PARTIE II.

DE LA NAISSANCE DU CHRIST À L’INVENTION DE L’IMPRIMERIE.

CHAPITRE XIII.

QUINZIÈME SIÈCLE.

Lollards. — Canon de l’évêque Arundel contre les traductions. — Valeur des livres. — Episcopus Puerorum. — Savants Anglais. — Bibliothèques. — Henri VI. — Jean Huss. — Jérôme de Prague. — Hussites. — Invention de l’imprimerie.

LES DISCIPLES DE WICLIF étaient appelés LOLLARDS, d’un terme allemand, signifiant chanter des hymnes à Dieu ; et augmenta si rapidement, qu’un écrivain contemporain affirme : « Un homme ne pouvait pas rencontrer deux personnes sur la route, mais l’une d’elles était un disciple de Wiclif. »

La véhémence avec laquelle ils déclamaient contre les vices du clergé, et les appels continuels qu’ils faisaient aux Saintes Écritures pour défendre leurs opinions, attirèrent sur eux les anathèmes de leurs adversaires mitrés, et firent promulguer les lois les plus sévères contre ceux qui embrasseraient leurs sentiments, ou oseraient lire la parole de Dieu sans la permission ecclésiastique. En 1396, Thomas Arundel, archevêque d’York, fut transféré au siège de Cantorbéry, et découvrit bientôt par sa conduite qu’il avait l’intention d’employer contre le . Lollards tout le pouvoir supplémentaire qu’il avait acquis par sa promotion à la primauté.

À peine Henri IV eut-il pris possession du trône d’Angleterre, qu’Arundel, qui l’avait soutenu dans ses prétentions à la couronne, s’adressa, avec son clergé, au parlement réuni à Westminster, pour obtenir la sanction de la législature de ses mesures cruelles et iniques. Malheureusement, il y réussit, et une loi sévère fut votée contre les dangereuses innovations, comme on les appelait, des Lollards. Par cette loi, faite en 1400, les évêques furent autorisés à emprisonner toutes les personnes soupçonnées d’hérésie, et à les juger devant le tribunal spirituel ; et, s’ils s’avéraient être des hérétiques obstinés ou relaps, le juge spirituel devait appeler le shérif du comté, ou le magistrat en chef de la ville, pour qu’il soit présent lorsque la sentence de condamnation serait prononcée, et pour livrer immédiatement le condamné au magistrat séculier, qui devait le faire brûler à mort. sur quelque place élevée, à la vue de tout le peuple. La première personne qui souffrit sous le bref De hœretico comburendo fut Sir William Sawtre, recteur de St. Oswyth, à Londres. L’une des accusations portées contre lui était : « Qu’il avait dit qu’il n’adorerait pas la croix sur laquelle Christ a souffert, mais seulement Christ qui a souffert sur la croix. » Une autre des accusations était : « Qu’il avait déclaré qu’un prêtre était plus tenu de prêcher la parole de Dieu que de réciter des services particuliers à certaines heures canoniques. » Pour ceux-là, hélas ! C’était le génie de la superstition régnante, que d’adorer la croix et de s’occuper des formalités habituelles était considéré comme plus important que d’adorer le Sauveur ou de prêcher son Évangile !

- ↑ Actes et Monumentes de Fox, t. I, p. 615. Histoire de la Grande-Bretagne de Henry, vol. x, b. v, ch. ii, p. 2. deux.

En 1408, l’archevêque tint à Oxford une convocation de tout le clergé de sa province, dont le but était d’élaborer certaines constitutions contre les Lollards. Par la cinquième constitution publiée dans cette covocation, il fut ordonné qu'« aucun livre ou traité composé par Jean Wiclif, ou par aucun autre de son temps, ou depuis, ou à composer ultérieurement, ne sera dorénavant lu dans les écoles, salles, auberges, ou autres lieux quelconques, dans la province susdite ; et qu’aucun ne soit enseigné selon ce [livre,] à moins qu’il n’ait été d’abord examiné, et sur examen approuvé à l’unanimité, par l’université d’Oxford ou de Cambridge, ou au moins par douze hommes choisis par lesdites universités, ou par l’une d’elles, à notre discrétion ou à celle de nos successeurs ; et ensuite [que le livre soit approuvé] expressément par nous, ou nos successeurs, et délivré au nom et par l’autorité des universités, pour être copié et vendu à ceux qui le désirent, (après qu’il aura été fidèlement collationné) à un juste prix, l’original demeurant désormais dans quelque coffre de l’université pour toujours. Et si quelqu’un lit un livre ou un traité de ce genre dans les écoles, ou ailleurs, contrairement à la forme ci-dessus écrite, ou enseigne selon elle, qu’il soit puni selon la qualité du fait, comme un semeur de schisme et un auteur d’hérésie.

♦Les livres des bibliothèques publiques étaient, à cette époque, tous conservés dans des quêtes.

Une autre constitution de la convocation fut formée expressément contre la traduction des Écritures en anglais : VII. C’est une chose dangereuse+, comme en témoigne le bienheureux Jérôme, que de traduire le texte des Saintes Écritures d’une langue à une autre, parce qu’il n’est pas toujours facile de conserver le sens de l’original dans une traduction, car le même bienheureux Jérôme confesse que, bien qu’inspiré++, il s’est souvent trompé : nous décrétons et ordonnons donc que personne ne traduise dorénavant, de sa propre autorité, aucun texte de l’Écriture sainte en anglais, ou dans toute autre langue, en guise de livre, de libelle ou de traité ; et que personne ne lise aucun livre, libelle ou traité de ce genre, qui a été publié récemment au temps de Jean Wiclif, ou depuis, ou qui sera composé à l’avenir, en public ou en privé, en tout ou en partie, sous peine d’excommunication plus grande, jusqu’à ce que ladite traduction ait été approuvée par le diocésain du lieu, ou, si l’occasion s’y prête, par un conseil provincial. Que celui qui agit de manière contraire soit puni comme un auteur d’erreur et d’hérésie. §

+ Les paroles de Jérôme, auxquelles la constitution se réfère, se trouvent dans son lettre au pape Damase, qui l’avait prié de déterminer lequel des diverses lectures dans les copies latines s’accordaient le plus correctement avec le grec SMS; et à quoi il répond, qu’il était très hasardeux de décider : « Pour qui est là, dit-il, qu’il soit instruit ou ignorant, lorsqu’il prend la Bible entre ses mains, et voit que ce qu’il lit diffère de ce qu’il qui ne criera pas immédiatement contre moi, comme un falsificateur et sacrilège, pour avoir osé ajouter, altérer ou corriger, dans des livres si anciens. Voir Lewis’s History of English Translations, p. 44. <> millions

++ Jérôme n’a jamais prétendu à l’inspiration.

