plus puissant et le plus heureux, cefut David parce qu'il fut le plus pieux. Le Chroniste porte un intérêt spécial auxinstitutions ecclésiastiques. Son point de vue est celui du Codesacerdotal (P) et de la communauté cléricale groupée autour du templeaprès l'exil. Comme P, le Chroniste s'intéresse aux généalogies, auxprêtres, aux lévites, au culte, à la liturgie. Dès David, ce culte,selon le Chr., a toujours existé sous cette forme ritualiste etcléricale. Le zèle des rois pour la Loi ou le temple estsoigneusement relevé. La valeur historique de ce livre n'égale pas sa valeurreligieuse. Pour ce qui concerne le passé, il faut toujours tenircompte de ce que les idées dogmatiques et ecclésiastiques de l'auteurpeuvent avoir influencé son récit et ses appréciations. L'histoireest certainement plus fidèlement rapportée dans les livres de Samuelet des Rois. Mais il peut arriver au Chroniste d'avoir disposé dedocuments qui avaient échappé à la connaissance des historiensprécédents. Ces documents peuvent quelques fois. être anciens etauthentiques, surtout lorsqu'ils rapportent des faits qui ne rentrentpas dans la préoccupation habituelle de l'auteur: ainsi ce quiconcerne les travaux civils ou militaires (2Ch 11:5,12 32:30),l'armée (2Ch 26:9-15), la justice (2Ch 19:4-11), etc. Ilarrive aussi que pour certains noms propres le Chroniste ait conservéla leçon exacte. Le livre de Samuel a remplacé dans ces noms levocable Baal par bôchet (honte) et écrit Mephibôchet,Merib-bôchet; comme, à son époque, les dangers, de l'idolâtrieétaient beaucoup moindres, le Chroniste écrit plus exactementEsbaal (1Ch 8:33 et suivant), Merib-Baal (1Ch 9:39 etsuivant), et Béeljada au lieu de Eljada.--Pour (1Ch 14:7) ce quiconcerne l'époque où il écrit, l'auteur nous donne des renseignementsprécieux, puisqu'il projette dans le passé ce qu'il voit autour delui. Il nous montre comment au IV e et au III e siècle av. J.-C,étaient appliquées les lois rituelles de P, et comment les prêtresinterprétaient l'histoire.LES SOURCES. SOURCES NON CITÉES. Parmi elles se trouvent: (a) les livres du Pentateuque, de Samuel et des Rois,auxquels l'auteur fait de larges emprunts; (b) des documents généalogiques et statistiques, deslistes de corporations, etc. SOURCES CITÉES, très abondantes. (a) Sources historiques: Livre des roisd'Israël (1Ch 9:1,2Ch 20:34); Histoire des roisd'Israël (2Ch 33:18); Livre des rois de Juda etd'Israël (2Ch 16:11 25:26 28:26); Livre des rois d'Israël etde Juda (2Ch 27:7 35:27 36:8); Mémoires du livre desRois (2Ch 24:27); Chroniques du roi David (1Ch 27:24). Cessources ne doivent être identifiées ni avec les «Chroniques», quisont citées dans le livre des Rois, ni avec ce dernier livrelui-même. Elles se ramènent toutes à un seul et grand ouvrage, quidevait comprendre toute l'histoire des rois de Juda, mais l'histoirecommentée et embellie (midrach), et que l'on appelle la sourceroyale, (b) Sources prophétiques.c-à-d. qui portent le nom d'un prophète: Samuel (1Ch 29:29),Nathan (1Ch 29:29,2Ch 9:29), Gad (1Ch 29:29),Ahija (2Ch 9:29), Jeddo (2Ch 9:29), Sémaja (2Ch12:15), Iddo (2Ch 12:15 13:22), Jéhu (2Ch 20:34),Ésaïe (2Ch 26:22 32:32), Hozaï (2Ch 33:19). Si cessources prophétiques sont distinctes des sources historiques, ellesne sont en tout cas pas anciennes; mais il est vraisemblable que cescitations de prophètes sont tirées aussi de la source royale, et queleurs titres se rapportent à des fragments du grand ouvrage.AUTEUR ET DATE. L'auteur des Chr. est aussi celui des livres d'Esdras et de Néhémie.Par l'importance qu'il accorde aux cérémonies du culte, on peutsupposer qu'il était Lévite, et même Lévite de la classe deschantres. Son nom est inconnu. Comme Ne 12:22 mentionne DariusIII (336-331 av. J.-C), les ouvrages du Chroniste ne peuvent êtreantérieurs à cette date. 1Ch 3:19-24 (texte des LXX) mentionnela onzième génération après Zorobabel, ce qui nous porte jusque versl'an 200 av. J.-C. On peut supposer que le livre a été écrit entre300 et 200, et qu'il a reçu postérieurement des adjonctionsgénéalogiques. On y ajouta aussi un «Psaume d'Asaph» (1Ch16:8-36), qui est formé de passages des Ps 96,Ps 105 et Ps106, et une prière (2Ch 6:40-42), qui ajoute au texte de1Ro 8:52 et suivant-une invocation, qui est une citation presquelittérale de Ps 132:8-10. Aug. G.