§ Labbei S. S. Concilia, tom. XI, t. II, p. 2095. Paris, 1671, fol.

Dans la deuxième année du règne de Henri V, en 1415, une loi fut votée, par laquelle, en plus des anciennes lois contre l’hérésie, tous les Lollards, ou ceux qui possédaient ou lisaient l’un des livres de Wiclif, ou entretenaient ses opinions, étaient déclarés coupables de trahison, et leurs biens ordonnés d’être confisqués. Cette loi était considérée comme particulièrement dirigée contre ceux qui lisaient le Nouveau Testament en anglais de la traduction de Wiclif. Nos anciens écrivains s’expriment ainsi à ce sujet : « Dans ledit parlement » (tenu à Leicester) « le roi fit cet acte très blasphématoire et cruel, pour être une loi pour euer, que quiconque ils étaient qui redeviendraient les Écritures dans la pince mère, (qui s’appelait alors le lerning de Wicleu ; ils doivent forfet la terre, le catel, le corps, le lif et les dieux, de leurs heyres pour euer, et ainsi être condempés pour hérétyques à Dieu, ennemis pour la couronne, et traîtres les plus errants à la terre. En outre, il a été décrété qu’il n’y avait pas de sanctuaire ni de terrain privilégié dans le realme shulde holde, bien qu’ils fussent encore permis à leurs et à leurs murmures. Et s’ils ne voulaient pas s’y rendre, ou s’ils rechutaient après leur pardon, ils souffriraient la mort de deux manières ; c’est-à-dire qu’ils seront d’abord pendus pour trahison contre le roi, puis brûlés pour hérésie contre Dieu, et pourtant ni l’un ni l’autre ne seront commis. *

|| Fox’s Actes and Monumentes, t. I, p. 678.

* Recueil complet des procès d’État, vol. I, p. 49. Lond., 1730, 2e édit., in-folio.

Mais si violentes que fussent les mesures prises contre ceux qui lisaient les Écritures en anglais, il s’en trouva qui, à tout hasard, cherchèrent la sagesse dans le livre de Dieu. Ceux-ci, pour favoriser la diffusion plus générale des Écritures, firent écrire en petits volumes des portions choisies de la traduction de Wiclif, afin que les pauvres puissent les acheter, l’impression étant inconnue et l’écriture fastidieuse et coûteuse. Lewis, l’auteur de l’Histoire des traductions anglaises de la Bible, possédait un de ces exemplaires en in-24, qui contenait l’Évangile de saint Jean, les épîtres de saint Jacques, saint Pierre, saint Jean, saint Jude et l’Apocalypse.+ Les registres des évêques mentionnent souvent ces petits livres, ou libelles, comme on les appelait, et les notent comme étant interdits. Les personnes qui étaient surprises en train de les lire, ou même de les avoir en leur possession, étaient poursuivies, et parfois brûlées avec elles pendantes au cou. En 1429, Nicholas Belward, de South Elmham, dans le Suffolk, fut accusé d’avoir en sa possession un Nouveau Testament, qu’il avait acheté à Londres pour quatre marcs et quarante pence, 2 £ 16 s. 8 c?., une somme équivalente à plus de 40 £ à présent ; un prix étonnant à avoir été payé par un ouvrier, car c’est ce que Belward semble avoir été : William Wright déclarant qu’il « avait travaillé avec lui de façon continue dans l’espace d’un an ; et j’ai étudié diligemment ledit Nouveau Testament. La même année, une accusation fut également portée contre Margery Backster, dans laquelle il fut déposé qu’elle avait demandé à Jeanne, la femme d’un certain Cliffland, et à sa servante, de « venir secrètement la nuit dans sa chambre, et là elle entendrait son mari leur lire la loi du Christ ; laquelle loi était écrite dans un livre que son mari avait coutume de lui lire la nuit ; et que son mari était bien instruit dans la vérité chrétienne. Beaucoup d’autres dépositions, de même nature, furent faites par les ennemis des Lollards, à la suite desquelles les disciples de Wiclif furent soumis à diverses pénitences et impuretés. Contre Richard Fletcher de Beccles, on allégua : « C’est un docteur très parfait dans cette secte, et il peut très bien et parfaitement expliquer les Saintes Écritures, et il a un livre de la Nouvelle Loi en anglais. » Contre Sir Hugh Pye, prêtre, on lui reprocha d’avoir « légué à Alice, servante de William White, un Nouveau Testament, qu’ils appelaient alors le livre de la Nouvelle Loi, et qui était sous la garde d’Oswald Godfrey de Colchester ». Même la capacité de lire a été comptée parmi les crimes de cette secte par leurs persécuteurs violents ; car il est remarqué dans les dépositions que « William Bate, tailleur, de Sything, et sa femme, et son fils, qui savent très bien lire l’anglais, est de la même secte que « la fille de Thomas Moone est en partie de la même secte, et sait lire l’anglais et que « John Pert, ancien serviteur de Thomas Moone, est de la même secte, et sait bien lire, et a lu en présence de William White. *

+ Lewis, p. 39·

*Fox’s Actes and Monumentes, t. I, p. 786-788.

Les disciples de Wiclif, cependant, ne se contentaient pas de connaître la vérité, et eux-mêmes ne lisaient que les Écritures : ils étaient animés de principes plus généreux, et louablement désireux de mettre la Bible entre les mains des autres, comme un moyen puissant d’éclairer l’esprit et d’influencer le cœur. Dans la poursuite de ce pieux dessein, ces premiers réformateurs furent matériellement aidés par la coopération zélée de Sir John Oldcastle, Lord Cobham, qui dépensa des sommes considérables pour recueillir, transcrire et disperser les œuvres de Wiclif ; et dans l’entretien d’un certain nombre de prédicateurs itinérants, qui furent employés à répandre les doctrines de notre réformateur anglais dans différentes parties du pays, particulièrement dans les diocèses de Cantorbéry, de Londres, de Rochester et de Hereford. Bale dit qu’il fit copier tous les ouvrages de Wiclif par le désir de Jean Huss, et qu’il les envoya en France, en Espagne, en Bohême et dans d’autres pays étrangers. L’appui que ce noble accorda aux Lollards et son zèle pour la diffusion de la vérité évangélique firent de lui l’objet de la persécution la plus cruelle. Il fut accusé d’hérésie, condamné et emprisonné dans la tour de Londres, d’où il trouva le moyen de s’échapper, mais ayant été repris, en 1417, par lord Powis, il fut suspendu vivant dans les chaînes, à une potence, et brûlé vif.

Fox’s Actes and Monumentes, vol. i, p. 664, &c. British Biography, vol. i, p. 138 Lond., 1773, 8 vol.

La cherté excessive des livres, avant l’invention de l’imprimerie, est une preuve suffisante que les Lollards ont dû être soutenus et aidés par des personnes riches et influentes, pour répandre largement les œuvres de Wiclif, en particulier sa traduction du Nouveau Testament. Plusieurs exemples de prix exorbitants des livres, vers cette époque, ont déjà été signalés ; Ce qui suit rendra la preuve encore plus décisive. En 1424, deux antiphonaireslivres contenant toutes les invitations, les répons, les vers, les collectes, et tout ce qui se disait ou se chantait dans le chœur, excepté les leçons, coûtèrent vingt-six marcs à la petite monasse de Crabhouse, dans le Norfolk ;et le prix ordinaire d’un livre de messe était de Jive markségal au revenu annuel d’un vicaire ou d’un vicaire, qui, vers cette époque, était fixé à cinq marcs (3 livres 6 s. 8 d.) ou deux marcs et sa pension. + Au début de ce siècle, Pierre Plaoul, évêque de Senlis, légua à la maison de la Sorbonne, à Paris, une grande Bible in-quarto, passablement écrite sur vélin, sur le dernier feuillet duquel était écrit une note latine, ainsi conçue : « Ce livre, dont la valeur est de quinze livres de Paris, appartient aux pauvres maîtres de la Sorbonne, leur a été léguée par le révérend père dans le Christ, Pierre Plaoul, ancien évêque de Senlis, et éminent professeur de l’Ecriture Sainte, de la société de ladite maison ; qui mourut le 11 avril 1415, et fut inhumé dans l’église de Saint-Marcellus, près du célèbre et mémorable maître Pierre Lombard, évêque de Paris. Que son âme repose en paix ! « Une Bible imprimée semblable dit Chevillier, n’aurait pas coûté six francs. » En 1491, les Homélies de Bernard sur les Cantiques furent mises en gage pour vingt schellings ; et quelques années plus tôt, en 1471, lorsque Louis XI. de France emprunta à la faculté de médecine de Paris les ouvrages du médecin arabe Rhasis, non seulement il y déposa, à titre de gage, une quantité d’argenterie précieuse, mais il fut obligé de se procurer un gentilhomme pour se porter caution avec lui dans un acte par lequel il s’engageait à la rendre, sous une confiscation considérable.++ Henri V d’Angleterre possédait une bibliothèque si maigre, qu’il emprunta plusieurs livres, qui furent réclamés par leurs pwners, après sa mort. La comtesse de Westmoreland présenta une pétition au conseil privé, en 1424, demandant qu’un ordre fût donné sous le sceau privé pour la restitution d’un livre, emprunté par le feu roi, contenant les Chroniques de Jérusalem et l’expédition de Godefroy de Boulogne ; ce qui a été accordé avec une grande formalité. Une autre pétition fut présentée par le prieur de Christ Church, à Cantorbéry, déclarant que le feu roi avait emprunté au prieuré les œuvres de saint Grégoire, qu’il avait ordonné par son testament de restituer, mais qui avaient été retenues par le prieur de Shine. Après de sérieuses délibérations, le conseil donna l’ordre au prieur de Shine, soit de remettre le livre, soit de comparaître devant le conseil, et d’assigner les raisons de son refus. Il ne le fera pas non plusPeut-être serait-il impertinent d’ajouter que la littérature en général, et la littérature sacrée en particulier, était encore découragée par la préférence presque universelle du divertissement à l’instruction. Les ménestrels étaient plus amplement rémunérés que le clergé ; et la fête de l’Episcopus Puerorumou enfant-évêque, plus fréquentée que les fêtes les plus solennelles de l’Église. Pendant plusieurs années du règne de Henri VI, particulièrement en l’an 1430, à la fête annuelle de la sainte-croix, à Abingdon, ville du Berkshire, douze prêtres recevaient chacun quatre pence pour avoir chanté un chant funèbre ; et le même nombre de ménestrels étaient récompensés chacun par deux shillings et quatre pence, outre la nourriture et le fourrage pour leurs chevaux. La même année, le prieur de Maxtock donna six pence pour un sermon à un docteur itinérant en théologie, d’un des ordres mendiants, qui allait prêcher dans les maisons religieuses. Dans un fragment très mutilé d’un Computusou registre annuel des comptes du prieuré de la cathédrale de Saint-Swithen, à Winchester, sous l’année 1441, un déboursement est fait aux chanteurs du monastère, qui, avec les choristes de la chapelle collégiale de Sainte-Élisabeth, près de cette ville, étaient habillés en filles, et exposaient leurs jeux devant l’abbesse et les religieuses de l’abbaye de Sainte-Marie. à Winchester, dans le réfectoire public de ce couvent, le jour des Innocents. Un autre fragment, d’un compte du cellérier de l’abbaye de Hyde, à Winchester, porte l’inscription suivante, sous l’année 1490 : « In larvis et aliis indumentis puerorum visentium dominum apud Wulsey, et constabularium castri Winton, in apparatu suo, nec non subinstrantium omnia monasteria civitatis Winton, in ffesto Nicholai. » C’est-à-dire : « En fournissant des masques et des robes pour les garçons du couvent, lorsqu’ils rendaient visite à l’évêque au palais de Wulvesey, au connétable du château de Winchester et à tous les monastères de la ville de Winchester, le jour de la fête de Saint-Nicolas. » Dans beaucoup d’églises, c’était une pratique courante d’élire un garçon le jour de la Saint-Nicolas ou des Innocents, pour prendre l’habit et remplir les fonctions de l’évêque, qui était donc appelé episcopus puerorumou évêque-garçon, et parfois évêque-choriste . C’était particulièrement le cas en Angleterre, dans l’église de Sarum. Le savant John Gregory, d’Oxford, a écrit un tract, publié après sa mort, expressément sur cette coutume de l’église de Sarum, dont le titre est : « Episcopus Puerorum in die Innocentium : or a discovery of a ancient custom in the church of Sarum, making an anniversarybishop among the choristers. » Dans cet ouvrage, il est dit : « L’epis-copus choristorum était un évêque choriste, choisi par ses confrères, le jour de la Saint-Nicolas. Ce jour-là plutôt qu’un autre, parce qu’il est singulièrement noté de cet évêque (comme Paul l’a dit de son Timothée), qu’il avait connu les Écritures d’un enfant, et qu’il avait mené une vie sanctissime ab ipsis incunabilis inchoatam. La raison en est encore plus propre et plus expresseDans le Festival anglais, il n’y a pas d’autre moyen d’y parvenir.

+ Johnson’s Ecclesiastical Laws, &c., vol. II, A. D. 1222, 1305, 1362.

++ Warton’s Hist, of English Poetry, vol. I, diss. 2. Chevillier, De !' Origine de ! ,Imprimerie de Paris, t. IV, ch. v, p. 371. Paris, 1694, in-4°.

Henry’s Hist, of Great Britain, vol. x, b. v, ch. iv, pp. 115, 116.

* Warton’s Hist, of English Poetry, vol, ii, pp. 105, 106 ; Vol. III, p. 324.

« On dit que son fader hyght Epiphanius, et son moder Joanna, &c. Et quand il fut bom, etc., ils le firent baptiser, et l’appelèrent Nycolasc’est-à-dire un nom d’homme, mais il garda le nom d’un enfant, car il a choisi de kepe vertues, meknès, et simplenes, et sans malice : aussi nous rede pendant qu’il était couché dans son cradel, il jeûnait mercredi et vendredi : ces jours-là, il ne soutenait que ceux du jour, Et là, il le tint plâtré : ainsi il lyu tout son lyf en vertus avec son nom d’enfant. C’est pourquoi les enfants l’adorent avant tous les autres saints. — Lib. Festivdlis in die SNicolas., fol. 55.

« Depuis ce jour jusqu’au jour des Innocents, la nuit (cela dura plus longtemps d’abord), l’episcopus puerorum devait porter le nom et soutenir l’état d’un évêque, vêtu d’une crosse ou d’un bâton pastoral à la main, et d’une mitre sur sa tête, et il y en avait aussi qui était multis episcoporum mitris sumptuosiordit l’un d’eux, beaucoup plus riche que ceux des évêques.

« Le reste de ses compagnons à partir de la même époque devaient prendre sur eux le style et la contrefaçon des prébendes, cédant à leur évêque (ou bien comme si c’était) rien de moins que l’obéissance canonique. »

« Et voyez quel service l’évêque lui-même, avec son doyen et ses prébendes, (s’ils avaient été pour officier), aurait fait le même service, la messe exceptée, la même chose était faite par l’évêque choriste et ses chanoines, la veille et les jours de fête. »

Dans le cas où l’évêque choriste mourrait dans le mois, ses exéquêtes étaient solennisées avec une pompe et une tristesse glorieuses. Il fut enseveli (comme tous les autres évêques) dans tous ses ornements. Dans la cathédrale de Sarum, il y a un monument, en pierre, d’un petit garçon vêtu tout en habits épiscopaux, une mitre sur la tête, une crosse à la main, et le reste en conséquence.

Notre auteur ajoute que toutes les cérémonies se faisaient « avec cette solennité de célébration et cet appétit de voir que le statut de Sarum était forcé de fournir. Sub pœna mujoris excom-municationis, nè quis pueros illos in præfata processions, vel alias in suo ministerio, premat aut impediat quoquo modo, quo minus pacificè valeant facere et exequi quod Ulis imminet faciendum, &c. Qu’aucune personne, sous peine d’anathème ; d’interrompre ou de presser ces enfants, à la procession, ou dans toute autre partie de leur service, de quelque manière que ce soit, mais de leur permettre de faire et d’exécuter tranquillement ce qu’il leur a demandé de faire.

♦Œuvres de GrégoirePosthumapp. 95,113-117. Londres, 1671,4to.

Quant au service divin célébré dans ces fêtes par les enfants, non seulement il était célébré par les garçons, mais aussi par les filles ; car il y a une injonction donnée au couvent bénédictin de God-stowe, dans l’Oxfordshire, par l’archevêque Peckham, en l’an 1278, que le jour des Innocents, les prières publiques ne soient plus dites dans l’église de ce monastère. per parvulas, c’est-à-dire par les petites filles. Et l’on peut remonter aussi loin dans le temps qu’au synode de Constantinople, tenu en l’an 867, auquel trois cent soixante-treize évêques étaient présents, on trouva que c’était une coutume solennelle dans les cours des princes, à certains jours déterminés, d’habiller certains laïques de l’habit épiscopal, qui devaient se faire passer pour un évêque. tant dans sa tonsure que dans ses ornements ; et aussi de créer un patriarche burlesque, qui pourrait faire du sport pour l’entreprise. Ce scandale pour la religion fut anathématisé par les bons évêques, mais sans succès complet, l’arrêt temporaire ne servant qu’à en changer la direction et à augmenter son énergie. + En 1274, le concile de Saltzbourg défendit à quiconque d’assumer la charge d’évêque de plus de seize ans, de grandes énormités ayant parfois été commises dans les églises par ceux qui s’étaient livrés à ces ludi, ou jeux.++ Et le concile de Basile, en 1435, les condamna, bien qu’ils continuèrent à être pratiqués pendant des siècles par la suite.

+ Hist. de la poésie anglaise de Warton, vol. III, p. 324.

++Du Cange, v. Episcopus puerorum.

♦Du Tilliot, Mémoires pour servir à l’Hist. de la Fete des Foux, pp. 58-73.

Cependant, à la fin du premier siècle et au commencement de ce siècle, il y avait plusieurs personnages illustres qui, malgré la superstition et le fanatisme de leur Église, méritent d’être enregistrés parmi les promoteurs de la littérature et de la science sacrées. UnPÈRE ESTON, ou EASTON, un Anglais, éduqué à Oxford, devint moine bénédictin de Norwich, et remplit successivement les sièges de Hereford et de Londres. Il était éminemment habile en hébreu, en grec et en latin, et semble avoir été le premier des modernes qui ait tenté une traduction de l’Ancien Testament immédiatement à partir de l’hébreu. On dit qu’il a achevé cette œuvre, à l’exception des Psaumes. Robert Wakefield (mort en 1538) dit, dans le tract qu’il écrivit sur la pureté du texte hébreu, que, pendant quelque temps, il avait l’ouvrage en sa possession, mais qu’à la fin il fut volé. Dans la préface de sa traduction, il défend l’intégrité de l’original hébreu contre Nicolas de Lyre et d’autres, qui supposaient qu’il avait été corrompu par les Juifs. Il fut créé cardinal par Urbain VI, mais fut ensuite jeté en prison, avec cinq autres cardinaux, par le même pontife, où il demeura cinq ans ; Après sa libération, il rédigea un récit de son emprisonnement. Il mourut à Rome en 1397.||

|| Bibliotheca Sacra, édit. Masch, t. II, tom. III, cap. III, sec. i, p. 433. HodyDe Bibl. Text., lib. iii, pt. ii, p. 440.

VolI. — 30

JOHN DE WHETHAMSTEDE, abbé de Saint-Albans, sous le règne de Henri VI, était un écrivain éminemment studieux et savant. Un manuscrit de sa vie, conservé à la bibliothèque cottonienne, énumère plus de quatre-vingts traités distincts donnés à l’abbaye, dont beaucoup ont été écrits par lui-même. Il dépensa de grosses sommes pour embellir et enrichir son monastère ; entre autres choses, il orna le toit et les murs de la chapelle de la Vierge Marie de tableaux, au coût de quarante livres, et donna un orgue au chœur de l’église. Il construisit une bibliothèque à Oxford et l’enrichit de livres. Pour familiariser l’histoire de son saint patron avec les moines de son couvent, il employa Lydgate, alors moine à Bury, dans le Suffolk, pour traduire la légende latine de sa vie en rimes anglaises. Pour la traduction, l’écriture et les enluminures, il paya cent schellings ;et dépensé pour la reliure et les autres ornements extérieurs du manuscrit, plus de trois livres. Il fut placé devant l’autel du saint, dans l’église abbatiale, Whethamstede ayant orné l’autel avec beaucoup de magnificence. Pendant son abbatiat, on commença sur son ordre une grande transcription de la Postilla de Nicolas de Lyre sur la Bible, avec les ornements et l’écriture les plus splendides. Le moine qui rapporte cette anecdote importante vécut peu de temps après lui, et parle de cette grande entreprise, alors inachevée, comme s’il s’agissait d’un magnifique édifice public. « Dieu vaut, dit-il, que cette œuvre de nos jours soit heureuse ! » Quelques-uns des tracts de Whethamstede, dont on trouve souvent des copies manuscrites dans nos bibliothèques, sont dédiés à Humphrey, duc de Gloucester, qui aimait à visiter l’abbaye, et employait notre abbé à recueillir pour lui des livres précieux. Un bel exemplaire de son Granariumouvrage immense, fut offert par le duc à la bibliothèque qu’il venait d’ériger lui-même, à Oxford. Un beau manuscrit in-folio de Valerius Maximus, enrichi des décorations les plus élégantes, avec une curieuse table, ou index, faite par Whethamstede, est encore conservé dans la bibliothèque de la Bodleian. Il est l’auteur d’une Chronique, couvrant une période de vingt ans, de 01 à 1441 inclusivement. Il contient de nombreux documents originaux, et donne un compte rendu très complet de certains événements, en particulier en ce qui concerne sa propre abbaye. Il fut ordonné prêtre en 1461 et mourut en 1382, âgé de plus de cent ans, dont quatre-vingt-deux dans les ordres sacerdotaux.

* Warton’s Hist, of English Poetry, vol. II, pp. 45-47, 53. Henry’s Hist, of Great Britain, vol. x, b. v, p. 13S.

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JOHN CAPGRAVE, un autre savant Anglais, naquit dans le comté de Kent. Il entra au monastère des moines augustins, à Cantorbéry, et après avoir obtenu son doctorat à Oxford, il devint provincial de son ordre. Il était le confesseur et l’ami intime de Humphrey, duc de Gloucester. Dans la bibliothèque de l’Oriel College, à Oxford, il y a un manuscrit Commentaire sur la Genèse, écrit par Capgrave, qui était réputé éminent comme théologien. Il s’agit d’un autographe de l’auteur, dédié au duc. Dans la superbe lettre initiale de l’épître dédicatoire, il y a une curieuse enluminure de l’auteur, présentant humblement son livre à son patron, qui est assis et couvert d’une sorte de chapeau. À la fin se trouve cette inscription, écrite de la main du duc lui-même : « Ce livre est à moy Humphrey duc de Gloucestre du don de frere Jehan Capgrave, quy le me fit presenter a mon manoyr de Pen-sherst le . . . . jour de ... . l’an MCCCXXXVIII », c’est-à-dire : « Ce livre m’appartient, Humphrey, duc de Gloucester, don de frère John Capgrave, qui me l’a offert à mon manoir de Penshurst, le . . . jour de . . . en l’an 1438. Outre ce Commentaire sur la Genèse, et d’autres sur l’Exode et les Rois, présentés aussi par le duc à la bibliothèque d’Oxford, il est l’auteur de commentaires sur presque tous les livres de l’Ancien et du Nouveau Testament ; ainsi que d’un Catalogue, ou Légende des Saints anglais, imprimé à Londres, par Caxton, 1516, in-folio ; une Biographie d’hommes illustres, qui florirent sous les Henri d’Angleterre ; et bien d’autres ouvrages, principalement historiques. Il était convaincu dans son attachement à l’Église de Rome, mais s’opposait et tonnait contre les pratiques dépravées des ecclésiastiques de son temps. Il mourut à Lynn, dans le Norfolk, le 12 août 1464 ; ou, d’après Pitts, À. D. 1484.*

Mais le plus généreux protecteur de la littérature générale était le bon HUMPHREY, duc de Gloucester. C’est à lui que la bibliothèque bodléienne, comme on l’appelle depuis, lui doit un don considérable et princier de livres, contenant six cents volumes. Ces livres sont appelés Novi Tractatusou nouveaux traités, dans le registre de l’université. C’étaient les copies les plus splendides et les plus coûteuses qu’on pût se procurer, finement écrites sur vélin et élégamment ornées de miniatures et d’enluminures, dont cent vingt furent évaluées à plus de 1000 livres sterling. La magnifique copie de Valerius Maximus, dont l’index a été fait par Whethamstede, était l’une d’entre elles. Comme il patronnait, d’une manière particulière, l’abbaye de Saint-Albans, beaucoup d’abbés lui faisaient leur cour en lui envoyant des présents de livres magnifiquement exécutés et ornés des peintures les plus exquises, qui semblent avoir fait partie de son don à la bibliothèque d’Oxford.| Humphrey était frère de Henri V et du duc de Bedford, et oncle de Henri VI, pendant la minorité duquel il administrait occasionnellement les affaires du royaume, en tant que régent.

| Warton, ubi sup.

La bibliothèque du Baliol College d’Oxford a également été fondée au début du XVe siècle. Il a été construit à l’origine en deux parties ; la partie inférieure, ou ouest, en 1427, par le Dr Thomas Chace, et la partie supérieure, ou partie est, vers l’année 1477, par M. Robert A.bdy, tous deux maîtres quelque temps. William Lambert, qui fut maître en 1406, et Robert Thwaites, qui obtint le même honneur en 1451, donnèrent de nombreux manuscrits précieux ; et William Wilton, un membre, puis chancelier de l’université, était également un contributeur de livres en 1492. Grey, évêque d’Ely, en 1454, se montra un bienfaiteur des plus nobles, non seulement en argent pour l’édifice, mais en ajoutant à la collection environ deux cents manuscrits, dont beaucoup richement enluminés, qu’il avait achetés en Angleterre et en Italie. Dans ce dernier pays, il employa des transcripteurs et des enlumineurs, comme le montrent quelques-uns de ses manuscrits qui se trouvent encore dans cette bibliothèque. Les enluminures ont été principalement exécutées par Antonius Marius, un « peintre exquis » de Florence, pendant la résidence de l’évêque dans cette ville. Sur la plupart, sinon la totalité, des manuscrits, les bras des donateurs étaient attachés, peints sur vélin et recouverts de morceaux de corne fine, pour éviter qu’ils ne soient arrachés ou défigurés. « Mais, qu’on le dise avec beaucoup de ressentiment, dit A. Wood, plusieurs de ceux qui sentaient la superstition, ou qui traitaient de la théologie de l’école, ou de la géométrie, ou de l’astronomie, ont été enlevés dans ce temps ignorant d’Édouard VI, où les gens, sous prétexte de réforme, ont volé et fait des ravages de ces choses que la postérité a depuis tant désiré voir. » *

Il ne faut pas oublier la physionomie que l’étude des saintes Écritures tirait aussi des habitudes de dévotion de deux personnages royaux. Il s’agit D’ANNE DE BOHÊME ET D’HENRI VI. La première de ces illustres personnages était la reine bien-aimée de Richard Il, fille de l’empereur Charles IV, et sœur de Winceslas, roi de Bohême et empereur d’Allemagne. Elle a été mariée au roi Richard, A. D. 1382. Wiclif, dans son livre « Du triple lien de l’amour », parle ainsi d’elle : « Il est possible que la noble reine d’Angleterre, sœur de César, ait écrit l’Évangile en trois langues, bohème, allemand et latin, et qu’hérétique pour cette raison serait une folie luciférienne. » L’archevêque Arundel, dans son sermon prêché à ses funérailles en 1394, la loue hautement en disant que, « bien qu’elle fût une étrangère, elle étudiait constamment les quatre Évangiles en anglais, et expliqués par les exposés des docteurs ; et que, dans l’étude de ceux-ci et dans la lecture des livres pieux, elle était plus diligente que les prélats eux-mêmes, bien que leur charge et leurs affaires l’exigeaient.+

+ Usserii Hist. Dogmat., p. 161. Lewis’s Life of Wicliffe, pp. 197,198.

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De l’attachement du roi Henri VI. aux Saintes Écritures et à ses habitudes régulières de piété, le récit suivant a été laissé par John Blackman, moine chartreux, et ami intime du monarque lui-même :

Il était incessamment occupé, soit à prier, soit à lire

les Saintes Écritures, ou chroniques, dont il tirait de nombreux passages pour sa propre consolation spirituelle, ainsi que celle des autres. Il avait aussi coutume d’envoyer à certains ecclésiastiques des épîtres hortatoires, pleines de mystères célestes et d’admonestations salutaires, au grand étonnement de plusieurs. Les jours ordinaires, il ne passait pas moins son temps à traiter les affaires de son royaume avec son conseil, selon l’exigence du cas ; ou bien en lisant des écrits ou des chroniques. C’est pourquoi Richard Tunstall, autrefois son fidèle chambellan, a rendu témoignage à son sujet, à la fois verbalement et dans ses écrits, en disant : « Il se plaisait dans la loi du Seigneur jour et nuit. » Pour confirmer la même chose, le roi lui-même se plaignait abondamment à moi dans son palais d’Eltham, lorsque j’étais seul avec lui, occupé avec lui dans ses livres saints, et écoutant ses exhortations salutaires, et les respirations de sa profonde dévotion ; car, ayant été interrompu par un coup frappé à la porte royale par un certain duc puissant du royaume, le roi dit : « Ils me dérangent tellement, que je peux à peine prendre le temps de me rafraîchir, soit de jour, soit de nuit, par la lecture d’aucune doctrine sacrée, sans être interrompu par quelque bruit ou autre. » Quelque chose de semblable s’est produit une fois aussi en ma présence à Windsor. Cependant telle était l’inconséquence de ce monarque, que, tandis que lui-même lisait constamment les Écritures et les considérait comme une source inestimable d’instruction et de consolation, ses sujets étaient persécutés, emprisonnés et brûlés vifs, pour avoir lu, ou entendu, ou poursuivi les préceptes de ces mêmes Écritures !

- ↑ Usserii Hist. Doginat., p. 171.

Les opinions de Wiclif, qui n’avaient cessé de se répandre en Angleterre, s’étendirent maintenant au continent, et trouvèrent en Bohême, en particulier, beaucoup de gens qui défendaient les doctrines du réformateur et s’efforçaient avec zèle de leur donner de la publicité et de l’établissement. Les serviteurs d’Anne de Bohême, reine de Richard Il, de retour dans leur pays, avaient emporté avec eux quelques-uns des écrits de Wiclif, et communiqué la connaissance de ses sentiments au cercle de leurs connaissances ; + mais l’agent principal de l’introduction des œuvres de Wiclif était un jeune noble de Bohême, nommé Faulfisch. Ce gentilhomme avait été étudiant à Oxford, où il avait embrassé les vues du réformateur anglais, et avait apporté en Bohême plusieurs de ses ouvrages, parmi lesquels se trouvaient ses livres De Realibus Universalibus ; De dwersis quæstioni-bus contra Clerum ; Dialogue ; Trialogus ; Super Evangelia sermones per circulum anni, etc.*** Ceux-ci étaient lus avec avidité par le célèbre Jean Huss, natif de Bohêne, qui, par son génie et son industrie, s’était élevé de l’obscurité à l’honorable charge de recteur de l’université de Prague, qui était alors dans un état florissant et remplie d’étudiants de diverses parties de l’Allemagne. Il avait aussi été nommé, en 1400, l’un des deux prédicateurs de Bethléem, grande église dédiée à Matthias et Matthée, qui avait été érigée et dotée par un citoyen opulent de Prague, dans le but de faire enseigner la parole de Dieu au peuple en langue vulgaire, tant dans les fêtes que dans les jours ordinaires. Huss fut bientôt rejoint par un grand nombre de membres du clergé et plusieurs membres de la noblesse ; en particulier par Jérôme de Prague, homme d’un talent et d’une adresse supérieurs, qui avait visité l’Angleterre pour ses études, et en avait rapporté divers écrits de Wiclif. Les partisans de notre réformateur, cependant, se rallièrent à un adversaire violent et fanatique à Subinco, surnommé Lepusarchevêque de Prague, prélat d’extraction illustre, mais si illettré, qu’il n’acquit la connaissance des lettres qu’après son avancement à l’archevêché. Cet ennemi résolu des Hussites, comme on les appelait, ordonna qu’on lui apportât tous les livres de Wiclif, afin qu’ils fussent brûlés publiquement. Le mandat épiscopal fut partiellement respecté, et plus de deux cents volumes, finement écrits et richement ornés de couvertures coûteuses et de bossages d’or, furent livrés aux flammes. Mais la fureur de Subinco et de son parti ne devait pas être apaisée par la simple destruction de ce qu’on considérait comme des œuvres hérétiques ; les enseignants étaient encore plus l’objet de leur plus grande inimitié+. Jean Huss fut chassé de Prague, et obligé de se réfugier dans le village d’où il tirait son nom. Dans cette retraite, « il passa son temps, dit un historien catholique, à traduire en langue vulgaire certains livres de l’Œd et du Nouveau Testament ; à quoi il ajouta des commentaires, et donna ainsi aux femmes et aux commerçants des moyens de disputer avec les moines et le clergé. Le concile de Constance s’étant assemblé en 1414, il fut cité à comparaître devant lui, et, contrairement à l’attente de ses ennemis, il agit avec cette noble décision qui marquait son caractère, et se présenta sans crainte le premier jour de sa séance, sous la proteCtion du sauf-conduit, ou passeport, de l’empereur Sigismond, qui exigeait de tous les sujets de l’empire « qu’ils le laissèrent passer et repasser en sûreté ; et, pour l’honneur de Sa Majesté Impériale, s’il le faut, de lui fournir de bons passeports. Mais le sauf-conduit fut perfidement violé, et Huss fut condamné et brûlé sur le bûcher, en 1415. Son ami et compagnon d’infortune, JÉRÔME, le suivit à travers les flammes l’année suivante. Énée Sylvius cardinal contemporain, et plus tard pape, sous le nom de Pie II, dit : « Ils supportèrent leurs souffrances avec constance, allant au bûcher comme à un festin, et ne laissant échapper aucune expression qui pût indiquer un malaise d’esprit. À mesure que le feu s’allumait, ils se mirent à chanter des hymnes que même les flammes et le crépitement du feu pouvaient à peine interrompre. Ainsi, par la mort de ces deux hommes droits et excellents, l’infamie éternelle fut attachée à un concile qui, tout en prétendant être assemblé pour la réforme de l’Église, décréta le martyre de ceux qui osaient s’opposer à ses superstitions et à ses erreurs, viola les engagements les plus solennels, soutint les chevaliers teutoniques dans leurs énormités, refusa de punir les partisans du régicide, et s’amusa des bouffonneries des divertissements dramatiques les plus ridicules. (Voir page 332.)♦♦

+ Fox’s Actes and Monumentes, t. I, p. 701.

*** Æneæ Sylvii Historia Bohemica, cap. XXXV, p. 65. Francofurt, 1687, 12mo Lewis’s Life of Wicliffe, ch. ix, p. 143.

++ Æneæ Sylvii Historia Bohemica, cap. XXXV, p. 66 à 69. Ridden De Eruditione Historia, cap. t. I, p. 40. Rotterd., 1680.

♦Æneæ Sylvii Historia Bohemica, cap. XXXVI, p. 73. Les prétendus réformateurs d’Earberry, p. 49.

♦♦ Voir Fox’s Actes and Monumentes, t. I, p. 701-756 ; Milner’s History of the Church of Christ, vol. IV, p. 209 ; et Warton’s Hist, of English Poetry, vol. I, p. 242.

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Irrités de la mort de leur maître et de son ami, les Hussites prirent les armes, et, sous la conduite de l’intrépide Zisca, noble de Bohême, commencèrent une guerre acharnée et sanglante, qui se termina d’abord par la mort de Zisca, puis par la division des Hussites en Calixtines et en Taborites ;les premiers disputant l’usage de la coupe (calix) aux laïcs dans l’eucharistie, et les seconds, qui tiraient leur nom d’une montagne appelée Thabor, où ils s’étaient enfuis, insistant sur une réforme plus générale et l’établissement d’une doctrine et d’une discipline plus pures. Pendant la guerre de treize ans menée par les Hussites, les mesures les plus destructrices furent trop souvent adoptées ; et il faut toujours déplorer que ceux qui se sont séparés de l’Église romaine, à cause de ses doctrines et de ses pratiques contraires aux Écritures, aient été poussés par leur violence à des déprédations indignes du caractère qu’ils prétendaient. Un jour, ils détruisirent une église et un monastère attenant au palais du roi, le plus grand et le plus beau de toute la Bohême, et les sépultures de ses souverains. L’église était magnifique ; L’autel était décoré d’or et d’argent, les robes ecclésiastiques étaient entrelacées de perles, et les fenêtres étaient grandes et vernissées. Le dortoir du monastère pouvait contenir huit cents moines ; les offices étaient magnifiquement construits ; le cloître entourait un vaste jardin ; et sur ses hautes murailles était inscrite toute l’Ancien et le Nouveau Testament en caractères rendus assez lisibles, en augmentant en grandeur à mesure qu’ils étaient éloignés et élevés.

* Æneæ Sylvii Historia Bohemica, cap. XXXVI, p. 74 et 75. Les prétendus réformateurs d’Earberry, t. II, p. 10.

Les Calixtins, ayant obtenu l’usage de la coupe eucharistique par la permission du pape, commencèrent bientôt à persécuter à leur tour les Taborites, qui ressemblaient en beaucoup de points aux Vaudois, et qui, ayant abandonné leurs principes martiaux, étaient devenus plus modérés et plus profondément pieux. Diverses sortes de tortures leur furent infligées, un grand nombre d’entre eux furent assassinés de manière barbare, et beaucoup moururent en prison ; les malades furent jetés dans les champs, où beaucoup périrent de froid et de faim ; et d’autres furent expulsés des villes et des villages, avec la confiscation de tous leurs effets. Ainsi chassés de leurs foyers, ils furent obligés de s’enfermer dans les montagnes et les bois ; et pour échapper à la fumée, pour n’allumer de feu, sauf la nuit, quand ils se réunissaient pour prier et lire la Parole de Dieu. En 1480, ils reçurent une grande augmentation de leur nombre, par suite de l’arrivée de réfugiés vaudois, qui s’étaient échappés d’Autriche, où leur évêque, Étienne, avait été brûlé vif et où une terrible persécution avait été soulevée contre eux. C’est de ces réfugiés de Bohême que descendent les Moravesou Frères unis, qui tirent le premier terme du pays qu’ils habitaient, et le second de leur union fraternelle dans le plan de discipline, etc., formé en 1457 par Grégoire, le fondateur de l’unité.+

+ Milner’s Hist, de l’Église du Christ, vol. iv, cent, xv, ch. iii, passim.

Telles furent les nobles luttes pour la vérité et pour les Saintes Écritures, comme la grande règle de foi et de pratique, faites par ces anciens dignitaires : mais les autorités pontificales savaient trop bien que leurs actions ne pouvaient supporter la lumière, et cherchaient donc leur salut dans les ténèbres. Un exemple frappant s’en produisit en 1418, lorsqu’Éric, de Poméranie, demanda au pape Martin V la permission de fonder une université à Copenhague, et ne l’obtint qu’à la condition expresse que les Saintes Écritures n’y fussent ni lues ni expliquées, mais que les conférences fussent limitées à la littérature profane !++

++ Le ms. Hist. du Dr Henderson, des versions danoises, dans lequel il se réfère à l’Annale de Pontoppidan. Eccles. Dan., t. II, p. 521.

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D’autres difficultés, outre celles qui provenaient de l’opposition papale, se présentèrent à ceux qui désiraient lire les Écritures ; car les copies en étaient rares et coûteuses, et ne pouvaient guère être obtenues que par les riches ; sauf quand les infatigables défenseurs de la pureté de l’Évangile en avaient l’occasion, possédaient la capacité et se soumettaient au travail de la transcription. Même ceux qui avaient acquis l’art important de l’écriture obtinrent difficilement les matériaux nécessaires à la transcription ou à la correspondance épistolaire.

* Beckman’s History of Inventions, vol. II, p. 223.

Heureusement, c’est à cette époque que l’art noble et important de l’imprimerie fut découvert, et les sources de connaissances devinrent bientôt relativement faciles D’ACCÈS. Notre honnête martyrologue énumère ainsi les avantages qui résultent de cette incomparable invention : « C’est ainsi que les langues sont connues, que la connaissance grandit, que le jugement s’accroît, que les livres se répandent, que l’on voit l’Écriture, que l’on lit les docteurs, que l’on ouvre des histoires, que l’on compare les temps, que l’on discerne la vérité, que l’on découvre le mensonge, et que l’on pointe du doigt, et tout cela par le bénéfice de l’imprimerie. C’est pourquoi, je suppose qu’il faut que le pape abolisse l’imprimerie, ou qu’il cherche un monde nouveau pour régner, ou bien, dans l’état actuel de ce monde, l’imprimerie l’abolira sans doute. Le pape et tout son collège de cardinaux doivent comprendre que, par la lumière de l’imprimerie, le monde commence maintenant à avoir des yeux pour voir et des têtes pour juger. Il ne peut pas marcher de manière aussi invisible dans un filet, mais il sera espionné. Et bien que, par la force, il ait fermé la bouche de Jean Huss et de Jérôme, afin qu’ils ne puissent pas prêcher, pensant assurer son royaume : cependant, au lieu de Jean Huss et d’autres, Dieu a ouvert la presse pour prêcher, dont le pape ne peut jamais arrêter la voix, avec toute la puissance de sa triple couronne. Par cette impression, comme par le don des langues, et comme par l’organe singulier du Saint-Esprit, la doctrine de l’Évangile retentit pour toutes les nations et tous les pays qui sont sous le ciel, et ce que Dieu révèle à un seul homme est dispersé à plusieurs, et ce qui est connu dans une nation est ouvert à tous.+

+ Fox’s Actes and Monumentes, t. I, p. 837.